Aucun d’eux n’avait bien sûr attrapé de poisson, mais Jack avait raison, l’imagination était un bon moyen de se distraire.
Sam regardait plus Jack que sa ligne. Il n’arrêtait pas de se chamailler avec Myriam, ce qui la faisait beaucoup rire.
Vers midi, ils revinrent bien sûr bredouilles au chalet. Mais cela n’avait aucune importance, ils avaient passé un bon moment, et c’était tout ce qui comptait.
« Ca vous dit de faire un pique-nique ce midi ? Demanda Jack
-Oui pourquoi pas, fit Sam alors que sa fille sautait de joie.
-Parfait. Alors il faut préparer les sandwichs. »
Ils se mirent au travail et une demie-heure plus tard ils étaient partis vers un endroit que seul Jack connaissait. Ils avaient, pendant dix minutes, traversés les chemins de terre derrière le chalet, et étaient finalement arrivés à destination.
Jack les avait amenés dans un grand parc, avec un lac encore plus grand que le sien, et des fleurs dispersées partout sur la grande étendue d’herbe. L’endroit était magnifique. Sam et Myriam était émerveillées.
Ils mangèrent enfin puis passèrent le reste de l’après-midi dans cet endroit. Des gens se promenaient et Myriam avait trouvé une camarade pour jouer.
« Ca fait du bien d’être ici, dit Sam en respirant un bon coup. C’est complètement fou… on visite des planètes tous les jours, et on ignore les merveilles que peut contenir la nôtre.
-Je suis tout à fait d’accord avec vous. C’est d’ailleurs pour ça, en partie, que je tiens à mon chalet.
-Vous avez raison. Moi j’ai toujours habité en ville. C’était plus pratique… pour les études, les sorties…
-Et moi la campagne, en bon loup solitaire.
-Rat des villes, rat des champs.
-C’est un peu ça en effet. »
Ils interrompirent leur conversation quand Myriam arriva devant sa mère et lui offrit un bouquet de fleurs. Sam lui fit un énorme bisou sur la joue en la remerciant, et la petite fille repartit jouer avec son amie.
« En y réfléchissant, j’aimerais que ma fille soit élevée en dehors de l’agitation de la ville, de tout ce stress.
« Ca lui serait bénéfique en effet.
-Votre fils aimait être ici ? Se risqua Sam.
-Oh, il râlait de temps en temps, mais oui, il aimait le chalet, la pêche, les longues balades…
-Et le piano ?
-Sarah n’aimait pas le piano, alors je n’en ai plus joué. Quand Charlie et sa mère n’étaient pas là, il m’arrivait de retoucher à une partition, mais j’avais trop peur de retomber dans la passion de la musique et de me priver une fois que Sarah reviendrait.
-Vous n’avez pas rejoué une fois que…
-Une fois que Charlie est mort et que Sarah m’ait quitté ? Non, j’étais trop anéanti. Depuis, je m’efforce de pêcher des poissons imaginaires, dit-il sur le ton de la plaisanterie.
-J’aimerais beaucoup que vous jouiez pour moi, enfin si cela ne vous gêne pas bien entendu.
-On verra, si vous êtes sage. »
Il s’allongea près d’un arbre et mis son bob sur son visage pour se protéger des rayons du soleil qui passaient à travers les branches.
Vers 19h, il regagnèrent le chalet et Myriam alla regarder un dessin animé pendant que Sam et Jack étaient dans la cuisine et préparaient à manger.
« Où sont les couteaux ? Demanda Sam.
-Là, dans le tiroir de droite, lui répondit Jack.
-Merci. »
Sam passa derrière Jack puis ouvrit le tiroir en se reculant un peu. Elle buta contre les fesses de Jack mais fit comme si de rien n’était. Puis elle revint à sa place, avec son couteau. Jack jeta un coup d’œil à côté de lui, Sam n’avait pas l’air troublée, elle tranchait les concombres sans ciller. Il attrapa alors le sel qui se trouvait au bout de la table, à côté de Sam, et frôla au passage ses deux bras dénudés. Un sourire naquit alors sur ses lèvres.
Le jeu était intéressant, très intéressant. Aucun des deux ne voulait montrer à l’autre ce qu’il voulait vraiment, mais tous les deux voulaient la même chose.
