OU EST SAMMIE ??
Jacob tambourinait nerveusement sur l’accoudoir de son siège tandis que Jack faisait le récapitulatif de leurs dernières recherches sous les regards attentifs de son double et du général Hammond.
Vingt-quatre longues et interminables heures s’étaient déjà écoulées depuis l’inexplicable disparition de Sam. On avait appelé partout : hôpitaux, famille, amis. Mais personne n’était en mesure de donner la moindre piste pour retrouver sa fille.
Jacob se souvenait avoir senti son cœur se serrer devant ce terrain vague où la voiture de la jeune femme avait été retrouvée. Une unique question avait alors obsédé ce père tourmenté : qu’était-il bien arrivé pour que son enfant chérie eût voulu disparaître ?
La réponse était là sous ses yeux. Les explications hâtives qu’on avait daigné lui donner sur le mariage de Sam et l’emménagement des deux Jack chez elle étaient la preuve de leur culpabilité à tous dans la désertion de sa fille.
Mais personne n’avait l’air de se soucier de cet aspect des choses. Même Selmak semblait totalement hermétique à ses interrogations légitimes de père.
- Il faut absolument retrouver le major Carter.
Tous sursautèrent en entendant la voix si particulière du symbiote.
- Vous ne pouvez vous permettre d’avoir un réacteur à Naquada dans le monde extérieur, poursuivit-il.
Le général Hammond acquiesça lentement.
- Si nous ne découvrons pas où elle est avant demain matin, je me verrai dans l’obligation de prévenir les autorités, annonça-t-il.
Jacob ne put en supporter davantage et reprit violemment le contrôle.
- Demandez-vous d’abord comment Sammie en est arrivée là ! s’écria-t-il furieusement
Le brusque changement de ton surprit tout le monde.
- Nous ne savons pas, répondit courageusement petit Jack. Samantha n’a été exposée à aucun produit dangereux. Peut-être est-ce dû au stress car…
Jacob frappa du poing sur la table et fixa avec haine le jeune homme.
- Cessez vos balivernes ! menaça-t-il. Ma fille est un soldat de l’Air Force ! Et elle est l’une des meilleures ! Alors jamais, elle n’aurait cédé au stress !
- Mais il n’y a pas d’autres explications, beau-papa…
Jacob devint rouge de colère devant la nouvelle protestation de petit Jack. Selmak dut user de toute sa force de persuasion pour retenir son hôte.
- Arrêtez tout de suite de m’appeler beau-papa ! vociféra-t-il. Nous n’avons aucun lien de parenté à part dans votre imagination fertile ! La seule relation que nous pourrions avoir est celle entre un assassin et sa victime !
Le Tokra sourit méchamment en voyant le visage du jeune homme se décomposer. Il l’avait mérité après tout ce qu’il avait fait subir à sa fille. Il regarda Jack et le général Hammond et leur fit clairement comprendre que leur tour viendrait. Mais il devait maintenant leur montrer qu’il n’était pas dupe.
- La seule chose qui aurait pu gravement perturber Sammie est la venue de deux hommes sous son toit ! lança-t-il
- Mais grand Jack et moi sommes le même homme ! tempéra petit Jack sincèrement
Jacob faillit être décontenancé par tant de mauvaise foi.
- Excusez mais pour moi vivre avec deux hommes et vivre avec le même homme en deux exemplaires, c’est pareil ! répliqua le Tokra hors de lui
- Vous êtes bien plusieurs dans un même corps ! fit remarquer petit Jack. Pourquoi n’aurait-elle pas droit à deux maris ?
Indigné, Jacob se leva prêt à commettre un massacre.
- Parce que vous êtes vous aussi marié avec elle, colonel O’Neill ? gronda-t-il
Il aurait dû se douter que Jack n’était pas un simple chaperon. Depuis le début, il l’avait repéré mais il savait que Sam le remettrait à sa place. Pour arriver à ses fins malhonnêtes, il avait sûrement utilisé son autorité contre elle.
- Il lui est fiancé ! corrigea petit Jack. Elle porte même la bague qu’il lui a offerte !
Jacob eut l’horrible sensation qu’à chaque fois qu’il pensait avoir touché le fond, on s’arrangeait toujours pour lui prouver qu’il y avait un étage inférieur.
