Citations du moment :
«Si les soucoupes proviennent d’une autre planète, pourquoi leurs pilotes n’ont-ils pas tenté d’entrer en contact avec nous au lieu de tourner en rond autour des contrées désertiques ?»
[ Woody Allen ]
Imagine

Effets indésirables : Chapitre 1

Titre : Effets indésirables
Auteur : Marita (marita42@voila.fr)
Catégorie : UST Sam/Jack (big time), humour, drame, enfin un peu tout je crois. A classer en PG-13, disons (ne prenons pas de risques).
Disclaimer : ils sont pas à moi, je ne touche rien, yadda yadda…
Résumé : lors d’une mission, Sam accepte une étrange boisson sans trop savoir ce que c’est…et s’en repend. Moralité : toujours demander à Daniel de traduire les commentaires avant de boire quoi que ce soit.
Note de l’auteur : je n’avais pas l’intention d’écrire cette fic, j’en avais déjà suffisamment à terminer, mais bon, elle s’est un peu imposée. Ça arrive, des fois. J’espère que vous l’aimerez. Moi, je me suis bien amusée à l’écrire.
Feedbacks toujours plus que bienvenus of course.
Bonne lecture !
 
 
 
 
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Sam referma vivement la porte avant de s’y appuyer, laissant sa tête retomber en arrière contre le froid panneau de métal. Elle soupira et se mit à la recherche de l’interrupteur, tâtonnant dans le noir jusqu’à ce qu’elle le trouve. Quand ses doigts rencontrèrent enfin ce qu’ils cherchaient, elle cligna des yeux, éblouie par le brusque flot de lumière crue émanant du néon. Elle colla alors son oreille contre la porte et se concentra sur les sons provenant du couloirs, tout en tâchant d’ignorer le bruit sourd des battements de son cœur. Elle resta là à écouter attentivement cinq bonnes minutes, puis, n’ayant rien entendu de suspect, elle laissa échapper un long soupir et se laissa glisser au sol où elle s’assit, et ferma les yeux un instant. Lorsqu’elle les rouvrit, elle fit le tour de la pièce du regard, réalisant alors réellement dans quelle situation elle se trouvait – et jura.
 
C’était vraiment stupide. A ce moment précis, elle se sentait tout à fait idiote, mais elle n’avait pas trouvé d’autre solution pour régler son « problème ». C’est pourquoi elle se retrouvait à présent là, assise par terre dans un des innombrables débarras du SGC, dans le but de ne pas se retrouver seule avec son supérieur hiérarchique direct, un certain colonel Jack O’Neill.
 
 
Tout avait commencé moins d’une semaine auparavant, lors d’une mission sur P4F-639. SG-1 y avait été chaleureusement accueilli par les habitants, qui n’étaient certes guère avancés d’un point de vue technologique, mais très amicaux et enthousiastes à l’idée de se faire de nouveaux amis. Sam était elle aussi assez enthousiaste, quoique pour d’autres raisons : le MALP avait en effet révélé la présence d’une grande quantité de divers minéraux en sous-sol, et elle espérait pouvoir obtenir l’accord des habitants pour exploiter quelques gisements particulièrement prometteurs. Malheureusement, les négociations avaient été fortement ralenties par des problèmes de langue, les Reelnak’ti ne parlant ni anglais, ni aucun dialecte goa’uld ou jaffa, mais uniquement une langue qui, selon Daniel, présentait quelques vagues similitudes avec une langue parlée sur Terre dans l’Antiquité en Mésopotamie. Le jeune archéologue avait beau être un linguiste particulièrement doué, ce dialecte lui avait donné du fil à retordre, et il lui avait fallu plusieurs longs entretiens avec le chef du petit groupe de diplomates locaux pour parvenir à comprendre la structure de la langue et extraire un vocabulaire de base suffisant pour communiquer l’essentiel.
Une fois cette tâche accomplie, les choses s’étaient accélérées. Oui, les habitants connaissaient l’existence des gisements, et non ils ne voyaient aucun inconvénient à partager ces ressources naturelles avec leurs nouveaux amis, pensez-vous, c’était bien naturel, eux-mêmes n’en avaient guère l’utilité, etc. Tout cela avait achevé de rendre le colonel particulièrement joyeux, pour une fois que des négociations se passaient sans problème, et de fil en aiguille, au bout de quelques jours les 4 membres de l’équipe faisaient figure de vieux amis pour toute la population. Au bout du compte, le « Président », comme l’appelait Jack, les avait gentiment conviés à un genre de banquet pour sceller officiellement cette nouvelle alliance. Les principaux dignitaires Reelnak’ti avaient rejoint les négociateurs et SG-1 dans une grande salle de réception décorée de fleurs et de bougies, où tous avaient pris place autour d’une immense table de bois massif sculptée de fins motifs ornementaux (qui avait bien sûr fait l’admiration de Daniel, tandis que Jack, comme toujours, s’intéressait davantage au contenu de son assiette). Le « Président » avait alors fait un discours, traduit « en gros » par Daniel, qui s’était fait un devoir de traduire du mieux qu’il pouvait la réponse de Jack. Tout le monde avait applaudi avec force sourires et hochements de tête satisfaits, et la fête avait commencé.
Un groupe de jeunes gens s’était installé pour jouer de la musique dans un coin, tandis que serveurs et serveuses faisaient leur apparition, chargés de lourds plateaux de victuailles en tout genre et de grandes amphores, remplissant généreusement verres et assiettes. Et tout s’était passé le mieux du monde jusqu’à ce que le repas touche à sa fin. Une jeune femme s’était alors approchée de Sam, une coupe entre les mains, et la lui avait tendue en souriant tout en lui expliquant quelque chose dans sa langue. Comme Daniel était occupé à discuter avec son voisin, Sam n’avait pas osé le déranger pour lui demander de traduire. C’avait été sa seule – et monumentale – erreur.
 
 
 
Flash-back : 2 jours plus tôt, planète P4F-639 :
        
         Sam jeta un œil en direction de Daniel : le jeune homme était en grande conversation avec son voisin de table, un homme d’âge mûr à l’air imposant qui de toute évidence n’était pas le genre d’homme qu’on interrompt en pleine discussion. Elle reporta donc son attention sur la jeune femme qui tenait toujours sa précieuse coupe, et lui sourit.
–Bon, je n’ai aucune idée de ce que vous venez de dire, mais je vous remercie, lui dit-elle, bien que son interlocutrice n’en comprît pas un mot.
Elle accepta la coupe et la porta à ses lèvres. La boisson était un peu acide, mais on avait visiblement ajouté pas mal de sucre pour la rendre plus agréable. Le résultat était tout à fait buvable, et de toute évidence non alcoolisé. Sam vida donc la coupe en quelques gorgées et la reposa.
–Merci beaucoup, c’était très…
Elle s’interrompit en voyant l’expression de totale stupéfaction avec laquelle la jeune femme la regardait. Celle-ci rougit jusqu’aux oreilles et s’éloigna vivement pour aller murmurer quelque chose à l’oreille d’une de ses compagnes, laquelle ouvrit de grands yeux avant de se mettre à palabrer d’un air affolé. Remarquant cette agitation soudaine, le voisin de Daniel leur demanda ce qui se passait (ou c’est ce que Sam supposa, étant donné qu’elle ne comprenait pas un traître mot de ce qui se disait). Les femmes répondirent en balbutiant et en rougissant de plus belle, et Sam eut le sentiment désagréable qu’elle était sur le point d’apprendre une très mauvaise nouvelle.
Elle ne s’était pas trompée. Après quelques échanges entre les femmes, Daniel et son voisin, l’archéologue se tourna vers elle d’un air gêné.
–Qu’est-ce qui se passe, Daniel ? Pourquoi tout ce remue-ménage ? le pressa-t-elle.
–Eh bien, euh, d’après ce que j’ai cru comprendre… C’est assez embarrassant, en fait, commença-t-il.
–Daniel, crachez le morceau ! s’impatienta Jack, qui avait lui aussi un mauvais pressentiment dans cette affaire.
–Eh bien apparemment, Sam a bu une boisson traditionnelle qu’on offre aux femmes qui, euh… Enfin, aux célibataires, disons. C’est sensé les aider à trouver un mari.
–Comment une boisson pourrait-elle faire cela ? demanda Teal’c.
–Je crois que c’est un aphrodisiaque, avoua enfin Daniel en baissant les yeux.
Sam ouvrit de grands yeux horrifiés.
–Quoi ??
–Euh, c’est pas le pire, poursuivit le jeune homme.
–Pas le pire ? Vous vous fichez de moi ? Qu’est-ce qui pourrait être pire ?
–Il semble que ce soit si fort que les femmes n’en prennent généralement qu’une gorgée ou deux. Apparemment, ça serait suffisant pour…enfin, vous voyez.
–Et j’ai bu toute la coupe…murmura Sam, atterrée.
–Exact, acquiesça Daniel.
Jack se leva aussitôt.
–Bon d’accord, les enfants, fin de la fête. On rentre. Daniel, expliquez à nos amis que le major ignorait qu’il ne fallait pas tout boire, qu’on est désolés et qu’on reviendra une autre fois.
–Euh…d’accord.
Daniel balbutia rapidement quelques mots, qui furent accueillis par des hochements de tête compréhensifs. Le « Président » se leva et se fit un devoir de raccompagner ses hôtes jusqu’à la Porte, en présentant toutes ses excuses à Sam pour ce regrettable incident. Celle-ci lui répondit d’un sourire crispé avant de suivre ses compagnons (ou plutôt de les précéder, en fait, tant elle était pressée de rentrer) à travers la grande flaque bleue du vortex.
 
 
         A peine arrivée au SGC, elle se tourna vers Jack.
–Mon colonel, si vous permettez, j’aimerais me rendre immédiatement à l’infirmerie.
–Allez-y, major, approuva-t-il. Je me charge d’expliquer la situation au général.
–Merci, mon colonel.
Le général Hammond, qui arrivait tout juste en salle d’embarquement, eut à peine le temps de s’écarter pour éviter Sam qui, légèrement affolée, se dirigeait à grandes enjambées vers l’infirmerie.
–Major, qu’est-ce que…  ?
–Désolée, mon général, lui répondit-elle par dessus son épaule. C’est urgent. Le colonel O’Neill vous expliquera.
Là-dessus, elle partit en petites foulées sans se retourner, sous le regard médusé et un peu inquiet du général.
 
         Une demi-heure plus tard, c’est une Sam Carter au bord de la crise de nerf qui leva les yeux vers Janet Fraiser.
–Alors ?
–Eh bien, pour autant que je puisse en juger, à part votre état d’énervement avancé qui a fait grimper votre tension au plafond, tout m’a l’air normal, répondit Janet.
Sam ferma les yeux et laissa échapper un long soupir de soulagement.
–Merci. C’est ce que je voulais entendre, répondit-elle.
–Cela dit, je ne pourrai pas me prononcer définitivement avant d’avoir les résultats de votre prise de sang, reprit Janet.
–Bien sûr, acquiesça Sam, plus pour ne pas contredire son amie que par réelle conviction.
Elle allait bien, Janet venait de le dire. Elle ne se sentait absolument pas différente. Aucune envie particulière de sauter sur le premier venu (exception faite d’un certain colonel, mais ça, ça n’avait rien d’inhabituel). Ce fameux aphrodisiaque n’avait de toute évidence pas autant d’effet que ça, sinon elle aurait déjà…
Un jeune infirmier qui passait par là lui fit perdre le fil de ses pensées.
–Je ne pense pas avoir les résultats avant demain matin, donc d’ici là je vous suggère de… Sam ?
Janet s’interrompit et fronça les sourcils en observant son amie. Celle-ci, la tête légèrement penchée sur le côté, était en train de regarder avec un intérêt non dissimulé… le postérieur d’un infirmier !
–Major Carter ! s’écria Janet, indignée.
Sam sortit aussitôt de sa rêverie et reporta son attention sur son médecin, qui la considérait d’un œil sévère.
–Oubliez ce que je viens de dire. Je crois que vous n’allez pas si bien que ça, en fin de compte.
–Quoi ? Mais Janet, je n’ai rien fait ! protesta Sam.
–Vous vous fichez de moi ? Vous étiez en train de… Enfin, vous savez très bien ce que je veux dire, continua-t-elle, en baissant la voix pour que personne ne profite de cette conversation pour le moins embarrassante.
–Je crois qu’il serait plus sage que je vous garde à l’infirmerie.
–Janet, vous ne pouvez pas me faire ça ! supplia Sam. Je n’ai rien, je vous assure !
–Oh, vraiment ? Et comment expliquez-vous ce qui vient de se passer ?
–Euh… J’étais juste… Il avait une tâche sur son pantalon.
–Samantha ! Vous mentez encore plus mal que Daniel !
–Bon, d’accord, je suis peut-être un peu plus, euh… intéressée par l’anatomie masculine que d’habitude, mais je peux me contrôler, je vous assure, plaida Sam. Ecoutez, je vais rester à la base cette nuit, et si je ne me sens pas comme d’habitude, je rapplique illico. Ça vous va ?
Janet fronça les sourcils en réfléchissant, considérant Sam d’un œil méfiant.
–Bon, très bien, mais au moindre soupçon de commencement de quelque chose, je veux vous voir ici dans la seconde, est-ce que c’est clair ?
–Merci, Janet, répondit Sam avec un grand sourire en descendant d’un bond du lit sur lequel elle était perchée. Maintenant il faut que j’y aille, mon équipe m’attend.
–C’est ça, à plus tard, murmura Janet en la regardant quitter l’infirmerie, à demi rassurée.
 
