2ème partie
COMME UN ESPOIR QUI NE VEUT PAS MOURIR…
Carolina laissait les larmes couler sur ses joues. D’ailleurs elle ne s’apercevait même pas qu’elle pleurait.
Depuis la fenêtre de sa chambre, elle voyait la neige tomber sur New York.
Cela faisait maintenant deux mois qu’elle était revenue de la base de Cheyenne Mountain. Elle ne sortait pratiquement plus de chez elle, et avait lâché son travail. Pourtant ils devaient l’attendre quelque part dans un pays en guerre. Elle voulait changer de vie, mais elle n’avait pas pris de décision. Elle ne pouvait pas.
Dès qu’elle fermait les yeux, elle se revoyait le dernier jour dans la salle de briefing leur annonçant le résultat de l’évaluation. Elle ressentait jusqu’au plus profond leur indifférence à tous. Elle n’était que de passage. Une personne qui était entrée dans leur vie qu’un court instant et qui n’avait rien laissé derrière elle qu’un vague souvenir si vite oublié.
Elle ne vivait plus que pour les instants extraordinaires qu’elle avait vécus dans la prison, quand après s’être libérée par un flot de paroles, elle s’était retrouvée dans ses bras. Elle l’avait embrassé, il avait répondu à son baiser, il avait eu envie d'elle pendant un court instant. Puis tout s’était dilué. Il ne lui restait que les larmes. Après son départ précipité de la base elle n’avait senti qu’un grand vide. Je ne le reverrais plus, jamais. Un couperet ce mot, pourtant il était doux sous la langue, rien de brutal dans ses syllabes, une douceur trompeuse, et définitive. Quoi de plus terrible quand on se dit qu’on a vécu intensément pendant quelques minutes, et que c’est déjà fini, à peine commencé. Voilà ce que la vie avait donné à Carolina French, quelques minutes d’un bonheur sans partage, et puis déjà le vide.
Elle ne souffrait plus de ses fantômes, la vie s’ouvrait devant elle, mais pour quoi ?
Elle laissait les larmes couler, le front sur la vitre glacée de la fenêtre.
Carolina était restée en contact avec Eva Jordan, médecin à la base. Elles avaient travaillé ensemble quelques jours et avaient vite sympathisé. Eva était une jeune femme dynamique, toujours souriante et bien dans sa peau. Elle élevait seule un petit garçon de neuf ans, qu’elle ne voyait pas souvent. Malgré cela elle dégageait une joie de vivre, que Carolina lui enviait.
Elle relut le dernier e mail de son amie.
« La vie continue, nous avons ici un travail fou. Une équipe est revenue avec un virus. Avec le médecin chef, nous avons dû travailler plusieurs jours pour trouver un remède. Une autre fois, ils avaient été blessés par des armes blanches. »
Et Eva continuait sur ce ton, sans jamais parler du projet Porte des étoiles. C’était top secret et bien trop dangereux à utiliser sur le net. Alors elle parlait d’armes en restant assez floue. Elle parlait d’équipe mais pas de SG suivi d’un chiffre. Elle nommait les gens par l’initiale du prénom… Mais Carolina savait toujours de quoi et de qui elle parlait. Quand elle voyait un S un T ou un D son cœur battait un peu plus fort. Quelque fois un J passait. Alors elle relisait le passage des dizaines de fois. Elle se tenait ainsi au courant de leur vie.
Un jour Eva lui apprit qu’on cherchait un nouveau médecin. Le service s’agrandissait. Il y avait trop de travail pour seulement deux médecins. Un troisième serait le bienvenu.
-Ce serait idéal pour toi lui avait dit Eva pendant un des séjours de Carolina à Colorado Springs, chez son amie.
-Tu crois ? Dit-elle d’un ton peu convaincant. Elle ne voulait surtout pas mettre la puce à l’oreille de son amie par un ton trop enthousiaste.
Mon dieu, je vais peut-être le revoir. Pensa t-elle en tremblant d’émotion.
Elle dut pâlir un peu car son ami s’inquiéta :
-Tu vas bien ?
-Oui, parle-moi un peu de ce poste. Il est vrai que je suis à un tournant de ma carrière. Je recherche quelque chose de différent, mais je ne voudrais pas faire de la médecine classique. Je pense que je m’y ennuierais.
