Titre : Plénitude
Auteur : Lisa
Résumé : Ils avaient imaginé beaucoup de cas de figure, mais jamais celui-là.
Statut : complet, 1/1
Catégorie : Romance, drame
Spoilers : Zénith, Abysse
Saison : Après Abysse
Rating : PG-13, à cause de scènes pas très jolies. Mais dans l’ensemble c’est difficile de noter cette fic.
Avertissement : Torture
Disclamers : Stargate SG-1 et ses personnages sont la propriété de MGM, Gekko Film Corp. et Double Secret Production. Je n’ai reçu aucune prime dans l’écriture de cette histoire. Toute ressemblance avec des personnes existantes est purement fortuite.
Note de l’auteur : Encore une fic courte en attendant les plus longues. Sinon, voilà ce qui arrive quand on lit Isaac Asimov… C’est à lui qu’il faut se plaindre ! A tous les Gaters qui me manquent tant que j’en arrive à trouver les vacances insupportables. J’espère que vous vous reconnaîtrez les miss du forum de Val J©Lisa, avril 2003
~*~
C’était la plus étrange des sensations.
La plus extraordinaire aussi.
Frémissant, il l’effleura de nouveau et la sensation coula doucement en lui. Elle se diffusa jusqu’au plus profond de son être, jusqu’à chacune de ses terminaisons nerveuses.
" Wow… " murmura-t-il en souriant imperceptiblement lorsqu’il leva les yeux sur elle et découvrit que les siens étaient clos. Elle avait la bouche légèrement entrouverte, et ses lèvres se courbèrent bientôt en un sourire identique à celui qu’il affichait.
" Vous regrettez quelque chose ? " demanda-t-il en plongeant son regard dans le sien, ne voulant rien voir d’autre qu’elle à cet instant.
" Plus maintenant "
~*~
Elle ne voyait plus. Le liquide pourpre qui s’échappait d’une profonde balafre frontale ouverte et réouverte quotidiennement coulait jusqu’à ses yeux et lui brouillait la vue. Elle ferma les paupières et deux larmes de sang coururent le long de ses joues pour venir mourir dans son coup.
Elle avait si mal pour lui…
Elle ne cherchait plus à ravaler sa propre douleur, la douleur faisait partie d’elle maintenant. C’était une peine secondaire. Mais la sienne ? Il avait résisté jusque là, et en toute franchise, elle pouvait dire qu’elle n’en aurait pas été capable. S’il avait été à sa place et elle à la sienne, si elle avait été le témoin impuissant de chaque coup, de chaque déchirement de chair… Elle n’aurait pas tenu le coup. Mais lui résistait, et elle savait qu’il n’avait jamais eu aussi mal.
C’était des larmes salées qui ruisselaient sur son visage grimaçant de chagrin, sans interruption. Il secouait mécaniquement la tête et sa bouche formait un mot, toujours le même.
‘Non’.
Non, il ne voulait pas que ça continue.
Non, il ne voulait plus qu’elle souffre.
Non, il ne voulait plus souffrir de la voir souffrir.
Non, il ne voulait pas croire que cela puisse être réel.
Non, il ne voulait pas qu’elle succombe sous ses yeux.
Non, il ne pouvait pas en être autrement…
‘Non-Non-Non-Non-Non-Non-Non-Non-Non-Non-Non-Non-Non…’
Que pouvait-il faire ? Avouer qu’elle était effectivement cette déesse des Enfers qu’ils appelaient Ereshkighal, sœur tortionnaire d’Inanna, leur déesse protectrice ? Pour qu’elle se retrouve sur l’échafaud à subir de nouvelles tortures ? Comment ce peuple en était arrivé à cette conclusion était un mystère pour lui. Mais il s’en foutait royalement, elle souffrait à cause de sombres croyances, et il la regardait s’en aller petit à petit.
Il avait renoncé à protester, à affirmer que la Porte n’était pas la Bouche des Enfers et qu’elle avait beau en être sortie, elle n’était en aucun cas Eresh-machin-truc. Ca ne servait à rien, ils étaient intimement persuadés que le démon était en elle.
Le fouet claqua et elle ne cria pas.
Il savait que ça n’avait rien à voir avec son courage de soldat. Aucun, si résistant soit-il, n’aurait pu rester insensible à un tel traitement. C’était simplement que son corps était si meurtri qu’il ne réagissait plus, que la vie la quittait.
Le fouet claqua encore et une ligne rouge apparut immédiatement sur son abdomen, bientôt suivit d’une autre, puis d’une autre encore. Et le sang continuait de couler, et de couler de son cœur déchiré.