 
 
 
Retour au présent
 
         Sam soupira en se remémorant les évènements qui avaient suivi cette visite à l’infirmerie. Elle avait passé la majeure partie du débriefing à ne surtout pas regarder le colonel, mais vu le côté embarrassant de sa situation, le fait qu’elle garde les yeux baissés n’avait pas semblé suspect. Après ça, elle s’était retirée dans son labo, où elle était parvenue à se concentrer sur son réacteur à naquaddah sans trop de problèmes étant donné qu’aucun beau mâle ne se trouvait à proximité. Elle en était même arrivée à penser que les effets de cette boisson n’étaient peut-être que très temporaires après tout. Jusqu’à ce que le colonel prenne la mauvaise idée de venir s’assurer qu’elle allait bien. Le simple fait de se trouver seule avec lui dans une pièce avait fait naître dans son esprit tout un tas d’idées absolument non appropriées à propos de son supérieur. Elle avait dû fermer les yeux pour chasser certaines images persistantes de son cerveau, et cela avait inquiété Jack. Qui en bon gentleman qu’il savait être parfois, s’était approché pour lui demander si elle se sentait bien, et avait fini par poser sa main sur son épaule quand elle n’avait formulé qu’une vague réponse inintelligible.
C’était là qu’elle était partie en courant. Pas la plus gracieuse des sorties, sans doute, et le pauvre Jack devait se demander ce qu’il avait fait pour la faire fuir, mais c’était ça ou lui sauter dessus. La dernière fois qu’elle avait essayé, il l’avait traînée de force à l’infirmerie (non sans avoir livré avec elle un intéressant combat au corps à corps au cours duquel… « stop ! » s’arrêta-t-elle. « ce n’est définitivement pas le moment de penser à ça ! »). Enfin bref, elle n’avait aucune envie de passer la nuit attachée à un lit (« sauf avec Jack… ummh… non ! non, non, non, mauvais, très mauvais »). Euh, donc, elle ne voulait pas finir à l’infirmerie sous l’œil réprobateur, ou pire, amusé, de Janet, en sachant que toutes les infirmières apprendraient à un moment ou à un autre quel était son problème, et que la rumeur aurait tôt fait de se répandre dans toute la base. Elle imaginait déjà les conversations de couloir et les regards en biais qu’une telle situation lui vaudrait, et elle n’avait vraiment pas besoin de ça. Elle était déjà bien suffisamment consciente des ragots qui circulaient à propos d’elle et de… « Non ! Ne pense pas à lui ! Pense à, euh…un Unas ! C’est ça ! Un grand Unas très moche avec un collier de dents autour du cou. Bien. On respire. Tout va bien. »
En bref, sa situation était assez désespérée. Elle ne pouvait tout de même pas rester indéfiniment dans cet espèce de placard à balais, sans compter qu’une femme de ménage risquait fort de venir l’en déloger à un moment ou à un autre, ce qui ne manquerait pas de soulever l’intéressante question de sa présence dans un tel endroit. Elle était décidée à ne pas retourner voir Janet avant le lendemain, pour avoir les résultats de sa prise de sang. Elle ne pouvait pas non plus prendre le risque de retourner à son labo, au cas où Jack reviendrait (ou s’il s’y trouvait toujours, trop sidéré par son départ pour réagir). Il lui restait donc fort peu d’alternatives, et aucune n’était particulièrement réjouissante.
 
         Cinq minutes plus tard, Sam ouvrit prudemment la porte du réduit et s’assura que personne ne venait dans cette direction avant de quitter son refuge. Jetant un regard à droite et à gauche, elle s’aventura jusqu'au milieu du couloir, prit une grande inspiration et releva la tête pour adopter un air dégagé. Puis elle se mit en route d’un pas tranquille, en tâchant d’avoir l’air le plus normal possible. Elle croisas deux jeunes lieutenants de SG-8, qu’elle salua cordialement avant de passer son chemin. Arrivant enfin devant l’ascenseur, elle pria pour que personne ne s’y trouve et glissa sa carte dans le lecteur prévu à cet effet. Quand les portes s’ouvrirent, elle soupira de soulagement en constatant que le seul occupant était le sergent Wyman, une petite brune à lunettes plutôt timide qui travaillait à la cafétéria. Elle lui sourit et enfonça le bouton du niveau 12, décidée à profiter de ces quelques secondes de calme. Le sergent sortit au niveau 14, ce qui lui permit de se détendre davantage encore jusqu’à ce que l’ascenseur parvienne à destination. Un groupe de SF attendait l’appareil au niveau 12, et elle remercia le ciel de ne pas avoir à aller plus haut. Tous s’écartèrent pour la laisser sortir avant de monter. Sam soupira en voyant les portes se refermer et tourna les talons.
Trente secondes plus tard, elle frappait à la porte de Teal’c. Le Jaffa vint lui ouvrir et parut surpris de la trouver là.
–Major Carter ?
–Teal’c, je demande l’asile.
Teal’c leva un sourcil, l’air confus.
–Euh, est-ce que je peux entrer ? reformula-t-elle.
–Bien sûr, répondit-il en se poussant pour la laisser passer.
–Merci, vous me sauvez la vie.
–En quoi votre vie est-elle menacée ?
–En fait, j’essaye surtout de me protéger de moi-même, pour l’instant. C’est un peu compliqué et, euh…embarrassant, ajouta-t-elle devant l’air perplexe de son ami.
–Cette boisson aurait-elle réellement des effets sur vous ?
–Il semblerait, oui, pour mon grand malheur.
–Dans ce cas, n’allez-vous pas essayer de me séduire ? demanda Teal’c de son ton toujours égal.
Sam ne put s’empêcher de sourire.
–Ne le prenez pas mal, Teal’c, mais vous n’êtes pas vraiment mon genre. Et puis vous êtes un peu comme un grand frère pour moi, alors…
–Je vois, répondit le Jaffa. Je suis très honoré que vous me considériez comme un frère. Je ferai de mon mieux pour vous protéger contre vous-même.
–Merci. Je savais que je pouvais compter sur vous.
–Que dois-je faire ?
–Ben, en fait, euh… Rien, sinon m’autoriser à rester ici pendant quelque temps. Si ça ne vous embête pas, bien sûr.
–Pas du tout. Voulez-vous méditer avec moi ?
Sam jeta un œil sur les dizaines de bougies allumées un peu partout dans la pièce et sourit.
–Pourquoi pas ? ça ne me ferait pas de mal de me détendre un peu.
Teal’c approuva d’un hochement de tête et ils s’installèrent l’un à côté de l’autre sur des coussins.
 
« Bon, tâchons de nous détendre. Je suis avec Teal’c, à l’abri, tout va bien. Je médite. … … Mince, comment est-ce qu’on fait pour méditer ? »
Elle ouvrit un œil et jeta un regard à son ami, mais celui-ci semblait déjà « ailleurs », et elle n’osa pas le déranger pour lui demander sa technique. Elle referma donc les yeux et réfléchit. Elle savait que Daniel venait parfois méditer avec Teal’c, donc a priori c’était humainement possible. Le problème était qu’elle était loin de posséder le petit côté « mystique-zen-grand-sage-illuminé-machin-bidule-tout-ça » de Daniel. Elle sourit à son propre choix de termes. Ça ressemblait furieusement à un Jack O’Neillisme. Dommage qu’il ne soit pas là, il aurait sûrement été ravi de constater toute l’influence qu’il avait sur elle.
« Il n’y a pas que de l’influence qu’il a sur moi », songea-t-elle. « Sur moi… umh…intéressant… ». Des images très peu catholiques commencèrent à se former dans son esprit. Elle rouvrit brusquement les yeux. « C’est pas vrai ! Je ne vais quand même pas passer la journée à ne penser qu’à ça ! Bon, on se calme et on reprend. »
Elle ferma à nouveau les yeux, respira à fond et tâcha de se concentrer. « Bon, pensons à…euh…un endroit calme. C’est ça. Euh…une plage. Pourquoi pas ? Une belle plage de sable fin, la mer est turquoise, le soleil brille, tout est calme. Bien. » Elle sourit en visualisant la scène, sentant ses muscles se détendre un par un. Sa respiration devint plus lente et plus régulière. Elle se sentait bien. Tout était calme, silencieux, repo…
 
Toc-toc !
 
Elle rouvrit les yeux, furieuse. Teal’c avait lui aussi été tiré de sa méditation par les coups frappés à la porte, et même s’il n’était pas du genre démonstratif, Sam devina qu’il n’était pas ravi non plus de cette interruption inopportune. Il se leva néanmoins et alla ouvrir.
–Hé, Teal’c, qu’est-ce que vous faites de beau ?
Sam se figea en entendant cette voix. « Oh non, pas lui. Il ne faut pas qu’il me voie. Non, en fait, il ne faut surtout pas que moi je le voie. Bon, on reste calme, Sam. C’est rien. Teal’c va sûrement le mettre à la porte. »
–Le major Carter et moi essayons de méditer, répondit le Jaffa à la question du colonel.
–Carter est avec vous ? …Et elle médite ??
Il avait l’air surpris. Comme si elle ne pouvait pas méditer ! Pas besoin d’avoir fait de grandes études à Jaffa-University pour ça ! Non mais sans blague !
–En effet, répondit laconiquement Teal’c.
« Exactement ! J’aurais pas dit mieux ! »
–Ah. Et, euh…on peut savoir pourquoi ?
« Parce que. »
–Je lui ai proposé de se joindre à moi et elle a accepté.
« Exact. Bien répondu. »
–D’accord, mais la méditation, c’est pas vraiment son truc, d’habitude. Elle va bien, vous êtes sûr ? insista O’Neill.
« Oui, on ne peut mieux, et elle ira même encore mieux quand vous serez parti, loin, ailleurs, plus là, et puis qu’est-ce que vous faites encore là, d’ailleurs ? Vous n’avez rien d’autre à faire ? »
–Elle m’a l’air en parfaite santé, répondit le Jaffa.
ça vous dérange si je vérifie ?
« Quoi ?? Oui, ça le dérange ! Enormément ! Dites-lui, Teal’c ! » pria-t-elle intérieurement.
–Non, répondit-il en s’effaçant pour laisser entrer Jack.
« Oh mon Dieu. Je suis morte. Il faut que je me contrôle. Sois forte, Sam. Tu peux le faire. »
 
–Carter ? ça va ?
Sam ouvrit un œil, puis les deux, et les leva vers son supérieur avec un sourire nerveux.
–Très bien, mon colonel.
–Ah. Parce que vous êtes partie en courant tout à l’heure, et je ne savais pas où vous étiez passée et, euh, enfin, je m’inquiétais un peu.
« Il s’inquiétait ! Pour moi ! Comme c’est chou ! »
–Désolée, mon colonel, je, euh…une envie pressante.
–Oh !
« Oh, bien joué, Sam ! Rien de tel pour le déstabiliser et le faire taire. »
–Oui, et ensuite je me suis dit que vous étiez sûrement parti et alors je suis venue trouver Teal’c et il m’a proposé de méditer avec lui, et j’ai pensé que c’était une bonne idée, et voilà.
–Bien. Alors, euh, tout va bien ? Ce truc que vous avez bu ne vous a pas…enfin…
–Non, pas du tout. Leur aphrodisiaque n’est sûrement pas très au point.
–Bon. Tant mieux.
–Oui.
–Bon, alors, si vous allez bien, je vais vous laisser, euh…méditer.
Sam hocha la tête et sourit. Il n’avait pas l’air très convaincu, mais il tourna néanmoins les talons et se dirigea vers la porte. Elle ne put alors s’empêcher de profiter de la vue que lui permettait la situation, et se mordit la lèvre pour ne pas l’appeler et lui dire de rester. Malheureusement, il se retourna précisément à ce moment-là et surprit son regard. Jack O’Neill n’était certainement pas du genre à rougir comme une fillette, mais le regard très appuyé de sa subordonnée sur une certaine partie de son anatomie lui fit monter le rouge aux joues.
–Major ! Je crois que vous devriez retourner voir le doc ! s’exclama-t-il.
–Mon colonel…
–Ah ! Ne m’obligez pas à vous y emmener de force !
Il fronça les sourcils en voyant une lueur lubrique passer dans les yeux de la jeune femme à cette idée.
–Carter !
–Je n’ai rien dit !
–Mais vous l’avez pensé, c’est pareil ! Alors soit vous filez à l’infirmerie, soit c’est Teal’c qui vous y traîne !
–Je vous assure que ce n’est pas utile, mon colonel. Je me contrôle parfaitement tant que vous ne… Enfin, ce que je veux dire, c’est que, euh…
–Peu importe. Vous n’êtes pas dans votre état normal, et il serait beaucoup plus sûr que le doc vous garde à l’œil.
–Mon colonel, s’il vous plaît ! implora-t-elle en levant vers lui des yeux suppliants.
–Non, Carter, et inutile de me faire vos yeux de cocker, ça ne marche pas.
Sam soupira bruyamment et se leva avec une moue.
–Passez devant, major, on vous suit.
 
