Deux mois, soit 61 jours, 1 464 heures ou 87 840 minutes. C'était le temps de sa détention. Pour le commun des mortels, deux mois, c'était court. Mais loin de chez soi, en milieu hostile, retenu prisonnier et vraisemblablement humilié, brimé, torturé, deux mois cela devait paraître une éternité.
Ils étaient en mission sur P1X304 qui comportait, d'après les premières analyses plusieurs petits filons de naquada et pour l'instant, aucun Grand Maître ne semblait en connaître l'existence. Ils devaient donc en profiter, une planète avec du naquada restait rarement inconnue des Goa'ulds. Ils devaient juste estimer le potentiel des filons. Une mission de routine, plus scientifique qu'autre chose. Après avoir effectué différents prélèvements et relevés, l'équipe reprit la direction de la Porte sous le commandement du Colonel O'Neill, plus que ravi de quitter enfin cette planète.
Teal'c et Daniel Jackson franchirent la Porte en premier, suivis de peu par le Major Samantha Carter, Le Colonel Jack O'Neill fermait la marche. Mais sans raison apparente, le vortex s'était refermé avant qu'il n'ait eu le temps de passer. Après plusieurs tentatives et deux jours de travail acharné, le Major Carter avait finalement réussi à rétablir un contact. SG1 et SG3 avaient été envoyées en mission de secours pour retrouver le colonel. Ils avaient parcouru la planète de long en large, des jours entiers mais ne l'avaient pas trouvé. Il avait disparu sans laisser de trace.
Ils avaient contacté leurs alliés, Tok'ras, Asgards et même la rébellion Jaffa, mais rien. Personne n'avait entendu parler de Jack O'Neill. Personne ne savait où il était ni même s'il était encore en vie. Ce fut la mort dans l'âme que le Général Hammond avait fini par le déclarer officiellement porté disparu. Tout s'arrêtait là, du moins en apparence. Le Général avait autorisé SG1 à continuer les recherches mais officieusement évidemment.
Deux mois, c'était le temps qu'il leur avait fallu pour le retrouver et le libérer. Sans l'aide des Tok'ras, ils n'y seraient probablement pas parvenus aussi vite. Ils leur devaient une fière chandelle même si ce n'était que le juste retour des choses. Comme le soulignait souvent le Colonel O'Neill, ils avaient aidé les Tok'ras plus souvent qu'à leur tour et n'avaient jamais eu grand-chose en échange. Enfin, l'essentiel était qu'ils l'aient localisé. Il allait enfin pouvoir rentrer chez lui, retrouver les siens.
Les Tok'ras avaient découvert, grâce à un de leurs espions, qu'il avait été capturé sur P1X304. Un Goa'uld, nommé Exgavus, jusque là encore inconnu, avait entendu parler de la présence de naquada sur cette planète et s'y était rendu dans l'espoir d'y installer une mine d'extraction. Il avait du être déçu par le faible potentiel de cette planète. Mais la capture du Colonel O'Neill, leader de SG1, allait sûrement lui apporter le respect et la reconnaissance des Grands Maîtres dont il avait tant besoin. Son ego démesuré et sa soif de pouvoir étaient comblés par une telle aubaine. Il avait abandonné l'idée d'extraire du naquada sur cette planète et avait emmené sa prise providentielle jusqu'à sa base. Sans son incroyable prétention et vantardise, les Tok'ras n'auraient jamais entendu parlé de ce Goa'uld ni du fait qu'il détenait un chef de la Tauri. Tout ce qu'ils avaient pu apprendre sur sa façon d'agir les avaient incité à alerter le SGC au plus vite. Si c'était bien un Tauri qui était retenu prisonnier, cela ne pouvait être que Jack O'Neill.
Ils n'avaient que peu d'informations et surtout il leur manquait l'essentiel, ils ignoraient encore où était la base de ce Goa'uld. Sans plus de détails, le Général Hammond ne pouvait rien faire. Les Tok'ras avaient fait passé le message pour que tous leurs agents sur le terrain prêtent l'oreille aux rumeurs concernant un Tauri. Ils ne pouvaient faire davantage sans risquer de les compromettre.
Ils eurent enfin la confirmation qu'ils attendaient et redoutaient à la fois: Jack O'Neill était bien retenu par Exgavus. Les informations continuaient à arriver au compte gouttes, essentiellement sur la nature des tortures du Goa'uld. Il était passé maître dans l'art des sévices psychologiques. Blesser physiquement ne l'intéressait guère, trop vulgaire à son goût, lui ne se délectait que du raffinement de ses tortures mentales et psychologiques. Il parvenait à entrer dans l'esprit de ses prisonniers, faisant siens leurs souvenirs et pensées intimes. Puis il les retournait contre ses cobayes, choisissant avec un plaisir non dissimulé leurs souvenirs les plus marquants, les plus douloureux. Il manipulait leurs esprits, détournait leurs pensées intimes en de monstrueux cauchemars. Il voulait les briser psychologiquement, les affaiblir pour qu'ils parlent. Il exposait leurs rêves, travestissait leurs pensées, transformait toutes choses agréables qu'ils avaient en mémoire en une horreur sans fin. Personne ne sortait indemne de ses séances de torture. Les plus faibles cédaient et finissaient par parler pour être aussitôt abattus. Les autres, ceux qui résistaient, glissaient inéluctablement vers la démence et tentaient de mettre fin à leur vie, c'était la seule issue pour échapper à leurs tourments.