Puis la cloche retentit et l’objet de torture tomba à terre.
Les trois hommes sortirent et s’en allèrent souper, pour revenir le lendemain matin. Si lendemain il y avait pour leur victime bien sûr. S’il n’y en avait pas, ils se seraient trompé au sujet de cette femme et prieraient pour son âme.
Jack en était malade.
Mais ils avaient laissé la grille de la salle de torture grande ouverte en partant, sachant que de toutes façons, leurs prisonniers ne s’échapperaient pas. Elle étant retenue au mur par de lourds bracelets de fer, et lui ayant farouchement refusé de la quitter depuis qu’elle était là. Depuis quatre jours.
Il essuya hâtivement ses larmes et se précipita à l’intérieur, retenant une exclamation de rage lorsqu’il découvrit de près ce qu’il voyait de loin. Si elle mourait, ce qui était bien plus que probable, il irait les égorger à main nue, un par un. En commençant par ce foutu prêtre qui se pensait prophète d’Inanna elle-même, et qui avait déclaré avoir tout de suite reconnu celle qui, selon la légende, avait empalé leur déesse à tous dans le Royaume des Enfers.
" Sam… " murmura-t-il en passant deux pouces tremblants sur ses paupières inondées de sang. " Sam, ça va aller, les renforts vont arriver d’ici peu… "
La jeune femme émit un petit rire. " Vous n’allez pas me faire croire une chose pareille, la citadelle de Sumer est plus protégée que dix forteresses Goa’uld réunies… Hammond ne risquera jamais… ". Elle fut interrompue par une petite toux sèche.
Il aurait tellement voulu la serrer dans ses bras une dernière fois… Au lieu de ça, il ne pouvait qu’effleurer sa peau là où elle n’était pas tailladée. Ses vêtements avaient été déchirés lors de son emprisonnement ici… Un instant, il avait pensé au pire, mais grâce au ciel elle avait échappé à cette humiliation supplémentaire. Ses bourreaux avaient interdiction formelle d’avoir quelque contact charnel avec la ‘créature démoniaque’.
Jusqu’où pouvait aller le mal lorsque cruauté et stupidité s’alliaient… pensa-t-il en caressant ses lèvres qu’un hématome colorait de mauve.
Elle rouvrit ses yeux sur lui et le regarda avec insistance.
" Vous allez continuer de vivre, n’est-ce pas ? "
C’était une question qui ne se posait pas. Il se l’était juré, il fallait qu’il étripe trois ou quatre personnes préalablement. Mais après, il était évident qu’il ne pourrait pas continuer sa route sans elle.
" Je ne pourrai pas, vous le savez… "
" Il faut me le jurer "
" J’en suis incapable, jamais je ne pourrai vivre avec votre souvenir "
Sam sourit mélancoliquement.
" Il le faudra bien pourtant, savoir que vous allez vivre sera mon dernier souhait, et je ne verrai pas le prochain lever de soleil… "
Lui aussi avait pensé ça il y avait peu de temps, dans la forteresse de Ba’al. Mais contrairement à elle, il avait toujours une alternative si jamais la situation devenait irrémédiable, il avait Daniel…
" Daniel… " murmura-t-il lorsqu’il vit la tête de son major retomber d’épuisement. " Daniel ! " répéta-t-il un peu plus fort en s’en détournant momentanément.
Comme rien ne se passait, il inspira à fond, et ferma les yeux. " Daniel, si vous êtes là, et vous devez l’être puisque votre meilleure amie est mourante, je vous en supplie, faites quelque chose pour elle… Proposez-lui ce que vous m’avez proposé… "
Il attendit encore.
" Elle est trop faible Jack "
Il se retourna vivement pour découvrir son ami qui se tenait là.
" Comment ça elle est trop faible, vous ne l’étiez pas peut-être vous ? "
" Je n’ai pas le pouvoir d’Oma… Communiquer avec des personnes inconscientes m’est impossible pour l’instant "
" Et qu’est-ce que ça peut bien changer de toute façon, vous avez l’intention de prendre le thé avec elle pour la convaincre d’ouvrir son esprit et de trouver son chemin ? D’ici là elle sera morte voyez-vous, ou bien cette bande de salopards reviendra et on ne pourra plus rien pour elle "
" C’est bien ce que j’essais de vous dire Jack, elle est trop faible… "
" Et moi ce que j’essais de vous dire, c’est de le faire sans son consentement pour l’amour du ciel ! Est-ce que c’est possible oui ou non ? " s’emporta-t-il avant de retourner promptement vers elle en réalisant qu’elle n’avait pas bougé depuis un certain temps.