–Sam, qu’est-ce qui se passe ? demanda Janet en voyant arriver son amie escortée par Teal’c et le colonel, qui en cet instant faisaient plus figure de gardes du corps que d’amis compatissants.
Sam se contenta de hausser les épaules et s’assit sur un des lits.
–Le colonel trouve que je devrais vous tenir compagnie.
Janet tourna un regard interrogatif vers Jack.
–Je ne voudrais surtout pas remettre en cause vos compétences, doc, mais il me semble que vous avez mal jugé de l’état du major, lui déclara celui-ci, en jetant un regard en biais à sa subordonnée.
–Comment ça ? Sam ?
Carter fixa le sol, évitant soigneusement le regard accusateur de son amie, qui avait pris son ton menaçant de « super doc » (ou « despote napoléonique », comme disait le colonel).
–Je vous assure qu’elle n’est PAS dans son état normal, poursuivit Jack. Pour son bien et, euh…celui d’autres personnes, je suggère que vous la gardiez ici, au moins pour cette nuit.
A ces mots, Sam releva la tête et fusilla son supérieur du regard. Celui-ci ne se laissa pas impressionner.
–Et n’essayez pas de filer en douce, major. Sinon je vous colle deux gardes aux baskets pour s’assurer que vous ne quittez pas l’infirmerie. C’est clair ?
–Limpide.
–Bien. Et, docteur ?
–Oui ?
–Si j’étais vous, je dirais à ce charmant petit infirmier, là-bas, de garder ses distances. Simple précaution, ajouta-t-il.
–D’accord. Ne vous inquiétez pas, je la tiens à l’œil.
–Merci.
Sam leva les yeux au ciel et se laissa tomber sur le lit, les yeux fixés au plafond, les bras croisés sur la poitrine. Elle ignora superbement les salutations du colonel et de Teal’c et ne leur adressa même pas un regard quand ils quittèrent l’infirmerie.
–Allons, Sam, ils s’inquiètent pour vous, c’est tout, tempéra Janet.
–Ouais, tu parles !
–Quoi qu’il en soit, il me semble que le colonel a raison. Je n’aurais même pas du vous laisser partir tout à l’heure. Alors cessez de bouder et mettez-vous au lit.
–Janet, je ne suis pas malade ! s’écria Sam. Que voulez-vous que je fasse dans un lit ?
–Et bien vous pourriez essayer de vous calmer, pour commencer, et de vous reposer un peu. Je crois que vous en avez grand besoin.
Sam soupira bruyamment mais obtempéra néanmoins. Lorsque Janet prenait ce ton-là, il était de toute façon inutile de chercher à discuter.
 
 
Après une soirée horriblement longue passée à compter et recompter les multiples trous et fissures ornant le plafond de l’infirmerie, Sam avait supplié Janet de lui donner quelque chose pour dormir. Celle-ci, jugeant l’idée plutôt bonne, avait accepté sans problème, ce qui permit à Sam de passer une nuit tranquille de repos. Le lendemain matin, elle se réveilla relativement tard, la bouche pâteuse et l’esprit encore embrumé par le somnifère.
–Hé, la belle au bois dormant ! la salua Janet en la voyant ouvrir les yeux.
Sam lui adressa un vague sourire.
–Comment est-ce que vous vous sentez, ce matin ?
–Je vous dirai ça dès que mon cerveau se sera remis à fonctionner. Bon sang, les somnifères ont toujours un effet désastreux sur moi !
–Compte tenu de votre état d’hier, ce n’est peut-être pas plus mal que vous soyez un peu groggy, répondit Janet.
Sam poussa un grognement inarticulé pour toute réponse.
 –Oh non, s’il vous plait, ne me dites pas que vous boudez encore !
–J’en sais rien, cerveau HS, moi pas pouvoir penser.
Janet sourit.
–Est-ce qu’un petit-déjeuner vous ferait plaisir ?
Sam réfléchit un instant à la question, interrogeant mentalement son estomac avant de décider.
–Je crois qu’un café et des pancakes seraient les bienvenus, répondit-elle finalement.
–D’accord. Je vais voir si je peux vous trouver ça.
–Merci.
 
Un copieux petit-déjeuner et une longue douche plus tard, c’est une Sam Carter beaucoup plus réveillée et beaucoup mieux disposée qui regagna l’infirmerie. Le Dr Fraiser l’attendait, une feuille de papier à la main.
–Sam, je viens d’avoir les résultats de vos examens.
Sam sentit soudain son entrain retomber d’un coup.
–Oh. Alors ? demanda-t-elle, d’une voix qu’elle voulait désinvolte mais où perçait une pointe d’angoisse.
–Le taux de certaines hormones présentes dans votre organisme est anormalement élevé, notamment en ce qui concerne l’adrénaline et les hormones sexuelles, ce qui ne me surprend pas vraiment. La question est : ce taux va-t-il revenir bientôt à la normale ?
Sam soupira.
–Comment savoir ?
–Est-ce que les gens de cette planète ne peuvent pas nous renseigner sur la durée des effets de leur décoction ?
–Si, sûrement, mais d’habitude personne n’en absorbe autant d’un coup, alors je suppose que ça risque de durer plus longtemps dans mon cas.
–On pourrait quand même demander à Daniel d’aller leur poser quelques questions. Ça pourrait nous apprendre des choses utiles.
–Très bien. Est-ce que je peux sortir d’ici, en attendant ?
Janet hésita un moment.
–Je ne sais pas, Sam. Vous avez l’air plus calme ce matin, c’est vrai, mais ça ne veut pas dire que les effets de ce produit se soient totalement dissipés.
–Je sais, rassurez-vous, je n’ai pas l’intention d’aller courir après les infirmiers, je veux juste pouvoir retourner travailler. J’ai un projet en cours et j’aimerais bien pouvoir avancer un peu. Croyez-moi, la meilleure façon de garder mon calme pour moi, c’est de travailler. Tant que personne ne vient me déranger, il n’y a pas de danger.
Janet soupira.
–Très bien, vous avez sans doute raison. De toute façon, je préfère que vous soyez dans votre labo à travailler plutôt qu’ici à bouder dans votre coin.
–Merci, Janet !
–De rien. Disparaissez avant que je ne change d’avis. Je vais voir le général pour lui demander si Daniel peut aller à la pêche aux informations pour moi.
–D’accord. A plus tard.
 
 
De légers coups frappés à la porte tirèrent Sam de l’état d’extrême concentration dans lequel elle était plongée. Un peu perdue, elle leva les yeux et croisa le regard interrogateur de Daniel.
–Je vous dérange ? demanda le jeune archéologue en entrant.
–Non, non, en fait j’avais besoin de faire une pause, répondit-elle en abandonnant son réacteur et ses schémas. Alors, quoi de neuf ?
–Eh bien, je viens de rendre une petite visite à nos amis Reelnak’ti.
–Quoi ? Vous êtes déjà revenu ? Mais Janet vient juste de…
Sam s’interrompit et ouvrit de grands yeux en consultant sa montre.
–Ouah ! Je n’avais pas conscience de travailler depuis si longtemps ! Bon, euh, alors, est-ce que vous avez appris quelque chose d’intéressant ?
–Pas vraiment, non, je suis désolé. Son’ti, le chef des négociateurs, m’a seulement assuré que les effets de cette boisson étaient temporaires, mais vu la quantité que vous avez ingurgité, il ignore combien de temps vous serez…indisposée.
Sam leva les yeux au ciel.
–Super, ça m’aide bien ! Et au fait, est-ce qu’ils ont toujours pour habitude d’offrir des aphrodisiaques à leurs invités ?
–Non, je ne crois pas. Cette jeune femme a pensé vous aider en vous en proposant. Et comme vous avez accepté…
–Daniel, je n’ai rien compris à ce qu’elle m’a dit ! ça aurait tout aussi bien pu être un produit miracle contre la chute des cheveux ou pour augmenter le QI, pour ce que j’en sais !
–Oui, enfin bref, toujours est-il qu’elle est sincèrement désolée de vous avoir mise dans l’embarras, et elle vous renouvelle ses excuses.
–Très aimable à elle.
–Sam ?
Daniel la considérait d’un œil désapprobateur. Elle soupira.
–Ecoutez, Daniel, je crois qu’effectivement elle ne pensait pas à mal, mais elle aurait peut-être pu simplement se mêler de ses affaires. Je ne lui avais rien demandé. Ou bien est-ce que c’est écrit « célibataire désespérée » sur mon front ?
Daniel sourit.
–Bien sûr que non. Seulement d’après ce que j’ai compris, toutes les femmes mariées portent leurs cheveux longs et attachés en tresses, chez eux. Comme ce n’est pas votre cas, elle a supposé que vous étiez célibataire. Et comme le célibat est apparemment conçu comme un grand malheur chez ces gens, elle a réellement voulu vous rendre service.
–En me faisant boire un aphrodisiaque ? C’est ça leur façon de trouver l’âme-sœur ?
–Et bien en fait, ils prêtent des pouvoirs très particuliers à cette boisson. Elle est préparée par des prêtresses qui sont les seules à en connaître la composition, et elle permettrait de révéler les désirs cachés du cœur de celle qui la boit.
–Les désirs cachés ? Vous êtes sérieux ?
Il haussa les épaules.
–Eux ont l’air d’y croire, en tout cas.
–Bon, alors il va falloir que je me surveille. Je ne voudrais pas révéler à trop de monde les « désirs cachés de mon cœur » ! conclut Sam d’un ton sarcastique.
–Pourquoi ? Ils sont si terribles que ça ? demanda Daniel, une lueur malicieuse dans le regard.
Sam lui adressa une grimace.
–Et même pires ! Bon, allez, maintenant que vous m’avez si brillamment remonté le moral, laissez-moi me remettre au travail. Au moins ici je ne risque pas de laisser libre cours à mes désirs cachés, ou je ne sais quoi.
Daniel sourit.
–D’accord. A plus tard, alors.
–Bye. 
 
 
         Le lendemain matin, après avoir passé une nuit de plus à la base pour plus de sécurité, Sam s’attabla devant un copieux petit-déjeuner. Elle avait à peine eu le temps de toucher à son premier toast que Jack vint la rejoindre.
–Est-ce que je peux m’asseoir avec vous sans que vous me sautiez dessus ou que vous partiez en courant, aujourd’hui ? demanda-t-il en la regardant avec méfiance.
Elle sourit.
–Je crois que vous ne risquez plus rien, mon colonel.
–C’est ce que vous avez dit la dernière fois, et on sait tous les deux que c’était faux.
Sam rougit légèrement et soupira.
–C’était il y a deux jours. Ça va maintenant, je vous assure.
Il hésita une seconde, puis se décida à poser son plateau et s’assit face à elle.
–Alors, comment ça va ? demanda-t-il. Ça fait une éternité que je ne vous ai pas vue.
–Simple précaution, répondit-elle. D’après Daniel, ce truc que j’ai bu aurait le pouvoir de « révéler les secrets désirs de mon cœur », ou quelque chose comme ça. Je ne voulais pas risquer de…enfin, vous savez, bafouilla-t-elle en baissant la voix et en évitant son regard.
Jack s’agita nerveusement sur son siège.
–Ah, euh, oui, bien sûr. Enfin bon, quoi qu’il en soit, c’est terminé, maintenant. N’est-ce pas ?
–Je pense, oui. Janet m’a fait une nouvelle prise de sang ce matin, pour s’assurer que toutes mes hormones avaient bien retrouvé un taux normal.
–Bon. Alors si tout va bien, vous pourrez reprendre le service actif ?
–Si j’ai la bénédiction de Janet, oui.
Il parut soulagé.
–Bon, tant mieux. Je commençais presque à m’ennuyer de votre blabla scientifique, ajouta-t-il avec un petit sourire, en attaquant son bol de Fruitloops.
Sam lui répondit par un de ces sourires électriques dont elle avait le secret, et Jack sentit des papillons danser dans son estomac à cette vue. Elle lui avait vraiment manqué.
 
