Citations du moment :
Le rire n'est jamais gratuit : l'homme donne à pleurer mais prête à rire
[Pierre Desproges]
Imagine

Second souffle : Chapitre 3

Cela fait maintenant plusieurs heures que je m’étais endormie dans la voiture. On s’est alors arrêté au bord d’un petit lac pour se détendre un peu.

 

J : Alors Carter, c’est pas joli le Minnesota ? Mais vous verrez, c’est encore plus beau chez moi !

 

Il continue à m’appeler par mon nom, il ne veut pas renoncer. M’appeler Sam, ce serait admettre que c’est la fin pour moi. Non, il ne veut pas penser à ça !

Je me retourne alors vers lui et le regarde droit dans les yeux.

 

S : Jack, je vais mourir. Je ne peux rien y faire, vous ne pouvez rien y faire. Par contre, vous pouvez m’aider à passer les derniers plus beaux jours de toute ma vie ; alors arrêtez de faire comme si tout allait bien, arrêtez de nier les choses…

 

Je pleure, c’est plus fort que moi, je ne peux plus me contenir.

 

S : …et embrassez-moi

 

Il me regarde effaré du discours que je viens de tenir, il ne veut pas que j’abandonne. Il me considère quelques secondes avant de me prendre contre lui et de poser un  tendre baiser sur mes lèvres. Un frisson. Nous nous embrassons de plus en plus passionnément et je sens d’autres larmes se mêler aux miennes, SES larmes. Il sait qu’il n’a pas le droit de me refuser quelques instants de bonheur. A bout de souffle nous nous séparons. Il me serre très fort dans ses bras et nous glissons à terre. Je me retourne et le regarde. Mais je vois tant de douleur dans ses yeux que je préfère détourner mon regard.

Nous finissons de contempler le soleil couchant et nous reprenons la route. Il était très tard quand nous sommes arrivés au chalet. Nous sommes montés directement nous coucher. Il m’a prise dans ses bras et nous passons la nuit enlacés.

Il est près de 11h00 quand nous réveillons. Il est toujours là, contre moi. Je ne peux qu’apprécier la chaleur de son corps contre le mien. Je me sens bien ce matin, cela fait des semaines que je n’ai pas été aussi bien. Je le lui dit et il sourit. Il m’embrasse sur le front et nous échangeons quelques câlins avant de nous lever. La journée passe vite, trop vite. Il m’apprend enfin à pêcher, avec beaucoup de patience il faut bien le dire car je n’arrête pas d’accrocher l’hameçon aux branches environnantes et aux souches au fond de l’eau. On rit beaucoup, surtout quand je casse le crin pour la 6ème fois de la journée.

Il est doux, tendre, toujours attentif à mes besoins et à mes désirs.

Ainsi passent ces 5 jours et je me dis qu’ils resteront un incroyable souvenir. Le dernier soir nous avons mangé dehors, près du lac et nous avons regardé les étoiles. Il était assis derrière moi, j’avais posé ma tête au creux de son épaule et il me tenait enlacée. J’aurais aimé que le temps s’arrête à ce moment, pour toujours. Une étoile filante laisse sa trace dans le ciel. Il se penche à mon oreille et murmure :

 

J : Fais un vœu.

 

Je ferme les yeux et je désire ne pas mourir. Le vent commence à souffler fort. Il m’embrasse et nous rentrons. Dans la chambre, il a allumé des bougies. C’est beau, IL es beau. Il s’approche alors de moi et me prend dans ses bras. Je sens qu’il va pleurer et ça me fait mal. Je lui demande de tenir, pour moi. Mais il me dit qu’il ne veut pas continuer sa route si je ne suis plus là.

 

J, en sanglots : Sam, j’ai dû faire comme si rien n’était pendant plus de 5 ans. Et aujourd’hui que tout peut commencer, je vais te perdre. Non Sam, tu sais que je ne le supporterai pas. Je ne veux pas avoir à endurer ton absence. Je t’aime Sam.

 

Je l’interromps d’un baiser, je ne veux plus rien entendre car je commence à pleurer moi aussi. Il se fait de plus en plus ardent, embrasé et nous nous retrouvons sur le lit à éprouver 5 années de silence et de sous-entendus.

Malheureusement, ce séjour se finit. Nous regardons une dernière fois le lac avant de partir et il aperçoit dans mes yeux un petit éclat qui avait disparu depuis longtemps. Ce petit éclat, me dit-il, qui lui a tant manqué.

 

    Nous voici de retour à la base, je ne pensais pas y retourner de nouveau. Main dans la main, nous traversons les couloirs jusqu’à l’infirmerie. Les soldats que nous croisons, loin d’être étonnés, préfèrent éviter mon regard. J’imagine qu’ils sont tous au courant, les nouvelles vont bon train ici.