- Mais comment avez-vous pu la forcer à accepter une chose pareille ? demanda-t-il au chef de Sg-1 demeuré stoïque. Elle risque la cour martiale à cause de vous !
- La carrière de Sam ne risque rien, Jacob, le rassura le général Hammond.
Le Tokra fusilla du regard son ami de longue date. Aussi improbable que cela pouvait paraître, il approuvait la situation. Mais dans quel antre malfaisant et pervers était donc tombée sa fille ? Il aurait dû plus insister pour l’obliger à entrer dans la NASA quitte à mourir du cancer !
- Enfin si on la retrouve avec le réacteur à Naquada avant demain matin, précisa le chef du Sg-C.
- J’espère qu’il ne lui est rien arrivé, murmura Jack.
Ce nouveau coup frappa Jacob en plein cœur. Ils n’en avaient tous que pour le réacteur à Naquada. Son enfant était piégée et il n’y avait que lui pour la sauver. Il s’en voulut de ne pas avoir été là quand elle avait eu désespérément besoin d’aide. Comme trop souvent dans sa vie. Elle avait naturellement trouvé d’autres figures de consolation mais c’était lui qui devait agir aujourd’hui. Il eut alors une révélation
- Je sais comment trouver Sammie !
*
Les doigts crispés sur le bord du comptoir, Jack attendait impatiemment la réponse de la réceptionniste d’un des luxueux hôtels de Colorado Springs. La jeune femme prenait tellement de temps à chercher la trace de Sam dans ce fichu ordinateur ! Comme si le nom qu’il avait donné n’était pas assez original !
Depuis plus de vingt-quatre heures, Jack vivait un réel enfer. Il était mortellement inquiet pour Sam et devenait seconde après seconde un peu plus empressé d’avoir la réponse à la question à laquelle seule son major pouvait répondre. Mais ce qui l’avait encore plus miné était qu’il avait été obligé de dissimuler tout ce qu’il ressentait. Lors du débriefing de ce matin, il s’était retenu pour ne pas hurler contre tous et leur annoncer la potentielle grossesse de Sam. Il aurait voulu répliquer aux attaques de Jacob et lui crier qu’il ne se passait pas un instant sans qu’il ne s’imaginât le pire. Il s’en voulait tellement que Sam en fût arrivée là.
- Oui, dit alors la réceptionniste. Nous avons bien une personne de ce nom ici. Elle se trouve actuellement dans sa chambre d’ailleurs.
A cette annonce, Jacob et petit Jack cessèrent leur joute oratoire sur la différence entre les Tokras et les Goaulds qui durait depuis qu’ils avaient tous les trois quitté la base. En effet, si petit Jack avait vite accepté les idées d’hôte et de symbiote, il refusait de concevoir l’aspect positif de la chose. Enfin, du moment qu’ils ne s’entretuaient pas…
Jacob s’approcha de la réceptionniste avec un intérêt non dissimulé rejetant Jack en arrière.
- Et comment l’avez-vous trouvée ? s’enquit-il
La jeune femme sembla se concentrer intensément.
- Bien, répondit-elle. Elle paraissait soulagée d’un grand poids.
Les trois hommes froncèrent les sourcils d’une manière identique au plus grand étonnement de la réceptionniste.
- Vous êtes sûre ? insista Jacob. Elle n’était pas désespérée et au bord de la crise de nerfs ?
- Absolument pas, affirma sans doute la jeune femme. Elle avait l’air plutôt fatigué compte tenu du gros sac qu’elle avait.
Jack put enfin pousser un soupir de soulagement à la mention du réacteur à Naquada. Il bénéficia immédiatement d’un regard noir de Jacob. Mais pour l’instant le chef de Sg-1 préférait éviter de montrer un trop grand intérêt pour Sam devant son père. Dissimulant sa joie, il s’adressa à la réceptionniste avec un ton neutre parfaitement maîtrisé.
- Dans quelle chambre est-elle ?
- La 333 mais…
L’exclamation extasiée de petit Jack effraya la pauvre jeune femme.
- Il fait de l’asthme, lui expliqua Jacob. Ne faites pas attention.
- Elle a demandé à n’être dérangée par personne, poursuivit la réceptionniste. Je peux lui laisser un message de votre part par contre.
Jacob arrêta fermement son mouvement vers un bloc de papier.
- Ce n’est pas la peine, déclara-t-il. Je suis mon père. Elle me recevra.