" En théorie… "
" Non, en pratique Daniel ! " hurla-t-il, deux doigts sous son cou pour vérifier la présence des battements de son cœur.
" Oui, c’est possible " avoua-t-il, provoquant un soupir de soulagement de la part de Jack. " Mais hautement réprimandé "
Le militaire le dévisagea, atterré
" Daniel… " articula-t-il lentement, " C’est de Sam que l’on parle, vous êtes au courant ? Sam, votre amie, celle qui n’hésiterait pas à donner sa vie pour vous… "
Celui-ci plissa et regarda le corps immobile et mutilé, suspendu aux énormes chaînes rouillées. Bien sûr qu’il le savait, et bien sûr qu’il donnerait de même sa vie pour elle… Alors qu’attendait-il pour faire ce que Jack demandait ?
" Très bien… Ecartez-vous " soupira-t-il en se dirigeant vers la jeune femme.
Il s’arrêta devant elle et son cœur se serra à la vue de ses blessures qui commençaient tout juste à coaguler. Ayant une douloureuse pensée pour tout ce qu’elle avait pu endurer, il plaça ses paumes sur son thorax et ferma les yeux.
Ce qu’il n’avait osé dire à son ami était qu’il n’avait jamais fait une telle chose auparavant. Oma lui avait juste décrit le procédé à l’occasion, mais rien de plus. Elle avait cent fois plus d’expérience que le novice qu’il était.
Il se concentra, se concentra encore…
" Daniel ? "
Ah.
Jack.
" Je n’y arriverai pas si vous m’interrompez ! "
" Ok, ok… "
Il prit une large inspiration (dont il n’avait pas réellement besoin, mais c’était une méthode de concentration qui lui était familière) et se focalisa de nouveau sur deux êtres : Sam et lui-même.
C’est alors qu’il la sentit, cette démangeaison qui lui surprit le bout des doigts. Il continua donc à appliquer ce que son instructrice lui avait inculqué et remonta lentement ses mains pour les placer sur les tempes de la jeune femme.
Elle ouvrit alors brusquement les yeux et releva la tête, murmurant son nom sans trop y croire. Elle sentait une force pénétrer en elle, mais une force totalement différente de tout ce qu’elle avait pu ressentir tout au long de sa vie.
" Ne pense à rien Sam, à rien d’autre que ton désir de continuer à exister… "
Voilà qui n’était pas bien difficile.
L’énergie qu’il semblait lui transmettre était de plus en plus forte, elle s’accumulait littéralement en elle, décuplant la douleur que lui infligeaient ses blessures.
Lorsqu’elle pensa imploser, elle ne sentit plus rien.
Elle entendit seulement des mots qu’elle eut bien du mal à coordonner pour comprendre le sens des phrases, de ce qui se disait à quelques mètres d’elle, ou bien à quelques milliers d’années-lumière.
" Elle est sortie d’affaire maintenant… Elle va mettre un peu de temps à réaliser ce qui lui arrive, mais elle n’a plus rien à craindre "
" Merci "
" C’est la moindre des choses… Maintenant vous devriez retourner sur Terre, les gardes ont un peu relâché leur vigilance, vous devriez… "
" Oui "
" Pardon ? "
" J’accepte ce que vous m’avez proposé chez Ba’al, j’accepte de vous rejoindre sur votre petit nuage… Faites-moi la même chose qu’à Sam "
" Jack… En admettant qu’il me soit possible de faire ça, pourquoi changez-vous d’avis à présent alors que vous refusiez tout net ma proposition lorsque vous faisiez face à la mort ? "
" Creusez-vous un peu la tête Daniel, vous n’êtes pas si bête… "
~*~
" Vous regrettez quelque chose ? " lui demanda-t-il alors qu’elle tentait de contrôler cette onde de plaisir qui la parcourait.
" Plus maintenant " répondit-elle distraitement.
" Ils vous est donc arrivé de regretter ? "
Hum… Fallait-il vraiment qu’il parle ? Il avait reprit forme humaine, visiblement perturbé par sa réponse.
" Il faut que je sache Sam, vous avez insisté pour que je décide par moi-même de devenir Tok’ra ou non, mais moi je vous ai mis devant le fait accompli… "
Elle reprit à son tour son apparence humaine pour éviter que leur discussion ne soit trop étrange. " Je regrette de ne pas avoir pu dire au revoir à mon frère " commença-t-elle en baissant les yeux. " Je regrette ma petite planète, je regrette Teal’c et Jonas aussi… "
" Je n’aurais pas dû vous imposer ce que j’avais décidé… " murmura-t-il.
