Du sable, du sable et encore du sable.
Et des dunes aussi, n’oublions pas les dunes, pensa Jack dont les yeux se fermaient progressivement.
Au début, le voyage n’avait pas été si désagréable. La capitale où ils se trouvaient dans la matinée était située dans la moitié sud du pays, la partie sahélienne. Malgré une mi-journée assez caniculaire, tous semblaient apprécier l’excursion. Le paysage était principalement composé de quelques longs palmiers à l’ullure d’asperges perçant un sol sec et craquelé. De temps en temps, ils croisaient une oasis où une petite communauté vivotait principalement grace à un seul et unique puit.
« Un chadouf » avait commenté Daniel à l’occasion.
« Excusez-moi ? »
« Cette immense pompe en bois, c’est un chadouf »
« Ah »
Mais à présent, au bout de sept heures de voyage, on sentait que les esprits commençaient à se lasser. Ils avaient petit à petit pénétré dans la partie nord du pays, la partie saharienne. Celle qui n’était composée que de sable et de dunes.
L’Erg du Djourab.
Il était évident qu’ils ne croisaient plus guère d’humains, ni d’êtres vivants en général, ce qui ne faisaient qu’ajouter à la monotonie de leur route.
Jack avait par conséquent décidé de faire un petit somme. Ses assoupissements n’étaient cependant jamais très longs, car les nids de poules qui les bringuebalaient dans tous les sens faisaient régulièrement cogner sa tête contre le dossier.
« C’est pas vrai, ils pourraient faire un petit effort côté confort dans ces boîtes de conserve… »
« Un peu de lucidité Jack, c’est un des pays les plus pauvres du monde… »
« Alors expliquez-moi juste une chose, pourquoi a-t-on fichu la Porte ici ? On n’a pratiquement aucune relation commerciale avec le Tchad, l’anglais n’y est même pas usité ! »
« Non, mais y’a du pétrole inexploité… Le gouvernement a dû penser qu’il était temps de tisser des liens amicaux avec ces gens merveilleux » déclara Daniel sur un ton monocorde qui traduisait un certain écœurement.
Ces paroles firent apparaître une grimace de dégoût sur le visage de Jack, qui presque immédiatement se transforma en une grimace de douleur lorsque son crâne prit de nouveau violemment contact avec l’appui-tête.
Le pire dans l’histoire, maugréa-t-il pour lui-même, était qu’il ne pouvait pas bouger d’un centimètre. D’accord, peut-être pas le pire, ou alors c’était un mal pour un bien, se dit-il en caressant la tête blonde posée sur ses genoux.
« Nous arrivons » déclara finalement Lassina qui était resté pratiquement muet durant toute la durée du trajet.
« C’est ici… ? » demanda Jack sur un ton dubitatif. Il ne voyait rien d’autre que du sable, des dunes et du sable. Rien de bien différent donc, mais le jeune homme répondit affirmativement.
« Le sable a bien évidemment recouvert l’endroit, c’est pourquoi nous y avions laissé une marque repère »
« Ah oui, laquelle ? »
« Je ne puis vous le dire colonel, ce projet est classé top secret dans votre pays comme dans le mien, et il me semble que j’ai déjà assez trahi mon gouvernement en vous conduisant ici sans autorisation »
« Vous aviez le choix Lassina, on ne vous a forcé à rien ! »
« J’en suis conscient, mais je dois la vie au docteur Jackson »
« Quoi ? »
« Oh une histoire de chantier instable… » répondit machinalement l’archéologue.
Jack haussa les sourcils et s’apprêta à répliquer, mais le 4x4 stoppa net et le choc réveilla Sam, ce qui capta immédiatement toute son attention.
« Hey »
Elle lui rendit son sourire et se frotta les yeux avec le vague espoir d’en drainer le sommeil.
« Bien dormi ? »
Pas encore assez réveillée pour trouver le courage d’ouvrir la bouche, elle hocha la tête et s’étira.
« Ca va, je suis confortable ? »
Cette fois, elle roula des yeux et glissa ses mains derrière sa nuque, l’attirant à elle dans un de ces baiser typiques d’un réveil suivant une nuit de passion.