- En fait, on est tous de la famille ! ajouta petit Jack avec entrain
Jacob fit la moue.
- Mais certains plus pour très longtemps…
Les regards du Tokra et de petit Jack s’accrochèrent une nouvelle fois sans vouloir se lâcher.
- Merci de votre aide, dit Jack alors pour clore leur conversation rapidement
Il fit ensuite signe aux deux hommes de le suivre jusqu’à l’ascenseur. Son double finit par lancer les hostilités.
- Qu’est-ce que vous vouliez dire par « certains plus pour très longtemps » ? demanda-t-il sans innocence
- Vous n’êtes pas assez niais pour ne pas avoir compris, répondit simplement Jacob.
- Je rêve ou c’est un compliment ? s’étonna sarcastiquement petit Jack
- Disons que vous êtes assez intelligent pour avoir épousé frauduleusement ma fille, répliqua le Tokra.
- Vous pouvez me répéter ça ? menaça le jeune homme
Jacob resta muet au plus grand mécontentement de petit Jack.
- Beau-papa ?
Jacob se renfrogna et baissa finalement la tête.
- Colonel O’Neill, pensez-vous que le major Carter ait eu l’intention de vendre votre réacteur ? demanda alors Selmak
Le liftier, qui était apparu avec l’ascenseur quelques instants auparavant, resta bouche bée.
- Il mue, expliqua petit Jack tandis que le chef du Sg-1 faisait discrètement non de la tête.
Le jeune homme acquiesça mécaniquement.
- Troisième étage, s’il vous plait, pria poliment Jack.
Il était tellement anxieux qu’il aurait pu monter quatre à quatre les escaliers. Mais il ne devait surtout pas attirer l’attention sur lui.
L’ascension se fit dans le silence le plus complet, petit Jack et Jacob ayant apparemment décidé d’une trêve. Les trois hommes arrivèrent bientôt à destination.
Petit Jack s’apprêtait à frapper à la porte mais Jacob le retint.
- Il va falloir agir avec tact et doigté, leur apprit-il. Laissez-moi faire.
Le Tokra s’éclaircit la gorge avant de frapper légèrement sous les regards peu convaincus des deux Jack.
- Service d’étage !
Petit Jack leva les yeux au ciel devant la voix faussée qu’avait prise le Tokra. Mais lorsque des pas se firent entendre de l’autre côté de la porte, un commencement de sourire vit le jour sur son visage. Jack, quant à lui, avait l’impression que son cœur allait bondir hors de sa poitrine.
- Je vous remercie mais je n’ai besoin de rien.
Jack réalisa alors combien elle lui avait manqué et pas seulement à cause des circonstances. Il se croyait presque revenu à l’époque où elle l’avait fait tomber dans le plus agréable des pièges. Il avait si désespérément besoin d’elle.
- Mais je vous assure que ce sera gratuit, insista Jacob.
- J’ai dit non.
- Mais je vais perdre mon boulot si vous ne me laissez pas faire ! supplia le Tokra
- Laissez-moi tranquille ! s’énerva Sam
Petit Jack ne put se retenir plus longtemps et frappa hystériquement à la porte.
- Samantha ! C’est nous !
Pendant quelques secondes, le temps sembla s’être suspendu. Mais le bruit sec du verrou qu’on fermait à double tour fut un dur retour sur terre.
- C’est malin ! s’écria Jacob en faisant mine de frapper le jeune homme. J’avais dit avec tact et doigté !
- Samantha ! continuait petit Jack telle une loque contre la porte. Je t’en supplie, ouvre !
- C’est hors de question ! répliqua la jeune femme qu’on sentait de plus en plus paniquée. Je ne veux plus vous voir !
- Mais mon amour, je t’aime ! hurla sans pudeur petit Jack. Pense à nous !
- Je m’en moque ! Allez-vous-en !
Jacob décolla le jeune homme de la porte sans ménagement. Sam était sur le point de devenir hystérique.
- Poussez-vous de là ! s’écria-t-il. Vous voyez bien que vous n’arrivez à rien !
- Papa ? reconnut alors Sam d’une voix blanche. Mais qu’est-ce que tu fais là ?
- Je suis là pour toi, Sammie, réconforta Jacob. Plus rien ne peut t’arriver maintenant. Ouvre-moi pour qu’on parle de tout ça tranquillement.
