L'espace d'une journée
Je ne sais pas ce qu'ils ont ce matin, ils sont… comment dire… bizarres ! Ah l'amour… c'est fou comme ça change les gens. Ca les rend plus beau. Déjà que Sam et Jack sont pas mal dans le genre. Nan mais qu'est ce que je dis ? Je suis incorrigible, et complètement déplacé. Ce que je veux dire, c'est que jamais je ne les ai vus comme ça.
Je connais bien Sam, je sais que c’est une femme avant d’être un militaire et une scientifique. Mais je sais aussi que si elle veut cacher quelque chose, elle sait très bien le faire. Quand à Jack, c’est un homme qui, malgré ses apparences, est très sensible, même s’il essaye de faire disparaître ses sentiments derrière un masque humoristique. Mais ce matin quelque chose avait changé. Il avait un petit rictus autour des lèvres, et sur le visage de Sam se lisait le soulagement et aussi quelque chose que je n'avais jamais vu avant : le bonheur.
Jamais je n'avais vu cela transparaître autant chez deux êtres ! Peut-être parce que leur vie était l'opposée même de la vie idéale, de ce bonheur auquel ils avaient droit maintenant. Peut-être aussi parce qu'il était légitime que cela leur arrive à eux. Quoiqu'il en soit, personne ne pouvait passer à côté d'eux sans penser qu'ils ne s'aimaient pas ni n'étaient pas heureux. Certes, c'était le commencement de quelque chose de nouveau, mais ça n'en était pas moins profond.
Je crois qu'ils ont vraiment pris conscience de leur amour quand moi j'ai eu l'impression d'être de trop…
~~~ Quelques heures plus tôt ~~~
"Hey Jack. J'ai eu Hammond, on les a eus."
Il les regarde, puis reprend.
"Hey, je suis la ! Vous avez entendu ? Ils sont foutus… on les a eus…"
Puis il s'en va.
Dans les décombres d’une salle, entre les bureaux cassés en deux et les lumières brisées, Sam et Jack s'embrassaient. Tout autour d'eux n'était plus que ruine, mais ils ne s'en souciaient guère. Rien n'avait d'importance car à cet instant rien ne pouvaient les séparer. C'était la première fois qu'ils s'étaient autorisés à se regarder sans mettre de côté leurs sentiments, la première fois qu'il pouvait se toucher, la première fois qu'ils avaient le droit de s'aimer. Ou plutôt qu’ils prenaient ce droit.
Aucune barrière ne pouvait leur faire emprunter un autre chemin que celui qu'ils avaient décidé de prendre à l'instant même où leurs lèvres s'étaient touchées.
Daniel était arrivé à ce moment là, et bien évidemment il n'y avait eu aucune réaction de leur part. Il s'était senti de trop alors il était parti.
Quelques secondes plus tard, Sam et Jack se séparaient enfin. Dans un regard lourd de sous-entendus, il se sourirent, puis Jack remis une mèche de cheveux de Sam normalement car le casque qu’elle portait les avait ébouriffés. Elle sourit puis baissa la tête. C'est ce moment là que Daniel choisit pour revenir vers eux.
"C'est bon, vous avez fini de parler ? A ce que j'ai vu votre conversation avait l'air passionnante et vous passionnés. Pour parler d'autre chose, Hammond nous fait savoir qu'il veut un débriefing de la mission dans une heure, alors fini de roucouler, on y va."
Il s'en alla, laissant Sam et Jack seuls, encore une fois. Ce fut Sam qui pris la parole la première.
"Je vais me changer, on se retrouve là bas ?
-D'accord, à tout à l'heure."
Elle s'approcha de lui et l'embrassa une dernière fois avant de s'en aller.
Comme prévu, une heure plus tard, elle arriva en salle de débriefing (elle aussi en sale état) où elle retrouva Daniel et Jack. Elle demanda à Daniel s'il avait eu des nouvelles de son père.
"Il est à l'infirmerie pour l'instant, il nous rejoindra pendant la réunion."
Elle acquiesça, puis ils se rendirent dans la salle.
Il y avait tous les soldats qui avaient participé à la mission, ainsi que les dirigeants des différents peuples auxquels le SGC avait fait appel, ainsi bien sûr que Hammond lui même et quelques autres militaires haut placés. Ce fut Hammond qui pris la parole.
"Comme vous le savez tous, les goaul’ds ont été anéantis pour de bon, et ce grâce à l'incroyable travail qu'on accompli nos soldats et nos alliés. Grâce à vous, nous avons rayé de la carte nos plus grands ennemis…"
Hammond continua son discours encore quelques minutes, puis Jack arriva en s'excusant.
"Et je tenais également à remercier personnellement Jacob, le colonel O’Neill, le major Carter, Daniel Jackson et Teal’c pour nous avoir fourni des renseignements précieux pour la déstruction totale et définitive des goau’lds."
Les désignés acquiescèrent. Puis la réunion s'acheva.
Sam attendit que son père sorte pour venir lui parler.
"Papa, ça va ?
-Oui. Ils m'ont fait toute une batterie d'examens, mais ça va."
Ils baissèrent tout les deux la tête, puis Sam regarda enfin son père dans les yeux.
"Je suppose que ça ne va plus être pareil maintenant.
-En effet. Tu vas prendre une décision ?