« Affirmatif mon colonel, sur toute la ligne. J’ai bien dormi ET vous êtes très confortable » annonça-t-elle avec emphase.
Le claquement des portières avant qui se refermaient finirent par la réveiller complètement et elle se redressa sur son siège, acceptant bientôt la proposition galante de Jack qui lui tînt la porte après être sorti.
Il rejoignirent les deux deux ex-collègues qui s’étaient arrêtés un peu plus loin, quoique Jack de demandât toujours ce qui pouvait indiquer la position de ce qu’ils cherchaient. Lassina sortit un appareil de sa poche sur lequel il commença à pianoter. Presque aussitôt, l’étendue immaculée de dunes se fendit, révélant une ouverture d’environ six mètres de largeur. Une grande quntité de sable tomba à l’intérieur.
« Et la lumière fut » commenta Jack lorsque des dizaines de néons obéirent au jeune homme et à son instrument.
C’était un escalier d’une trentaine de marches de béton, dont les premières étaient maintenant recouvertes de sable jaune. Le couloir était donc large, ce qui rassurait l’équipe sur la présence de la Porte un peu plus bas dans l’installation, et des éclairages se succédaient au plafond qui était incliné selon un angle d’une vingtaine de degrés.
« Vous pouvez y allez » informa Lassina en leur indiquant le passage.
« Vous ne venez pas ? » interrogea Jack, sceptique.
« Non, je ne veux pas savoir ce que vous comptez faire, ma responsabilité s’arrête ici »
O’Neill attrapa par la manche le jeune archéologue qui se préparait déjà à s’engager dans les escaliers.
« Et ça ne vous paraît pas louche ? Ca ne vous a pas effleuré l’esprit qu’il pourrait refermer la porte derrière nous et alerter son gouvernement ? »
« Je dois dire que non Jack, pas une seule fois. Et quand bien même, j’ai là ce petit appareil en liaison directe avec Teal’c qui peut nous téléporter à tout moment »
Sur ce, il se dégagea et commença à descendre les marches, laissant derrière lui un militaire qui cherchait désespérément un contre argument pour répliquer à cela. Sam glissa sa main dans la sienne et emboîta le pas à son ami.
« Il est pas net ce type, il nous cache quelque chose » grogna-t-il en se laissant entraîner.
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« Pour être franche Jack… » déclara-t-elle en admirant ce cercle merveilleux qu’ils avaient passé tant et tant de fois, « Je ne crois pas que je pourrai un jour me résoudre à ne plus côtoyer cet univers… »
« Pardon ? »
Les yeux de Sam détaillèrent chaque chevron, chaque symbole. Elle se plaisait à reconstituer des combinaisons qui étaient autant de clés ouvrant sur de fabuleux souvenirs.
« J’ai passé tellement de temps à observer la voûte céleste après la fermeture du programme, tellement de temps à me demander ce qu’il pouvait bien se passer là-haut… C’est mon univers tu comprends, même si je le voulais je ne pourrais plus me contenter de cette bonne vieille Terre… »
« Comment je dois comprendre ça ? »
« C’est oui »
« Sûre ? »
« Certaine, on ira vivre là-bas »
L’esquisse d’un sourire se dessina sur le visage de Jack. « Et ils vécurent heureux et eurent… »
Beaucoup d’enfants, compléta mentalement Sam. Oh oui, plein d’enfants, une ribambelle d’enfants bénéficiant d’un fantastique héritage intergalactique, tout en s’épanouissant au sage contact des Nox… Finit ta phrase Jack, pensa-t-elle en décrochant ses yeux de l’anneau pour retourner vers son amant.
Oh mon Dieu…
« Eh bien qu’attends-tu Sam, dis-le, ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants… Mais dis-moi, la princesse n’aurait-elle pas avant tout quelque chose à confesser à son prince ? »
Pétrifiée, Sam ouvrit la bouche pour répondre, puis la referma, et la rouvrit et la referma encore. « Jeffrey… » murmura-t-elle d’une voix étranglée.