Pour seule réponse, les trois hommes entendirent la jeune femme traîner un meuble jusqu’à la porte.
- Sammie ? appela Jacob sans comprendre
- Je ne veux pas te voir non plus ! hurla-t-elle en partant dans les aigus. Disparaissez tous autant que vous êtes !
- Mais je suis ton père ! protesta-t-il. Je suis là pour te sauver !
- Je ne veux pas de ton aide ! Je n’ai aucune envie d’être sauvée !
- Sammie… Ne m’oblige pas à défoncer la porte !
- Je m’en fiche ! Si vous entrez, je me jette par la fenêtre !
Au bruit de ses pas, la jeune femme semblait vouloir réellement mettre son projet en exécution. Plongé jusqu’alors dans la plus grande impassibilité tant le rejet de Sam lui paraissait irréel, Jack revint brusquement à la réalité.
- Défoncez-moi cette porte au plus vite ! ordonna-t-il en se dirigeant vers la chambre contiguë.
Jacob acquiesça et se mit immédiatement au travail. Petit Jack ne semblait pas comprendre.
- Qu’est-ce que tu vas faire ? demanda-t-il
- L’empêcher de commettre l’irréparable ! lui apprit Jack la main sur la poignée. Mais gardez bien toute son attention, il ne faut pas qu’elle se doute que j’arrive.
*
Sur le balcon de sa chambre, Sam admirait sereinement la vue plongeante sur les étages au-dessous d’elle. Le vide ne lui faisait pas peur. C’était la seule solution.
Le danger n’était pas loin. Elle entendait distinctement les hommes défoncer la porte. Le bruit régulier de leurs épaules contre le bois solide était comme une marche funèbre.
- Sammie ! cria son père. Ouvre !
La jeune femme tressaillit tant l’émotion dans cet appel désespéré était grande. Sa main relâcha la rambarde.
- Nous sommes venus pour te ramener à la maison, Samantha ! ajouta petit Jack
Elle se glaça immédiatement. Elle préférait mourir plutôt que de les suivre. Elle grimpa agilement sur le bord de la terrasse et ferma les yeux. Ayant parfaitement trouvé son équilibre, elle resta un instant immobile oubliant l’agitation au loin pour mieux savourer la caresse du soleil sur sa joue et l’air estival pénétrant dans ses poumons. Elle étendit alors lentement les bras avec l’impossible espoir d’être emportée par le vent doux. Son pied droit descendit dans le vide comme s’il recherchait une hypothétique marche et elle se prépara à la chute.
- Non !
Sam réalisa à peine que Jack était à ses côtés que les deux puissantes mains du chef de Sg-1 s’empressaient de la ramener à lui. Ils furent silencieux pendant quelques temps, ne faisant que respirer bruyamment. La jeune femme prit alors conscience de son cuisant échec mais aussi de l’étreinte étouffante de Jack.
- Lâchez-moi ! protesta-t-elle
Ses bras se firent durs autour d’elle, l’emprisonnant totalement alors. Sam ne s’en débattit que plus violemment, sentant peu à peu la colère prendre le pas sur la surprise.
- Mais lâchez-moi ! hurla-t-elle. Je ne vous suivrai nulle part !
- Il est hors de question que je vous laisse et vous allez me faire le plaisir de venir à l’intérieur avec moi ! répliqua-t-il avec autorité
Sam bouillonna. Il était temps de lui présenter celle qui avait décidé de ne plus se laisser faire par les hommes.
- Non ! refusa-t-elle avec aplomb. Je vous ordonne de me lâcher ! Lâchez-moi ou je vais me jeter par la fenêtre et vous avec !
Jack la retint juste à temps. La force de la jeune femme le surprit et le blessa à la fois. Elle devait être vraiment déterminée à en finir pour agir de la sorte. Il sursauta en sentant Sam pleurer et peu à peu s’affaisser. Il la ramena prudemment à l’intérieur et l’assit délicatement sur le lit où trônait le réacteur à Naquada. Il s’agenouilla devant elle et prit tendrement ses mains dans les siennes.
- Ne me touchez pas ! le repoussa-t-elle malgré ses larmes. Ne m’approchez pas !
Jack la regardait sans comprendre tandis qu’elle sanglotait.
