Devant le domicile du colonel Carter, 19h30
Sam suivit des yeux la voiture de Daniel jusqu’à ce qu’elle disparaisse au coin de la rue. Prenant son courage à deux mains, elle regarda autour d’elle. A première vue il s’agissait d’un petit quartier résidentiel tranquille. Une rue calme. Deux rangées de maisons. Des petits jardins bien entretenus. Rien de bien remarquable. Le fait d’habiter là ne la choquait pas. D’autant plus qu’elle avait bien compris qu’elle passait les ¾ de son temps entre la base et les missions « off world » comme ils disaient. La maison avait l’air relativement grande Elle s’avança non sans appréhension et posa une main tremblante sur le portillon. Elle l’ouvrit. Il ne grinçait pas.
Elle se reconnaissait bien là. Toujours tout contrôler. Elle devait le huiler régulièrement. Machinalement elle vida la boîte aux lettres avant de s’engager dans l’allée. Elle la remonta lentement. Arrivée au bas du perron elle marqua un nouveau temps d’arrêt. Elle avait l’impression d’être le héros de « Retour vers le futur ». Elle gravit les marches une par une. Une sensation bizarre lui noua l’estomac alors qu’elle tournait la clef dans la serrure. Elle avait l’impression de violer l’intimité de la personne qui habitait là. D’empiéter sur sa vie privée. Seulement cette personne c’était elle. Drôle de paradoxe.
Prenant une grande inspiration, elle se décida finalement à entrer et referma la porte derrière elle. Elle fit quelques pas. Déposa le courrier sur une console, sa veste à une patère. Et elle éclata en sanglots. Elle ne s’y attendait pas. Pourtant une seconde plus tard elle se retrouvait par terre. Le regard troublé par des larmes qu’elle ne pouvait retenir. Elle ne savait absolument pas pourquoi elle pleurait. Elle ne l’avait pas fait depuis qu’elle s’était réveillée sur cette étrange planète. Sauf cette nuit quand elle avait appris la mort de son père. Elle pleurait de rage, d’impuissance, d’incompréhension. Plus elle pleurait et plus son cœur semblait s’alléger.
Elle ne sut pas exactement combien de temps elle resta ainsi mais peu lui importait. Daniel lui avait dit qu’elle n’aurait qu’à l’appeler quand elle voudrait qu’il revienne la chercher. Elle avait tout son temps. Elle se releva finalement, un peu honteuse de sa propre faiblesse. Méticuleuse comme toujours elle commença son exploration par la première pièce qu’elle avait repérée en entrant. Elle poussa la porte coulissante et se retrouva dans un bureau. Son bureau vraisemblablement. Des dossiers. Des classeurs. Un ordinateur. Deux ordinateurs… bon, un bureau quoi. Une décoration simple, assez épurée mais élégante. Tout comme le mobilier.
Des livres sur les étagères. Beaucoup de livres. Tous classés par thème et par ordre alphabétique. Cela la fit sourire. Elle secoua la tête, amusée. Comment pouvait-elle être aussi ordonnée ? C’était à la limite du pointillisme. C’était trop bien rangé. Trop parfait. Ça ne lui ressemblait pas tant que ça. Ça laissait une drôle d’impression. Mélancolique. Pas de photo ici. Juste le travail. Elle n’eut pas envie de fouiller dans les tiroirs. Elle savait pertinemment ce qu’elle allait y trouver : la même chose que dans les siens. Cette pièce ne lui apprendrait rien de plus. Quoique… Non, elle verrait plus tard.
Elle repassa dans l’entrée pour se rendre dans la salle à manger qui se prolongeait par le salon. Même style clair, assez moderne. Encore beaucoup d’étagères. Des plantes vertes par-ci par-là. Elle se prit à effleurer quelques bibelots. Elle s’adossa à une colonne. Caressa le plâtre blanc comme si ce contact pourrait lever le voile sur les secrets de son futur. Elle aima le vaste salon. Les meubles. La cheminé. Les cadres. Des photos. Sa famille, SG1, Cassandra, Janet… d’autres qu’elles ne connaissaient pas. Elle devina que les deux enfants près d’elle sur l’une d’entre devaient être ses neveux. Un nom s’imposa à elle sur la suivante : Pete. Elle et lui à un bal.
Elle réprima un frisson et se dirigea vers la cuisine. Elle la jugea sympa. Mi-authentique, mi-moderne. Son répondeur clignotait furieusement. 5 messages. Elle les écouterait plus tard. Elle fit la grimace en ouvrant les portes du réfrigérateur. Deux tomates et trois canettes de soda light se battait en duel. Hummm… Pas très brillant. C’est en le refermant qu’elle remarqua les photos retenues par deux aimants qui l’ornaient. Des petites photos d’identité. Elle et un homme. La quarantaine, plutôt mignon. Scott sans doute. Ils avaient l’air heureux tous les deux là-dessus. Il la tenait dans ses bras. Ils riaient. Ça lui réchauffa le cœur. Très brièvement.
De nouveau dans l’entrée elle se reconnu une vielle photo. Elle et Marc. Deux ans auparavant. Peu avant que leur mère ne disparaisse. Catherine l’avait fait agrandir en double. Une pour elle et une pour son frère. Un souvenir des jours heureux. Tout avait basculé quelques semaines plus tard. Elle ferma les yeux et se pinça les lèvres. Allons, elle n’était pas là pour s’apitoyer sur son sort. A l’étage deux chambres. Une qu’elle identifia comme celle de Cassandra. Elle ne se permit qu’un rapide coup d’œil. Et la sienne. Rien à dire, c’était une chambre. Le lit lui plaisait bien. En fer forgé. Fait de draps blancs. Une commode.