Ils savaient tous que le Colonel avait suivi un entraînement spécial pour résister à ce genre de torture, mais ils pensaient aussi que son passé fournissait un immense terrain de jeux à Exgavus. Ils avaient peur, surtout elle. Peur de ce qu'il avait subi, peur des souvenirs auxquels il avait dû être confrontés, à nouveau. Pour la première fois, ils craignaient qu'il ait craqué. Oh non bien sur, pas qu'il les ait trahis, il aurait préféré mourir que de faire ça, mais juste que trop de choses douloureuses, trop de plaies à peine refermées aient eu raison de sa force de caractère et de son mental.
Quelques temps plus tard, ils apprirent que les Tok'ras avaient localisé la base d'Exgavus et que celui-ci s'était enfui en prévision d'une attaque de Ba'al. Apparemment, il s'était aventuré un peu trop près de ses territoires et Ba'al n'avait guère apprécié qu'un petit Goa'uld se permette de le défier. L'attaque n'avait pas encore eu lieu et tous espéraient qu'Exgavus, trop occupé à couvrir ses arrières, avait abandonné les prisonniers derrière lui. De nouvelles rumeurs disaient que Ba'al avait découvert sa fuite et qu'il avait déjà envoyé quelques vaisseaux pour réduire à néant celui qui avait osé le défier. Il y avait peu de chance pour que Ba'al se préoccupe de l'ancienne base d'Exgavus mais dans le doute, il n'était pas question d'envoyer des soldats au massacre, ordre du Président. Le Général Hammond organisa donc une mission de secours officieuse avec le reste de SG1. Pas d'équipe de soutien, pas de renfort, ils partiraient seuls et devraient se débrouiller.
Ils se sentaient déjà mieux, la pression de ces derniers mois retombait un peu, même si une nouvelle appréhension, liée à leur prochaine mission, s’était installée. Et cela leur faisait le plus grand bien. A eux et à leur entourage. Ils n'avaient pas été faciles à vivre durant les deux mois d'absence du Colonel O'Neill.
Ils avaient géré son absence tant bien que mal. Chacun à leur façon. Teal’c avait passé des heures à faire son Kelnor’im et à taper sur un sac de sable, en salle de sport. Daniel, lui s’était abruti dans le travail, tout comme Sam d’ailleurs. L’un ne quittait son bureau et l’autre son labo que pour aller manger et dormir. Ils s’étaient isolés, parlaient le moins possible, chacun se refermait sur sa douleur. Le fait que la vie continuait et que les autres avaient vite repris leur quotidien les agaçait. Mais ainsi allait la vie. Eux n'avaient pu s’octroyer de moment de répit. Chaque minute passait à ne rien faire laissait resurgir la douleur de son absence. Il leur manquait. Le vide qu’il avait laissé leur était insupportable.
Ils étaient réunis au Mess comme ils le faisaient tous les jours ou presque. Il était tard, ils attendaient toujours que le Mess soit désert pour s’y rendre. Bob le cuisinier les avait pris sous sa coupe. Il adorait Jack O’Neill, l’un des rares gradés à le traiter d’égal à égal. Jack plaisantait souvent avec lui sur la qualité de la nourriture, sur ses talents de cuisinier. Alors, lorsqu’il avait appris sa disparition, il s’était senti proche de son équipe, il imaginait leur souffrance. Il avait remarqué que SG1 était plus soudée que jamais, mais aussi plus isolée du reste de la Base. Un soir, il leur avait discrètement proposé de les accueillir plus tardivement s’ils souhaitaient être seuls. Ils avaient accepté son offre presque avec soulagement. Ils commençaient à ne plus supporter les regards incessants et les petits sourires attristés des autres soldats.
Ils étaient donc au Mess, devant leur plateau repas préparé spécialement pour eux par Bob. Ils avaient même ri lorsque celui ci leur avait demandé de ne jamais raconter à O’Neill le traitement de faveur qu’il leur faisait parce que le Colonel serait déçu d’apprendre qu’il n’était plus le seul à en profiter. Ce que le cuisinier avait dit leur alla droit au cœur, il avait toujours, lui aussi, l'espoir de retrouver Jack.
Bob venait de quitter le Mess, ils se retrouvaient juste entre eux.
" C'est tout Jack ça, de savoir s'attirer les bonnes grâces du cuisinier en chef !" s'exclama Daniel.
" Il est vrai que O'Neill accorde beaucoup d'importance à la nourriture", poursuivit Teal'c avec un demi sourire.
Seule Sam resta silencieuse. Elle observait ses amis parler de lui comme s'il était en vie et ça lui faisait beaucoup de bien. Elle sourit en pensant aux réflexions qu'aurait faites le Colonel s'il les avait entendus.
" Sam? Ca va? Vous avez l'air pensive."
" Je vais bien Daniel, j'imaginais juste la litanie qu'aurait fait le Colonel sur l'absolue nécessité de se nourrir correctement."
" Dites plutôt qu'il aurait vanté son incroyable sens diplomatique pour obtenir les faveurs de Bob", répliqua Daniel en riant.