- Mais ne pouvez-vous pas me laisser en paix ? supplia-t-elle faiblement. Qu’est-ce que je vous ai fait pour que vous me poursuiviez comme ça ?
- Nous vous inquiétons pour vous, répondit-il tendrement. Vous êtes partie sans aucune explication et en plus avec le réacteur à Naquada.
La lèvre inférieure de Sam trembla alors que Jack était sous le choc. Jamais il ne l’avait vue dans un état pareil. Voûtée dans son épais peignoir blanc, elle ressemblait véritablement à une loque.
- Je devais partir, répondit-elle simplement tout en continuant à pleurer. Je devais tous vous fuir ! Et je ne pouvais pas partir sans lui ! Nous sommes indissociables ! Je ne suis rien sans lui et il n’existerait pas sans moi !
- C’est une machine ! répliqua Jack trop rationnellement
- Ne dîtes pas ça ! s’énerva Sam en le menaçant du doigt. Je vous interdis de dire ça ! Il est mon seul ami ! Ce que je ressens pour lui, je ne l’éprouve pour personne d’autre !
La jeune femme ne se laissa pas attendrir par la soudaine tristesse qui apparaissait sur le visage de Jack.
- N’essayez pas ça avec moi ! lui demanda-t-elle entre deux sanglots. Ça ne marche plus ! Plus jamais, je ne me ferai avoir par vos attitudes charmantes, vos attentions ! Je serai comme Mary Poppins !
- Pardon ?
Au moins, Jack avait maintenant l’explication du nom que Sam avait donné à la réception. Mais il commençait à être vraiment inquiet. Le discours de la jeune femme n’avait aucun sens. Il espérait que cela n’était dû qu’à son épuisante crise de larmes.
- Elle est belle, intelligente, sûre d’elle et jamais elle n’a cédé à Burt aussi gentil et avenant qu’il paraissait ! lui énuméra-t-elle en hoquetant. Elle est vraiment parfaite ! C’est la seule femme digne de ce nom !
- C’est un personnage de fiction ! la rappela Jack sur terre une nouvelle fois
- Elle est la seule qui a donné des réponses à mes questions ! répliqua Sam dans un cri déchirant.
Jack saisit alors l’occasion et regarda la jeune femme intensément.
- Et vous ? Pouvez-vous donner une réponse à ma question ?
Sam pâlit puis sanglota en voyant la boîte du test de grossesse.
- Vous me devez la vérité, insista Jack. Etes-vous oui ou non…
Elle fondit en larmes comme jamais puis fit non de la tête. Jack sentit une peine immense l’envahir. Regardant la jeune femme prendre pitoyablement son visage entre ses mains, il osa formuler une interrogation qu’il savait sans réponse.
- Vous… vous auriez aimé être… « e » ?
- Je n’en sais rien ! répondit Sam d’une voix noyée
Jack la serra dans ses bras sans qu’elle ne le repoussât.
- Peut-être… Peut-être que vous vous êtes trompée… Peut-être aussi que le test était faux…
Sam pleura de plus belle contre lui.
- Je suis « i » !
Jack lui caressa les cheveux tendrement. Quel crétin il avait été de se laisser aller à un tel espoir ! Il était extrêmement surpris de constater combien il avait accepté cet enfant.
- Pardon, demanda-t-il.
Sam s’écarta de lui et le regarda avec tant de douleur qu’il crut mourir.
- Je suis si malheureuse depuis que vous êtes là…
Jack resta interdit tandis que les larmes se tarissaient soulagées par cette prise de conscience. Les coups qui s’abattaient sur la porte étaient maintenant pour lui comme autant de coups de poignard dans son cœur.
- Vous ne pouvez pas dire ça, déglutit-il avec difficulté.
- Tout ce que je vous demande est de me laisser en paix ! ordonna Sam
Jack ne l’avait jamais vue aussi vindicative et distante. Mais jamais il n’avait eu autant besoin d’elle à ses côtés. Il était donc prêt à tout faire pour l’avoir de nouveau dans sa vie.
- Rentrez avec nous, pria-t-il. Je vous promets que petit Jack, Jacob et moi vous laisserons tranquille.
Un violent coup de hache dans la porte vint troubler le tout relatif climat de confiance entre Jack et Sam.