Une photo de ses parents. Une d’elle et Daniel. Une de Janet, elle et Cassie. La même qu’à la base. Dans la commode des sous-vêtements… relativement sexy, il fallait bien l’avouer. Des chaussettes… sans intérêt. Des dessins d’enfants. Cassandra. Une bonne centaine. Elle en sortit certains pour les observer à loisir. Une photo glissa. Elle s’en saisit, un peu surprise. Une photo de mariage. Une photo de mariage ?!? Elle et le général. Elle dut s’asseoir. Ils n’étaient pourtant pas mariés ? Elle l’aurait su sinon. Non ? Elle repensa à ces histoires de réalité alternées que Daniel n’avait fait qu’effleurer. Il avait eu l’air mal à l’aise. A cause de ça ? Il faudrait qu’elle lui demande.
En fait non, elle demanderait à Teal’c plutôt. Elle étudia à nouveau le rectangle de papier glacé. Ils avaient l’air tellement heureux tous les deux. Lui surtout. Elle n’aurait jamais imaginé qu’il puisse sourire autant. Et elle aussi. Elle était radieuse. Beaucoup plus que sur aucune des photos qu’elle avait pu voir jusqu’à présent. Cette réflexion la laissa songeuse. Et puis une autre pensée lui vint à l’esprit : pourquoi avait-elle conservé cette photo ? Cela méritait d’être creusé. Mais pas tout de suite. Elle remit tout en place et passa dans la penderie. Bon, elle n’avait pas encore trop mauvais goût en ce qui concernait les vêtements. Plutôt bon goût même. Simple.
Mais après tout elle était en treillis 10 mois par ans alors… Des jeans, des hauts, quelques robes d’été. La routine. Rien qui soit susceptible de retenir son attention. Sauf peut-être… Une chemise d’homme. Etrange. Enfin, pas tant que ça mais elle avait la sensation qu’elle n’appartenait ni à Peter ni à Scott. Sur une étagère, tout en haut, dépassait une petite touffe de poils, étrangement familière. Elle se dressa sur ses pieds et s’en empara. Elle sourit. Pilou. Son doudou. Un adorable petit ours en peluche brun à la fourrure douce et à l’air doux avec ses deux yeux chocolat et son sourire malicieux. Elle l’avait donc gardé… Elle le replaça où elle l’avait trouvé.
Ensuite, la salle de bain. Blanche. Quelques produits de beauté autour du lavabo. Des gels douche, shampoing, bains moussants et autres autour de la baignoire. Ça faisait assez salle de bain d’hôtel. Un peu impersonnelle. Elle ouvrit le placard à pharmacie, la gorge sèche. Elle savait ce qu’elle allait trouver. Et elle eut raison. Des anti-dépresseurs. Beaucoup. Des somnifères aussi. Elle s’adossa au mur froid de la pièce. Oh, non. Tout n’allait pas bien. Elle pouvait presque sentir sa propre détresse. 18 ans plus tard. Quand elle se regarda dans le miroir c’est l’autre qu’elle vit un instant. Les yeux cernés, rouges, inondés de larmes.
« Pourquoi Sam ? ». Elle ne se rendit même pas compte qu’elle avait murmuré et qu’elle avait posé une main sur la surface froide de la glace. Elle redescendit le visage fermé. L’esprit parasité par milles pensées qui se mélangeaient douloureusement dans sa tête sans qu’elle ne puisse les identifier. Elle remit la visite de la cave à plus tard. A moins qu’elle n’y cache des cadavres ou un autel vaudou, cela ne l’avancerait pas beaucoup. Elle se décida pour le répondeur et regagna la cuisine. Cette fois elle ouvrit les placards. Un peu plus remplis que le frigo. Elle dénicha une cuillère, un pot de nutella – elle avait toujours adorée ça – puis écouta les messages en sirotant une canette.
- Sam, mon ange, c’est Scott. Je voulais juste te dire que je dois rentrer à Chicago en urgence pour une opération. J’aurais vraiment voulu te voir avant mais tu dois être en mission. Tu me manques déjà. (d’une voix enjouée) Je t’ai laissé plein de messages sur ton portable, j’espère que tu ne m’en voudras pas. Rappelle-moi dès que tu le peux. Je t’embrasse très fort. Je pense à toi.
Scott… il avait l’air vraiment gentil. Mais quelque chose dans sa voix, dans son message indiquait clairement qu’ils ne formaient pas vraiment un couple. Pas au sens conventionnel en tous cas. Toutefois il lui semblait très attaché et c’était manifestement réciproque. A méditer.
- Salut petite sœur, je voulais juste savoir comment tu allais. Passe nous voir quand tu veux. Les enfants t’attendent avec impatience. Bisous.
Elle reconnut la voix la voix de son frère. Elle n’avait pas tellement changé. La tendresse qui s’en dégageait l’émue.
- Mademoiselle Carter, je suis votre conseiller à la banque…
Agacée, elle zappa le message pour passer au suivant. Foutu démarcheur !
- Oui, c’est encore moi ma belle. C’était juste pour te dire que tu peux m’appeler à n’importe qu’elle heure. N’oublie pas que je t’adore. Bye.
Décidemment. C’était la perfection faite homme.
- Hello chérie, c’est moi. Je voulais te dire que je serais en vacances le 18 novembre. J’espère que ta proposition de partir toutes les deux tient toujours. J’ai hâte de te voir. On a pleins de trucs à se raconter. Tu achèteras la glace et j’amènerais les films romantiques comme au bon vieux temps. Allez, je te laisse. A bientôt.