" J'imagine mal O'Neill tenter de séduire le cuisinier, Daniel Jackson"
Sam et Daniel se regardèrent puis tournèrent la tête vers Teal'c en se demandant s'il avait mal interprété le sens des paroles de Daniel. L'air impassible du Jaffa ne leur en apprit guère plus. Dans le doute, Daniel enchaîna.
" Je ne voulais pas dire ça Teal'c, obtenir les faveurs de quelqu'un n'implique pas nécessairement une connotation … sexuelle"
" J'avais bien saisi le sens de vos propos Daniel Jackson", lui répondit le Jaffa en inclinant la tête légèrement et en esquissant ce qui ressemblait à un sourire.
" C'est Jack qui serait fier de vous Teal'c, ajouta Daniel encore surpris par le trait d'humour de leur ami. N'est ce pas Sam?"
" Je le crois aussi, Daniel. Le Colonel ajouterait certainement que c'est grâce à lui que Teal'c s'essaye à l'humour" s'empressa de répondre la jeune femme.
" Je n'aurai jamais cru qu'il me manquerait à ce point" dit Daniel d'une voix douce.
Une nostalgie les étreignit soudainement. Ils repensaient aux bons moments qu'ils avaient passés avec lui. A tout ce qu'ils avaient vécu ensemble.
Daniel repensait au nombre de fois où Jack était venu dans son bureau, alors qu'il était bloqué dans une traduction, et qu’il lui avait remonté le moral, l'air de rien. Daniel réalisait que, même si les piques et réflexions de Jack l’exaspéraient parfois dans ces moments là, elles lui permettaient aussi de se changer les idées. Bien souvent d’ailleurs, juste après que Jack ait quitté son bureau, Daniel parvenait à traduire le passage sur lequel il était coincé l’instant d’avant. C’était un des effets "Jack O’Neill."
Teal'c songeait à leurs combats côte à côte et surtout à leurs parties de golf ou de jonglage lors des boucles temporelles. Il repensa aussi à leur petite conversation dans les vestiaires lorsque Sam avait disparu à bord du Prométhée. Jack n'avait rien dit ou presque mais Teal'c savait qu'il s'était inquiété énormément pour elle. Il ne put s'empêcher de regarder la jeune femme. Elle semblait perdue dans ses pensées, tout comme eux. Elle avait un petit sourire sur les lèvres mais ses yeux n'étaient que tristesse.
Elle le revoyait la pousser dans le Vortex la première fois qu'elle avait passer la Porte, leur discussion sur les futures recrues du SGC et sa réflexion sur le fait qu'il n'avait jamais été jeune. Elle repensa à sa disparition sur Edora, puis au baiser qu'il avait échangé avec son double. Elle avait eu mal, très mal mais elle n'avait rien montré ; de quel droit aurait-elle pu dire quoi que ce soit? Pour quelle raison aurait-elle dû lui faire comprendre qu'il l'avait blessée? Aucune. Ou alors peut-être à cause du test Zatar'c, de ce regard échangé lorsqu'il avait refusé de la laisser seule alors que tout allait exploser ou encore à cause de la façon qu'il avait d'être là pour elle, malgré tout, malgré Pete. Elle réalisa soudain qu'elle n'avait pas appelé ce dernier pour lui dire qu'elle resterait à la base ce soir. Elle le ferait dès qu'elle rejoindrait son labo. Pour l'instant, elle avait besoin de la présence de ses amis. Etre avec eux, c'était presque comme être avec lui, elle avait l'impression qu'il était là quelque part. Pas très scientifique comme réflexion mais c'était ce qu'elle ressentait.
Et Daniel et Teal'c vivaient la même chose. Ils s’attendaient à le voir débarquer à tout instant, pour faire un combat avec Teal’c, pour lancer quelques taquineries à Daniel, pour extirper Sam de son labo.
C'était fou la place que pouvait prendre un seul homme. Son absence leur avait fait prendre conscience de combien il égayait leurs journées, par le seul fait de sa présence. Il savait toujours d'un mot détendre l'atmosphère, donner du baume au cœur. Il pouvait aussi réduire au silence n'importe qui avec ses remarques acérées mais cela, en règle générale, il le réservait aux autres.
Ils se séparèrent sur ces réflexions et regagnèrent leurs lieux de prédilection. Daniel, son bureau, Sam, son labo et Teal'c ses quartiers.
Sam en profita pour téléphoner à Pete. Au bout de quelques minutes, la conversation changea de ton.
" Je suis désolée, Pete, je te l'ai déjà expliqué, j'ai beaucoup de travail, je dois rester ici, il compte sur moi"
" Tu pourrais au moins revenir le soir, t'aérer un peu la tête, te reposer, ça te ferait le plus grand bien, tu as l'air épuisée, Sam"
" Je ne peux pas …"
" Je ne comprends pas Sam"
" Qu'est ce que tu ne comprends pas Pete? "
" Que tu refuses de rentrer à la maison, que tu restes enfermée dans cette Base"
" Fais un effort, il a disparu, on doit le retrouver, ma place est ici"
" C'est la que tu te trompes, ta place est auprès de moi Sam et tu n'as pas à sacrifier ta vie privée pour ça"
" Pour ça? C'est tout ce que tu trouves à dire?" Elle commençait à s'emporter et elle n'aimait pas ça, elle se radoucit un peu. "Si c'était un de tes collègues qui avait des ennuis, tu ne ferais ton possible pour l'aider?"
