Citations du moment :
Certains hommes parlent pendant leur sommeil. Les conférenciers parlent pendant le sommeil des autres.
Albert Camus
Imagine

Myst : Chapitre 1

Lentement, presque sensuellement, les brumes se lèvent. En étirant leurs longs bras, elles ramènent pudiquement les fumerolles de la terre à elles. Ces douces fumées se détachent comme avec un sifflement de regret.

 

Après la nuit passée à même le corps de la terre, il est temps de laisser le jour prendre place. Le soleil caresse déjà dans le sens du vent les volutes entêtantes tandis que les couleurs pastel y jouent à cache-cache…

 

Le monde s’inonde et se prélasse de la couleur sang de l’astre qui veille sur ses terribles enfants à deux pattes. Mais pour l’heure, aucun ne se montre, le monde parait encore vierge de leur trace. Les arbres se gaussent d’eux tandis que le vent apporte leur odeur immonde à ce monde.

 

Mais voila qu’alors que le brouillard abandonne le camp, lovée en son cœur, plus engoncée qu’un diamant en sa gangue, une humaine gît sur l’humus sec de ses pleurs. Pitoyable, elle tente d’agripper la fumée pour la retenir et s’en emmailloter. Les brumes joueuses coulent entre ses doigts, se faufilent hors de son cœur. Elles fuient la jeune femme pour mieux lui revenir et de nouveau s’enfuir en un courant d’air cristallin.

 

La jeune femme parait désemparée de se trouver exposée aux regards ainsi. Transie, Samantha cherche à se saisir des rayons solaires, ses doigts effilés ne rencontrent que l’ombre de la vallée où elle erre. Ses yeux tintinnabulent sous le regard du monde sur elle. De sa gorge semble vouloir sortir un cri muet. Mais nul ne s’en préoccupe, quelle attention de l’arbre à la douleur humaine ? Quel sacrifice de l’homme à la douleur de l’Yggdrasil ?

 

Alors les larmes humaines n’émeuvent pas cœur de sève du pin les abritant pourtant. Nul souffle de grâce n’agite les feuilles du charme. Au cœur de cette foret, Samantha ne trouvera pas de branche compatissante, elle n’a que son épaule pour pleurer son père.

 

Alors, elle vide son cœur à cette terre qui ne l’écoute pas. Tant et tant que bientôt cœur n’est plus qu’une outre désertée, asséchée. Qui sera son porteur d’eau à nouveau ?

 

Mais soudain, le vent charrie l’odeur d’un autre bipède. Son cœur est une oasis submergée : tristesse, peine mais aussi espoir et amour…Lentement son regard erre à travers le brouillard pour la retrouver, l’airman lui a indiqué la direction qu’elle avait prise au plus profond de la nuit ce matin.

 

Et voila Jonathan près d’elle, ses mains cherchant les siennes pour l’arrimer à lui, qu’elle ne suive pas les brumes comme elle en est tentée. Voila son souffle contre sa nuque et voila ses yeux perdus dans les siens.

 

Ici la fraîcheur de son eau remplissant son cœur, là la chaleur de son baiser contre son front. Voici la marque au fer rouge de ses lèvres contre les siennes, voici l’absolution de sa folie.

 

Voici l’aube passée, le jour installé…

 

Fin, 30/09/04.

 

 

 
 
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