 
         Daniel avait passé toute la matinée à plancher sur une traduction pour SG-8 qui avait ramené d’intéressants artefacts de PM8-642, sans parvenir à en déchiffrer l’écriture. Vers 11h, il décida de s’accorder une pause et quitta son bureau pour se dégourdir un peu les jambes. Sans l’avoir prémédité, il se retrouva un niveau plus bas, devant le labo de Sam. « Tiens, tiens, on dirait que mon inconscient me joue des tours, songea-t-il. Bon, j’avoue, je suis un peu inquiet pour elle. Maintenant que je suis là, autant aller voir comment elle va. »
Il toqua à la porte et entra, mais ne vit personne. Les lumières étaient allumées et l’ordinateur de Sam était en marche, elle ne devait donc pas être bien loin. « Peut-être qu’elle fait une pause, elle aussi ». Il était sur le point de sortir, lorsqu’un objet insolite retint son regard. Une chaussure. Par terre. Une ranger de Sam, plus précisément. Intrigué, Daniel s’avança. Ça ne ressemblait pas à Sam d’enlever ses rangers au travail, et encore moins de les laisser traîner dans son labo. Il contourna le bureau et se figea. Là, par terre, ne se trouvait pas seulement une ranger, mais également sa propriétaire. Etendue sur le sol, inconsciente. Daniel se précipita sur le téléphone.
–Ici Daniel Jackson, je suis dans le labo du major Carter, niveau 19. Il me faut une équipe médicale de toute urgence !
 
Cinq minutes plus tard, deux infirmiers arrivèrent en courant, accompagnés du Dr Fraiser.
–Daniel, qu’est-ce qui s’est passé ? interrogea celle-ci en commençant aussitôt à ausculter Sam.
–Je ne sais pas. Je l’ai trouvée comme ça quand je suis arrivé. Est-ce qu’elle va bien ?
–Pas terrible. Bon, il faut la transporter à l’infirmerie. Messieurs, aidez-moi à la mettre sur le brancard.
Les infirmiers s’exécutèrent puis gagnèrent l’infirmerie au pas de course, suivis de Janet et Daniel.
 
 
         Dix minutes plus tard, Jack arriva en courant à l’infirmerie.
–Daniel ! aboya-t-il dès qu’il vit le jeune homme. Qu’est-ce qui se passe ?
–C’est Sam. Elle a fait un malaise, ou quelque chose comme ça.
–Quoi ? Comment va-t-elle ?
–Elle va mieux, maintenant, répondit Janet en les rejoignant. Son état s’est stabilisé, mais je suis quand même inquiète. Elle a une forte fièvre.
–Mais elle allait bien, ce matin. J’ai pris mon petit-déjeuner avec elle, elle avait l’air en forme.
–Je sais, son état a dû se dégrader rapidement, sinon elle serait venue me voir. Je ne comprends pas ce qui s’est passé. Je vais aller bousculer un peu les gars des labos pour avoir le résultat de sa dernière prise de sang.
–Est-ce qu’on peut faire quelque chose ? demanda Daniel.
–Rester près d’elle, au cas où elle se réveille. Mais en toute franchise, je doute que ça arrive, répondit Janet d’un air morose, avant de s’éloigner à petits pas rapides.
Daniel et Jack échangèrent un regard consterné et prirent chacun une chaise qu’ils avancèrent près du lit de Sam.
La jeune femme, dont les joues inhabituellement rouges contrastaient avec la blancheur immaculée des draps, était reliée à un moniteur cardiaque qui émettait des bips réguliers, et une perfusion était fichée dans son bras. Des gouttes de sueur perlaient à son front, et l’expression de son visage était tout sauf sereine. Jack la considéra un long moment en silence, l’inquiétude creusant de profondes rides sur son front.
–Jack, je suis sûr que ça va aller, tenta de le rassurer Daniel, bien que lui-même ne se sentit guère plus confiant. Sam est forte, elle a connu pire et elle s’en est toujours tirée. Si ça se trouve, c’est seulement une mauvaise grippe.
–Daniel, on est en juin ! Il n’y a pas de grippe à cette époque de l’année.
–C’était juste un exemple. Ça pourrait être n’importe quelle maladie on ne peut plus banale.
–Ouais, ça serait quand même une drôle de coïncidence qu’elle chope je ne sais quel virus juste maintenant, non ? Vos copains de P4F-machin-chose ne vous ont pas dit qu’il y avait des effets secondaires à ce fameux truc qu’elle a bu ?
–Non, ils n’ont rien évoqué de tel. Mais il est possible que Sam réagisse différemment, pour une raison quelconque.
–Mouais. Espérons que le doc trouvera vite ce que c’est. J’ai un mauvais pressentiment, dans cette histoire.
 
Lorsque Janet revint, Jack était seul au chevet de Sam, perdu dans ses pensées.
–Daniel est parti ? demanda-t-elle en s’approchant.
Jack sursauta au son de sa voix, ce qui fit sourire le jeune médecin.
–Euh, oui, il est allé prévenir Teal’c, répondit-il. Alors, doc, quoi de neuf ?
Janet prit la chaise laissée vacante par Daniel et s’assit en soupirant.
–J’ai les résultats de sa dernière prise de sang, mais je ne sais pas trop quoi en penser. C’est très curieux. Les taux d’hormones qui avaient grimpé sont revenus à la normale, ou à peu près, mais le nombre de ses lymphocytes est très élevé. En fait, son organisme semble réagir à une intrusion.
–Un virus ?
–Non, aucun virus ni agent infectieux d’aucune sorte n’ont été détectés. Mais il y a autre chose…ça ne va pas vous plaire.
Jack fronça les sourcils et prit une profonde inspiration, s’attendant au pire.
–Dites-moi.
–Eh bien, comme vous le savez, Jolinar a laissé une protéine spécifique dans le sang de Sam. Jusqu’à maintenant, ça n’avait jamais posé de problème. Mais aujourd’hui, il semble que son organisme se soit mis à réagir à cette protéine. Il la rejette, un peu comme lors d’une greffe.
–Quoi ? Mais pourquoi ? Après tout ce temps, ça n’a pas de sens !
–Je sais, c’est incompréhensible. Sauf si un ingrédient spécifique du produit qu’elle a bu a déclenché cette réaction.
–Mais comment ? Quel genre de truc pourrait faire ça ?
–Eh bien, a priori, je dirais un truc genre goa’uld.
Les yeux de Jack se rétrécirent à deux fentes tandis que sa mâchoire se crispait.
–Doc, qu’est-ce que vous ne me dites pas ?
–On a retrouvé une protéine inconnue dans le sang de Sam. Mais en y regardant de plus près, je me suis aperçue qu’elle présentait des similitudes avec une autre protéine, que vous et moi connaissons bien : la trétonine.
–Quoi ?? Mais…
–C’est impossible, intervint Daniel, qui venait de revenir avec Teal’c. Les Reelnak’ti n’ont pas vu de Goa’uld depuis des centaines d’années. Et puis technologiquement, ils ne sont pas assez avancés pour mettre au point un produit comme la trétonine.
–Et pourtant, cette protéine est bel et bien là, répondit Janet en tapotant sa feuille d’analyses. Et elle a déclenché une véritable guerre civile dans l’organisme de Sam.
–Nos chers nouveaux amis ne sont peut-être pas aussi honnêtes qu’ils le prétendent, reprit Jack. Ils peuvent très bien être plus avancés qu’ils n’y paraissent et nous l’avoir caché.
–Pourquoi est-ce qu’ils auraient fait ça ? répondit Daniel. Ils ne nous connaissaient pas, ils n’avaient aucune raison de s’en prendre à nous.
–Pour ce qu’on en sait. Rien ne nous dit qu’ils ne sont pas de mèche avec un quelconque Goa’uld.
–Mais dans quel but est-ce qu’ils auraient infecté Sam ? Je veux dire, comment auraient-ils su qu’ils devaient s’en prendre à elle précisément ?
–J’en sais rien, mais je n’aime pas ça. Et je dis qu’on devrait aller leur rendre une petite visite. J’ai bien envie de leur demander ce qu’ils mettent dans leur potion magique.
–Ils ne vous le diront pas, Jack. Il n’y a que les prêtresses qui connaissent la composition de ce produit, et elles ne parlent pas aux hommes.
–Eh bien, pour une fois, elles feront une exception ! Carter est en train de mourir à petits feux, par leur faute, alors il me semble que le moins qu’ils puissent faire pour nous prouver leur bonne foi, c’est de nous donner un coup de main !
Daniel soupira mais acquiesça néanmoins.
–Très bien, je vais me préparer.
–Moi aussi, ajouta Teal’c.
–Bien. Moi je vais prévenir le général. Doc, vous voulez bien venir avec moi pour lui expliquer la situation ?
–Bien sûr, je vous suis, colonel.
 
 
 
         Un jeune homme, que Daniel présenta à ses compagnons sous le nom de Jal’nel, accueillit SG-1 à la Porte des Etoiles. Daniel se mit aussitôt en devoir de lui expliquer le but de leur visite, avec force gesticulations et mimiques pour être plus sûr de se faire comprendre. Le jeune homme hocha la tête et leur fit signe de le suivre dans un vaste bâtiment. Là, il expliqua la situation à un homme plus âgé, qui avait l’air d’occuper des fonctions importantes. Celui-ci s’approcha des trois Terriens et commença à discuter avec Daniel, sous l’œil de plus en plus agacé de Jack.
–Daniel, quel est le problème ? finit-il par demander, interrompant la conversation.
–C’est bien ce que j’avais prévu, soupira le jeune archéologue. Ils refusent de nous laisser rencontrer les prêtresses. Apparemment, elles vivent à l’écart de la société, un peu comme des religieuses cloîtrées. Les hommes n’ont pas le droit de les voir.
–Eh bien dites-leur qu’on fermera les yeux ! On se fiche de les voir, on veut juste leur parler !
Daniel reprit ses tractations houleuses avec le dignitaire Reelnak’ti, et finit par se tourner vers Jack et Teal’c.
–Bon, on est arrivés à une sorte d’arrangement, annonça-t-il. Une femme va nous accompagner au temple et nous servira à la fois de guide et de chaperon, si j’ai bien compris. En clair, elle s’assurera qu’on arrive bien à destination et elle fera les présentations avec les prêtresses.
–Eh ben voilà, on y arrive ! C’était pas si terrible que ça !
–Oui, euh, il y a juste une petite chose, ajouta Daniel.
Jack fronça les sourcils.
–Une « petite chose » ?
–Oh, c’est juste une formalité, vraiment ! Seulement, pour s’assurer qu’on ne retourne pas rendre visite aux prêtresses à l’occasion, ils doivent nous conduire au temple les yeux bandés.
–Les yeux bandés ? Vous plaisantez, j’espère !
–Jack, c’est la coutume. Ils nous font déjà un immense honneur en nous permettant de leur parler.
–Daniel, c’est hors de question. Je ne fais pas confiance à ces gens. Prêtresses ou pas, je ne vais nulle part si je ne sais pas où on m’emmène.
 
