Tu te retrouves seule devant cette maison qui aurait pu être la tienne. Mais voilà, une partie de toi ne voulait pas lâcher ce en quoi tu avais cru pendant de nombreuses années. De toute façon, tu devais bien reconnaître que tu ne t'étais jamais vue aller jusqu'à l'autel, vers Pete. A chaque fois que tu pensais à ton mariage, malgré toi ce n'était pas lui que tu te voyais rejoindre.
            Tu finis par te lever du banc et prends soudain conscience que vous étiez venu jusqu'ici avec la voiture de ton ex-fiancé. Te voilà donc errant dans les rues de Colorado Springs. Tu pourrais appeler la base pour qu'on t'envoie une voiture, mais tu n'as pas envie d'y retourner maintenant. Une brise souffle et tu resserres tes bras autour de toi, essayant de te réchauffer. Tu ne sais pas où tu vas et à vrai dire tu t'en moques bien. Tout ce qui compte pour toi pour le moment c'est de marcher, de t'éloigner de ce qui avait failli devenir ta vie.
            Ton esprit finit par remarquer que tu connais les rues que tu parcoures et, quand tu lèves les yeux, tu te retrouves une fois de plus en l'espace de quelques jours devant la maison de ton supérieur. Tu te rends alors compte que sa voiture est là. Sans le vouloir vraiment, tu te remets à marcher et te tiens maintenant devant sa porte. Alors que tu lèves la main pour frapper, la porte s'ouvre et ton geste se suspend.
            Il te regarde, surpris de te voir sur son perron. Tes yeux ont du dévoiler quelque chose car, quelques secondes plus tard, il te serre dans ses bras. Alors pour la première fois depuis des jours, tu laisses tes émotions t'envahirent et te mets à pleurer contre son épaule. Tu sais que tu es en train de lui tremper sa chemise mais tu ne peux pas arrêter tes larmes; c'est plus fort que toi.
            Tout en te serrant contre lui, il recule, te faisant rentrer dans la maison, et ferme la porte d'entrée. Tu t'accroches désespérément à lui; il est ta bouée de sauvetage, il a toujours été là pour toi quand tu n'allais pas bien, et tu sais qu'il le sera toujours quelles que soient les circonstances. Tu le sens te serrer encore plus fort contre lui, à t'en étouffer presque, mais tu t'en moques car tu en as besoin.
            Tes larmes finissent par te tarir mais des sanglots te secouent toujours. C'est à ce moment que tu sens une de ses mains caresser ton dos, tandis que l'autre faisait de même sur tes cheveux. Tu te souviens alors de la dernière fois où vous vous étiez retrouvés dans cette même position; Janet venait de mourir et tu avais failli le perdre aussi. Cette fois, c'était presque similaire; tu avais perdu ton père et tu avais là aussi failli le perdre en quelque sorte.
            Tes sanglots finissent par s'estomper et tu le sens se séparer de toi. A regret, tu le laisses s'éloigner, tes yeux clos. Tu sens alors qu'il efface les traces de tes larmes sur tes joues avec ses pouces. Ses lèvres se posent sur ton front en un signe de réconfort qui signifie bien plus que ça pour tous les deux.

 

"J'ai rompu avec Pete," lâches-tu alors.

 

            Tu vois alors une petite lueur illuminer ses yeux mais elle disparaît aussitôt. Mais tu l'as vu et c'est ce qui compte le plus pour toi. Tu lui décoches un petit sourire, lui faisant comprendre que tu ne regrettes pas ta décision.

 

"Vous êtes sûre de vous? Je veux dire, avec la mort de Jacob…"
"Oui, je le suis. Il fallait que je le fasse."
"Vous êtes venue comment jusqu'ici?" demande-t-il, se rappelant soudain qu'il n'avait pas vu sa voiture dehors.
"A pied. On était allé à la maison qu'il nous avait acheté avec sa voiture et il est parti."
"Il vous a laissé seule?"
"Je ne peux pas lui en vouloir. J'avais besoin de marcher en plus."
"On devrait retourner à la base. J'étais juste venu…"

 

            Il s'interrompt et tu vois qu'il ne sait pas comment te dire le reste. Tu comprends alors que ça devait avoir un rapport avec Kerry et ton cœur se serre rien qu'en y pensant.

 

"Kerry et moi on a rompu. Enfin, c'est elle plutôt. Elle est venue récupérer quelques affaires et comme j'avais besoin d'une pause avec tout ce qu'il se passe."

 

            En entendant ces mots, tu sens une vague de soulagement t'envahir. Tout semble revenu à la normale; plus de Pete, plus de Kerry, plus rien entre vous à part cette loi.

 

"Vous avez raison, on ferait mieux de rentrer au SGC. On a du pain sur la planche."
"Oui et dès que tout sera fini et qu'on aura récupéré Daniel, on prend tous les quatre des vacances et on monte au chalet."
"D'accord," réponds-tu, le plus simplement du monde.

 

            Tu vois dans ses yeux qu'il est surpris que tu aies accepté aussi vite. Il avait sûrement pensé qu'il devrait user de nombreux arguments pour que tu viennes enfin. Mais tu as envie depuis trop longtemps de découvrir son chalet que la réponse fut immédiate.

 

"Génial," dit-il alors.

 

            Tu vois alors une lueur dans ses yeux ce qui te fait sourire, ce sourire que tu ne réserves qu'à lui. Vous savez tous deux que ce chalet n'est qu'une façon implicite de dire que tu es prête à passer à l'étape suivante. Même si ta route est encore semée d'embûches, tu sais parfaitement que ce qui t'attend au bout vaut le coup.