« Oui, Jeffrey, quelle surprise n’est-ce pas ? C’est étonnant comme le monde est petit, on tombe sur son époux à tous les coins de rue de nos jours… Oh, Docteur Jackson, vous n’oublierez pas de remercier votre ami… C’était vraiment gentil de sa part d’interrompre mon entretient avec le président Deby pour m’informer que ma femme se baladait en ville avec un homme qui passait à l’occasion sa main sous son T-shirt »
Ses ongles s’enfoncèrent dans ses paumes. Tôt ou tard il aurait fallu en passer par là, mais elle aurait vraiment préféré la seconde option.
« Sam… ? »
Ses yeux rencontrèrent ceux de Jack. Elle pouvait y lire l’incompréhension et l’incrédulité, mais surtout la douleur. Beaucoup de douleur, qui résonna dans son âme et la fit trembler.
« Toi, tu te la fermes le revenant. Je suis celui avec un flingue posé sur tes tempes alors je suis celui qui pose les questions, ok ? »
Il ne répondit pas. Rien n’importait plus pour lui sinon chercher des réponses auprès de… de qui au juste ? Qui était-elle à présent ?
« Tu ne m’as pas répondu mon ange, la princesse n’aurait-elle pas quelque chose à dire à son prince charmant ? » lança Jeffrey sur un ton mielleux.
Sam jeta un coup d’œil à Daniel qui observait la scène sans mot dire. Elle sentit qu’il était prêt à agir… il ne fallait pas. Elle secoua doucement la tête de gauche à droite. Le corps du jeune homme se détendit mais une expression frustrée s’afficha sur son visage.
Elle porta alors sa main à sa poche sans quitter Jeffrey des yeux, de peur qu’il ne s’en prenne à celui qu’il tenait en joue. Une vague d’inquiétude l’envahit. Ce pantalon avait été bien malmené durant ces trois semaines qu’avait duré le voyage, il aurait été si facile pour un si petit objet de s’échapper et de rouler dans un coin…
Non, Dieu merci, elle ne l’avait pas perdue. Elle était là, tout au fond de la poche mais elle était bien là. Un frisson la parcourut en pensant à ce qu’elle allait faire, à ce qui allait arriver ensuite. Malgré tout ce qu’elle avait traversé dans sa vie, ce moment allait sans doute être un des plus pénibles.
Elle sortit le petit anneau et le fit jouer à la hauteur de ses yeux. La lumière s’y refléta et les miroitements dorés captèrent immédiatement l’attention de toutes les personnes présentes.
« Bien, tu vois ce n’était pas si difficile après tout… »
« Sam… » répéta Jack sans trop vouloir croire à ce qu’il voyait.
« Eh bien Sam ? Ton prince demande une explication… »
Elle détestait cet homme. Comment pouvait-il lui faire ça ? Non, se contredit-elle immédiatement, la dernière chose qu’elle était en droit de faire était de lui en vouloir. Elle l’avait aimé, ou du moins elle avait eu besoin d’y croire, et elle avait accepté de l’épouser pour le meilleur et pour le pire. Il avait tous les droits de réagir ainsi. Elle et elle seule était dans l’erreur.
« Je… je l’ai… » Sa voix se rompit avant qu’elle n’ait pu finir sa phrase.
« Excuse-moi ? Je n’ai pas entendu ma chérie » nargua-t-il d’une voix doucereuse en faisant jouer le percuteur de son arme.
Sam se ressaisit immédiatement en entendant le déclic familier.
« Je l’ai épousé » lança-t-elle, et un sourire se forma sur les lèvres de Jeffrey. « Il y a deux mois de cela… » compléta-t-elle dans un murmure.
Un silence pesant s’abattit sur la salle. Elle savait tous les regards fixés sur elle, mais elle n’avait d’attention que pour l’homme à qui elle était consciente d’avoir enfoncé un poignard dans le cœur. Une fois encore, la douleur qu’elle pu voir dans ses yeux l’ébranla profondément.
« Mon dieu je suis désolée Jack… si désolée… » gémit-elle en se prenant la tête entre les mains.
« Si désolée JACK !? » explosa Jeffrey dont la main se crispa violemment sur le revolver, « Tu t’es envoyée en l’air avec ce mec et tu oses dire devant moi que tu es désolée pour lui ? » hurla-t-il.