-Alors ce poste est fait pour toi ! D’ailleurs, ajouta –telle malicieusement, je me suis permis d’en parler au général Hammond. Tu as rendez-vous avec lui dans l’après midi.
-Quoi ? Elle était stupéfaite !
-Tu n’es pas fâchée j’espère ?
-Oh non pas du tout, c’est que c’est si soudain, je ne m’y attendais pas dit-elle d’une voix blanche.
-Tu es sûre que tout va bien ? Son amie s’inquiétait.
-Très bien, dit-elle. Je crois même que c’est une excellente idée. Son cœur battait à grands coups sourds comme s’ il allait se décrocher. Elle adorait ce flot d’adrénaline qui courait dans ses veines. Elle se sentit d’un coup revivre, sa dépression envolée, et l’espoir renaître en son cœur.
Elle se reprit : Ce n’est pas toi qu’il aime, grande folle, tu n’as aucune chance. Mais elle s’en fichait, tout ce qu’elle voulait c’était le voir. Et puis un poste de médecin à la base impliquait qu’elle les verrait très souvent, Sam, Daniel et Teal’c aussi qu’elle aimait aussi beaucoup. A chaque retour de mission il y avait une visite médicale approfondie. Elle les verrait vraiment très très souvent. Elle s’en réjouissait.
-Alors on y va quand ?
-J’ai les autorisations pour t’emmener là bas dès maintenant.
-Maintenant ?
Carolina n’était plus tout à fait sûre d’avoir envie d’y aller tout de suite. Elle reculait. Mais son amie ne comprendrait pas.
-C’est d’accord ajouta–t-elle d’une voix ferme.
Cheyenne Mountain apparut au détour d’un virage. Carolina le nez collé à la vitre ne voulait rien perdre du voyage. Eva ralentit. Elle dut montrer patte blanche avant d’entrer. N’entrait pas qui veut. Il y avait d’abord la grille extérieure à passer, puis de nombreux barrages. Il fallait du temps pour parvenir dans l’ascenseur qui les descendait au cœur de la base.
Des soldats en faction dans les couloirs, des caméras de surveillance partout. Nul ne pouvait passer inaperçu dans ce lieu. Elle ne fut donc pas surprise de rencontrer le général Hammond qui l’attendait à la porte de son bureau.
Il l’accueillait à bras ouverts comme une personne indispensable, cela l’étonna, puis elle se rappela qu’elle était quelqu’un de reconnue dans le monde médical. C’était cette réputation qui lui avait ouvert les portes de la base la première fois. Elle avait un peu tendance à oublier cette notoriété qui était la sienne, elle trouvait cela un peu surfait. Elle était le docteur Carolina French médecin spécialiste, en médecine traumatique. C’était un titre un peu ronflant mais qui pouvait recouvrir bien des choses, les blessures physiques et surtout morales des victimes après des attentats , des agressions.
Le travail qui l’attendait à la base serait un peu différent.
-Vous aurez la responsabilité de l’infirmerie conjointement avec le docteur Frazier, lui expliqua le général Hammond. Elle reste médecin chef titulaire, mais elle souhaite passer plus de temps à faire de la recherche. C’est vous qui vous occuperez des équipes au retour de leur mission. Ne croyez pas que ce sera une tâche facile, il y aura beaucoup de travail.
-Je pourrai commencer quand ?
-Mais quand vous voulez dit Hammond, je suppose que vous avez des choses à régler avant.
-En effet général, je souhaiterais prendre un logement ici même à Colorado Springs pour me rapprocher de mon travail.
-Mais s’étonna Hammond, vous aurez des quartiers à la base, cela va sans dire et vous serez obligée de loger sur place pendant votre service.
-Merci général. Mais je souhaite avoir un petit chez moi ici, pour les congés.
-Naturellement conclut Hammond. On se revoit donc dans huit jours.
Je vais vous raccompagner.
Les couloirs étaient déserts à cette heure de la journée.
-Il n’y a pas grand monde dit Carolina.
-Non, en effet toutes nos équipes sont sur le terrain ou en congé, sauf SG12 qui vient de rentrer de mission. A propos docteur French, vous connaissez déjà l’infirmerie, je ne vous la fais pas visiter.