 
         Cinq minutes plus tard, Jack commençait sérieusement à regretter d’avoir cédé face à l’insistance de Daniel. Une vieille femme pas très commode les conduisait à travers la ville, ou du moins Jack supposait que c’était « à travers la ville », étant donné qu’il ne savait même pas quelle direction ils avaient prise en sortant du bâtiment. Leur « gardienne » lui tenait fermement le poignet et le tirait sans ménagements, ne prêtant aucune attention à ses protestations. Daniel et Teal’c suivaient en file indienne, chacun tenant celui de devant par les épaules, formant ce qui devait ressembler à une espèce de ridicule farandole.
–Je n’ai pas joué au petit train depuis la maternelle, maugréa Daniel. Je ne peut pas dire que ça m’aie manqué.
–Ah, ça, il fallait y penser avant de leur dire qu’une seule guide nous suffirait ! grogna Jack. Et arrêtez de me marcher sur les pieds !
–Désolé, je n’ai pas trop l’habitude de marcher sans voir où je vais.
–Mouais, ben on se demande à cause de qui on en est réduits à ça !
Daniel s’apprêtait à répliquer que leurs hôtes ne leur avaient pas vraiment laissé le choix, mais la vieille femme interrompit les deux hommes d’un sec rappel à l’ordre accompagné d’une secousse guère amicale au poignet de Jack.
–Eh, ça va, inutile de devenir violente ! protesta celui-ci.
–Jack, elle vient de dire qu’on est arrivés, expliqua Daniel. Il faut qu’on se taise, maintenant.
–Suffisait de le dire, grommela Jack en levant la main pour signifier à son « guide » qu’il avait compris et qu’il se tairait à présent.
Le petit groupe s’immobilisa un instant, et la vieille femme frappa quatre coups à une porte. Une voix féminine plus jeune lui répondit, et après une brève discussion entre les deux femmes, la porte s’ouvrit. La vieille femme les poussa à l’intérieur, où une main nettement plus douce les guida sur une centaine de mètres, avant de s’arrêter. Une autre porte s’ouvrit, et les trois hommes furent poussés par là dans ce qui devait être une autre pièce. Après quoi, la porte se referma et ils restèrent seuls. Jack en profita pour ôter le bandeau qui couvrait ses yeux et se tourna vers ses compagnons. Teal’c l’imita, et Daniel également, après qu’il eut reçu un léger coup de coude dans les côtes de la part de son supérieur.
–J’y vois rien du tout, murmura-t-il en réajustant ses lunettes sur son nez.
–Cette pièce est apparemment dépourvue de fenêtre ou d’une quelconque source de lumière, observa Teal’c.
–Sûrement pour qu’on ne puisse pas voir leurs précieuses prêtresses, répliqua Jack d’un ton sarcastique.
Leur conversation fut interrompue par le bruit de la porte qu’on ouvrait. Ils eurent à peine le temps de distinguer la jeune femme qui entra avant que la porte ne se referme, les plongeant à nouveau dans l’obscurité.
–Soyez les bienvenus dans l’enceinte de notre temple, étrangers, les salua la prêtresse. Je me nomme Meyna et je suis la grande prêtresse de ce temple. On m’a dit que vous souhaitiez me rencontrer.
–Ah, oui, en effet, répondit Jack. On voulait vous demander…
Il s’interrompit soudain et fronça les sourcils.
–Petite minute, vous parlez notre langue ?
La jeune femme sourit.
–C’est exact.
–Et vos compatriotes, ils la parlent aussi ?
–Non. En tant que prêtresses, nous avons toujours eu certains privilèges, dont celui de voyager par le cha’pai pour servir les anciens dieux. Cela a permis à nos ancêtres vénérées d’apprendre la langue de nombreux autres peuples. Nous n’empruntons plus l’Anneau des Dieux depuis bien longtemps, mais ces connaissances ont été transmises de génération en génération, jusqu’à aujourd’hui. Néanmoins, elles n’ont jamais franchi les murs de ce sanctuaire.
–Je vois. Bon, enfin, en tout cas, c’est tant mieux, ça nous facilitera les choses, répondit Jack. Mon ami Daniel adore jouer les traducteurs, mais bon, si tout le monde se comprend, c’est encore plus simple.
–En effet. Mais dites-moi, quelle est la raison exacte de votre visite ?
–Oui, alors voilà. En fait, l’autre jour, on dînait avec vos grands chefs et plein de beau monde, et ma subordonnée a malencontreusement accepté de boire votre aphrodisiaque maison, sans savoir ce que c’était, bien sûr.
–Oui, on m’a fait part de cet incident. Comment va votre amie ?
–Mal. C’est pour ça qu’on est là. En fait, au début, ça allait à peu près, elle était juste un peu…euh…enthousiaste en ce qui concerne la gent masculine, si vous voyez ce que je veux dire, mais ce matin on l’a retrouvée inconsciente. Notre médecin lui a fait des examens et elle dit que votre machin a provoqué une réaction pas normale dans son organisme, et euh… Daniel, vous voulez bien expliquer à notre amie ce qu’a dit Fraiser ?
Le jeune homme réprima un sourire et expliqua brièvement à Meyna dans quel état se trouvait Sam. La jeune femme parut surprise et ennuyée.
–J’ignorais qu’il était possible pour un ancien hôte de survivre à la mort du symbiote, avoua-t-elle. Et encore plus que celui-ci laissait cette trace dans le sang de l’hôte. Vous comprenez, les Goa’uld ne sont pas venus sur cette planète depuis des centaines d’années.
–Oui, ben justement, à ce propos, on se demandait comment votre boisson pouvait produire une réaction avec une protéine d’origine goa’uld si rien dans sa composition n’est tiré d’un symbiote, reprit Jack.
Meyna hésita un instant avant de répondre.
–La composition de l’eau du cœur est un secret scrupuleusement gardé depuis des générations, répondit-elle enfin. Personne ne la connaît en-dehors de ces murs… Mais étant donné votre situation… Suivez-moi.
Elle ouvrit la porte et sortit. Jack échangea un regard avec Daniel et Teal’c, puis la suivit, clignant des yeux au soleil.
–Je croyais qu’on n’avait pas le droit de vous voir, remarqua-t-il.
Meyna se retourna et lui sourit.
–En principe, c’est exact. Mais vous n’êtes pas de notre monde, et je sens que je peux vous faire confiance.
–Vous le sentez ?
 La jeune femme s’arrêta et posa son regard sur Teal’c.
–Cet homme-là est trop honnête et respectueux pour tenter quoi que ce soit contre moi ou mes sœurs, déclara-t-elle calmement.
Teal’c s’inclina légèrement devant elle.
–En effet, répondit-il.
Meyna se tourna ensuite vers Daniel.
–Celui-ci est trop gentil et timide, et il ne lui viendrait même pas à l’esprit de s’en prendre à nous.
Daniel rougit un peu, embarrassé, mais sourit néanmoins à Meyna, sous le regard amusé de Jack.
–Ah, vous devriez vous méfier, intervint celui-ci. Sous ses apparences timides se cache un véritable bourreau des cœurs !
–Jack ! protesta Daniel en rougissant davantage.
–Non, je ne m’inquiète pas, répondit néanmoins Meyna en souriant. Quant à vous, ajouta-t-elle en se tournant vers Jack, eh bien il me semble que je n’ai aucun souci à me faire vous concernant.
–Tiens donc ! Et on peut savoir pourquoi ? Vous pensez que je suis trop vieux pour ça ?
–Non, je pense que votre cœur appartient déjà à une femme, répondit la prêtresse en fixant Jack de ses grands yeux verts.
Celui-ci en resta bouche bée, alors que Daniel réprimait difficilement un sourire. Même Teal’c avait l’air amusé.
–Oui, euh, enfin, tant que vous nous faites confiance…, marmonna Jack en reprenant une contenance un peu plus digne.
–Tout à fait, répondit Meyna avec un petit sourire. Maintenant, suivez-moi, je veux vous montrer quelque chose.
 
         Les trois hommes suivirent la jeune femme le long d’une allée ombragée qui traversait un genre de jardin japonais, et arrivèrent devant un petit bâtiment de forme circulaire. Meyna marqua un temps d’arrêt et se tourna vers ses visiteurs.
–Ce que vous allez voir, aucun homme avant vous ne l’a vu. Je vous demanderai donc de garder le secret vis-à-vis de mon peuple, par respect pour nos traditions.
–Bien sûr, répondit immédiatement Daniel, sans laisser le temps à Jack de formuler la moindre objection.
Celui-ci soupira mais ne le contredit pas, et Meyna se retourna donc pour ouvrir les portes du bâtiment. Jack s’attendait à peu près à tout, mais certainement pas à ce qu’il découvrit en pénétrant à l’intérieur à la suite de la jeune prêtresse. Là, au beau milieu du temple, lieu sacré entre tous pour ces gens, se trouvait ce qu’il convenait d’appeler un laboratoire, ou même plutôt toute une unité de recherche, étant donné l’importance des locaux. Une dizaine de femmes d’âges divers étaient penchées sur des paillasses, dosant, remuant, secouant et observant différentes substances indéterminées avant de prendre des notes sur de grands cahiers. Toutes s’interrompirent et ouvrirent de grands yeux stupéfaits en s’apercevant de la présence d’étrangers, de sexe masculin qui plus est, dans leur temple. Mais Meyna les rassura d’un geste.
–N’ayez pas peur, je les ai autorisés à venir ici, ils ne vous feront aucun mal. Ce sont nos nouveaux amis venus de la planète Terre, ceux qui ont traversé le cha’paï il y a une dizaine de jours. Ils ont besoin de notre aide pour soigner une de leurs amies qui va très mal. C’est pour ça et uniquement pour ça qu’ils sont là.
Ces explications semblèrent rassurer les prêtresses, au moins partiellement, et toutes se remirent au travail, non sans jeter de discrets coups d’œil aux trois hommes par-dessus leurs tubes à essais. Meyna sourit à ses hôtes et leur fit signe de la suivre. Ils traversèrent la vaste pièce, passèrent une porte, et débouchèrent sur une salle encore plus grande, majoritairement occupée par une sorte de piscine. Jack se crispa aussitôt : il avait déjà vu une installation semblable, et il craignait de découvrir à quoi servait ce bassin. L’eau était sombre et on ne distinguait pas le fond, mais à en juger par l’aspect de la pièce, les prêtresses ne l’utilisaient pas pour venir faire quelques brasses entre deux expériences dans leur super labo.
Meyna se retourna et Jack eut une fois de plus la désagréable impression qu’elle pouvait lire dans ses pensées rien qu’en plongeant ses immenses yeux verts dans les siens. Il détourna le regard et indiqua le bassin du menton.
–Jolie piscine que vous avez là. L’eau est chaude ?
–Tiède, répondit la jeune femme avec un demi sourire. Mais vous ne voudriez pas vous y baigner, croyez-moi.
–Je vous crois.
–Comme vous devez l’avoir deviné, ce bassin est rempli de symbiotes, reprit-elle. Ou du moins, des quelques uns qu’il nous reste.
Jack ne put s’empêcher de grimacer à ces mots. Il ne s’habituerait jamais à ces espèces de larves à crochets. Meyna sembla percevoir son trouble car elle sourit de nouveau.
–Nous ne les gardons pas ici par affection, colonel. Les symbiotes nous servent uniquement dans nos recherches.
–Et dans la préparation de vos aphrodisiaques, ajouta Daniel.
–En effet. Même si au départ les symbiotes étaient utilisés pour une raison bien précise dans la composition de cette boisson, aujourd’hui nous n’en incorporons dedans que lorsque nous voulons l’offrir à des étrangers.
–Comment ça ? Je ne comprend pas, répondit Daniel.
–C’est une longue histoire, mais je vais tâcher de vous résumer les choses. Il y a de ça de très nombreuses années, des milliers sans doute, les Goa’ulds sont venus sur notre planète et ont réduit la population en esclavage. Ils ont prétendu être des dieux et ont exigé que des femmes de notre peuple s’occupent spécifiquement de leur rendre un culte dans ce temple. Des femmes ont donc été choisies dans ce but, pendant que le reste de la population était forcée de travailler dans des mines ou aux champs pour leur fournir du minerai et du ravitaillement pour leurs troupes. Les prêtresses eurent également pour tâche de veiller sur les jeunes larves avant leur implantation, mais afin que le secret des Goa’uld ne soit jamais révélé, elles furent enfermées dans ce temple et des Jaffas en défendirent l’accès à quiconque. Lorsqu’une aînée venait à mourir, le Goa’uld régnant choisissait une jeune fille pour la remplacer, et personne n’avait rien à dire. Cette situation a duré des centaines d’années, jusqu’à ce que nos mines s’épuisent peu à peu et que le Goa’uld qui dominait mon peuple soit tué dans une bataille avec un de ses rivaux. Après cela, les faux dieux ne sont plus jamais revenus et notre peuple a connu la paix et la liberté. Les femmes qui sont ici aujourd’hui sont toutes volontaires, et chacune est libre de partir si elle le souhaite. Il va sans dire que nous ne vénérons plus les Goa’uld, mais nous avons souhaité conservé ce temple debout comme un souvenir de ces années noires, pour nous rappeler le privilège que constitue le fait de vivre libres.
–Je ne comprend toujours pas pourquoi vous utilisez les symbiotes, fit Daniel. Pourquoi n’avoir pas tout bonnement tué les larves quand les Goa’uld sont partis ?
–Nous avons préféré les garder afin de mener des recherches sur elles. Nous pensions pouvoir développer une substance chimique quelconque qui nous permettrait de repousser les Goa’uld s’ils venaient à revenir.
–Et ça a marché ? demanda Jack.
–Oui. Nous sommes parvenues à élaborer un produit capable de reconnaître un certain type de protéine que tous les Goa’uld ont dans leur sang, afin de les annihiler. C’est tout à fait inoffensif pour un être humain mais en principe un Goa’uld n’y survit pas.
–Cool ! On pourrait être intéressés par ce produit. Mais pour l’instant, notre urgence est de soigner Carter. Si je comprends bien, il y avait un peu de votre poudre de perlimpinpin dans ce truc qu’elle a bu.
–En effet. Nous en incorporons toujours une dose dans les boissons que nous offrons aux étrangers, pour plus de sûreté.
–Si nous avions été des Goa’uld, nous serions morts ? demanda Daniel.
–Certainement.
–Mais Sam n’est pas une Goa’uld. Pourquoi a-t-elle eu cette réaction ?
–A cause de la protéine que Jolinar de Malk’shur a laissé dans son sang, répondit Teal’c.
Meyna fronça les sourcils.
–Qui est cette personne ?
–C’était une Tok’ra, expliqua Jack. Carter a été son hôte pendant quelque temps. Quand elle est morte, elle a laissé une protéine particulière dans son système sanguin.
–Excusez-moi, mais qu’est-ce qu’une Tok’ra ?
–Vous ne savez pas ? demanda Daniel, étonné.
–Non, c’est la première fois que j’en entends parler.
–Les Tok’ra sont des Goa’uld qui vivent en harmonie avec leur hôte, expliqua Teal’c. Ils n’approuvent pas les méthodes de leurs congénères et livrent contre eux une féroce bataille depuis de très longues années.
–Vraiment ? ça alors, c’est incroyable !… Et vous dites que votre amie a été l’hôte d’un de ces Tok’ra ?
–Pendant une courte période seulement, mais oui. Lorsque Sam a été blessée, le symbiote a sacrifié sa vie pour la sauver.
–Et elle a gardé cette protéine dans son système ?
–En effet.
–Mon Dieu, alors je comprends pourquoi elle a réagi à cette boisson. Je suis terriblement navrée. Si j’avais su ce qu’il en était, jamais nous ne l’aurions proposée à votre amie.
–Bon, mais est-ce que vous pouvez la soigner, maintenant ? s’impatienta Jack.
–Honnêtement, colonel, je l’ignore, mais je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour ça. L’ennui, c’est que nous disposons de peu de temps, j’en ai peur. Si comme vous me l’avez dit votre amie est inconsciente depuis ce matin, si nous ne trouvons pas d’antidote elle sera morte dans quelques jours, une semaine tout au plus.
–Dans ce cas, je suggère que vous vous mettiez au travail le plus vite possible, répondit Jack.
–O’Neill, ne devrions-nous pas demander aux Tok’ra de venir aider Meyna ? intervint Teal’c.
ça serait une bonne idée, répondit Daniel. Les Tok’ra connaissent bien la façon dont fonctionne cette protéine dans l’organisme de Sam, et ils ont déjà travaillé à l’amélioration de la trétonine. Si quelqu’un peut aider Meyna, c’est bien eux.
–Je serais heureuse de les accueillir, acquiesça Meyna. Leurs connaissances nous seront très précieuses.
–D’accord, approuva Jack. On rentre à la base, on prévient les Tok’ra et on revient dès qu’on a des nouvelles.
–Très bien. En attendant, mes sœurs et moi allons nous mettre au travail, répondit Meyna.
–Bien, alors à plus tard. Inutile de nous raccompagner, on va trouver notre chemin.
 