" Pas au point de mettre notre relation en péril, non. "
" …"
" Sam? "
" Ecoute, je dois raccrocher, je te rappelle plus tard, bonne nuit Pete."
Il regarda le combiné qu'il tenait encore à la main et soupira. Elle ne le rappellerait pas ce soir, ni demain d'ailleurs. Il venait de comprendre qu'il passait au second plan. Il n'était pas sa priorité alors que Lui l'était. Il avait bien noté une certaine réserve dès qu'il lui parlait d'avenir, mais il avait mis cela sur le compte de leur relation encore récente. Il croyait qu'elle voulait prendre son temps. Il avait tort et il venait de s'en apercevoir. Il avait senti la colère et l'agacement qu'elle avait tenté de refouler pendant leur courte conversation. Il pouvait comprendre son attachement à son supérieur, son inquiétude. Il avait déjà connu cette angoisse qu'on ressent lorsqu'un équipier est en danger. Mais de là à mettre sa vie entre parenthèse, non, là il ne comprenait plus. Ou que trop bien.
Un jour où il l'avait questionné sur les membres de SG1, elle avait fini par lui expliquer. Ils étaient ses amis, sa famille, ils se protégeaient, se soutenaient mutuellement. Ils formaient une équipe soudée et efficace. Il avait insisté sur sa relation avec son supérieur. Du respect, de l'admiration, de la fierté. Voila ce qu'elle ressentait pour lui. Pour le supérieur ou pour l'homme ? lui avait-il demandé. Elle avait changé de sujet, très habillement d'ailleurs maintenant qu'il y repensait. Il aurait du comprendre depuis longtemps déjà. Il suffisait de déchiffrer son regard. Brillant, pétillant. Ou encore sa voix, douce, empreinte de respect certes mais un peu mélancolique. Ou encore son sourire, resplendissant quand elle parlait de lui. C'était un véritable automatisme, dès que le nom d'O'Neill était prononcé, elle souriait. Et le pire était qu'elle le faisait machinalement, sans s'en rendre compte. Un jour, il lui avait fait remarqué gentiment qu'il serait aux anges le jour où elle lui ferait un tel sourire. Elle lui avait mis une petite tape sur l'épaule en le traitant d'idiot et l'avait embrassé. Il avait bien remarqué son air embarrassé mais n'y avait pas prêté une attention particulière. Il aurait dû. Il repensa une bonne partie de la nuit à chaque réaction qu'elle avait eue lorsque le sujet de discussion déviait sur O'Neill. Il songea à son comportement lorsqu'elle sortait de la base en même temps que son supérieur alors que lui l'attendait bien sagement dans la voiture. Il revoyait leur air complice puis son attitude gênée quand elle l'apercevait alors qu'il sortait de la voiture. Il réalisa qu'elle évitait au maximum toutes ses marques d'affection quand O'Neill était dans les environs.
Fallait-il être stupide et aveugle pour ne pas avoir vu l'évidence. Il aimait Sam, de cela il est certain, mais il n'avait pas l'intention de rester dans l'ombre de ce militaire. En restant à la base cette nuit, une de plus, elle avait fait un choix. Même si elle n'en avait pas conscience, elle avait choisi son supérieur et pas l'homme qui partageait sa vie depuis quelques mois. La triste réalité venait de lui sauter au visage. Il allait partir et la laisser assumer ses actes. Il allait sortir de sa vie, il l'en informerait dès qu'elle se souviendrait qu'il existait et qu'elle prendrait enfin le temps de le contacter.
Sam avait raccroché car elle sentait que le terrain devenait glissant. Elle connaissait assez Pete pour savoir qu'il n'allait pas tarder à faire des sous entendus déplacés, et cela, elle ne l'aurait pas supporté. De plus, avec la mission qui l'attendait le lendemain, elle n'avait pas la tête à se quereller ou à se justifier. Elle avait conscience de le blesser mais il n'était pas sa priorité. Pas avec ce qui se passait. Le fait qu'il ne comprenne pas l'avait énervée. Comment pouvait-il être aussi obtus, insensible?
Elle finit par rejoindre ses quartiers. Il serait bien assez temps de penser à Pete une fois la mission terminée. Lorsqu'ils auraient ramené le Colonel à la maison.
SG1 venait d'arriver sur la planète de Exgavus, cet endroit était affreux et glacé. Tout était froid, gris, humide, mort. Rien. Il n'y avait pas un bruit, pas âme qui vive.
Ils fouillaient chaque coin et recoin, chaque cachot, chaque cellule. Et toujours rien. Tout n'était que désolation. Et toujours cette odeur. Entêtante, écoeurante. Une odeur de mort et de folie. C'était pesant, étouffant. Ils avaient la désagréable sensation qu'une chape de plomb s'était abattue sur eux. Oppressant, terrifiant. Ils étaient des militaires aguerris, rompus à ce genre de spectacle mais cette fois c'était différent. Il avait été retenu ici. Deux mois de sa vie, parqué ici, comme un animal, dans une de ces cellules malodorante, exigu, si basse qu'aucun homme de taille normale ne pouvait tenir debout, sombre, souillée par la moisissure, les excréments, le sang. Empestant la folie, la souffrance, la mort. Ils voyaient dans certains cachots des traces sur le mur, des traces d'ongles laissées à force de désespoir et de souffrance. Et ils ne le trouvaient toujours pas.