Une jeune femme manifestement. La voix ne lui disait rien mais en 18 ans elle avait certainement du faire de nouvelles rencontres… Elle n’avait pas appris grand-chose en somme mais elle se sentait mieux. Savoir qu’au moins trois personnes pensaient à elle la réconfortait. Munie de son pot de nutella et de sa canette elle se rendit dans le bureau et alluma l’un des deux ordinateurs. Le portable. Elle mit un CD – Frank Sinatra, l’un des seuls chanteurs qui n’étaient pas de parfaits inconnus pour elle – dans la chaîne puis commença à inspecter les tiroirs. Des dossiers. Quelques lettres personnelles…
Elle reporta son attention sur l’écran et sourit. L’arrière plan du bureau était une photo de Daniel, elle et Teal’c, en train de poser en jouant les James bond. Bien sûr en 18 ans l’informatique avait bien évolué mais le matin même un jeune sergent informaticien lui avait expliqué quelques trucs sur les nouveautés survenues et notamment l’usage quasiment compulsif d’internet par la population. Elle avait été impressionnée par le concept. Il lui avait montré les ficelles et elle avait tout de suite pigé le truc. Comme quoi avoir trois ans d’avance n’était peut-être pas si inutile que ça. D’abord, le dernier dossier créé…
Voilà. « Lettre de démission ». Lettre de quoi ?!? Ok, le titre était des plus explicites. Elle jeta quand même au texte. Oui, c’était bien ça. Sa lettre de démission. Là, ça allait vraiment mal. Elle ne comprenait pas. Elle n’avait pourtant pas menti au général en disant qu’elle pensait aimer sa vie à la base. Comment ne pas l’aimer ? Lieutenant colonel à 36 ans. Elle dirigeait la première équipe du projet. Equipe composée de deux de ses meilleurs amis. Son métier la passionnait. Tous ses collègues semblaient l’apprécier. En tous cas ils la respectaient et l’admiraient sans aucun doute. Son supérieur était des plus conciliant.
Alors pourquoi vouloir partir ? Ça n’avait aucun sens. Elle ferma la fenêtre et alla consulter sa messagerie. « AngelsamC ». Son adresse la fit sourire. C’était son nom de code à l’université. Mot de passe. Voyons… si elle n’avait pas changé son nom... Gagné ! « Elisabeth ». Le prénom de sa grand-mère maternelle. Elle l’avait toujours adorée mais elle était morte 5 ans auparavant. Alors… Vous avez 1 message. Cassie. Elle parcourut la liste des noms de ces autres correspondants. Daniel, Teal’c, Paul, Marc, Hélène, Louis, George, Alice, Tom, Scott, Alan, Eva, Lily. Pour les amis. Se désintéressant des contacts professionnels, elle ouvrit le mail de Cassandra.
Coucou, Ça va ? Je sais qu’on devait s’appeler ce week-end mais je ne tiens plus. Il faut que je te le dise. J’ai eu 16 à mes partiels de physique ! C’est super, non ? J’espère que tu es fière de moi. Je pense beaucoup à toi. Tu me manques. J’ai hâte d’être en vacances pour rentrer à la maison et voir tout le monde. Bisouxxxxxxxxxx Cassie PS : au sujet de « qui-tu-sais » ça n’avance pas trop, je t’informerais dès qu’il y aura du nouveau J
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Elle en fut touchée. Elle se sentait si proche de cette fille. Elles avaient le même âge, elles venaient de perdre leur mère… Elle décida de lui répondre immédiatement. Se tenant le plus possible à ce qu’elle pourrait écrire avec 18 ans de plus. Elle n’eut pas à chercher beaucoup et opta pour un court message, moins susceptible de la trahir.
Bien sûr que je suis fière de toi ma puce. Je te félicite pour cette excellente note. Tu me manques aussi. Ici tout va, la routine… Daniel et Teal’c sont en pleine forme. J’embrasse. A bientôt Sam
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Bon, à priori, elle ne risquait pas grand-chose avec ça. Elle se dépêcha de l’envoyer puis se déconnecta, encore sous le choc de la lettre de démission. Elle explora quelques fichiers, des dossiers photos mais sans grand succès. Ah, la dernière chanson qu’elle avait écouté… Pourquoi pas. Elle avait toujours eu tendance à choisir les titres en fonction de son humeur. Elle arrêta la chaîne et monta le son du PC. « I fall to pieces ». Ça promettait. Leann Rimes. Inconnue au bataillon.
Fall to pieces |
Each time I see you again |
I fall to pieces |
How can I be just your friend? |
You want me to act like we've never kissed |
You want me to forget |
Pretend we've never met |
And I've tried and I've tried but I haven't yet |
You walk by and I fall to pieces |
I fall to pieces |
Each time someone speaks your name |
I fall to pieces |
Time only acts to the flame |
You tell me to find someone else to love |
Someone who'll love me to |
The way you used to do |
But each time I go out with someone new |
You walk by and I fall to pieces |
You walk by and I fall to pieces |
Où-là... oui, c’était vraiment pas la joie. A nouveau elle sentait et ressentait la détresse de cette femme qu’elle serait. Comme si la musique formait un lien entre elles deux. Elle avait mal. Et elle ne savait même pas pourquoi. Les paroles s’insinuaient insidieusement dans son esprit. Elle avait la désagréable impression d’être dans un état second. Elle savait qu’il fallait qu’elle arrête la lecture du morceau mais quelque chose l’empêchait de le faire. A nouveau les larmes glissèrent le long de ses joues. Salées. Amères. Son regard se détourna de l’ordinateur et se porta sur un des tiroirs qu’elle n’avait pas encore ouverts.