Tremblante, Sam jeta un regard désespéré à Jack. Une grande sensation de souffrance s’empara d’elle lorsqu’elle le vit impassible, ignorant du canon pointé sur son front. Il continuait à la fixer, l’expression douloureuse n’avait pas totalement disparue de son visage, mais elle pouvait à présent en discerner une autre. Il était égaré, il ne savait pas… il ne savait plus. Il était indifférent. « Je n’ai pas… »
« Couché avec lui ? Tu te fous de moi ! Cache le suçon de la taille du Texas que tu as dans le cou avant de me sortir un mensonge pareil ! »
Daniel haussa les sourcils et fit gonfler ses joues. Oui en effet, c’était flagrant… Il avait vaguement remarqué une trace rouge qui s’agrandissait petit à petit durant cette longue traversée de la galaxie de la planète Asgard à la Terre, mais jamais il n’avait réalisé qu’elle s’était à ce point étendue. Sam baissa piteusement la tête et remonta son col.
Un long, long mutisme s’installa.
Le jeune femme était nauséeuse. Une fois encore, le destin la malmenait. Vraiment, elle n’était pas du genre à s’apitoyer sur son propre sort, mais c’en était trop… Elle n’avait jamais eu de chance, et ce n’était pas peu dire. Sa vie n’avait été qu’un vaste champs de bataille jonché de peines et de désastres où espoirs et désespoirs se côtoyaient continuellement. Et le bouquet final la frappait de plein fouet.
Pourquoi… ? Mais pourquoi elle pour l’amour du ciel ?
Elle savait pertinemment de quel côté penchait la balance, mais ce n’était pas si facile. Rien n’avait jamais été facile.
Jeffrey transpirait abondamment, les doigts crispés sur la gâchette. Cet homme là, qu’il ne connaissait que par quelques photos que sa femme gardait toujours sur elle, avait foutu son mariage en l’air. Même à son apogée, une ombre avait toujours plané sur leur vie conjugale. Il ne s’était jamais passé un jour, une nuit, sans que ce fantôme ne mette de barrières entre eux.
Il le haïssait.
Peu importait la façon dont il avait ressuscité, ou quoi que ce fut d’autre, il avait toujours su que le passé de sa femme n’était pas totalement net et qu’il en ignorait une bonne moitié.
Mais il l’aimait.
« Sam, je veux que tout redevienne comme avant… »
« Tu sais très bien que rien ne sera plus comme avant » coupa-elle.
« Mais je veux y croire tu comprends ? Croire que ma vie n’a jamais été gâchée par le spectre de ce type… »
« Je sais, il aurait mieux valu que nos routes ne se croisent jamais »
« Et encore, vous avez eu de la chance si je peux me permettre » interrompit Daniel, « Les autres ont tous passé l’arme à gauche ». L’archéologue se tût rapidement en recevant les foudres du couple.
Ou de l’ex-couple… ?
Peu importe.
« Ce mec doit disparaître de la surface de la Terre » continua Jeffrey en donnant un petit coup de poignet. Jack ignora encore le canon qui prit de nouveau contact avec le côté gauche de son visage, visage qui ne changeait toujours pas d’expression.
« Euh… Justement, en parlant de ça… » coupa Daniel en fouillant dans une des nombreuses poches de sa veste, « Il ne faudrait pas faire attendre Teal’c trop longtemps vous ne croyez pas ? »
Sam acquiesça et le jeune homme sortit un petit appareil, en prenant soin de garder le contact avec les yeux de Jeffrey qui le détaillait suspicieusement ses gestes.
« Teal’c, c’est bon, on l’a localisée… Vous pouvez faire le nécessaire »
Aussitôt, une lumière blanche enveloppa intégralement la salle.
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« Oui, c’est certain… pourquoi se compliquer la vie à faire dans le détail alors qu’on peut tout embarquer… » grinça Daniel en jetant un coup d’œil à Jeffrey qui s’était raidit et contemplait son nouvel environnement. Sa bouche était entrouverte et ses yeux arrondis s’accordaient avec la terreur peinte sur son visage.
Le jeune homme bondit et lui arracha son arme des mains, s’étonnant tout de même grandement du manque total de réaction de la part de Jack.
« Qu’est-ce que je fais là bordel… » jura-t-il plus pour lui même qu’à l’attention de son entourage.