 
 
         Trois jours plus tard
–Bon, c’est l’heure de vérité, murmura Janet.
Elle saisit une seringue remplie d’un liquide brunâtre et s’approcha du lit de Sam. En face d’elle, les trois autres membres de SG-1, le général Hammond, ainsi que Meyna, Jacob Carter et Jolek, un scientifique Tok’ra, attendaient nerveusement. Les Tok’ra avaient passé les trois derniers jours à travailler sans relâche à l’élaboration d’un antidote pour Sam, et grâce à leurs efforts conjugués à ceux des prêtresses Reelnak’ti, ils avaient fini par mettre au point un produit qui, ils l’espéraient, pourrait sauver la jeune femme. Il n’y avait de toute façon qu’une seule manière de s’assurer de son efficacité.
Janet prit une inspiration, jeta un regard à son amie et enfonça la seringue dans sa perfusion, la vidant de son contenu.
–A présent, il n’y a plus qu’à attendre et à prier, conclut-elle en se retournant vers le petit groupe.
Jack s’agita à ces mots. « Attendre » et « prier », ce n’était pas vraiment son fort. Jack était un homme d’action et être réduit à attendre là bêtement sans rien faire pour savoir si son amie allait vivre ou mourir l’agaçait prodigieusement. Il aurait aimé pouvoir faire quelque chose, n’importe quoi, mais il savait qu’en l’occurrence, il n’y avait rien à faire. Un sentiment terrible d’impuissance l’envahit, et il se laissa tomber sur la chaise la plus proche, les yeux fixés sur les traits fatigués de son second.
Il remarqua à peine qu’autour de lui, le petit groupe se dispersait. Le général devait aller briefer SG-9 pour leur prochaine mission, Janet avait d’autres patients à voir, et Daniel alla raccompagner Meyna et Jolek à la Porte des Etoiles, étant donné qu’ils voulaient tous les deux rentrer sur leur planète respective. Teal’c lui aussi finit par partir méditer dans ses quartiers, et il ne resta plus que Jack et Jacob au chevet de Sam. Les deux hommes, assis côte à côte, gardaient le silence, chacun plongé dans ses pensées. Ce n’est qu’au bout d’une dizaine de minutes que Jack sembla sortir de sa transe et s’aperçut enfin de la présence de Jacob à ses côtés. Il se tourna vers lui et soupira.
–Jacob, je sais que ça ne changera pas ce qui s’est passé, commença-t-il, mais je suis désolé.
Jacob fronça les sourcils.
–Désolé ? Mais de quoi ?
–De ce qui est arrivé à Sam.
–Jack, ne soyez pas ridicule, ce n’est pas votre faute.
–Peut-être pas directement, mais la sécurité de mon équipe est ma responsabilité.
–Jack, arrêtez ça, le coupa Jacob. Ça ne sert à rien de vous culpabiliser. Et puis de toute façon, vous n’aviez aucun moyen de prévoir ce qui est arrivé. Si quelqu’un est à blâmer dans cette histoire, ce serait plutôt Sam. Elle n’aurait pas dû accepter cette boisson sans savoir ce que c’était.
Jack se tortilla sur son siège, ne sachant comment répondre.
–Avouez que si les conséquences n’avaient pas été aussi graves, vous vous seriez fait un devoir de lui passer un savon pour avoir fait une bêtise pareille, sourit Jacob.
Jack s’autorisa un bref rictus.
–C’est bien possible, concéda-t-il.
–Et vous auriez eu raison, reprit Jacob. Alors cessez de vous torturer avec ça.
Le ton de Jacob était sans réplique, et il n’y avait de toute façon pas grand chose à répondre. De toute évidence, la discussion était close. Le silence retomba alors comme les deux hommes se plongeaient à nouveau dans leurs pensées. Ce fut Jack qui le rompit à nouveau.
–Jacob, vous devriez aller vous reposer. Ça fait des jours que vous avez à peine fermé l’œil.
–Vous aussi, il me semble, rétorqua l’interpellé.
Jack haussa les épaules.
–Je suis plus jeune, et puis je suis habitué, je dors toujours mal.
–Et moi j’ai un symbiote qui me permet de tenir assez bien malgré le manque de sommeil.
–Oui, mais Selmak aussi a besoin de repos de temps en temps, non ?
–Moins que vous, j’en suis sûr.
–Jacob…
–Jack…
 
Janet hocha la tête d’un air navré en s’approchant.
–Messieurs, désolée d’avoir à vous dire ça, mais vous êtes pathétiques. Allez donc dormir tous les deux, je veille sur Sam. Ah ! Pas de discussion, colonel ! le coupa-t-elle avant qu’il ait pu formuler la moindre objection. Ne me forcez pas à vous en donner l’ordre.
Jack se leva à contrecœur et, après un dernier regard à Sam, il quitta l’infirmerie en grommelant quelque chose qui sonna étrangement comme « despote » aux oreilles de Janet. Elle leva les yeux au ciel et se tourna vers Jacob.
–Je sais que je ne peux pas vous donner d’ordre, mais s’il vous plaît, allez vous reposer aussi, implora-t-elle. Je vous promets de vous prévenir s’il y a le moindre changement dans son état.
–Docteur, je peux parfaitement rester là.
–Je sais, mais allez-y quand même. Le colonel O’Neill me ferait une scène s’il apprenait que je vous ai autorisé à rester et pas lui.
Jacob adressa à la jeune femme un sourire fatigué.
–Très bien, céda-t-il. Selmak est aussi de votre avis, de toute manière.
Janet sourit et hocha la tête d’un air satisfait. Jacob se leva, puis se pencha pour déposer un baiser sur le front de Sam.
–Je reviens bientôt, ma chérie. Tiens le coup, murmura-t-il à l’oreille de sa fille.
Il lui caressa doucement les cheveux, soupira, puis tourna enfin les talons. Janet, restée seule, se tourna vers son amie toujours inconsciente, et soupira.
–Il faut que vous vous en sortiez, Sam, lui chuchota-t-elle. Sinon je ne sais vraiment pas ce que je pourrai faire de ces deux-là.
 
 
 
Emergeant lentement du brouillard dans lequel était plongé son cerveau, Sam ouvrit un œil, puis les deux. Elle fronça les sourcils et fit un effort pour accommoder son regard, discernant plus nettement son environnement. La première chose qu’elle vit fut un mur. Un mur gris, en ciment, très ordinaire, orné ça et là de quelques taches qui… Elle fronça un peu plus les sourcils et tenta de réfléchir – et Dieu que c’était difficile, son cerveau semblait vraiment fonctionner au ralenti – et s’aperçut qu’elle fixait en réalité le plafond ô combien familier de l’infirmerie. Après les multiples séjours qu’elle y avait fait, elle connaissait par cœur chaque fissure, chaque tache et chaque nuance de gris de ce plafond. Elle aurait pu le dessiner les yeux fermés. Enfin, l’imaginer les yeux fermés en tout cas, vu l’étendue plutôt réduite de ses talents de dessinatrice.
Son esprit semblant peu à peu se souvenir de la façon de fonctionner en vitesse normale, elle reconnut le bip-bip régulier d’un moniteur cardiaque, le clac-clac des chaussures des infirmières sur le ciment, les conversations étouffées des médecins ne voulant pas réveiller les malades. Les malades ? « Tiens, oui, au fait, qu’est-ce que je fais là ? » se demanda-t-elle, réalisant soudain sa situation. La dernière chose dont elle se rappelait, c’était…euh… Elle fronça une nouvelle fois les sourcils, forçant son esprit à retrouver les souvenirs qu’elle cherchait. Son labo. « C’est ça. J’étais dans mon labo, je travaillais sur mon nouveau réacteur à naquaddah et… Je me suis sentie mal. Et après… » Elle se concentra, mais impossible de se souvenir de la suite. Les yeux toujours fixés au plafond, elle sursauta en entendant une voix près d’elle.
–Hé, à peine réveillée et déjà en train de cogiter ! Allez-y doucement, vous allez vous épuiser, à ce rythme-là !
Sam tourna la tête et rencontra le regard chaleureux de Janet Fraiser.
–Janet ? Qu’est-ce qui s’est passé ? interrogea-t-elle.
–Disons que vous nous avez fait une belle frayeur, répondit le jeune médecin. C’est une longue histoire.
–Une longue histoire ? Je suis là depuis combien de temps ?
–Un peu plus de 4 jours.
–4 jours ?
Cette conversation ramenant automatiquement à sa mémoire une autre du même style, Sam tourna la tête de l’autre côté et parcourut la pièce du regard. Janet sourit.
–Il est allé se reposer un peu.
Sam se retourna vers son amie, surprise.
–Qui ça ? demanda-t-elle en rougissant.
–Le colonel. C’est bien lui que vous cherchiez, non ?
–Oui, enfin je me disais juste que, enfin, peut-être qu’il serait dans les parages, balbutia Sam en détournant les yeux.
–Oh, il y était, ne vous inquiétez pas ! J’ai presque dû le menacer pour qu’il accepte de vous laisser 5 minutes pour aller dormir. Vous savez comment il est quand vous vous retrouvez ici.
Sam rougit de plus belle mais ne put empêcher un sourire ravi de se former sur ses lèvres.
–D’ailleurs, je ferais bien de le prévenir que vous allez mieux, continua Janet en ignorant volontairement la réaction de son amie, sinon il va être infernal avec moi pendant des semaines !
Sam sourit.
ça ne changerait pas beaucoup de d’habitude, remarqua-t-elle.
–A qui le dites-vous !
 
Cinq minutes plus tard, c’est un Jack O’Neill décoiffé et passablement essoufflé qui fit irruption à l’infirmerie. Il s’efforça de prendre un air calme et détaché, mais ne trompa pas Janet : il était évident qu’il avait couru. « Comme d’habitude », songea-t-elle en réprimant un sourire. Jack s’approcha du lit de Sam et se fendit d’un sourire un rien crispé.
–Carter.
–Mon colonel.
–Ravi de vous voir revenue parmi nous.
Sam le remercia d’un large sourire, qui en provoqua un tout aussi conséquent chez son interlocuteur en réponse.
–Merci, mon colonel.
–Comment est-ce que vous vous sentez ?
–Un peu groggy, mais ça peut aller.
–Bien.
Janet s’approcha et toussota légèrement pour signaler sa présence aux deux officiers qui semblaient avoir complètement oublié le monde alentour. Jack sursauta légèrement et sembla presque surpris de la voir là. Cependant, la surprise disparut bien vite de son regard, remplacée par un reste d’inquiétude.
–Comment est-ce qu’elle va ? demanda-t-il.
–Eh bien sa fièvre est tombée, et tous ses signes vitaux sont revenus à la normale, répondit Janet. Je dois attendre les résultats de sa dernière prise de sang pour être sûre à 100%, mais a priori je dirais que l’antidote a fonctionné.
–Voilà le genre de nouvelles que j’aime entendre !
 