Attirée irrésistiblement vers lui, elle l’ouvrit. Fébrilement elle fouilla dedans à la recherche de quelque chose qui pourrait la mettre sur la voix. Peine perdue. Il ne s’agissait que de dossiers. Mue par une force invisible elle glissa sa main entre le bord du tiroir et le premier de ses dossiers. Ses doigts entrèrent en contact avec un morceau de papier. Froid. Une photo. Elle s’en saisit délicatement et la sortit de sa « cachette ». Parce qu’il s’agissait bien là d’une cachette. Elle ferma les yeux, sentant monter en elle une poussée d’adrénaline. Elle était sûre d’avoir fait là une découverte capitale.
Elle la détailla d’abord au toucher. Froissée. Usée. Mais pas déchirée. Elle devait la sortir souvent mais en prendre grand soin. Au comble de l’excitation, elle entrouvrit les yeux et une exclamation de surprise mourut sur ses lèvres. Trop sous le choc pour esquisser le moindre geste, elle fixait le visage sévère – mais qui savait pourtant être si doux – et maintenant familier, figé sur le papier glacé. Un instant elle ne comprit pas. Pourquoi ? Qu’est-ce que… ? Pourquoi lui ? Puis tout s’éclaira. C’était tellement évident ! Comment n’y avait-elle pas pensé avant ?
Le sourire de victoire qu’elle avait esquissé se rembrunit aussitôt. Evident, oui. Mais tellement douloureux aussi. Le général O’Neill. Son supérieur. Elle l’aimait. Elle étouffa un rire nerveux qui ressemblait davantage à un sanglot. La femme qu’elle deviendrait tomberait amoureuse de son supérieur hiérarchique. Un chagrin d’amour. Voilà ce qu’elle avait. Le plus vieux truc du monde. Elle prit quelques secondes pour digérer l’info. Elle n’y avait pas pensé avant parce que du haut ses 49 ans – face aux 18 qui étaient les siens – il incarnait pour elle l’image du père. Mais pour une jeune colonel de 36 ans…
Bien sûr ça n’arrivait qu’à elle des trucs comme ça. Oh, d’autres femmes craquaient sûrement pour lui. Sexy, viril, charmeur, charismatique. Il avait tout pour plaire. Mais elle, elle l’aimait. Et elle l’aimait même sûrement comme elle n’avait jamais aimé personne. Et ça la rongeait. Ça la détruisait à petit feu. Parce qu’il était plus qu’évident que ses sentiments n’étaient pas réciproques. Elle était son amie mais il était l’homme de ses rêves. D’où les anti-dépresseurs. D’où la lettre de démission. Elle ne supportait plus de travailler près de lui. Elle la plaignit. Vraiment. De tout son cœur. Mais que pouvait-elle faire ?
Elle avait mis le doigt sur le problème. Malheureusement il était insoluble. Enfin… elle avait partiellement mis le doigt dessus. Elle savait, elle pressentait qu’il y avait autre chose. Au bout de huit ans quand même… Pourquoi démissionner maintenant ? Pourquoi avoir attendu aussi longtemps ? Pourquoi s’être accroché aussi longtemps ? Ce n’était pas son genre pourtant. Et pourquoi Pete dans ce cas ? Pourquoi Scott ? Pour une petite réponse trouvée, un monceau d’interrogations s’ouvrait à elle. Posant le portrait sur la table, elle prit sa tête dans ses mains pour tenter de remettre de l’ordre dans son esprit.
C’est un bruit dans le couloir qui la sortit de ses pensées. Elle sursauta, se redressa vivement et son premier réflexe fut de cacher la photo. Elle la remit prestement à sa place, referma le tiroir puis souffla un instant. Elle ne songea pas à avoir peur alors que des pas caractéristiques se rapprochaient. Elle savait de qui il s’agissait mais se demandait comment elle avait fait pour ne pas entendre la porte d’entrée.
- (X) Sam, tout va bien ?
Elle se retourna juste à temps pour voir un Daniel passablement inquiet pénétrer dans la pièce. Elle se composa – non sans difficulté – un sourire, qu’elle voulut crédible, avant de lui répondre.
- (Sam) Oui, ça va pourquoi ?
- (Daniel, remontant ses lunettes sur son nez) Et bien il est… (il regarda sa montre) près de minuit. Et comme tu ne m’as pas appelé…
Elle consulta sa propre montre et constata qu’il avait raison. Elle n’avait pas vu le temps passer. Elle était ici depuis plus de 4 heures… Elle avait l’impression que ça faisait 40 minutes à peine.
- (Sam) Je suis désolée. Je n’ai pas fait attention à l’heure.
- (Daniel, souriant) Ce n’est rien. Jack veut qu’on rentre à la base pour la nuit. On peut y aller ?
Honnêtement, elle était plutôt soulagée. Elle ne se voyait pas passer la nuit ici. Pas après ce qu’elle avait découvert. Elle ne pourrait pas dormir. Cette maison était par trop chargée de sa tristesse.
- (Sam) Je ferme l’ordinateur et je te suis.