- Mais lâchez ça ! On y presque ! protesta Jacob
- C’est ce que vous dîtes depuis un quart d’heure et on est toujours là ! répliqua petit Jack
Le chef de Sg-1 tenta tant bien que mal de faire abstraction de l’activité extérieure.
- Je vous prie, supplia-t-il. Rentrez à la base.
- Non et ce n’est pas négociable, annonça Sam d’une voix sans appel.
Jack se mordit amèrement la lèvre en se souvenant d’unes des nombreuses fois où son double et lui n’avaient pas laissé de choix à la jeune femme.
- Vous ne vous rendez peut-être pas compte mais pendant qu’on s’escrime contre cette porte, « il » est avec elle ! révéla petit Jack alors
- Il sait très bien qu’il ne doit pas toucher à ma fille s’il tient à la vie ! menaça Jacob
Jack pesta pour s’être laissé distraire encore une fois. S’il voulait persuader la jeune femme de le suivre, il ne devait pas tenir compte des élucubrations sans intérêt des autres.
- Je prendrai petit Jack chez moi jusqu’au divorce, avança-t-il, je demanderai à Hammond de me donner un congé spécial et nous partirons dans le Minnesota ! Nous disparaîtrons !
- Et après le divorce ? osa demander Sam
Jack savait qu’il était sur la bonne voie et il eut un sourire timide.
- J’espère que nous pourrons retravailler ensemble, souhaita-t-il. Que vous me ferez de nouveau confiance et que vous saurez que je ne vous veux aucun mal. Car si vous êtes malheureuse quand je suis là, vous ne pouvez pas imaginer combien je le suis quand vous n’êtes pas là.
Sam ne sut pas quoi répondre à cette déclaration spontanée. Jack attendait sa réponse avec anxiété.
- Mais il fait quoi votre symbiote, beau-papa ? Parce que jusqu’à présent, il ne nous a pas beaucoup aidés !
La jeune femme sursauta à ce surprenant surnom tandis que Jack maudissait le ciel d’avoir emmené son double avec eux.
- Cessez de m’appeler beau-papa !
- Mais comment voulez-vous que je vous appelle, beau-papa ?
Le regard désespéré qu’eut Sam en entendant cette dernière réplique montra à Jack que tout n’était pas gagné.
- Ne vous préoccupez pas d’eux, la rassura-t-il. Ce n’est plus votre problème désormais. Dîtes seulement oui.
Sam fit son premier sourire depuis qu’il était arrivé et il sut qu’il avait réussi.
- Je vais rentrer à la base, mon colonel.
- Merci, Carter.
L’entendre redevenir le petit soldat qu’il avait toujours connu lui fit néanmoins un petit pincement au cœur. Les choses retournaient à la normale.
La hache dont la lame pointait de leur côté disparut soudainement.
- J’en ai assez ! hurla Jacob
- Non ! Reposez cette hache, beau-papa !
- Je ne suis pas votre beau-papa !
Jack jugea bon d’intervenir à cet instant et se dépêcha de sauter le meuble pour ouvrir la porte. Il arriva juste à temps pour arrêter le bras de Jacob. Il fixa avec incrédulité le Tokra aux yeux flamboyants.
- Dépêchez-vous d’aller rejoindre Sam et dîtes-lui de se préparer le plus rapidement possible, ordonna-t-il.
Il tendit les clés de la voiture à Jacob.
- Attendez-nous là-bas, poursuit-il. Petit Jack et moi allons régler la note de Carter et présenter nos excuses à la direction de l’hôtel pour tout le désordre que vous avez fait tous les deux.
Il regarda autour de lui les débris de la porte traînant un peu partout dans le couloir et la hache que Jacob avait finalement plantée dans la moquette.
- C’est étonnant que la sécurité ne soit pas encore arrivée, remarqua le chef de Sg-1.
- On les a renvoyés, avoua piteusement son double.
Jack soupira devant l’ampleur de la tâche. Il poussa le jeune homme vers l’ascenseur alors que Jacob rejoignait sa fille.
- Mais moi je voulais voir Samantha ! protesta petit Jack
- Ben, à ce propos, il faudrait qu’on se parle toi et moi…
*
Sam entendait son père faire les cent pas dans la chambre tandis qu’elle s’affairait dans la salle de bains. Ils n’avaient échangé que quelques mots, Jacob ne lui ayant répété que ce que lui avait dit Jack. Il devait penser que tous les mots de réconfort qu’il avait préparés étaient maintenant inutiles. Et il n’avait pas tort : il arrivait trop tard et son intervention supplémentaire n’aurait eu comme résultat que d’infantiliser la jeune femme. De toutes façons, cela se passait toujours de cette manière en cas de crise mais elle avait cessé de lui en vouloir depuis longtemps.