-Inutile en effet général. Je vais vous laisser, j’ai mon avion dans deux heures.
-A bientôt docteur French.
Ça y est ! C’est fait, je suis dans la place. Dans huit jours je commence à travailler ici, dans la base.
Carolina se sentait soulagée et tout de même un peu inquiète.
Elle passa huit jours frénétiques à New York à préparer son départ. Mettre son appartement en vente. Téléphoner à sa mère. Mais celle-ci avait tellement l’habitude des absences prolongées de sa fille, qu’elle ne trouva même pas cinq minutes pour la voir.
-Tu comprends, ma chérie, ce séminaire à Los Angeles… Et puis mes patients…
La chérie comprenait parfaitement et n’avait pas du tout envie d’entendre parler sa mère de tous ses rendez-vous, ses séminaires, ses soirées mondaines avec untel et untel …
Elle alla voir son père au fond de sa campagne. Il la reçut simplement, elle put lui parler comme elle ne l’avait pas fait depuis des années. Elle lui dit qu’elle avait un nouveau travail, qui serait moins dur que le précédent. Il ne dit pas grand chose, l’écouta, et la serra dans ses bras affectueusement. Elle le trouva vieilli, il n’avait que soixante cinq ans mais en faisait dix de plus. Elle le quitta avec un serrement de cœur, et se promit de rester en contact avec lui. A Colorado Springs elle ne serait qu’à deux heures de voiture de chez lui.
Le soleil avait disparu derrière la couche de nuages. Le temps devenait gris et froid. Un temps de neige. Déjà de petits flocons virevoltaient mais cela ne gênait nullement le docteur French qui s’approchait de la base.
L’ascenseur qui l’emportait dans les entrailles de la base descendait beaucoup trop vite à son goût. Dans quelques instants elle serait présentée à l’ensemble du personnel, et aux équipes présentes. En fait peu de gens la connaissaient. Elle avait surtout évalué SG1 , le général Hammond et les responsables des services. D’autres médecins l’avaient aidée dans son travail.
Elle fit son entrée dans la salle en regardant un point droit devant elle, sans s’attacher à aucun autre visage que celui d’Hammond. Elle affichait une assurance qu’elle était loin de ressentir. Son cœur battait à grands coups. Elle était admirablement bien vêtue de sa longue jupe noire qu’elle affectionnait et de son chemisier de soie, une veste négligemment jetée sur son épaule. Son regard gris lumineux éclairait son visage brun, elle était belle et elle le savait.
-Mesdames et messieurs, je vous présente le docteur Carolina French qui va prendre possession de l’infirmerie et aider les docteurs Frazier et Jordan dans leur lourde tâche. Certains d’entre vous la connaissent déjà, pour les autres je dirais simplement que le docteur French n’est pas militaire mais qu’elle nous est recommandée vivement par le pentagone. Son expérience nous sera à tous très profitable, bienvenue parmi nous docteur French.
Carolina se rappela peu ce qui suivit, des mots d’accueil auxquels elle répondit par des phrases de politesse. Elle ne voyait qu’une chose SG1 n’était pas là. Comme personne n’avait l’air de s’inquiéter elle en conclut qu’ils devaient être en mission.
A l’infirmerie, Janet l’attendait et lui fit visiter tout le service. Elle n’en connaissait que quelques salles. Elle fut impressionnée par le matériel qu’ils avaient à leur disposition. Cette infirmerie était certainement le service possédant le plus de technologies de pointe du monde entier. Ils avaient bénéficié de technologies aliens, et cela constituait un matériel sophistiqué de très grande performance.
Les alarmes se mirent à mugir.
-Une équipe qui rentre sans doute, lui dit Eva. Il faut être sur le pied de guerre très rapidement, on ne sait jamais ce qui va se passer.
Carolina se mit tout de suite dans l’ambiance. L’Equipe SG3 revenait. Un des officiers avait une cheville cassée, un autre une vilaine blessure à la jambe. Ils avaient essuyé un tir de jaffas juste avant de passer la porte en catastrophe. Le service était en ébullition, cela faisait un groupe important de personnes à examiner et à soigner. Ce n’est que trois heures plus tard qu’elles purent souffler. Le soir elle regagna ses quartiers, ils étaient dans le secteur des officiers. Une petite chambre très simple avec un bureau, qu’elle garnit de quelques livres de médecine. Les seuls livres qu’elle lisait quand elle n’était pas trop épuisée.