Il avaient regagné le vaisseau Asgard. Teal’c et une demi-douzaine de ses compagnons se pressaient déjà autour du Shapaï, sans doute pour vérifier son authenticité.
« Des extraterrestres hein ? » lança-t-il en désignant les Jaffas du mentons. Personne ne prit la peine de formuler l’évidence.
« Oh je sais ce que vous pensez… Quel scoop n’est-ce pas ? Figurez-vous que j’en ai un meilleur : tout le Pentagone est au courant depuis une petite dizaine d’années… De toute façon ne vous inquiétez pas pour ça, personne ne vous renverra sur Terre avant un bon lavage de cerveau » exposa Daniel en jouant machinalement avec le revolver dont il avait hérité.
« Va pour le lavage de cerveau, vous nous faites ça rapidement et vous nous renvoyez sur Terre comme si de rien était »
Nous ? Daniel haussa les sourcils et considéra d’un air interrogatif la grande salle du vaisseau dans laquelle ils se trouvaient. Avaient-il par hasard téléporté quelqu’un qui accompagnait Jeffrey ? Peut-être son pseudo ami qui était resté à la surface…
Puis il réalisa le malentendu.
« Vous voulez dire… vous et Sam ? »
Jack sembla alors sortir de la transe dans laquelle il était plongé depuis l’arrivée de Jeffrey. Il secoua la tête et commença à s’éloigner.
« Jack ! » l’interpella la jeune femme en courant après lui, « Attend, je t’en prie… »
Sans répondre, il dégagea son bras de l’étreinte de la jeune femme.
« Jack ! » répéta-t-elle sur un ton suppliant.
Il se retourna alors vers elle, et la souffrance qui était de nouveau présente dans ses traits la frappa.
« Honnêtement, comment veux-tu que je réagisse ? Qu’est-ce que tu attends de moi exactement ? »
« Un peu de compréhension » murmura-t-elle.
« De la compréhension ? Sam, tu réalises un peu ce que… » Sa voix se brisa. Il ferma brièvement les yeux, puis se ressaisit et continua.
« J’ai passé plus d’un an sur cette planète, avec une femme adorable, aimante, avec qui j’avais déjà eu une relation. Tout ce temps je l’ai passé à repousser ses avances et à me morfondre, encore et toujours, en pensant aux deux personnes sans qui je n’étais plus rien, toi et Lyra… Tu as une idée de ce que je peux ressentir en apprenant que celle qui occupait mes jours et mes nuits avait un autre homme dans sa vie ? Et que qui plus est, qu’elle n’avait pas jugé utile de m’en informer ? »
« J’ai voulu… J’ai voulu sauver let temps qu’on nous avait donné avant de… »
« Mais merde Sam, tu sais très bien que j’aurais mille fois préféré entendre la vérité de ta bouche, et attendre un peu pour le reste ! Est-ce qu’une partie de jambes en l’air est plus importante à tes yeux que le respect sur lequel on avait fondé notre relation ? »
Ces paroles amenèrent immédiatement les larmes aux yeux de la jeune femme. Voyant cela, Daniel ne pu réprimer une vague de colère. Délaissant leur précédent agresseur, il bondit sur Jack et lui décrocha une droite impressionnante qui le fit chanceler, la main sur la mâchoire.
Sam se précipita immédiatement à son secours.
« Vous êtes un beau salaud Jack » cria-t-il sans se démonter, les yeux brillants de colère, « Avez-vous la moindre idée de l’état dans lequel votre disparition l’a mise ? Des épreuves qu’elle a dû traverser, seule, avec un enfant sur les bras ? Car moi-même je n’étais plus là pour elle, j’en ai honte d’ailleurs quand j’y repense… Mais quand elle m’a contacté, un jour, en me disant qu’elle allait se marier, j’ai tout de suite compris ce que vous, vous semblez ne pas comprendre ! Elle avait besoin d’un père pour sa petite fille, elle avait besoin combler ne serait-ce qu’à moitié le vide affectif que vous aviez laissé dans son cœur… Quant à comprendre pourquoi elle ne vous a rien dit Jack, c’est à la portée du premier abruti ! Elle était trop submergée par le bonheur de vous avoir retrouvé pour le gâcher immédiatement ! »
Le jeune archéologue reprit son souffle.
