Quand un amour s'en va, un autre revient.
Les yeux de son père venaient de se fermer. Sam pleure doucement sans faire de bruit. Elle lève la tête vers la cabine de contrôle et le voit à travers la glace. Il regarde son père endormi, elle ne voit aucune larme dans ses yeux. Cependant, elle sait que lui aussi souffre : il considérait Jacob comme un père et ce dernier considérait Jack comme un fils, plutôt comme un gendre qui méritait sa fille.
Sam se redresse, embrasse le visage du défunt et regarde comme dans un film, le corps médical fourmiller autour du lit. Sam sort, ils vont préparer le corps.
Les jours suivants, elle n'a pas eu une seconde de répit. Son frère Marc est dépassé par les événements. Comme d'habitude Sam en bon militaire, s'occupe des préparatifs et ne se donne ni le temps de penser à sa propre tristesse, ni de pleurer sur ce père trop vite disparu.
Le jours des obsèques arrive trop tôt ou pas assez vite, cela dépend des jours et de son moral.
Il pleut ce jeudi sur la ville. Une centaine de parapluies sont ouverts. Sous certains se trouvent de hauts dignitaires de l'armée américaine et des représentants de Washington, sous beaucoup se trouvent des membres du SGC. Le Général Hammond est là lui aussi. Il est triste. Ses yeux sont gonflés par des nuits trop courtes et mouillées. Les membres de SG1 sont bien sûr tous présents.
Le pasteur récite le psaume "Le Seigneur est mon berger" dans un silence lourd. Seuls les clapotis de la pluie sur la toile des parapluies s'entendent. Jack se tient à côté de son colonel. Il ne dit rien, le regard et le visage sont inexpressifs. Un léger tremblement de la lèvre inférieure peut faire apparaître son désarroi. Mais cette subtile défaillance ne peut être comprise que par des yeux experts. L'habitude d'un militaire aguerri peut être, celui d'un homme qui a beaucoup souffert , sûrement.
Le moment des condoléances arrive. Sam et Marc tendent leur main d'un geste mécanique. Parfois, certains montrent leur tristesse par des baisers amicaux. La fille de Jacob n'a toujours pas craqué. Jusqu'au bout, elle accomplit son devoir, celui d'une fille digne à l'image d'un père qui a toujours été militaire.
En retrait de la queue (qui parait interminable), un homme est stoîque. Il reste ainsi sous la pluie, sa casquette de général un peu enfoncée sur sa tête, protègant ses cheveux ras de l'humidité. Mais est-ce vraiment ses cheveux qu'il essaie de protéger ainsi ? Des larmes discrètes se mêlent aux gouttes, commencent à couler au coin de ses yeux. Son regard est fixé sur le cercueil mis en terre et ses lèvres bougent sans qu'aucun son n'en sorte. Il est en conversation privée avec le défunt. Sam le voit : Qu'est-il en train de lui dire ?
La foule se disperse et nos deux âmes en peine restent, seules à présent. Le général se retourne et s'avance vers Sam. Il ne dit rien, il n'a rien à dire ses yeux parlent pour lui. Il s'arrête à quelques centimètres sans la quitter du regard et ouvre les bras. Elle se jette à l'intérieur et reste agrippée à ce corps tant désiré, en libérant ses larmes trop longtemps refoulées. Elle lève la tête et lit sur les lèvres de l'être aimé trois mots simples, si inespérés mais si réconfortants . Elle lui répond : Moi aussi.
La pluie continue de les accompagner dans leur étreinte. Toujours sans qu'une seule parole ne soit prononcée, il lui prend la main et la conduit vers son 4x4. Il sera son phare dans la brume de sa tristesse.
La pluie s'arrête subitement de tomber, le soleil commence à briller. Un arc en ciel se forme dans le ciel et éclaire une tombe. On peut y lire : Ici gît Jacob Carter (1940-2005), un militaire, un ami et un père exceptionnel.
Salutations à tous.