Elle reprit son travail le lendemain somme toute assez reposée. Elle se rendait à l’infirmerie quand elle croisa Sam.
Etonnement de part et d’autre :
-Docteur French ? Une autre évaluation peut être ? Dit-elle en voyant la blouse blanche de la jeune femme.
Carolina sourit :
-Non, je travaille ici depuis hier, avec le docteur Frazier et Eva. Faites attention Sam lui dit-elle en riant c’est moi maintenant qui fais toutes les piqûres !
-Oh j’espère que vous avez la main douce lui répondit Sam en souriant, Et j’en connais un qui ne sera pas content, ajouta t-elle
-De quoi ?
-Des piqûres ! Il déteste ça et elle enfila le long couloir qui menait à la salle de briefing tout en lui faisant un signe de la main.
O’Neill s’énervait. Ça faisait déjà trois heures que Daniel était penché sur son tas de cailloux. Il n’y avait personne dans le temple. Pas de jaffas, pas de goa’ulds. Rien à faire sur cette planète désertée de toute population. Il s’ennuyait. Sam bien sûr faisait des relevés, de quoi ? Il n’en avait aucune idée. Teal’c était comme lui, il attendait. Mais Teal’c ne se démontait jamais, il était d’un calme qui énervait le colonel. Celui-ci s’était levé de très mauvaise humeur, il avait mal dormi, et puis cette mission de routine était trop peu intéressante pour lui remonter le moral.
Le vent se leva d’un coup. Une brusque rafale, violente qui soulevait des tonnes de poussières.
-Daniel, il faut rentrer cria O’Neill sans se faire entendre. Il attendait avec Teal’c à la porte du temple. C’était maintenant une vraie tempête qui soufflait, pliant les arbres, couchant les herbes, puis le ciel creva laissant passer des trombes d’eau. En un instant tout fut inondé et l’eau ruissela entre les pierres mal jointes du temple. Teal’c et O’Neill coururent se réfugier à l’intérieur, on ne voyait plus clair. Ils avancèrent vers le fond de la salle. Le bruit de la tempête s’atténua.
-Daniel, Carter, il appela plusieurs fois sans succès. Faisant signe à Teal’c ils se dirigèrent dans deux directions opposées.
-O’Neill, venez vite
Jack arriva en courant, et vit Sam et Daniel inanimés sur le sol.
L’eau commençait à arriver aux premières marches du temple. Teal’c prit Daniel sur son épaule et O’Neill porta Sam dans ses bras. Ils avaient maintenant de l’eau jusqu’à la ceinture. Dehors les éléments étaient déchaînés et ils étaient obligés de hurler pour se parler. La porte n’était pas très éloignée. Pas plus d’une centaine de mètres qu’ils mirent une heure à franchir, le poids de leurs amis rendaient leur progression extrêmement difficile. La porte était à moitié immergée et le DHD sous l’eau.
-Teal’c hurla O’Neill pouvez-vous leur maintenir la tête hors de l’eau à tous les deux ? Je vais faire le code.
Il plongea, l’eau était très sale et c’est à tâtons qu’il dut composer le code en s’y reprenant à plusieurs reprises pour pouvoir respirer.
Dès que le vortex fut ouvert ils se jetèrent dans l’anneau. Et firent un atterrissage brutal sur la rampe métallique.
-Pourquoi ce sol est-il si dur ? Pensa O’Neill juste avant de sombrer.
Fermez l’iris hurla Hammond et déconnectez le vortex immédiatement. Une eau noire et sale s’était engouffrée à leur suite, inondant de plusieurs centimètres la salle d’embarquement.
-Mais qu’est ce que c’est que ça ? Dit le général, puis se reprenant une équipe médicale, vite !
Carolina et Eva prirent en main les arrivants.