-Je ne sais pas, je préfère ne pas y penser pour l'instant."
Sam regarda intensément son père. Elle savait qu'elle prendrait une décision, et que cela changerait à jamais leur relation. Si elle décidait de partir, elle le verrait moins et serait sans doute encore moins proche de lui. Si elle restait, peut-être la fuira-t-il, peut-être que ce sera elle qui le fuira, ou bien peut-être qu'il se rapprocherons. Elle ne pouvait rien prévoir, et pourtant elle aurait tant aimé le prendre dans ses bras pour lui dire qu'elle ne voulait pas le perdre.
"On se voit plus tard, dit-il au bout de quelques secondes. Au revoir.
-Au revoir, papa."
Elle resta quelques instants à le regarder s'en aller puis repris ses esprits et se dirigea vers Jack.
"Ca te dirait de manger quelque part ? fit-elle
-Pourquoi pas, je meurs de faim.
-Alors allons-y."
Comme prévu, ils allèrent dans un restaurant, à la décoration assez simple et très chaleureuse. Ils commandèrent puis passèrent le reste du repas à parler. Mais ils n'abordèrent pas le sujet de la mission. Maintenant qu'ils étaient libres, ils n'allaient pas revenir sur du passé.
"J'ai assez parlé de moi je crois. Maintenant parle-moi de toi.
-Je crois que tu sais déjà tout. Je suis un militaire, et une scientifique qui n’arrive pas à se faire comprendre par ses supérieurs. »
Cette remarque fit sourire Jack.
« Voilà, c’est tout, il n’y a rien d’autre à dire.
-Je suis sûr que si on gratte un peu la surface on voit qui tu es vraiment.
-Ah bon, et qui suis-je selon toi ?
-Tu es quelqu'un de sensible, qui n'aime pas faire souffrir ses proches. Quelqu'un qui a le souci de bien faire, quelqu'un qui n'abandonne pas facilement. Quelqu'un capable de ressentir des choses étonnamment fortes et quelqu'un qui peut porter un lourd fardeau. Enfin, tu es quelqu'un qui peut cacher ses sentiments aussi profondément qu'elle les ressent.
-Et bien, je ne savais pas qu'il y avait autant à dire sur moi !
-Que pense ton père de tout ça ?
-De tout ça quoi ?
-De la destruction des goau’lds.
-Je suppose qu'il doit être content. Mon père ne montre jamais vraiment ses émotions. Je trouve ça dommage, mais en même temps, on ne peut pas le lui reprocher.
-Tu vas décider quoi ?
-Je n'en sais rien encore, à vrai dire je n'ai pas encore réfléchi.
-Prends ton temps, rien ne presse.
-Oui…"
Elle prit sa serviette puis la fit tourner entre ses doigts. Jack le remarqua et lui demanda si elle voulait s'en aller. Elle lui fit un grand sourire et recula sa chaise. Il en fit de même et se leva puis tendit la main pour que Sam la prenne et se lève à son tour.
Ils payèrent l'addition puis s'en allèrent. La main dans la main, ils se baladèrent dans les rues de Colorado Springs. C'était un soir comme les autres, les lumières des magasins clignotaient, les étoiles brillaient de plus en plus sous le fond bleu nuit du ciel. Et Jack et Sam étaient les acteurs de ce théâtre, jouant pour la première fois une pièce que nul autre ne pouvait interpréter comme eux. Pas besoin de scrïpt, pas besoin de paroles pour que le courant passe, pas besoin de mots pour se faire comprendre. Juste deux mains, justes deux corps, juste la liberté.
Ils continuèrent de marcher jusque devant un cinéma. Jack proposa d'y entrer et Sam acquiesça en souriant. Ils s'assirent au milieu de la rangée de droite.
L'écran de cinéma s'alluma et l'on projeta les bandes annonces. Sam et Jack regardaient et firent le bilan des films qu'ils aimeraient aller voir quand ceux-ci sortiraient. Puis les lumières s'éteignirent et le film commença. Pas d'histoire de meurtre, pas de règlement ni de militaires, pas de terroristes ni d'explosifs, rien de tout cela. C'était juste un film avec des personnages de la vie de tous les jours, des gens normaux et insouciants de ce qu’ il se passe dans la réalité. Un film parfait pour faire oublier les batailles et les guerres que l'on fait à ceux qui veulent tout détruire, y compris la vie de gens qui protègent celles des autres.
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Il y a parfois des choses que même un film ne fait pas oublier, comme les émotions qui nous tiraillent lorsqu'on voit ses images et qu'on entend les paroles des acteurs, le temps de quelques minutes d'évasion. Il y a également ce que l'on ressent lorsque à côté de vous se tient la personne que vous attendiez et qui vous sourit lorsque vous la regarder, les sentiments que vous avez lorsque cette même personne pose sa tête sur votre épaule et vous fait confiance. Et puis l'énervement quand votre meilleur ami vient gâcher ce moment en vous téléphonant sur votre portable que vous avez oublié d'éteindre parce que vous aviez la tête ailleurs.
Je ne sais pas ce qui s'est passé entre eux ce soir là, d'ailleurs ça les regarde. Mais ce que j'ai entendu au téléphone me conforte dans l'idée que je suis souvent de trop lorsqu'ils sont ensemble et que j'aurais bien du mal à m'imposer.