Voiture de Daniel, 00h20
Ils roulaient tranquillement vers Cheyenne Mountain. Dans le silence. Daniel concentré sur la route et hésitant à sortir la jeune fille de ses pensées. Sam, le front contre la vitre, les yeux dans le vague, ressassant sans cesse les évènements des dernières heures. Elle se demandait si Daniel savait. Si il savait pour elle. C’était son meilleur ami. Il aurait du savoir. Mais lui aurait-elle dit ? Peu probable. Elle détestait montrer ses faiblesses. Elle devait se haïr d’avoir de tels sentiments. De se sentir comme une collégienne. Mais avait-il deviné ? Sans doute. Oui, elle était douée pour cacher ce qu’elle ressentait mais pas à ce point. Quoique…
Et puis si il le savait, pourquoi ne lui avait-il rien dit ? Il préférait peut-être qu’elle l’apprenne par elle-même. Comment allait-elle faire ? Elle ne pourrait plus regarder le général dans les yeux sans se trahir, la trahir. Pourtant il lui semblait que ces sentiments appartenaient à quelqu’un d’autre. Quelqu’un dont elle était proche. Mais ce n’était pas les siens. Elle ne se rendit compte que Daniel lui parlait que lorsqu’une main se posa sur son bras. Elle se tourna vers lui et lui adressa un petit sourire d’excuse.
- (Sam) Pardon. Tu disais ?
- (Daniel, reportant son attention sur sa conduite) Tu as trouvé quelque chose ?
Elle hésita avant de répondre. Devait-elle lui dire la vérité ? Pas sûr. Daniel était gentil, prévenant, affectueux, concerné, adorable… Mais il y avait un « mais ». Quelque chose la retenait. Il connaissait sans doute ses faiblesses. Il connaissait sûrement la femme fragile et sentimentale derrière son professionnalisme tout militaire. Mais… Elle décida que non. Elle ne lui parlerait pas de ce qu’elle avait découvert. Ce n’était pas une question de confiance. Non. Elle savait qu’il ne la trahirait jamais. C’était juste un pressentiment. Une réminiscence de ce qu’elle avait été… serait… enfin, elle se comprenait.
C’est Teal’c qu’elle devait consulter. Lui il saurait. Elle en était sûre. Lui il ne la jugerait pas. Cependant Daniel ne l’aurait pas fait non plus. Mais lui il saurait la conseiller. L’éclairer objectivement en tous cas. L’écouter. Lui il ne lui mentirait pas. Pas même pour la protéger. Elle se retourna donc vers la vitre. Se replongeant dans le paysage nocturne qui défilait. Elle ne pouvait pas le regarder alors qu’elle allait lui mentir. Pour la bonne cause certes. Mais cela resterait un mensonge.
- (Sam) Non.
Manifestement il ne fut pas dupe. Il lui lança juste un regard en biais. Sans reproche. Il ne dit rien. Elle lui en fut reconnaissante. Il respectait son choix. Peut-être qu’il savait ce qu’elle avait découvert. Peut-être qu’il était déjà au courant. Elle ouvrit la bouche – s’apprêtant à l’interroger – mais se ravisa et la referma. Non. Définitivement non. Ce n’était ni le bon moment ni la bonne personne. Elle avait besoin d’y réfléchir encore. Seule. Après elle irait voir Teal’c. Elle redressa la tête quand ils passèrent le barrage de l’entrée du périmètre de la base.
- (Sam) Arrête !
Daniel freina brusquement effrayé par le cri de la jeune femme. Elle lui adressa une grimace d’excuse.
- (Sam) Je vais descendre là si ça ne te dérange pas. J’ai besoin de prendre un peu l’air.
Il acquiesça en souriant. Elle lui rendit son sourire en sortant de la voiture.
- (Sam, désignant son sac) Tu pourras le mettre dans mes quartiers ?
- (Daniel) Bien sûr. (alors qu’elle s’éloignait) Hey ! Ne reste pas dehors trop longtemps. (redémarrant) Bonne nuit !
Elle lui adressa un petit salut militaire et commença à grimper sur les hauteurs. Elle avait ressenti un besoin irrépressible de sortir de l’habitacle. Une vague de détresse l’avait saisi à l’idée de pénétrer dans la base. D’aller s’enfermer sous terre. Il lui semblait qu’elle étoufferait. Elle avait mal à la tête. Elle porta la main à son front. Il était brûlant. De plus en plus elle était envahie de sentiments qui n’étaient pas les siens. Peine. Douleur. Passion. Désespoir. Désir. Résignation. Impuissance. Elle se laissa glisser jusqu’à terre contre un tronc d’arbre. Les yeux fermés. Elle avait l’impression que sa tête allait exploser. Tout comme son cœur.
Il lui semblait être revenue deux ans en arrière. La souffrance n’était pas la même. Pas plus cruelle. Juste… différente. Effrayante. Effrayante parce qu’elle n’arrivait pas à la cerner. Elle n’était pas sienne. Elle se mit à trembler. Elle sut qu’elle allait pleurer avant même que les premières larmes lui piquent les yeux. Etrangement elle aimait pleurer. Enfin, aimer n’était pas le terme exact mais cela la soulageait. Ça les soulageait. Elle et l’autre. Les minutes passèrent. Peut-être même les heures. Elle ne revint à la réalité que quand deux bras puissants l’entourèrent et qu’elle se sentit serrée contre un torse musclé.
A moitié inconsciente elle releva son visage encore humide vers l’inconnu. Pas si inconnu que ça finalement. Jack passa une main sur sa joue, essuyant ses dernières larmes. Elle se laissa aller. Rassurée. Protégée. Apaisée. Le général caressait doucement ses cheveux, le menton posé sur la jolie tête blonde blottie dans son cou. Dès que Daniel était rentré, il lui avait quasiment sauté dessus. Son ami avait été très vague. Il en avait déduit qu’il ne savait rien. Elle ne lui avait rien dit. Il s’en serait douté. Il n’avait pas été surpris non plus quand l’archéologue lui avait dit qu’elle était restée en haut.