Le colonel et Teal’c n’étaient pas blessés, seulement trempés et frigorifiés. Il n’en était pas de même pour Sam et Daniel qui n’étaient toujours pas revenus à eux. Le colonel refusa de se reposer il entra dans la salle de soin. Daniel et carter étaient tous les deux allongés, et une jeune femme leur faisait les prélèvements sanguins.
-Qu’est ce qu’ils ont ? Demanda O’Neill inquiet. Carolina se retourna, choc des regards, aussitôt contrôlés.
-Je ne sais pas colonel, il faut que je les examine. Mais ne restez pas là dans mes pattes lui dit-elle comme il ne bougeait pas.
Daniel clignait des paupières et revenait doucement à lui.
-Alors Daniel on tombe dans les pommes ? C’est l’émotion d’avoir trouvé de jolis cailloux ! Ironisa Jack, soulagé quand il vit son ami ouvrir les yeux et le reconnaître.
-Et Sam ? Dit faiblement Daniel
-Rassurez-vous, docteur Jackson , elle a reprit conscience, dit Carolina.
-Docteur French ? Dit-il faiblement. Il referma les yeux, sans force.
-Maintenant c’est à vous dit-elle au colonel, qui tremblait de froid dans ses vêtements trempés. Vous inondez le sol de l’infirmerie et vous allez prendre mal.
-Mais Carter ?
-Elle va bien lui dit-elle un peu sèchement, venez maintenant que je m’occupe de vous.
Elle fut obligée de le pousser vers un lit voisin, et comme il ne régissait pas :
-Vous vous déshabillez tout seul, ou vous avez besoin d’aide ?
-Ça ira.
Mais quand elle s’approcha de lui avec une seringue, il réagit.
-Je croyais docteur que vous ne faisiez jamais de piqûres !
-Et bien j’ai été obligée de changer mes méthodes. Elle lui prit le bras, serra avec le garrot et d’un geste peut-être un peu trop brusque, elle lui enfonça l’aiguille dans la veine.
-Aïe, Janet a la main plus douce.
-Ah oui, dommage que Janet soit occupée ailleurs, dit-elle perfidement. Je ne vous savais pas si douillet colonel ?
-Oh si , n’oubliez pas de me laisser un peu de sang !
Elle rit :
-Ne vous inquiétez pas Colonel, je vais vous en laisser un litre ou deux !
Il fit une grimace mais ne répondit pas.
-A part le fait que vous ayez froid et que vous n’aimiez pas les piqûres, avez-vous mal quelque part ?
-Non, juste un peu moulu.
Carolina dans l’exercice de sa profession se sentait tout à fait à l’aise. Elle avait le pouvoir de faire abstraction de toutes les choses qui pouvaient la perturber. Pour elle en ce moment le colonel était un patient, rien de plus, c’est cela qui faisait sa force. Qu’importaient les circonstances elle était toujours efficace.
-Maintenant que vous vous êtes reposés, si vous nous parliez de cette mission SG1. Comme il y a eu un problème médical, j’ai dit au docteur French de se joindre à nous. Major Carter, c’est à vous dit Hammond.
Au bout de la table le général Hammond, entouré des quatre membres de l’équipe, et Carolina qui se mit à côté de Daniel en face du colonel et de Teal’c.
-Mon général, j’étais en train de faire des relevés dans le temple, où l’air était raréfié, il y avait juste assez d’oxygène. Mais un moment j’ai senti ma tête me tourner et je me suis réveillée à la base.
-C’est pareil pour moi dit Daniel. Je ne me suis rendu compte de rien.
-Colonel ? Dit Hammond
-C’était une mission comme je les déteste, de la routine. Et puis il y a eu cette tempête énorme et toute cette eau. Quand je leur ai dit de rentrer j’ai tout de suite vu qu’il s’était passé quelque chose, ils étaient évanouis. On est rentré à toute vitesse à la base. Encore une mission pour rien, mon général.
-En effet, mais nous y reviendrons tout à l’heure. Docteur French, vos conclusions ?
-J’ai trouvé dans le sang du docteur Jackson et du major un produit que je n’ai pas encore réussi à identifier. Sans doute un neuroleptique. Le labo travaille dessus actuellement. Dans le sang de Teal’c il n’y avait rien, et en proportion moindre dans le sang du colonel.