- Dommage qu’on doive partir, dit Jacob alors.
Sam sourit devant cette originale façon de renouer le dialogue.
- Pourquoi ? demanda-t-elle
- Ils ont des choses pas mal sur la carte de leur restaurant, lui apprit-il. Ça m’aurait bien plu un petit lapin aux olives.
Sam perdit son sourire tandis que sa main lâchait sa boîte de fil dentaire. La jeune femme s’assit sur la cuvette des w-c et tenta de retrouver son calme. Elle ne devait pas se laisser aller de la sorte. Elle se l’était promis. Mais l’attaque avait été trop subite et entendre ces mots sortir de la bouche même de son père l’avait profondément ébranlée.
La tête de Jacob était apparue dans l’embrasure de la porte et l’observait avec attention.
- Sammie ? Tout va bien ?
- Oui, je t’assure, affirma la jeune femme. Juste un petit moment d’égarement.
Jacob acquiesça docilement. Sam sentit qu’il attendait qu’elle dît quelque chose.
- Je suis désolée que tu ais découvert tout ce qui concernait le mariage de cette manière. Je pensais que tout serait réglé à l’une de tes prochaines visites.
- Je comprends, répondit Jacob en hochant de la tête. Enfin, je sais que rien dans cette situation n’est de ta faute. Ils ont essayé de profiter de toi bassement.
Sam manqua de s’étouffer à ces paroles. Elle ne pouvait oublier avoir ouvertement séduit Jack et à des fins très réprouvées par la morale.
- Sammie ? s’inquiéta Jacob. Tu veux boire quelque chose ?
- Oui, je veux bien.
Jacob rejoignit le bar dans la chambre. Sam fut soulagée de le voir s’éloigner d’elle. Son instinct ne l’avait pas trompée en lui disant de ne pas le laisser entrer tout à l’heure.
- Tu le veux comment ton verre ? Petit ou grand ?
Sam poussa un cri d’horreur. C’en était trop ! Elle referma violemment la porte et s’enferma à double tour.
- Sammie ?
Elle l’entendit courir vers la porte de la salle de bains.
- Sammie ! Ouvre !
- Non ! Je ne sortirai pas ! Et si tu essaies de défoncer la porte, je me jette par la fenêtre !
Jacob entendit alors Jack et son double entrer. Ils ne mirent pas longtemps à comprendre.
- Je me doutais que vous alliez tout faire rater, beau-papa ! commenta le jeune homme
- Heureusement qu’on ne doit libérer la chambre qu’à midi, soupira le chef de Sg-1.
*
Il fallut à Jack bien deux heures pour faire sortir Sam de la salle de bains partiellement inondée. En effet, la jeune femme avait rapidement réalisé qu’elle était dans une pièce sans fenêtre et avait déclaré qu’elle se noierait dans sa baignoire si elle ne le faisait pas dans ses larmes avant. Malheureusement, elle avait oublié de baisser le débit de l’eau pendant les âpres négociations et la note de l’Air Force s’était gonflée d’une rénovation totale de la salle de bains.
Ils étaient ensuite partis sans pour autant retourner à la base. Jack avait bien prévenu le général Hammond de leur réussite mais avait estimé que Sam n’était pas encore prête à rentrer.
Malgré les instructions sévères du chef de Sg-1, Jacob n’avait pas résisté à l’envie de faire une belle leçon de morale à sa fille sur les devoirs d’un parfait soldat. Sam, assise à l’avant de la voiture, avait serré les dents et avait supporté tout le laïus sans protester. Le manque de réaction de la jeune femme et les regards assassins des deux Jack l’avaient convaincu de l’inutilité de son action.
Petit Jack en avait profité pour affirmer son amour éternel et sans limites, persuadé que ce que lui avait dit le chef de Sg-1 sur la crise de Sam ne pouvait être que faux. Il s’était heurté à une Sam plus glaciale que les fjords de Norvège, n’usant même pas de son petit sourire gêné pour le remercier. Vexé, il rejoignit Jacob dans son silence boudeur.