Janet m’examine de nouveau, elle veut que je reste me reposer. Je me sens tellement fatiguée que je n’oppose aucune résistance.

Jack a refusé les missions d’Hammond, il veut rester près de moi. Tous mes amis passent donc leurs journées ici. Ainsi, entre les jeux de cartes et les parties d’échecs, je passe du bon temps et je ris beaucoup, ce qui me fait énormément de bien.

    Ce matin pourtant, je n’ai pas pu me lever, je sens incapable de bouger, beaucoup trop faible. Je sais ce qui m’arrive mais je suis néanmoins paralysée par la peur. J’appelle Janet. Elle m’ausculte et je vois des larmes à ses yeux. Cela confirme ce que je pensais déjà. Je lui demande doucement :

 

S : C’est fini ?

 

Elle me regarde et ne répond rien, les yeux baissés. Je soupire et m’allonge avant de sombrer dans un profond sommeil.

    C’est de pire en pire chaque jour, une longue et lente agonie. Je n’ai même plus la force de garder mes yeux ouverts. Jack ne quitte plus l’infirmerie et pourtant, je ne veux pas qu’il soit là quand…

    Aujourd’hui, ça arrivera aujourd’hui. Je le sens, je le sais, lui aussi. Même respirer est devenu pénible. J’ouvre les yeux, Jack s’approche aussitôt de moi.

 

J : Salut

 

Je lui répond un bonjour à peine inaudible. L’alarme se met soudain en route :

ACTIVATION EXTERIEURE NON AUTORISEE !

Ca n’a pas l’air de le préoccuper, il reste avec moi. Lui aussi sent que c’est pour aujourd’hui.

    Et voilà comment va disparaître le major Samantha Carter, théoricienne en astrophysique de l’USAF. Voilà comment je vais effacer ma vie de la surface de la Terre et même de l’univers. Moi qui ai tout enduré, la torture mentale, physique, moi qui me suis battue contre les faux dieux, moi qui ai voyagé vers d’autres galaxies, aussi loin que nos fusées et nos satellites, moi qui ai bouleversé les lois de la physique, moi qui me suis reconstruite alors que j’étais terrassée ; moi, Samantha Carter, je vais finir ma vie sur un lit d’hôpital, dans une base secrète à plusieurs dizaines de mètres sous terre, anéantie par un ennemi si petit que je ne le vois même pas. Je comprends maintenant ce qu’à pu ressentir mon père. Des regrets ? oui. Celui de n’avoir pas profité de ma vie comme je l’aurais voulu, celui ne n’avoir pas dit plus tôt à Jack que je l’aimais. Mais malgré tout, je veux partir avec la certitude que j’aurai aussi apporté beaucoup à tous ceux que l’on a rencontré. Je veux qu’ici, on garde l’image d’un soldat qui a accompli son devoir.

    Jack me regarde intensément, il essaie de lire dans mes pensées. Je lui souris et il prend mes mains dans les siennes. Il n’y en a plus pour très longtemps maintenant, il est incapable de retenir ses larmes.

 

J : Je sais que je n’ai jamais été très doué pour les discours. Je ne peux pas te dire ni te décrire tout ce que je peux ressentir pour toi, les seuls mots qui me viennent à l’esprit sont : je t’aime si fort Sam.

 

Je ne peux pas lui répondre, je suis trop bouleversée. Dans un ultime effort, je me redresse et je l’embrasse, doucement, tendrement. Il m’aide à me recoucher.

 

S : Jack…

 

Son regard se fixe au mien. Dernières confidences sur mon lit de mort.

 

S : Ne m’oublie pas.

 

Des mots qui font mal. Il ne peut plus pleurer, la souffrance est au-delà des larmes. Il resserre plus forts ses mains et murmure :

 

J : Jamais, je te le promets.

 

Je sais que je peux partir en paix. Un froid soudain m’enveloppe. J’entends encore des bruits agités autour de moi, un signal dont la cadence ralentit, mais tout cela me paraît tellement loin ! Je ne sens plus rien, même plus le froid. Tout est blanc, je me sens partir et je m’apaise, je ne saurais dire combien de temps. Le froid revient, plus intense, il me brûle la peau. Je perçois des sons que je parviens à identifier : des voix, des cris, des bruits de pas. On me transporte. La lumière blanche revient, la chaleur aussi, quelqu’un me tient la main. Je suis encore trop faible, je n’ose pas ouvrir les yeux.

 
 
Conçu par Océan spécialement pour Imagine.
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