-Quoi, il y a quelque chose dans mon sang ? Mais je n’ai rien ressenti docteur,
-Tous les trois, examens complets , dit le général d’un ton ferme. Tout doit y passer, si on vous a empoisonnés je veux savoir avec quoi et pourquoi.
Inutile de protester colonel ! Ajouta t-il en jetant un regard sévère à O’Neill. A l’infirmerie tout de suite. Nous reparlerons de vos missions ratées quand nous aurons éclairci ce mystère. Rompez.
- Daniel, si vous n’aviez pas été aussi long avec vos cailloux, on n’en serait peut-être pas là grogna O’Neill.
Ils venaient encore de subir prise de sang et radios et attendaient les résultats.
-Mais si je vais sur une planète pour en repartir aussitôt, ça sert à quoi ?
-Il a raison mon colonel, ajouta Sam. Etudier une civilisation ne se fait pas en deux secondes.
-Oh major, n’en rajoutez pas.
Daniel se leva et voulut faire quelques pas mais un vertige le saisit, il serait tombé si Teal’c ne l’avait pas retenu.
-Ça va Daniel ? Demanda Jack subitement inquiet.
-Oui Jack, j’ai dû me lever trop vite.
-Vous devriez en parler au toubib, d’ailleurs la voilà qui revient ajouta t-il en voyant Carolina revenir avec des feuilles dans les mains. Janet la suivit la mine sombre.
Ce fut elle qui prit la parole.
-Vos prises de sang ne sont pas bonnes. Le taux de neuroleptiques a augmenté dangereusement chez le major et le docteur Jackson, de façon un peu moindre chez vous colonel.
-Mais comment est-ce possible ? Dit Sam. Normalement si nous avons été empoisonnés la concentration du poison devrait redescendre et non pas monter ?
-Vous avez tout à fait raison. Le docteur French va vous installer tous les trois sous monitoring, elle vous posera une voie pour que nous puissions vous prélever un peu de sang toutes les heures sans vous piquer à chaque fois.
-C’est entendu Janet, je commence par le major et le docteur Jackson, qui sont les plus atteints. Pouvez-vous demander à Eva de venir m’aider ?
Une demi-heure plus tard Sam et Daniel étaient reliés au monitor qui enregistrait leur rythme cardiaque en permanence. Ce rythme était très lent, plus lent que la normale, et cela inquiéta beaucoup Janet qui revenait régulièrement du labo avec les nouvelles analyses.
-A nous deux, colonel dit Carolina.
Dans le lit voisin elle lui fit les mêmes soins. Il était très inquiet pour ses amis et n’arrêtait pas de bouger.
-Colonel, si vous ne vous calmez pas, je me verrai dans l’obligation de vous attacher ! Dit-elle sévèrement.
Daniel avait du mal à rester éveillé, il avait l’impression d’avoir pris une cuite monumentale et ses yeux se fermaient.
-Docteur appela-t-il d’une voix faible, je ne me sens pas bien…il n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’il se sentit tomber.
Carolina se précipita, sur le monitor le cœur battait faiblement. Elle fit passer dans la perfusion une ampoule d’adrénaline, le cœur reprit son rythme normal. Mais Daniel ne se réveilla pas.
Quelques instants plus tard le major, à son tour tomba dans le coma.
Après l’effervescence, le silence retomba sur l’infirmerie, entrecoupé seulement du bip des monitors. Au chevet de Sam et de Daniel une infirmière en permanence veillait sur eux.
Malgré les ordres Jack s’était levé, il avait arraché la perfusion de ses veines et du sang coulait le long de ses avant-bras, il s’en fichait. Le major allait mourir, pour une stupide mission sur une stupide planète, et celui lui arrachait le cœur. Il s’était assis près d’elle sur le bord du lit, il lui tenait la main. Il lui parlait pour essayer de la maintenir éveillée. Il resta là longtemps jusqu’à ce que Carolina l’oblige à regagner son lit.
-Venez Jack, vous êtes épuisé.
Avec un soupir il s’allongea, ferma les yeux.
-Reposez-vous, vous êtes atteint aussi, gardez vos forces.
-Vous ne trouvez pas ce que c’est ?
-Non, on cherche toujours, les meilleurs spécialistes travaillent sur vos échantillons sanguins. Mais le taux de poison augmente régulièrement dans le sang.