Il comprenait très bien qu’elle en avait besoin. Pourtant, au bout de deux heures, voyant qu’elle n’était pas redescendue, il avait décidé d’aller à sa rencontre. Il ne mit que quelques minutes à la trouver. Puis il la vit. Au pied de cet arbre. En pleurs. Il en fut bouleversé. Profondément. Elle avait l’air tellement fragile. Tellement perdue. Tellement mal. Et c’était Sam. Il hésita à peine. Se rapprocha. S’assit près d’elle. Elle ne le remarqua même pas. Alors il fit la chose qui lui parut la plus naturelle : il la prit dans ses bras. Elle ne réagit pas davantage mais ne protesta pas.
Ils restèrent ainsi un petit quart d’heure. Peut-être plus. Peut-être moins. Ni l’un ni l’autre n’aurait su le dire. La jeune fille comprenait mieux comment elle avait pu tomber amoureuse de lui. Au-delà du charme incontestable qu’il dégageait. De son intelligence et de sa capacité à diriger ses hommes, à prendre des décisions. Il possédait une chose qu’elle n’arrivait pas à déterminer. Peut-être cette tendresse dont il savait faire preuve précisément quand elle en avait besoin. Cette douceur dans ces gestes. Ce côté gamin. Cette capacité qu’il avait à la faire se sentir si protégée, si en sécurité. Si merveilleusement bien.
Elle, elle n’était pas attirée par lui. Pas de cette façon. Mais cet autre elle. Celle qui appartenait à ce monde. Elle ne pouvait que l’être. Elle ne pouvait même pas en vouloir au général. Ce n’était pas de sa faute si il était ainsi. Ce n’était pas de sa faute si elle l’aimait. Tout comme ce n’était pas de sa faute si il ne l’aimait pas. Non, elle ne pouvait pas lui en vouloir pour ça. Mais quand elle croisa son regard chaud et attentif posé sur elle, elle eut un doute. Et si elle s’était trompée ? Bon, depuis le début elle avait supposé – sans trop savoir pourquoi – que les sentiments qu’elle venait de découvrir étaient à sens unique.
Et si ce n’était pas le cas ? Si il… Non. Ce n’était pas possible. C’était… Pourquoi ? Là elle ne comprenait plus du tout. Pourquoi alors toute cette détresse ? Si ils s’aimaient… tous les deux… Pourquoi ? Non. Il se contentait d’être son ami. Comme Daniel. Comme Teal’c. Il ne l’aimait pas comme elle l’aimait. Sinon ça n’avait plus aucun sens. Ou alors peut-être qu’ils avaient essayé et que ça n’avait pas marché ? Mais ils le lui auraient dit. Il le lui aurait dit quand même. Pffff… Peut-être qu’elle pourrait simplement lui poser la question ? Ouch… Mauvaise idée.
- (Jack) Car… Sam ? Vous allez bien ?
Non, il ne l’aimait pas. Pourtant elle aurait voulu pouvoir en être sûre. Comme on disait, qui ne tente rien n’a rien ! Elle prit son courage à deux mains.
- (Sam, se détachant de lui) Je peux vous poser une question… indiscrète ?
- (Jack, souriant) Dois-je m’attendre au pire ? (devant son air sérieux) Allez-y.
Elle ouvrit la bouche. La referma. L’ouvrit à nouveau. La referma. Plusieurs fois. Elle baissa les yeux. Les releva. Se mordit la lèvre. Les ongles. Passa une main sur son visage. Le tout sous le regard mi-amusé, mi-interrogatif de Jack.
- (Jack) Sam… ?
- (Sam, l’arrêtant d’un geste) C’est… c’est vraiment délicat. (se lançant) Est-ce qu’il y avait quelque chose entre vous ? Vous et elle je veux dire. Vous et le colonel Carter.
Il sembla hésiter un instant et elle fronça les sourcils. Ce n’était pourtant pas compliqué. Oui ou non ? Elle n’avait besoin que d’un mot. Un nouveau doute l’assaillit. Pourquoi cette hésitation ? Le général savait qu’il allait dire non. Qu’il devait dire non. Mais le fait est que mentir à la jeune fille qui lui faisait face ne lui plaisait pas. Il ne trouvait pas ça « bien ». Cependant il n’avait pas le choix. En tout cas c’est ce dont il voulait se persuader. Ce serait mieux pour lui et surtout mieux pour elle. Il ne la méritait pas, alors pourquoi l’ennuyer avec ça ? Il se devait de la sauver… de lui.
- (Jack) Non. Bien sûr que non. Nous sommes… nous sommes des amis.
« Pourquoi est-ce que ça sonne si faux ? » songea t’il. Il était de mauvaise fois. Il savait exactement pourquoi sa phrase sonnait faux. C’est parce que c’était faux justement. Définitivement et totalement faux. D’ailleurs elle n’avait pas l’air très convaincue.
- (Sam) Bien. C’est ce que je pensais. Je suis désolée. Je ne sais pas pourquoi…
- (Jack) Y’a pas de mal. […] Il est tard, on devrait rentrer.
- (Sam) Bien sûr.
Il se leva et l’aida à faire de même. Il regagnèrent la base dans le silence le plus total. Le général la laissa devant ses quartiers après un « Bonne nuit » un peu gêné.