A table il y eut quelques frôlements de jambes et de mains, quelques sous-entendus et quelques regards fuyants. Mais les sourires, eux, ne trompaient pas. C’étaient des sourires gênés d’abord, malicieux ensuite, puis presque coquins. Et puis le sérieux, le masque qu’ils avaient pris soin de construire pendant six ans revenait à la charge et voilait leurs sentiments.
Quand Sam revint au salon après avoir bordé sa fille, elle trouva Jack sur le canapé, les pieds posés comme la veille sur la table basse.
Elle se risqua à frôler les cheveux grisonnants de Jack, puis alla s’asseoir sur son fauteuil.
« Vous savez ce qu’on dit ? Fit Jack.
-Quoi ? Lui demanda Sam.
-A propos des blondes, fit Jack en souriant.
-Oui, mais là vous ne prenez pas en compte tous les critères.
-Ah non ?
-Non. Je suis blonde, c’est une évidence. Mais je suis scientifique, et militaire aussi. Et je sais que pour enfiler des chaussettes, il faut mettre les orteils d’abord.
-Vous m’en voyez ravi, fit Jack, une pointe d’humour dans la voix. »
Elle le dévisagea, puis commença à rire, et fut bientôt rejointe par Jack.
Au bout d’un moment, lorsqu’il n’y eut que le silence pour abriter leurs sentiments, Jack prit la parole.
« Je n’ai pas de si grands pieds. Vous trouvez que j’ai des grands pieds ?
-Pas spécialement.
-Vous trouvez que j’ai des petits pieds alors ?
-Pas spécialement.
-Des pieds moyens ? »
Sam sourit.
« Vous avez des pieds parfaits.
-J’espère qu’il n’y a pas que ça de parfait chez moi. »
Les allusions étaient frappantes, mais il voulait savoir jusqu’où allait les mener ce jeu dangereux.
« Qui a dit ça ? Demanda Sam avec un air nonchalant.
-Personne, fit-il avec la même nonchalance.
-Vous pourriez enfin me le dire.
-Quoi ?
-Cette chose que vous deviez me dire, finit Sam.
-Oh, celle-là. Non, pas encore, c’est pas encore le bon moment.
-Et quand est-ce que ce sera le bon moment ?
-Ca dépend de vous.
-De moi ? »
Jack fit oui de la tête devant une Sam légèrement perdue. Celle-ci se leva et alla dans le jardin. Jack la rejoignit doucement et s’arrêta à quelques mètres d’elle alors qu’elle avait le dos tourné. Il tendit sa main et frôla doucement, tout doucement le tissu de son short. Elle se retourna alors qu’il remettait son bras le long de son corps. Sam se rapprocha mais Jack ne bougea pas. C’était à elle de faire un geste.
Elle se contenta de le regarder, de scruter ses yeux pour essayer de savoir ce à quoi il pensait vraiment. Pour essayer de savoir si son geste était simplement une envie ou bien un désir.
Jack voyait bien ce qu’elle essayait de faire. Un sourire un peu timide naquit alors sur son visage, encourageant la lente progression de leur relation.
Sam enlaça alors Jack et lova sa tête contre son cou. Elle laissa sa main rejoindre le dos de Jack puis descendre un peu plus. Soudain, elle fit remonter sa main sur le torse de Jack puis desserra son étreinte. Elle voulu partir mais le bras de Jack l’en empêcha.
Sam, réellement surprise, ne savait pas comment réagir. Jack la rapprocha de lui, et lentement, mis sa main sur sa joue, puis dégagea une mèche de cheveux de son visage pour la remettre derrière son oreille. Sam ferma les yeux un instant un peu plus long que les autres, puis Jack embrassa son oreille dégagée et descendit ses baisers jusque vers le cou de Sam. Celle-ci ne bougeait plus, totalement envoûtée par cet instant de bonheur inattendu. Jack cessa ses baisers brûlants et Sam soupira de frustration. Il la regarda ouvrir les yeux et lui sourit.
« Bonne nuit Sam, fit-il en allant se coucher. »
Il n’allait pas la laisser comme ça ?
Et bien si, si il l’avait fait. Et Sam n’avait pas bougé, elle n’avait pas essayé de le rattraper. Elle était trop bouleversée. C’était presque… irréel !
Il fallait qu’elle éclaircisse tout ça avec lui. Demain, avant qu’il ne parte à la base.