« Vous me décevez Jack, énormément. L’homme que je connaissais aurait tout fait pour Sam, tout. Au lieu de ça il se comporte tellement bassement avec elle que j’en viens à éprouver de la sympathie pour Jeffrey »
Jack avait gardé le silence pendant tout le discours de son ami. Un combat d’émotions se livrait en son âme et conscience, et il devait avouer que les arguments qu’il venait de se faire asséner prenaient déjà le dessus. Et lorsqu’il prit conscience que la jeune femme avait glissé un bras autour de sa taille pour l’aider à se remettre du coup qu’il avait reçu, après toutes ces ignominies qu’il venait de lui envoyer en pleine figure… A vrai dire, il approuvait le geste de Daniel… Mieux, il se serait bien lui-même infligé le même sort.
Un violent frisson le parcourut. Le dégoût qu’il avait pour sa propre personne était si intense… Comment Sam pourrait-elle un jour le pardonner ? Comment Sam pouvait-elle tout simplement l’aimer encore ?
« Je ne te mérite pas Sam… »
« Vous êtes idiot mon colonel… » lui murmura-t-elle en prenant son visage entre ses mains.
« Je suis sérieux major » insista-t-il en réadoptant inconsciemment les vieilles habitudes.
« Ne dis pas n’importe quoi… Aucun de nous n’a vraiment de choses à se reprocher, on n’a pas choisi tout ça… Et quand bien même, ne dit-on pas que l’amour, c’est de ne jamais avoir à dire pardon ? »
Qu’y avait-il à ajouter ?
Rien, sans doute.
Le monde s’effaça autour d’eux. Daniel qui esquissait le début d’un sourire en s’inquiétant de l’état de sa main. Jeffrey dont le regard incrédule passait alternativement du couple à la grande baie vitrée qui ouvrait sur l’espace. En bas à droite, une Terre de trente centimètres de diamètre, à peine. Teal’c qui regardait le tout sans trop comprendre ce qu’il se passait.
Le baiser était doux, plein de retenue, bien que déjà expérimenté maintes et maintes fois auparavant. Comme s’ils cherchaient à goûter toutes les meilleures saveurs qu’ils pouvaient s’offrir.
Un raclement de gorge se fit entendre.
« Tu pourrais au moins m’épargner ça Sam ! »
Les yeux de la jeune femme qui, jusqu’à présent, n’étaient emplis que de tendresse, s’attristèrent soudainement.
« Il faut que je lui parle » dit-elle doucement. « Il n’y est pour rien, il est tombé dans mon monde, jamais on ne devrait infliger une chose pareil à quiconque… »
« Ne me compte pas dans le lot surtout… J’y suis, j’y reste, et j’en suis on ne peut plus heureux »
Ses paroles lui décrochèrent un sourire, puis elle fit glisser le long de ses épaules ses bras qui s’étaient enroulés autour de son cou, pour finalement s’éloigner de lui.
Beaucoup plus rapidement qu’elle ne l’aurait souhaité, ses pas la menèrent à son mari. Cela lui était presque étrange de se référer à lui comme son mari, maintenant qu’elle venait de retrouver celui qu’elle savait être le véritable homme de sa vie… Mais ce dont elle était consciente était qu’elle devait assumer.
Elle arriva à sa hauteur et imita son attitude, les mains derrière le dos, tournée vers l’espace, vers cette petite planète bleue qui était la leur.
« Dis-moi que ça aurait pu marcher entre nous Sam »
« Oui, bien sûr que ça aurait pu marcher » répondit-elle, adoptant un ton convaincu. Elle était honnête d’ailleurs, elle se serait sûrement accommodée à un homme normal, à une maison normale, à un métier normal… A une vie normale !
Mais parallèlement, la normalité se serait-elle accommodée à elle ?
La réponse était négative, et c’était pour cela qu’elle allait maintenant partir vivre à l’autre bout de la galaxie avec son fiancé défun, avec son père défun, sans oublier plusieurs races d’extraterrestres en tout genres.
« Alors… pourquoi ? »
« Surtout dis-toi bien que ce qui arrive n’est en rien ta faute Jeffrey, je n’aurais simplement pas dû t’entraîner dans ma vie… »
Jeffrey fronça les sourcils et lui demanda silencieusement une explication.