Et soudain, au détour d'une cellule, ils sentirent une présence. Le major Carter braqua sa lampe et découvrit un homme, du moins c'était ce qu'il lui semblait. Elle vit d'abord une forme humaine, recroquevillée sur elle-même, puis une barbe grisonnante, des cheveux hirsutes et un regard qu'elle entre aperçut. De toute sa vie, elle n'avait vu un tel regard. Il n'était que peur et résignation. L'homme redressa la tête et chercha à voir qui lui braquait cette lumière aveuglante. Et là, elle sut que c'était lui, celui qu'ils étaient venus chercher. Elle reconnut immédiatement la brève étincelle de provocation et de rébellion dans ses yeux marrons, son air borné et bravache. C'était bien lui, ils l'avaient enfin retrouvé. Elle appela ses compagnons et Teal'c s'approcha. Elle avait baissé la lampe pour éviter de l'éblouir, il pouvait maintenant voir qui était en face de lui. Le grand Jaffa s'avança doucement vers lui. Il sortit de sa tanière en rampant, déplia ses longues jambes, se leva doucement et tomba dans les bras de Teal'c. Il s'accrochait à lui comme si sa vie en dépendait. Il finit par sourire timidement, il avait l'air tellement soulagé. Il avait les yeux humides mais bien sûr aucune larme ne coula. Teal'c avait l'air aussi bouleversé que lui. Tous l'étaient. Son cauchemar, son enfer était terminé. Ils pouvaient le ramener chez lui, chez eux.
Ils durent le soutenir pendant tout le trajet, il était trop faible. Il ne parlait pas, il avait toutes les peines du monde à tenir sur ses jambes. Il avait des vertiges et un horrible mal de tête, il était affamé et le pire de tout assoiffé. Jamais il n'aurait cru avoir si froid et si soif en même temps. Il avait voulu boire mais le major Carter avait refusé, elle avait reconnu les signes de déshydratation et ne voulait prendre aucun risque. Il était fiévreux, sa tension était très basse, les muscles autour de ses yeux étaient distendus. Elle lui avait juste humecté les lèvres à plusieurs reprises. Il comprenait mais avait quand même une furieuse envie de sentir un peu de fraîcheur couler au fond de sa gorge.
Ils rejoignirent la Porte sans aucune difficulté, la rumeur sur Ba'al semblait vraie, il n'était pas venu. Arrivés à la Base, le Colonel O'Neill fut immédiatement pris en charge par une équipe médicale. Il s'était évanoui depuis un bon moment déjà.
L'information de son retour avait empli le SGC d'une bonne humeur disparue depuis quelques temps déjà. Même si la vie avait repris son cours, personne n'avait oublié Jack O'Neill. Et surtout pas SG1. Eux aussi étaient très heureux de le revoir parmi eux, mais ils avaient vu son état déplorable et ils se demandaient comment il allait réagir. Ils avaient du mal à imaginer ce qu'il avait traversé même si les cachots leur avaient donné une vague idée de l'horreur de sa captivité.
Ce fut dans cet esprit que SG1 se rendit au débriefing. Le Général Hammond les accueillit avec le sourire.
"Ravi de vous voir de retour et surtout avec le Colonel O'Neill. Major, vous pouvez commencer"
Elle raconta leur arrivée sur la planète, l'atmosphère désolée des lieux, leur longue recherche, l'étrange absence de prisonniers.
"Nous avons fini par retrouver le Colonel O'Neill dans un recoin isolé au milieu des cellules."
"Il était seul?"
"Oui, Mon général, il n'y avait personne. Juste quelques cadavres mais personne en vie, à part le Colonel."
" Nous attendrons le réveil du Colonel pour en apprendre plus. Pour l'heure, il est toujours inconscient mais son état est stationnaire. Le médecin m'a dit que vous aviez eu raison de ne pas lui donner à boire et à manger. Il est dans un état de déshydratation avancée et a beaucoup maigri, son organisme n'aurait sûrement pas supporté l'ingestion de quelques substances que ce soit. Il va devoir suivre un régime spécial et adapté le temps que son métabolisme se régénère. Les prochaines 24 heures seront déterminantes. Vous pouvez disposer. Et temps que j'y pense, vous avez retrouvé le Colonel O'Neill par hasard au cours d'une mission, cela va de soi."
"Vous nous demandez de mentir Général?"
"Ne vous inquiétez pas pour ça Docteur Jackson, il me faut un rapport officiel mais le Président n'a pas envie que le NID apprenne que le SGC a organisé une mission officieuse contre son avis."
"Vous lui avez dit?" Il semblait incrédule
"Disons que le Président a eu beaucoup de mal à croire à cette heureuse coïncidence, mais comme il apprécie énormément le Colonel et qu'il respecte notre travail, il a accepté de fermer les yeux … pour cette fois."
"C'est surtout qu'il doit y voir son intérêt."
"C'est possible en effet, mais l'essentiel n'est pas là. Ce sera tout pour l'instant."
Tous quittèrent la salle de réunion. Le Major Carter se rendit à l'infirmerie où elle rencontra le médecin en charge du Colonel.