–Sam !
La jeune femme, Jack et Janet se retournèrent à cette exclamation, et aucun d’entre eux ne fut surpris de voir Jacob arriver. Janet s’écarta pour le laisser passer.
–Papa ! Je suis contente que tu sois là.
Jacob s’assit au bord du lit et serra sa fille dans ses bras.
–Tu nous as fait une belle peur !
–Je sais. Désolée.
Jacob hocha la tête, écartant d’un geste ses excuses.
–Comment tu te sens ?
–Bien. D’ailleurs il semblerait que ce soit en partie grâce à toi.
–Plutôt grâce à Selmak, à vrai dire. C’est lui qui a fait tout le boulot pour nous deux.
–Alors remercie Selmak de ma part.
–Il dit qu’il a été ravi de pouvoir t’aider.
–Et la prêtresse ? Elle est toujours là ?
–Meyna ? Non, elle a dû repartir, répondit Jack. Elle avait des trucs à faire dans son temple, apparemment… Des trucs de prêtresse. Mais on lui a promis de lui donner de vos nouvelles, alors dès que vous serez sur pieds, on pourra aller lui rendre une petite visite. Je suis sûr que vous allez adorer leur temple, c’est un vrai laboratoire. Une sorte de zone 51 en miniature, les F-302 en moins.
–J’ai hâte de voir ça.
Jack sourit.
–Ouais, ben en attendant, reposez-vous. Je ne veux pas vous voir au travail avant au moins une semaine, voire deux. C’est clair ?
–Oui mon colonel.
 
 
 
3 jours plus tard
 
         Sam interpella Janet dès que celle-ci regagna l’infirmerie après avoir pris une courte pause déjeuner.
–Janet, je vous en prie, je me sens bien et…
–Sam, pour l’amour du ciel, vous allez finir par devenir aussi infernale que le colonel O’Neill, si vous continuez ! l’interrompit la jeune femme d’un ton exaspéré.
–Désolée, il doit déteindre sur moi. Mais je m’ennuie à mourir ici !
Janet leva les yeux au ciel.
–Sam, vous êtes ici pour vous reposer, pas pour vous amuser et encore moins pour travailler.
–Mais ça fait une éternité que je me repose ! Je vais finir par être épuisée à force de me reposer !
–Sam…
–Janet, je voudrais seulement pouvoir rentrer chez moi. Je serais plus au calme qu’ici, et puis en plus je ne supporte plus ces rideaux verts. On vous a déjà dit qu’ils étaient vraiment moches ?
–En fait, je crois me souvenir que le colonel a dû y faire allusion une fois ou deux, répondit Janet en soupirant.
–Il avait raison, répondit Sam.
–Qui avait raison à propos de quoi ?
 
Les deux jeunes femmes se retournèrent et découvrirent Daniel, les mains dans les poches, qui les regardait d’un air interrogateur. Sam lui jeta un regard plein d’espoir.
–Daniel, s’il vous plait, expliquez à Janet que je serais beaucoup mieux chez moi pour me reposer, et aussi accessoirement que ses rideaux sont moches.
Le jeune archéologue parut un peu embarrassé.
–Eh bien, je ne suis pas médecin, si Janet pense qu’il vaut mieux que vous restiez en observation ici quelques jours, il serait peut-être plus sage de l’écouter.
–Merci, répondit Janet.
Sam leva les yeux au ciel.
–Et moi qui comptais sur votre aide ! Apparemment, il va falloir que je m’adresse à quelqu’un d’autre. Est-ce que le colonel est dans les parages ?
–Euh, il me semble qu’il est en réunion avec le général.
–Ah. Et il en a pour longtemps ?
Daniel sourit.
–Je ne sais pas trop, mais je suis sûr qu’il s’éclipsera dès qu’il en aura l’occasion. Vous connaissez l’amour immodéré de Jack pour les réunions !
–Oui, mais si c’est avec le général…
–Le général connaît Jack aussi. Il sait bien qu’il a la capacité attentionnelle d’un enfant de 3 ans, et encore dans ses bons jours.
Sam ne put retenir un petit rire.
–C’est méchant, mais c’est assez vrai.
–Je lui dirai de passer vous voir dès qu’il sortira, promit Daniel. Mais en attendant, ayez un peu pitié du Docteur Fraiser. Elle ne veut que votre bien, comme nous tous d’ailleurs.
–Je sais, soupira Sam. C’est juste que je m’ennuie ici.
–Vous voulez que je vous tienne un peu compagnie ?
–Vous devez avoir du travail.
–En fait, vu que vous êtes clouée ici, le général a décidé de mettre SG-1 en stand-by. Pas de mission, et rien d’urgent à faire.
–Vraiment ?
–Absolument. Je suis tout à vous.
Sam le gratifia d’un timide sourire.
–C’est gentil, mais je ne voudrais pas vous embêter.
–Sam, vous ne m’embêtez pas, je vous assure.
–Bon, dans ce cas, prenez une chaise et faites comme chez vous.
Daniel s’exécuta de bonne grâce et les deux amis se mirent à bavarder gaiement, sous l’œil soulagé de Janet Fraiser, qui put en fin vaquer tranquillement à ses occupations sans être interrompue par les protestations de Sam.
 
 
 
 
         Le lendemain
 
Sam referma la porte de sa maison et soupira de contentement. Après avoir passé quelques heures supplémentaires à alternativement supplier Janet et bouder dans son coin (technique imparable qu’elle avait apprise du meilleur spécialiste en la matière, un certain colonel Jack O’Neill), elle avait enfin obtenu la permission de rentrer chez elle. Tous ses examens étaient bons, elle se sentait bien et le fait de rester enfermée à l’infirmerie à ne rien faire commençait à la rendre dingue. C’est donc avec un réel soulagement qu’elle s’assit à la table de la cuisine pour siroter un thé tout en triant son courier. Elle était en train de parcourir une énième publicité pour un quelconque opérateur téléphonique, qui proposait des prix imbattables et se proposait de réduire sa facture de moitié, lorsque justement le téléphone sonna. Elle hésita quelques secondes, envisageant de ne pas répondre et de laisser le répondeur de déclencher, mais par acquis de conscience, elle se leva finalement et alla décrocher.
 –Allô ?
–Ah, vous êtes rentrée !
Sam sourit.
–Il y a environ 5 minutes.
–Vous auriez pu prévenir que vous partiez. Ça m’aurait évité d’aller à l’infirmerie pour rien.
–Désolée, mon colonel. Quand Janet m’a dit que je pouvais rentrer, j’étais tellement contente que je suis partie le plus vite possible, avant qu’elle change d’avis.
–Mouais, je comprends. J’espère que vous n’avez pas conduit, au moins ?
A ces mots, Sam leva les yeux au ciel.
–La clémence de Janet a des limites, répondit-elle. Elle m’a laissée rentrer à la seule condition que je demande à quelqu’un de me ramener. Je déteste ça parce que du coup je suis bloquée chez moi sans voiture.
–Je vous la ramènerai, si vous voulez.
–Et comment est-ce que vous ferez pour rentrer chez vous ensuite ?
–Je dirai à Daniel de me suivre jusque chez vous, je laisserai votre voiture et il me ramènera.
–Oui, et ensuite c’est vous qui serez coincé sans voiture.
Un léger silence suivit cette remarque, puis Jack reprit :
–Pas bête.
–Je sais.
–Vous n’arrêtez jamais de penser, hein ? Même quand vous êtes malade ?
–Je ne suis pas malade, je suis en convalescence.
–Ouais, enfin bref. Alors bon, je pourrais demander à Teal’c de vous ramener votre voiture, et ensuite je le ramènerai à la base avec la mienne. Qu’est-ce que vous en dites ?
–J’en dis qu’on est vendredi soir et que si vous amenez la pizza, je ne refuserai pas un peu de compagnie, répondit Sam sans réfléchir.
Elle entendit le sourire dans la voix de Jack lorsqu’il répondit.
–Une soirée SG-1 ? Nous 4, quelques bières et des pizzas ?
ça fait longtemps qu’on n’en a pas fait.
–C’est vrai, mais vous êtes sensée vous reposer…
–Eh bien vous ne partirez pas trop tard, comme ça je pourrai aller me coucher.
Il n’hésita qu’un instant avant de répondre.
–OK. Je vais prévenir les gars.
–Très bien. A tout à l’heure. Oh, et mon colonel ?
–Oui ?
–Si vous pouviez expliquer à Teal’c que je suis fatiguée et que je ne me sens pas d’attaque pour un marathon Star Wars…
–Bien sûr. Je suis sûr qu’il comprendra.
–Merci, mon colonel.
–Pas de quoi. A tout à l’heure.
Lorsque Sam raccrocha, son thé avait notablement refroidi, mais elle s’en fichait. Elle vida sa tasse dans l’évier, laissa le tas de prospectus sur la table et partit prendre une douche, un grand sourire aux lèvres.
 
 
         A 20 heures tapantes, on sonna à la porte. Sam s’empressa d’aller ouvrir et tomba nez à nez avec un bouquet de fleurs. Celui-ci s’écarta toutefois bien vite pour laisser apparaître le visage souriant de Daniel.
–Bonsoir ! la salua-t-il chaleureusement.
–Bonsoir, Daniel. Entrez.
–Merci.
Le jeune homme entra, suivi de Teal’c, dont les bras étaient chargés de boîtes de pizzas.
–C’est pour moi ? demanda Sam en désignant les fleurs.
–Oh, oui, pardon, répondit Daniel en les lui tendant. Pour fêter votre rétablissement.
Sam sourit.
–C’est très gentil. Elles sont magnifiques, merci.
–De rien. En fait, c’est une façon de vous dire à quel point je suis soulagé de voir que vous allez bien. Vous nous avez vraiment fait une belle frayeur, vous savez. Quand je vous ai trouvée inconsciente dans votre labo, bon sang… J’en ai encore des frissons quand j’y repense.
Sam entoura les épaules de son ami d’un bras et déposa un baiser sur sa joue.
–Désolée de vous avoir causé tant d’émotions, s’excusa-t-elle.
–Oui, enfin ce n’était pas votre faute. L’important c’est que vous alliez bien.
–Absolument. Bon, installez-vous, faites comme chez vous. Je vais voir si je trouve un vase pour ces magnifiques fleurs.
–D’accord.
Les deux hommes s’installèrent au salon et Sam les rejoignit avec le vase quelques minutes plus tard.
–Au fait, le colonel n’est pas avec vous ? demanda-t-elle en se laissant tomber dans un fauteuil.
–Non, mais il ne devrait pas tarder, répondit Daniel. Je crois que votre père voulait lui parler, du moins c’est ce qu’il m’a semblé.
–C’est également mon impression, confirma Teal’c.
–Mon père voulait parler au colonel ? répéta Sam, surprise. Mais de quoi ?
Daniel haussa les épaules.
–Aucune idée. Il faudra le lui demander.
 
         A ce moment-là, on frappa à la porte.
–Tiens, quand on parle du loup…, remarqua Daniel.
Sam se leva et alla ouvrir.
–Bonsoir, mon colonel. On vous attendait.
–Désolé pour le retard, j’ai été retenu à la base un peu plus longtemps que prévu. Oh, et j’ai une surprise pour vous.
Sam fronça les sourcils.
–Quel genre de surprise ?
Jack lui tendit un grand sac en papier, qu’elle saisit avec précaution.
–Ne prenez pas cet air méfiant, Carter, ça ne va pas vous exploser à la figure, s’exclama Jack.
–Qu’est-ce que c’est ?
–Ouvrez, vous verrez bien.
Sam s’exécuta et lui lança un regard surpris en découvrant le contenu du sac.
–Des jus de fruits ?
–J’ai pensé que comme vous êtes « en convalescence », il valait peut-être mieux éviter la bière. Et puis comme ça, ça évitera à Teal’c d’avoir à raccompagner Daniel, ajouta-t-il à mi-voix en se penchant vers elle.
Sam pouffa de rire, ce qui attira l’attention de ses amis restés au salon.
–Qu’est-ce qu’il y a de si drôle ? demanda Daniel.
Jack échangea un regard avec Sam, qui gloussa de plus belle.
–Rien, Danny boy, répondit-il. Carter a juste des restes de nervosité à extérioriser. Ça lui passera.
Sam se força à reprendre son sérieux et fit entrer Jack, qui alla rejoindre Teal’c et Daniel tandis qu’elle allait chercher des verres pour les boissons.
 