Laboratoire du colonel Carter, 3h45
Sam n’avait pas pu trouver le sommeil. Elle avait donc rejoint son laboratoire. Ça lui faisait bizarre de dire ça mais ça sonnait bien. Sa discussion avec le général – au lieu d’apaiser ses doutes – n’avait fait que les exacerber. Un non franc et réfléchit l’aurait convaincu mais là… Il avait trop hésité et ensuite avait répondu trop précipitamment pour être honnête. Il lui cachait quelque chose, c’était plus qu’évident. La question maintenant était de savoir de quoi il s’agissait. Et surtout pourquoi il avait fait ça. Mue par un pressentiment elle reprit les rapports qu’elle avait étudiés avec Daniel.
Elle se concentra particulièrement sur lesquels l’archéologue était vite passé et avait semblé mal à l’aise. D’abord sur les dimensions parallèles. Ça lui semblait encore tellement étrange… Mais après tout Einstein lui-même… Stop ! Elle devait se concentrer. Bon, ensuite ce truc sur cette planète où le général avait été obligé de rester plusieurs mois… Elle ne voyait pas bien le rapport avec elle mais Daniel avait fait une drôle de tête en évoquant ces évènements donc… Il y avait aussi cette histoire de zatar’c. Quand Martouf était mort. C’est tout ce qu’il en avait dit, pourtant cela lui avait semblé plus compliqué.
Après, elle se rappelait d’une mission où ils avaient perdu la mémoire. Tous les quatre. Evidemment il devait y avoir d’autres choses. Elle en était sûre. Elle demanderait à Teal’c. En attendant elle relut attentivement les rapports qu’elle avait sélectionnés. Entre les lignes elle comprit certaines choses qui lui avaient échappées auparavant. Certaines autres restèrent encore dans l’obscurité. Elle élargit encore son champ d’action. A d’autres missions. D’autres situations qui lui semblaient un peu confuses, voire ambiguës. Dommage qu’ils ne conservent pas leurs archives vidéo sur le long terme pensa t’elle en baillant. Ouf… 6h30. Déjà.
Elle s’étira longuement sur son siège puis décida de voir cette fameuse vidéo du décès de son père. Ce n’était peut-être pas une bonne idée mais elle avait le sentiment qu’il le fallait pourtant. Elle alla chercher la cassette que le général avait déposée la veille sur une étagère. Elle la glissa dans le magnétoscope et la régla tout au début. Son image – celle de 36 ans s’entend – apparut sur l’écran, au chevet de son père. Son cœur se serra quand elle le vit si faible, si pâle. Elle monta le son pour pouvoir entendre ce qu’ils disaient tous les deux. Elle avait les yeux rivés sur l’écran. Elle buvait littéralement leurs paroles.
“Don’t let the rules stand in your way”.
“I love you”.
Ces phrases résonnaient dans sa tête sans qu’elle puisse vraiment les comprendre. Mais de quoi parlait-il ? Etait-il au courrant lui aussi ? Et puis quelles règles ? […] Ah, oui. L’armée bien sûr. Le beau règlement de l’Air Force. La non-fraternisation. Evidemment. Elle zappa les passages où elle n’apparaissait pas ou ne parlait pas. Un passage retint cependant son attention. Elle retourna légèrement en arrière et eut un mouvement de recul. Elle avait rêvé ou le général l’avait pris dans ses bras ? D’accord… Elle lui caressait la main maintenant. Elle lâcha la télécommande qui tomba à terre dans un bruit sourd.
“Always”
C’était une blague ? « Always » ? Qu’est-ce que ça voulait dire ? Voilà que ce mal de tête la reprenait… Ça devenait de plus en plus compliqué. Un métier digne d’une série de SF. Une vie sentimentale sortie tout droit d’un roman à l’eau de rose. Dans quoi était-elle tombée ? Elle alla éteindre la télé puis se frotta les yeux. 7 heures ? Parfait. Elle allait prendre une douche histoire de se rafraîchir les idées. Elle en avait vraiment mais alors vraiment besoin. Après elle verrait Teal’c. Elle en avait besoin aussi. Ça devenait vraiment urgent. Oh oui. Très très urgent. Elle avait l’impression de flotter en dehors de son corps. De nager en plein brouillard. Elle était totalement perdue.
Quartiers de Teal’c, 7h30
Elle frappa doucement à la porte puis entra quand on l’y invita. Le jaffa finissait de se préparer. Il se retourna et ses lèvres s’étirent d’un grand sourire quand il reconnut la jeune fille. Il lui fit signe de s’avancer dans la pièce, ce qu’elle fit avant de refermer la porte derrière elle. D’un signe de tête il lui désigna le lit sur lequel il s’assit après qu’elle en ait fait de même.
- (Teal’c, la saluant) Samantha. (après un instant) Vous semblez fatiguée.
- (Sam, avec un petit sourire) Je n’arrive pas tellement à dormir ces derniers temps.
Il lui pressa doucement la main, compréhensif. Elle le remercia d’un regard.
- (Sam) Teal’c, est-ce que vous pouvez répondre à quelques questions ?
- (Teal’c) Bien sûr.
- (Sam, levant la main) Attendez. Il s’agit que quelque chose d’un peu… personnel. Je pense que vous allez me dire que ça ne vous regarde pas. Que ce n’est pas à vous de me parler de ça. Que vous ne pouvez pas vous en mêler. Que je devrais voir ça avec lui. Que…
- (Teal’c, la coupant dans son élan) Vous voulez que je vous parle d’O’Neill ?