"Comment va-t-il?" demanda-t-elle aussitôt.
"Il est très affaibli, mais n'a pas de trace de blessure. Ce qui m'inquiète le plus c'est sa déshydratation. J'ignore depuis combien de temps il n'a nu bu ni mangé correctement, mais je n'avais jamais vu ça. La plupart de gens n'auraient pas survécu. Il est vraiment solide."
Cette dernière remarque fit sourire le Major.
"Il devrait bientôt se réveiller?"
"Je l'ignore mais dès qu'il sera conscient j'en informerai le Général. Si vous voulez bien m'excuser, Major, je dois surveiller sa réhydratation. Il serait dommage qu'il nous quitte parce que je n'aurais pas remarqué un œdème du poumon ou un infarctus cérébral, non?"
"Evidemment, je vous laisse."
Elle sortit de l'infirmerie en repensant aux dernières paroles du médecin. Si Janet avait été là, jamais elle ne se serait permise de faire ce genre d'humour déplacé.
Les jours passèrent. Le Colonel se remettait doucement des séquelles physiques de sa détention. La solution glucogéne qu'ils lui avaient administrée par perfusion avait eu les effets escomptés. Il dormait beaucoup et parlait peu. Le Général était venu le voir avec SG1 et il leur avait raconté comment il s'était fait prendre. Le vortex s'était fermé et il n'arrivait plus à activer la Porte, il avait donc attendu qu'ils viennent le chercher. Malheureusement pour lui, un vaisseau Goa'uld était arrivé entre temps. Il s'était caché mais avait été capturé et emmené pour être "présenté" au maître des lieux. A partir de là, tout était confus, il n'avait que des bribes de souvenirs. Il se souvenait du froid, de l'humidité, il revoyait son cachot, il entendait des gens crier, il sentait sa gorge s'assécher au fil des jours et son estomac être tiraillé par la faim. Il se rappelait avoir profité d'un moment de panique, pendant l'évacuation des prisonniers, pour se cacher. Mais il ne se rappelait pas des tortures qu'il avait subies. Il n'avait pas la moindre idée de ce qu'on lui avait fait et il avait du mal à le supporter. Il préférait savoir. Le Général lui proposa de rencontrer un psychologue mais il refusa, il n'aimait pas ces gens là. Il les questionna sur ce qui s'était passé durant son absence. Ils lui racontèrent tour à tour et finirent par lui dire que Exgavus avait été tué par Ba'al. "Carter, vous me ferez penser à le remercier la prochaine fois qu'on le croisera" avait dit Jack en souriant. C'était le premier trait d'humour qu'il faisait depuis son retour et tous surent l'apprécier à sa juste valeur.
Il pouvait à nouveau s'alimenter normalement alors il avait rejoint son équipe au Mess, après avoir bataillé avec le médecin qui refusait de le laisser quitter son lit. Lorsqu'il pénétra dans le Mess tous les regards étaient fixés sur lui, tous les soldats le saluaient. La plupart d'entre eux ne l'avaient pas revu depuis son retour. Il leur rendit leur salut et après s'être servi, il alla s'asseoir avec ses amis.
"Quel accueil Jack, ça fait plaisir, non?" lui demanda Daniel tout sourire.
"Et oui Daniel, deux mois sans me voir et tout le monde est perdu, c'est pas à vous que ça arriverait ça" lui dit Jack en lui mettant une tape sur l'épaule.
La discussion continuait sur le même ton lorsque Sam remarque l'air absent du Colonel. Il avait des flashs, il se revoyait face à Exgavus, il avait mal, tellement mal. Après avoir rassuré ses amis, il retourna à l'infirmerie. Cela avait été la condition du médecin en échange d'un repas au Mess. Bien entendu, il ne dit rien au médecin sur ses flashs back.
Il était épuisé, chaque nuit il se réveillait, en sueur, terrifié, le cœur battant à tout rompre, il savait qu'il rêvait souvent de Charlie mais il ignorait pourquoi ça le rendait si mal, il croyait pourtant avoir surmonté sa perte. Le médecin en informa le Général Hammond qui ordonna à Jack de suivre une thérapie. Evidemment, le docteur Mac Kenzie n'en tira rien. Il refusait de parler, prétextant que tout était flou, qu'il n'avait que de vagues réminiscences. Il n'avait aucune envie de parler de son fils avec ce "fouilleur de méninges" comme il se plaisait à l'appeler. Il devenait de plus en plus taciturne. Il avait eu l'autorisation de rentrer dans ses quartiers, alors il s'y enfermait et tentait vainement de se souvenir. Il avait l'impression que tout était là, qu'il lui fallait juste la bonne clé pour y accéder. Les séances avec Mac Kenzie ne donnaient toujours pas de résultats. Lorsque celui-ci fit son rapport au Général, il parla de blocage psychologique suite à un fort traumatisme et du temps qu'il lui faudrait.
Le temps était justement ce qui commençait à leur manquer. Les missions de SG1 avaient été suspendues en attendant le rétablissement du Colonel mais là, le Général ne pouvait plus se permettre de laisser une équipe "au repos". Surtout pas SG1. Il ordonna une nouvelle évaluation du Colonel. Les médecins refusèrent encore de le laisser reprendre les missions. Ce qui l'avait exaspéré et lui avait fait perdre son légendaire sang froid.