 
         La soirée se passa joyeusement, les quatre amis profitant de l’occasion pour discuter de tout et de rien, plaisanter et déguster les excellentes pizzas apportées par Teal’c. Suite à diverses allées et venues de chacun, ils avaient tous changé de place, et Sam s’était retrouvée assise sur le canapé à côté du colonel, tandis que Teal’c occupait un confortable fauteuil et que Daniel avait fini par s’asseoir par terre sur le tapis. Depuis quelques minutes, Teal’c avait entrepris de leur raconter une légende jaffa, au grand ravissement de Daniel (qui la connaissait déjà presque par cœur, mais qui ne s’en lassait pas). Jack écoutait distraitement lorsqu’il sentit soudain un poids sur son épaule. Tournant la tête sur le côté, il sourit en découvrant que Sam venait visiblement de s’endormir contre lui. Attirant discrètement l’attention de ses amis, il leur fit signe de jeter un coup d’œil à la jeune femme.
–Elle s’est endormie, constata Daniel.
–On dirait que votre histoire ne l’a pas passionné, Teal’c, répondit Jack. Sans vouloir vous offenser.
–Je ne suis pas offensé, répondit le Jaffa de son habituel ton impassible. Je crois que le major Carter a besoin de repos. Nous ferions mieux de nous en aller, Daniel Jackson.
–Oui, je crois, répondit Daniel en se levant. Jack, vous venez ?
–Non, allez-y. Je vais rester pour ranger tout ça et la mettre au lit.
–La mettre au lit ? répéta Daniel avec un petit sourire.
–Daniel, elle a besoin de dormir. Qu’est-ce que vous imaginez ? Je sais me contrôler, quand même !
Daniel se contenta de sourire.
–Bien sûr, Jack, personne n’en doute. Allez, bonne nuit !
–C’est ça, à plus, grommela Jack en regardant ses amis partir.
La porte se referma, et il soupira. Jetant un œil de côté, il sourit en constatant que cette petite discussion ne semblait pas avoir réveillé Sam. Elle avait l’air détendue, sereine et abandonnée dans son sommeil. Jack passa doucement une main sur ses cheveux, puis soupira et se leva, prenant soin de caler la tête de la jeune femme dans les coussins pour ne pas qu’elle tombe.
Il prit son temps pour faire la vaisselle, jeter les boîtes de pizzas vides et ranger les jus de fruits entamés au frigo. Lorsqu’il revint au salon, Sam n’avait pas bougé d’un millimètre. Il l’aurait bien laissée dormir tranquillement, mais s’il faisait ça elle risquait d’avoir terriblement mal au cou le lendemain matin. Il se décida donc à la réveiller pour la convaincre d’aller se coucher.
–Carter ? murmura-t-il en s’asseyant près d’elle.
–Ummh ?
–Carter, je sais que vous êtes épuisée, mais vous ne pouvez pas passer la nuit comme ça. Réveillez-vous au moins une minute, le temps d’aller jusqu’à votre chambre.
Sam protesta encore sans ouvrir les yeux.
–Carter, je ne vais pas vous porter, quand même !
A ces mots, un large sourire apparut sur les traits fatigués de la jeune femme. Jack la considéra d’un air faussement choqué.
–Major ! Vous n’avez pas honte d’avoir de telles pensées pour votre supérieur ?
Sam ouvrit enfin les yeux et lui sourit malicieusement.
–Mais je n’ai absolument rien dit, mon colonel. C’est vous qui interprétez les choses de travers !
–Bien sûr, bien sûr, vous êtes l’innocence incarnée, c’est bien connu, répliqua-t-il.
–Exactement, répondit-elle en s’étirant longuement, découvrant par là une partie de son abdomen normalement couverte par son T-shirt.
Jack empêcha de justesse un grognement de franchir ses lèvres. Avait-elle conscience de l’effet que ce genre de mouvements de sa part produisait chez lui ? Pour la première fois de la soirée, il fut très heureux de ne pas avoir apporté de bière. Si elle décidait de jouer avec ses nerfs, il aurait besoin de tout son self-control pour résister.
–Pendant que vous faisiez la sieste, j’ai fait un peu de ménage, déclara-t-il en se levant, préférant changer de sujet.
Sam sourit.
–Quel parfait homme d’intérieur vous faites !
–N’est-ce pas ? approuva-t-il avec un grand sourire satisfait.
Elle le considérait toujours d’un air pensif, un léger sourire aux lèvres, et Jack sentit sa bouche devenir sèche. Il ne lui voyait que rarement cette expression, et généralement ce n’était pas bon signe pour la personne qui se trouvait en face. La plupart du temps, c’était le type de petit sourire qu’elle avait avant de jouer un tour à Daniel ou à Cassie. Jamais encore elle ne l’avait regardé lui de cette manière, et vu l’humeur qui semblait être la sienne ce soir, Jack se sentait un peu inquiet.
–Euh, bon, Carter, ce n’est pas que je n’apprécie pas votre compagnie, mais il commence à se faire tard et vous avez besoin de repos, alors je crois que je vais…
–Restez, l’interrompit-elle.
Il resta à la regarder bouche bée plusieurs secondes avant de retrouver l’usage de la parole.
–Pardon ?
Sam se mordit nerveusement la lèvre, mais ne détourna pas les yeux.
–Au moins un moment, ajouta-t-elle. S’il vous plaît.
–… Carter, je ne suis pas sûr que…
–Je veux juste parler, le rassura-t-elle. S’il vous plaît, mon colonel, asseyez-vous une minute.
Jack hésita, dansa d’un pied sur l’autre pendant une bonne minute, son esprit ne cessant de lui répéter que c’était une MAUVAISE idée, mais il finit néanmoins par s’asseoir à l’autre bout du sofa, aussi loin d’elle que possible. OK, il voulait bien être gentil et discuter un peu, mais il n’était pas complètement idiot non plus. Mieux valait garder une distance raisonnable avec le major ce soir.
–Bon, alors, de quoi est-ce que vous voulez parler ? demanda-t-il.
–Eh bien, Daniel m’a dit que vous aviez parlé à mon père, ce soir. Je me demandais juste… Enfin, ça ne me regarde peut-être pas, vous avez tout à fait le droit de lui parler sans que je sois au courant, mais…
Jack sourit, soulagé de constater que la conversation ne s’annonçait pas aussi gênante que ce qu’il craignait.
–Mais vous êtes curieuse et vous aimeriez quand même bien savoir ce qu’on s’est raconté de beau ? demanda-t-il.
–Oui.
–Rassurez-vous, on ne dit pas du mal de vous derrière votre dos. Jacob voulait juste, euh… Enfin, il avait entendu certaines rumeurs au SGC ces derniers jours et il voulait savoir si elles étaient fondées ou non.
Sam fronça les sourcils, perplexe.
–Des rumeurs ? A quel propos ? demanda-t-elle.
Jack baissa les yeux et se tortilla nerveusement, soudain beaucoup moins à l’aise.
–A propos de vous, lâcha-t-il.
Sam écarquilla les yeux, choquée.
–De moi ?? Il y a eu des rumeurs à propos de moi ces derniers temps ?
–Oui, enfin, disons, quelques-unes, euh, apparemment. Et il se trouve que votre père a surpris certaines conversations à ce propos, et il s’est un peu inquiété.
–Comment ça, il s’est inquiété ? Qu’est-ce que ces rumeurs avaient d’inquiétant ?
–Oh, rien de bien méchant, enfin… Vous savez ce que c’est, les gens déforment toujours tout, et à la fin l’information qui circule n’a plus grand chose à voir avec la réalité.
–Mon colonel. Dites-moi, insista Sam, guère satisfaite par la réponse pour le moins évasive de son supérieur.
–Eh bien, c’est un peu gênant…, commença Jack.
Mais Sam le regardait toujours avec détermination, et il comprit qu’elle ne le lâcherait pas avant d’avoir obtenu ce qu’elle voulait. Il se racla nerveusement la gorge, puis se lança.
–En fait, certaines personnes ont fait courir le bruit que vous auriez eu un comportement déplacé avec certains membres masculins du personnel de la base, suite à votre accidentelle absorption de ce machin sur P4F-639.
–Quoi ???
–Oui, euh… En particulier, certains ont prétendu que vous aviez, euh…tenté de me séduire, grommela-t-il en évitant son regard.
Ok, cette conversation ne serait peut-être pas aussi plaisante, tout compte fait.
–Tenté de vous… ? Oh mon Dieu ! soupira Sam.
–Ouais, on peut dire ça. Votre père a entendu ces bruits de couloir et ça l’a un peu, comment dire… contrarié. Cela dit, c’est un homme intelligent, et je crois que Selmak l’a aidé aussi à garder son sang froid, et donc il m’a aimablement demandé ce qu’il en était avant de tirer des conclusions hâtives.
Sam grimaça.
–Je suis désolée, mon colonel. J’imagine que ça n’a pas dû être agréable.
–Ben, vous savez, ça fait comme qui dirait quelques années que je me prépare mentalement à une conversation de ce genre, alors… Et puis comme c’était faux, et que ni vous ni moi n’avions rien à nous reprocher, je dirais que ça s’est plutôt bien passé.
Sam soupira, puis se leva et commença à arpenter nerveusement la pièce.
–Tenté de vous séduire. J’arrive pas à le croire ! Ils n’avaient qu’à dire que je vous avais sauté dessus, pendant qu’ils y étaient !
Jack détourna les yeux et ne répondit pas, jugeant plus prudent de ne pas lui révéler qu’apparemment, c’était très exactement ce que certains avaient sous-entendu. Il toussota et reprit :
–Oui, enfin vous savez comment les rumeurs circulent. Ça dure un temps, et puis ça se calme. La semaine prochaine, ils auront trouvé un autre sujet de conversation.
–Peut-être, mais en attendant, c’est ma réputation qui en prend un coup ! répondit Sam, pas du tout calmée. Et puis d’abord, pourquoi est-ce que mon père ne m’a pas posé la question à moi directement ? Je suis quand même la mieux placée pour savoir ce qu’il en est réellement, non ?
–Bien sûr, mais vous étiez fatiguée, il ne voulait pas vous embêter avec ça. Et puis il était peut-être un peu mal à l’aise à l’idée d’aborder ce genre de sujet avec vous.
–Ah, et avec vous il n’était pas mal à l’aise ?
Jack soupira.
–C’est différent. Vous êtes sa fille.
–Oui, et vous êtes mon officier supérieur. Vous n’êtes pas sensé être au courant du moindre de mes faits et gestes, surtout si ça concerne ma vie privée.
–Non, bien sûr, répondit Jack d’un ton amer.
Sam sentit le malaise dans sa voix, mais préféra l’ignorer.
–Alors pourquoi est-ce qu’il vous a posé la question à vous ? insista-t-elle.
Jack haussa les épaules.
–A vrai dire, je crois surtout qu’il voulait s’assurer que je n’avais pas profité de la situation pour enfreindre les règlements avec sa fille.
Sam leva les yeux au ciel.
–Comme si c’était votre style !
–Carter, c’est votre père. Il s’inquiète pour vous. C’est naturel.
–Non, mon colonel, pas quand il n’a aucune raison valable d’être inquiet.
–Eh ben, peut-être qu’il pensait que c’était une raison valable, répondit Jack en détournant le regard.
Sam s’arrêta et le regarda un long moment en silence, avant de revenir s’asseoir près de lui.
ça aurait pu arriver, admit-elle à mi-voix.
Jack releva les yeux vers elle et lui adressa un sourire hésitant.
–Oui, ça aurait pu. Si vous n’aviez pas eu la présence d’esprit de vous enfuir comme si vous étiez poursuivie par une horde de Unas en furie…
–Le général Hammond aurait fait une attaque en regardant la bande de la caméra de surveillance de mon labo, finit Sam en lui rendant son sourire, sentant le rouge lui monter aux joues.
Jack laissa échapper un petit rire.
–Et votre père m’aurait scalpé, ajouta-t-il.
–Probablement, acquiesça Sam.
Ils se regardèrent un long moment en silence.
–Il le fera sûrement un jour de toute manière, reprit Jack.
Sam sentit son cœur manquer une pulsation à ces mots. Si la phrase était équivoque, le regard de Jack ne l’était pas. Profondément touchée par cet aveu à demi formulé, elle posa sa main sur celle de son supérieur et lui sourit.
–Quand ça arrivera, je vous défendrai, répondit-elle, d’une voix rendue sourde par l’émotion.
–Alors je n’ai rien à craindre, répondit Jack.
Ils se sourirent et Sam sentit les doigts de Jack glisser doucement entre les siens et serrer sa main. A cet instant, elle sut que tout irait bien.
 
 
 
 
 
Fin
 
 
 
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