« Daniel avait raison tout à l’heure, beaucoup sont morts, et de façon plus générale personne n’en est ressorti indemne »
Ils restèrent longtemps à oberver l’espace infini, droit devant eux. Puis, Jeffrey, qui se demandait vraiment s’il y avait une bonne étoile qui lui appartenait quelque part par là, rompit le silence.
« Alors… j’imagine qu’il ne me reste plus que deux choses à faire… »
Sam tourna la tête vers lui.
« La première aurait été de m’excuser pour… toute cette histoire malsaine… mais comme tu l’as si bien dis toi-même, l’amour est de ne jamais avoir à dire pardon »
Il reçut en réponse un hochement de tête et une expression triste dans ses yeux qui furent suffisants pour le convaincre de la sincérité de son amertume.
« La deuxième est de te souhaiter bonne chance pour la suite… Je ne sais pas ce que tu vas faire là-bas, et je ne veux rien savoir d’ailleurs, mais je sais qu’il te rendra heureuse, et crois-moi ou non, c’est tout ce qui m’importe… »
Sam avait le cœur brisé. Encore un qui allait s’effacer de sa vie en ne laissant d’autre trace que celle d’un pénible souvenir dans son cœur…
« Bonne chance à toi aussi Jeffrey » murmura-t-elle en le prenant dans ses bras. Les larmes qui coulaient de ses yeux mouraient dans le cou de celui qui était encore son mari. « Tu verras » affirma-t-elle entre deux sanglots, « Tu trouveras quelqu’un qui te correspondra »
Il passa sa main dans ses cheveux et la pressa contre lui.
« Quelqu’un qui ne côtoiera pas les martiens » ajouta-t-il avec un petit sourire triste.
La jeune femme rit à sa remarque, puis se détacha de lui et essuya ses yeux.
« Merci pour tout » dit-elle simplement en reculant, prévoyant ce qui allait suivre.
« Et embrasse Lyra de ma part » lui lança-t-il avant de disparaître dans un halot de lumière argentée.
Sam le regarda se volatiliser pour ce qu’elle savait être la dernière fois, car dans quelques minutes, par les bons soins des appareils Asgards, il n’aurait certainement plus aucun souvenir d’elle. De nouveau, elle tourna son attention vers cette planète turquoise qui avait été, et serait toujours son chez elle. La nostalgie la déchirait, elle se demandait comment elle pouvait faire ça, abandonner son berceau pour un autre sans aucune signification à ses yeux…
Deux bras encerclèrent sa taille et un baiser fut déposé sur ses cheveux. Une chaleur saisissante s’empara immédiatement de tout son être et elle posa ses mains sur ces avant-bras qui l'enveloppaient jalousement, cherchant à se blottir plus intimement contre lui.
La réponse à ses questions était là, en partie. Elle allait vivre avec lui, elle allait vivre avec leur enfant. Mais elle allait aussi continuer le combat à ses côtés.
Une douleur diffuse la surprit au milieu de sa rêverie. Elle avait dû se tendre, même imperceptiblement, car elle sentit l’étreinte de Jack se relacher légèrement et vit ses yeux chercher les siens. De nouveau elle se sentait nauséeuse. Sans raison cette fois, pourtant.
… ?
Son expression soucieuse s’éffaça rapidement lorsqu’elle donna une toute nouvelle signification à ce qui lui arrivait.
« Jack… » murmura-t-elle en prenant la main de son amant et en la portant un peu plus haut sur son ventre, pressant très légèrement leurs doigts entrelacés à cet endroit précis.
Fin
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Merci à tous ceux qui m’avaient demandé une suite à Delta Lyr… Bon, évidemment, avec deux résurections et un happy end pareil, on est un peu loin de l’idée de départ qui n’était autre qu’un drame, mais ça m’a quand même permi de me lancer dans une trame sérieuse avec des obstacles et des problèmes à résoudre… Alors merci à vous de m’y avoir poussé, c’était une expérience intéressante J Oh et pour ceux qui n’avaient pas compris la métaphore du titre, c’est Jeffrey le papillon et l’ombre qu’il avait portée sur le couple s’est envolée avec lui. Ah oui, j’oubliais, feedbackez-moi surtout !!