Jack se fâcha :
-Ça vous sert à quoi d’avoir un QI de 145, si vous ne trouvez rien !
Elle eut un sursaut, il venait d’évoquer par le biais de cette phrase anodine tellement de choses, douloureuses et exaltantes.
Il s’en rendit compte :
-Excusez-moi, Carolina, je ne suis plus moi-même.
-Ce n’est rien, colonel, reposez-vous. Nous-nous occupons très bien du major et de Daniel.
Au laboratoire Janet, déprimée, se frotta les yeux,. Elle avait désespérément besoin de quelques heures de sommeil. Le sang ne voulait pas livrer son secret. Elle l’avait pourtant observé sous un très fort grossissement. A la base ils ne possédaient pas de microscope électronique, trop coûteux. Elle était persuadée qu’il s’agissait d’une technologie visible seulement avec des appareils de pointe utilisés seulement par les plus grands hôpitaux du pays.
Malgré l’heure tardive, elle demanda une entrevue avec le général Hammond. Celui-ci la reçut dans ses quartiers, visiblement il n’était pas couché et travaillait sur son ordinateur quand elle entra.
-Mon général, j’ai besoin d’une autorisation pour sortir les prélèvements de la base. Ici je ne trouve rien, il me faudrait un microscope électronique très puissant.
-Vous pensez à quoi docteur ?
-A des nanites, ou quelque chose d’équivalent. Une technique qui diffuserait le produit en permanence, dans le sang de la victime. Je pense à un piège laissé par les goa’ulds pour tuer toutes les personnes qui oseraient s’introduire dans le temple. Il semble que c’est dans le temple que le poison est répandu et inhalé par la personne qui reste un moment dans ce lieu. C’est pourquoi le colonel est atteint d’une forme plus légère, il a passé la majeure partie de la mission à l’extérieur.
-Et Teal’c ?
-Justement c’est pourquoi je pense à un piège goa’uld. Il ne vise pas les jaffas mais seulement les étrangers.
-Comment vont-ils ? Demanda le général après un silence.
-Pas très bien dit Janet d’un air sombre, Sam semble un peu mieux résister que le docteur Jackson, qui est tombé dans un coma profond.
-Pouvez-vous me donner les autorisations pour un hôpital mon général ?
-Je m’en occupe tout de suite docteur Frazier.
Quelques instants plus tard Janet et deux assistants étaient en route pour l’aéroport où un avion les attendait pour les emmener à l’hôpital militaire de Chicago.
Il ne fallut que quelques minutes à Janet pour voir des milliers de nanites circuler dans les échantillons sanguins. Chacune d’elle diffusait son poison puis se détruisait. Il y avait là de quoi tuer plusieurs fois chaque individu. La concentration en poison était très forte et elle se diluait progressivement dans l’organisme empoisonnant celui-ci peu à peu.
Quelques heures plus tard elle était au chevet des malades. Il n’y avait aucun changement, les médicaments antiviraux, n’agissaient pas, l’adrénaline soutenait le cœur mais à trop forte dose elle pouvait s’avérer plus dangereux que le poison lui-même.
Teal’c vint au devant de Janet quand elle arriva dans la pièce.
-Docteur, mon sang ne contient pas de poison n’est ce pas ?
-Non, en effet, c’est une technologie goa’uld, vous êtes immunisé.
-Alors pourquoi vous ne leur donnez pas mon sang . Il doit y avoir dedans des anticorps qui pourrait les sauver.
-Teal’c, je ne peux pas donner votre sang tel quel, cela pourrait les tuer. Mais rassurez-vous, avec vos prélèvements nous sommes en train d’essayer de fabriquer un antidote, mais ça va être long.
-Je suis volontaire dit O’Neill, injectez-moi votre truc !
-C’est impossible colonel, dans quelques heures nous aurons sans doute avancé.
-Ouais, mais ce sera peut-être trop tard pour Daniel et le major.
O’Neill était furieux et désespéré. Il était là immobile sur un lit à regarder mourir ses amis. C’était beaucoup plus qu’il ne pouvait en supporter.