" Et me laisser mourir ? Voyons Jack, vous avez fait ce que vous deviez faire… "
" Sans votre consentement "
Elle ignora sa dernière remarque, sachant pertinemment qu’il avait ses remords et qu’ils finiraient par s’atténuer d’eux-mêmes, et continua sur sa lancée. " Je regretterai les parties d’échecs avec Cassie, les après-midi shopping avec sa mère, les ballades à moto… Je regretterai aussi de n’avoir jamais été découvrir votre petit lac, les émissions scientifiques du jeudi soir, la gelée bleue… "
" Vous regrettez réellement ça ? "
" Bien sûr… Vous avez vu de la gelée bleue dans le coin ? "
" Je parlais du Minnesota… " dit-il en souriant au malentendu. " Vous regrettez de n’être jamais venue ? "
Sam sourit à son tour, mais au contraire car elle savait que ça n’avait rien d’en malentendu. Elle le connaissait assez bien pour savoir comment lui faire oublier ses soucis. Cependant, elle décida de profiter de l’occasion pour aborder un sujet qui l’avait tracassé pendant longtemps.
" Oui… Mais c’était une métaphore n’est-ce pas ? "
" Que voulez-vous dire ? " demanda-t-il en fronçant les sourcils.
" Eh bien je n’ai jamais pensé que vos invitations se résumaient à des invitations… C’était tout l’implicite que je redoutais, et à vrai dire je le regrette aussi à présent "
" Ahh " protesta-t-il en levant les mains, comme il avait coutume de le faire. " Laissez-moi récapituler. Vous regrettez d’avoir redouté l’implicite de la métaphore d’une partie de pêche ? Alors avoir fait votre ascension ne vous suffit pas, il faut aussi que vous vous transformiez en Daniel ? "
" Vous voulez une interprétation ? " demanda-t-elle, souriant comme elle l’avait toujours fait lorsqu’il protestait contre sa tendance à utiliser dix mots au lieu d’un seul.
" Pourquoi pas, oui… " répondit-il avec toute l’ironie dont il était capable.
" Je regrette que vous ne m’ayez jamais fait l’amour "
Ah.
Voilà autre chose…
S’il avait été encore fait de chair et de sang, il aurait sans doute perdu tout ses moyens.
Mais ce n’était plus le cas, et elle attendait une réaction de sa part.
Eh bien…
" Mais vous avez pourtant dit ‘plus maintenant’… "
" En effet " ronronna-t-elle en se libérant de son apparence humaine pour s’étirer de tout son long sous la forme d’un nuage argenté. " J’ai trouvé plus plaisant encore… "
Séduit et plein d’anticipation, il la rejoignit à quelques mètres du sol et s’élança à sa poursuite au-dessus de l’étendue d’eau près de laquelle il se trouvaient, sur une petite plage de sable fin de leur nouvelle planète.
Il la rattrapa enfin, la dépassant de peu et lui barrant le passage. Elle le percuta avec grâce et s’immobilisa immédiatement, troublée par l’intensité des sensations que ce contact provoqua.
Lorsqu’elle reprit ses esprits, elle découvrit qu’il tendait déjà un de ces longs bras translucides vers elle. Celui-ci traversa tout son être, et elle crut qu’elle allait défaillir de plaisir. S’il lui était resté un semblant de conscience, elle aurait expliqué la chose comme étant la rencontre de leurs particules respectives et leur interpénétration, étant donné que l’espace vide qui se trouvait entre elles permettait une telle chose… Mais le moment n’était décidément plus à la réflexion.
Elle avait imaginé des dizaines de cas de figures pour leur… rencontre physique, mais celle qu’elle expérimentait dépassait de loin tout ce dont elle avait pu rêver.
Voyant que son état ne lui permettait plus aucun mouvement, il s’approcha d’elle et s’arrêta à la limite de son corps, laissant peu après sa matière s’écouler en elle atome par atome.
Jamais il n’avait ressenti une chose pareille, et il était certain qu’aucun humain ne le pourrait jamais. Il se mêlait littéralement à elle, frémissant malgré la chaleur que leur rencontre produisait.
Il en voulait toujours plus et en obtenait toujours plus.
Elle gémit son nom.
Il ne voulait pas se laisser emporter maintenant, il voulait continuer à être conscient de sa présence… Mais les sensations se faisaient toujours plus intenses, et bientôt, il ne put que succomber au néant du plaisir qui se diffusait dans tout son être.
Un passant aurait vu une sphère incroyablement lumineuse flotter au dessus de l’onde chatoyante.
Mais ils étaient seuls à s’abandonner l’un à l’autre.
~*~
Fin
Je vous l’avais dit… C’est à Asimov qu’il faut se plaindre…