Le reste de la journée se passa dans le calme le plus complet, Jack ayant tenu à se taire pour permettre à Sam de reprendre entière possession de ses moyens. La jeune femme, crispée les premières heures, relâcha peu à peu son bras protégeant jalousement le réacteur à Naquada. Elle ne vit même aucun inconvénient à ce que Jacob se chargeât de le ramener à la base en fin de journée. Jack vit là que Sam allait beaucoup mieux quoiqu’elle eût salué la machine au lieu de son père à leur départ.
Quand la voiture s’arrêta devant sa maison, la jeune femme eut un grand sourire : elle allait enfin retrouver ses murs pour elle seule. Elle resta pourtant interdite en voyant les deux Jack la suivre.
- Mais où allez-vous ? demanda-t-elle en tentant tant bien que mal de masquer sa panique
- Calmez-vous, Carter, rassura Jack dans un sourire. Nous venons seulement prendre nos affaires et ensuite nous disparaîtrons. N’est-ce pas petit Jack ?
- Mouais, confirma son double un peu forcé. Mais, Samantha, tu n’as qu’un seul mot à dire pour que nous revenions.
Elle ne prit même pas la peine de répondre provoquant la déception totale du jeune homme. Jack tapota fraternellement son épaule en signe de soutien.
Ils entrèrent dans la maison et Sam soupira devant tout le travail qu’elle aurait pour faire de nouveau cet espace sien. Elle se réfugia dans la cuisine alors que les deux hommes allaient et venaient. Elle demeura pensive un bon moment et sortit de sa torpeur quand elle n’entendit plus aucun bruit. Fronçant les sourcils, elle fit le tour de toutes les pièces.
- Mon colonel ? Petit Jack ? appela-t-elle
La voiture du chef de Sg-1 n’était elle aussi plus là. Sam sourit. Ils avaient disparu comme ils l’avaient promis.
Elle commença à ranger le salon et découvrit bientôt le sweat-shirt préféré de petit Jack coincé entre deux coussins du canapé. Elle était maintenant sûre de les voir revenir car le jeune homme ne pouvait pas faire un pas sans.
Elle continua à tout remettre en ordre jusqu’au soir. Elle se dirigeait vers la salle de bains quand le téléphone retentit dans la maison plongée dans l’obscurité. Supposant qu’il s’agissait de petit Jack réalisant enfin qu’il avait oublié son vêtement fétiche, elle décida que cela attendrait bien qu’elle eût pris sa douche. La sonnerie persistante alors qu’elle était sous l’eau lui confirma que sa fuite était vraiment justifiée. Il n’abandonnerait donc jamais !
Se glissant dans un peignoir moelleux, elle prit alors conscience d’un détail troublant tandis que le téléphone acceptait enfin de se taire. Elle ne savait toujours pas qui l’avait appelée et incitée à partir. Si dans son esprit torturé elle avait d’abord cru à une intervention du réacteur à Naquada, elle devait avouer qu’il n’avait pas le don de parole.
Essuyant vigoureusement ses cheveux, elle rejoignit sa chambre pour y prendre un pyjama. Elle resta immobile en voyant sa fenêtre ouverte. Elle appuya sur l’interrupteur mais la lumière ne s’alluma pas.
- Petit Jack ?
Le silence lui répondit la glaçant des pieds à la tête. Elle s’avança prudemment dans la chambre.
- Petit Jack, ce n’est pas drôle !
Sam comprit que ce n’était pas son futur ex-mari lorsqu’une main se plaqua violemment sur sa bouche. Elle se débattit mais la poigne de l’homme la maintenait prisonnière.
- Pourquoi ne répondez-vous pas au téléphone ? murmura une voix empreinte de folie. Pourquoi n’êtes-vous pas venue me rejoindre quand je vous ai appelée ? Moi seul pouvait vous aider !
Le cri désespéré de Sam s’étouffa sous la main de son agresseur. Elle était sûre de connaître cet homme mais ne parvenait pas à retrouver son identité.
- Je vais vous tirer de là…
Sam fut sur le point de suffoquer quand elle parvint à mettre un visage sur cette voix. Ce n’était pas possible ! Elle voulut protester de nouveau mais un lourd objet s’abattit sur sa tête la faisant sombrer dans l’inconscience.