Toute l'équipe était en salle de réunion avec le Général.
"Mon Général, vous devez me remettre sur le terrain, je vais devenir dingue si je reste ici" supplia presque Jack.
"C'est hors de question Colonel, vous n'êtes pas en état d'assurer le commandement de votre équipe, pour le moment du moins"
Jack allait rétorquer lorsque le Major Carter prit la parole.
"Mon Général, d'après les dires du docteur Mac Kenzie, si le Colonel O'Neill parvenait à se souvenir, ses cauchemars devraient s'arrêter et son état devrait s'améliorer, non?"
Hammond acquiesça. Elle poursuivit.
"On pourrait demander l'aide des Tok'ras pour utiliser leur activateur de mémoire, enfin, si le Colonel est d'accord" dit elle en le regardant. Elle savait qu'il n'aimait pas les Tok'ras mais elle espérait qu'il allait accepter.
"Il me semblait pourtant que vous n'aviez pas gardé un bon souvenir de cette expérience, Carter, et vous voudriez que j'accepte?"
"C'est peut-être votre seule chance, Jack" intervint Daniel.
"Et surtout, le seul moyen pour reprendre rapidement du service, O'Neill" conclut Teal'c.
Sam leur fit un signe de tête pour les remercier de leur soutient, ce qui n'échappa pas à Jack.
"Vous êtes tous ligués contre moi, c'est ça?" dit il en souriant doucement.
"C'est à vous de décider Colonel, mais tant que vous n'aurez pas réglé votre problème, vous ne quitterez pas cette base"
Il savait qu'il n'avait pas le choix. Il ne supportait plus de rester inactif et il voulait savoir pourquoi le souvenir de son fils le hantait de nouveau. Il accepta, comme l'avait dit Daniel avec juste raison, c'était sa seule chance.
Ils contactèrent les Tok'ras qui, à leur grande surprise, acceptèrent bien volontiers de prêter leur concours. Lorsque Anise et Ploun'k arrivèrent et leur expliquèrent le fonctionnement de l'activateur, ils comprirent tout de suite la raison de leur empressement. Les Tok'ras l'avaient modifié, ils en avaient développé la puissance et maintenant ils pouvaient voir sur un écran la projection des souvenirs. Ils justifièrent ce dernier point par le fait que certaines personnes n'étaient pas suffisamment précises lorsqu'elles racontaient leurs souvenirs et que cela leur avait déjà porté préjudice. Ils expliquèrent également que les visions se déroulaient comme un film, le produit qu'ils injectaient au "patient" transformait sa façon de voir les choses et il était intégré dans ses souvenirs. Ceux qui regardaient l'écran voyaient donc le "patient" agir et pas uniquement ce qu'il avait vu.
Ils s'étaient installés dans une petite salle, le Colonel ne semblait plus décidé à recourir à cette nouvelle technologie.
"Colonel, vous voudrez bien prendre place" lui dit Anise en lui montrant un siège.
"Euh, je peux réfléchir encore un peu? Parce que voir ma vie sur grand écran, très peu pour moi, je suis un grand timide, moi" dit Jack avec un sourire en coin.
"Colonel, vous ne pouvez faire marche arrière, nous ne sommes pas venus pour rien."
"Euh … Plouc, c'est ça? Pas facile à porter …"
"C'est Ploun'k, Jack" le reprit Daniel
"Oui, peu importe. Ecoutez, Punk…"
"Ploun'k"
"Ca va Daniel! C'est ma vie que vous allez voir, alors j'ai bien le droit de décider si je veux devenir une star, non?"
Anise voulut intervenir mais Sam l'en empêcha d'un simple regard. Elle entraîna le Colonel à l'écart.
"Carter?"
"Mon Colonel, je sais que ça ne vous plait pas mais c'est votre seule chance"
"Ca vous plairait à vous? Vous apprécieriez que je vois vos petits secrets?"
"Ils vont juste activer votre mémoire épisodique en vous donnant des mots clés, ils ne remonteront pas plus loin que les quelques mois passés."
" Vous y veillerez?" Il la regardait droit dans les yeux.
Elle put voir qu'il appréhendait cette expérience mais aussi qu'il avait confiance en elle. Elle ne savait pas ce qui allait ressortir de tout ça, mais elle allait faire son possible pour préserver au maximum sa vie privée.
" Oui, Mon Colonel, comptez sur moi" lui répondit-elle en souriant.
Il s'installa sur le siège pendant que les Tok'ras l'équipaient. Ils n'étaient que cinq dans la pièce, un infirmier, Anise, Ploun'k, Sam et Jack. Le Général Hammond, Teal'c et Daniel assisteraient à l'expérience depuis la salle de contrôle de l'infirmerie. Jack allait rester conscient pendant toute l'expérience mais il serait dans un état quasi-hypnotique. Avec les modifications faites sur l'activateur, le "sujet" n'avait plus besoin de parler.
"Bien, nous allons commencer, vous êtes prêt Colonel?"
"Mais bien sûr Anise, j'ai hâte que ça commence"
Si elle avait perçu l'ironie elle n'en montra rien. Sam adressa un sourire à Jack et lui fit un signe d'encouragement auquel il répondit par un léger haussement d'épaule signifiant sûrement "quand faut y aller …"
"Nous allons procéder à un petit test pour voir si tout fonctionne correctement."