Carolina sentit son désespoir. Elle lui prit la main, il s’y accrocha. Elle aurait voulu qu’il crie, qu’il explose ou qu’il pleure, cela lui aurait fait du bien. Non il restait immobile dans le lit, en silence, le visage tourné vers Sam qui se trouvait juste à côté de lui.
Carolina ne savait plus quoi dire, pour la première fois de sa vie les mots lui manquaient.
Plus tard Janet revint le voir :
-Où en êtes-vous docteur ?
-Ça avance, nous venons de franchir une première étape intéressante. L’antidote fabriqué à partir des anticorps de Teal’c, fonctionne dans une éprouvette.
-Alors qu’est ce que vous attendez ! Faites-moi la piqûre !
-Mais ça pourrait vous tuer !
-Honnêtement vous avez un autre cobaye ?
-Non dit Janet en hésitant
-Alors vous n’avez pas d’autre solution. Allez-y !
-C’est d’accord. Mais je dois vous prévenir je dois injecter dans une artère, ce qui est plus difficile. Et vous Jack qui n’aimez pas les piqûres vous allez être servi.
-Vous perdez du temps docteur, dit-il simplement.
-D’accord, Carolina aidez-moi, je vais piquer dans la fémorale.
Le produit coulait lentement dans le sang de O’Neill.
Il fallait attendre. C’était inconfortable, douloureux. Il ne disait rien, fermait les yeux. Son cœur s’emballa un instant, puis reprit son rythme normal.
Le général Hammond était là lui aussi. Sur son visage se lisait l’inquiétude. Sa meilleure équipe était encore une fois de plus anéantie. Il y avait trop de souffrances dans ces missions. Il arrivait à un tel point de saturation qui si on lui avait parlé de la fermeture du programme, il aurait applaudi des deux mains.
Il s’approcha et les regarda, ceux qui étaient devenus ses amis. Daniel si pâle ne respirant que grâce à la machine. Sam toute menue au fond du lit, blanche, branchée au monitor, luttant de toutes ses forces pour vaincre ce mal. Le colonel, immobile, la poitrine couverte d’électrodes, des perfusions dans chaque bras, et à l’aine. C’était le pire qu’il avait devant lui, le cauchemar le plus effroyable qui se réalisait. Et je ne peux même pas joindre Jacob, sa fille va peut-être mourir, et il ne le saura même pas.
Il rejoignit Teal’c qui passait tout son temps près de ses amis, et ne les quittait que pour se reposer en état de kel’no’rim. Teal’c ne pouvait pas faire grand chose pour eux, que de les aider par sa présence. Il parlait avec O’Neill quand celui-ci n’était pas trop fatigué pour lui répondre. Ils évoquaient leur vie, leur mission, leur amitié. Mais ils ne parlaient pas de leur douleur, bien trop pudiques tous les deux.
Janet surveillait le passage du médicament dans les artères du colonel. Elle avait marqué le produit pour le visualiser sur l’écran. Malheureusement elle ne pouvait voir les nanites. Mais le produit se diffusait régulièrement tout le corps en était imprégné, pas une parcelle n’était épargnée. Il fallait de la patience beaucoup de patience. La perfusion durerait plusieurs heures.
La nuit promettait d’être longue. Le personnel était épuisé. Janet renvoya ceux qui n’étaient plus indispensable. Elle s’accorda une heure de sommeil dans un fauteuil.
Les hurlements du bip la réveillèrent en sursaut. Daniel venait de faire un arrêt cardiaque.
Le colonel se réveilla en sursaut et cria.
Janet prit les palettes, il fibrille :
-Chargez à cent, on dégage !
Rien.
-Chargez à deux cents !
Le cœur repartit d’abord faible, puis plus régulier. La dernière prise de sang montrait une charge de poison proche de la dose létale. Il fallait faire très vite.
Les résultats des analyses n’étaient pas concluants. Il fallait augmenter la dose. Un nouveau produit fut injecté, ce fut un échec. Beaucoup de souffrances inutiles.
Janet s’approcha du colonel
-Si nous continuons comme ça Jack, on va vous tuer, ça ne sert à rien.
-Il n’y a pas d’amélioration ?
-Si mais elle est si faible. Ce n’est pas suffisant.
-Docteur Frazier dit Teal’c, en s’approchant et si la solution était le naquada ?