"Ah parce que vous n'êtes pas sûr que ça marche? Rassurez moi, vous savez le faire aller au moins ce truc?" Sa voix était emplie de sarcasmes.
"Evidemment Colonel. Allons y. Qu'avez-vous fait hier vers 10h00?"
L'écran s'alluma. Ils le voyaient faire une partie de boxe avec Teal'c. Ce dernier fit un signe montrant que c'était bien ce qu'ils avaient fait.
"Et le 23 de ce mois, en début de soirée?"
L'écran se brouilla, effaçant l'image de la salle de sport et la remplaçant par le labo du Major Carter. Il était venu la chercher pour aller au Mess et lui avait fait un discours sur la nécessité vitale de s'alimenter. Elle avait ri et ils étaient sortis en plaisantant.
Ils souriaient, lui en se souvenant et elle en se revoyant avec lui sur cet écran. Elle pensa que c'était vraiment étrange de se voir comme ça. D'autant plus qu'elle avait l'impression de se voir avec ses yeux à lui. Elle espérait subitement que la prochaine question des Tok'ras concernerait sa captivité. Même s'ils n'avaient jamais rien fait de contraire au règlement, elle préférait éviter qu'on la voie à l'écran, surtout lorsqu'il était dans les parages. Enfin, façon de parler, si elle apparaissait c'est qu'il était là puisque c'étaient ses souvenirs à l'écran. Elle se concentra à nouveau sur l'expérience.
"Vous arrivez sur P1X304, vous y êtes?"
Ils voyaient la planète, les grandes plaines à perte de vue. Ils le voyaient, assis sur un rocher, observant les alentours, une main posée sur son P90, l'autre martelant son genou, l'air visiblement "passionné" par la mission.
Le Général ne put s'empêcher de demander s'il était toujours comme ça. Le petit sourire des deux hommes présents avec lui fut suffisamment éloquent. Toutefois Daniel crut bon de préciser que c'était encore pire pendant les missions archéologiques. Ce qui n'étonna pas outre mesure le Général.
Teal'c était un peu plus loin, surveillant lui aussi la zone pendant que Daniel aidait Sam à faire les relevés de naquada. Ils avaient fini les prélèvements et se dirigeaient vers la Porte. Les trois premiers membres passèrent sans encombre puis ce fut la fermeture du vortex.
- - - - - - - - - - - - - - - -
Ils allaient enfin savoir ce qui lui était arrivé. Ils allaient découvrir deux mois de sa vie. Ils s'apprêtaient à pénétrer dans ses souvenirs, à voir sa vie de prisonnier étalée devant eux. Sam frissonna malgré elle. Tous étaient tendus, seul Jack semblait serein, les produits que les Tok'ras lui avaient fait prendre devaient y être pour beaucoup.
- - - - - - - - - - - - - - - -
- Manquait plus que ça, fut la première chose qu’il avait dit lorsque le vortex avait été rompu. Il avait tenté à plusieurs reprises de réactiver le DHD, sans aucun succès. Il s’était alors caché derrière un gros rocher, seul abri présent près de la Porte en attendant les secours. Il ne s’inquiétait pas outre mesure, Carter allait résoudre son petit problème en moins de temps qu’il ne fallait pour le dire et il pourrait rentrer chez lui.
La nuit commençait à tomber. Apparemment, Carter avait quelques difficultés mais il savait qu’elle allait s’acharner jusqu’à ce qu’elle trouve la solution. Il prit son mal en patience, grignota une des barres énergétiques qu’il avait dans son barda et finit par s’assoupir. Au petit matin, son instinct le réveilla. Il avait cru entendre un bruit sourd. Il resta à couvert, vérifia ses armes et passa la tête discrètement pour observer les environs. Rien. Il entendit à nouveau le même bruit et leva les yeux au ciel.
- Génial, des serpents! C’est bien ma veine, pensa-t-il en apercevant un vaisseau Goa’uld. Il chercha un nouvel endroit pour se cacher mais il n’y avait aucune planque à proximité.
- Foutue planète. Une petite mission scientifique de routine avait dit le Général. Ben voyons.
Il garda sa position en espérant que les Goa’ulds atterriraient loin du rocher qui ne lui offrait qu’une maigre couverture.
- Raté. Evidemment, c’était trop leur demander.
Le vaisseau venait de se poser à une centaine de mètres de lui. Il regarda avec effarement les dizaines de Jaffas qui en sortaient. Ca n’allait pas tarder à chauffer pour son matricule. Il en vit quelques uns se diriger vers lui. Il envisagea plusieurs solutions mais il avait suffisamment analysé la situation, critique, dans laquelle il se trouvait pour savoir qu’il n’avait guère de choix. Tirer à tout va ne servirait à rien hormis à attirer davantage de Jaffas, en plus l'idée de se faire blesser voire tuer ne l'enchantait pas du tout. Attendre qu'ils le repèrent, c'était le meilleur choix. Il aviserait ensuite. Il voulait laisser une trace, un message pour que SG1 sache ce qui c'était passé mais c'était déjà trop tard. Il était cerné. Il fut rapidement emmené dans le vaisseau. Son manque de résistance lui évita quelques coups. C'était toujours cela de gagner.
- Autant être en forme pour la suite des réjouissances.