Elle le regarda en écarquillant les yeux. Surprise.
- (Sam) Waow… Vous au moins vous êtes direct. Mais comment avez-vous… ?
- (Teal’c) Je vous connais bien.
- (Sam, amère) Mieux que moi on dirait. (levant les yeux vers lui) Vous allez m’aider ?
Il hocha la tête affirmativement.
- (Sam, avec un sourire reconnaissant) Merci. [...] Je ne vous demande pas ce que vous en pensez, ce que vous en déduisez ou des subtilités de ce genre. Je veux juste les faits. (levant sa main qui tenait les dossiers) J’aimerais que vous m’éclaircissiez sur quelques points.
Il eut un nouvel hochement de tête. Elle s’assit alors en tailleur sur le lit de son ami et commença son interrogatoire. Le jaffa s’y prêta de bonne grâce, répondant à toutes ces questions, et même au-delà, pendant une bonne heure. Il lui parla beaucoup. Il avait enregistré une multitude d’informations l’air de rien. Sam était de plus en plus perplexe. Toutes ses situations… tous ces échanges… Teal’c semblait persuadé qu’il y avait quelque chose entre eux mais alors pourquoi le général avait-il nié ? Si c’était si évident il devait bien se dire qu’elle finirait bien par l’apprendre, non ?
Le seul problème avec Teal’c c’est qu’effectivement il exposait les faits mais comme elle ne se confiait pas à lui il ne savait pas réellement ce qu’elle éprouvait. Cependant il était assez physionomiste. Il arrivait bien à déterminer quand elle était triste ou non. Quand ça allait bien ou pas. Finalement il lui apprit énormément. Et du coup elle ne savait plus du tout quoi faire. Elle en voulait un peu au général de lui avoir menti ainsi. Si il n’éprouvait rien pour elle tout serait plus facile. Elle n’aurait qu’à tout faire pour l’oublier. Se reprendre. Peut-être même démissionner si c’était la seule solution. Mais là… Elle semblait souffrir d’autant plus parce qu’il l’aimait.
Ça n’avait aucun sens. Elle comprenait pourquoi ils n’avaient jamais rien fait. Certes leur travail était important mais si les sentiments étaient là, qu’ils soient ensemble ou non… Et puis ils sauvaient le monde, ils avaient bien le droit à une compensation. Ne serait-ce pour tout ce qu’ils avaient subi durant ces huit ans ! Non, il n’y avait pas que ça. Quelque chose de plus profond les retenaient. Mais quoi ? Pourquoi s’infligeaient-ils ça ? En tous cas, pourquoi s’infligeait-elle ça, elle ? Et pourquoi avait-il menti ? Peut-être qu’il ne l’aimait pas… vraiment ? Son crâne était au bord de l’implosion.
La fatigue n’arrangeait rien. Elle avait l’impression que la pièce tournait autour d’elle. Elle voyait flou. La voix de Teal’c lui parvenait dans le lointain, à travers du coton. Les feuilles de papier glissèrent à terre dans un doux bruissement. Ses paupières se fermaient malgré elle. Ses membres ne répondaient plus. Elle se sentit partir doucement puis se fut le noir. Teal’c la rattrapa rapidement avant qu’elle ne tombe. Il la prit dans ses bras et la conduisit rapidement à l’infirmerie.
Infirmerie, 10 minutes plus tard (8h50)
Sam reposait, pâle, sur un des lits. Teal’c, Daniel et Jack se tenaient debout devant le lit, en silence, quand un médecin arriva, un dossier dans les mains. Jack lui sauta quasiment dessus, visiblement très inquiet.
- (Jack) Docteur ?
- (Docteur, avec un léger sourire) Tout va bien mon général. Elle dort pour le moment. Elle était dans un état d’épuisement très avancé.
- (Teal’c) Elle n’a pas dormi cette nuit.
- (Jack, passant une main dans ses cheveux) Et pas plus de 5 heures la nuit précédente.
- (Docteur) Vous avez votre réponse. Sans compter la détresse psychologique. Vous n’ignorez pas que sa situation n’est pas des plus simples…
- (Daniel) Effectivement.
- (Docteur) Le mieux c’est de la laisser dormir. Je vais lui donner une légère dose de somnifère et elle dormira jusqu’à quatorze heures au moins. Elle en a vraiment besoin.
- (Jack) D’accord. Appelez-moi dès qu’elle se réveille.
- (Docteur) Bien général.
- (Jack, à Daniel et Teal’c) Je dois retourner en salle de briefing, (avec une légère grimace) SG3 va commencer à s’impatienter.
Les deux hommes acquiescèrent. Une fois le général parti, ils restèrent encore quelques instants auprès de Sam puis Daniel accompagna son ami à ses quartiers.
Quartiers de Teal’c
- (Daniel, aidant Teal’c à ramasser les feuilles volantes) Qu’est-ce que voulait Sam ?
- (Teal’c, sans le regarder) Des réponses.
- (Daniel) A propos de… ?
Le jaffa se contenta de lui désigner les dossiers qu’il tenait dans sa main. Il parcourut quelques pages avant de relever la tête.
- (Daniel) Et qu’est-ce que vous lui avez dit ?
- (Teal’c, sobrement) La vérité.
- (Daniel, avec un faible sourire) Vous avez eu plus de courage que moi.
- (Teal’c, se redressant) Ce n’est pas une question de courage Daniel Jackson. C’est une question de point de vue. Je pense avoir quelque avantage sur vous sur à ce propos.
- (Daniel) D’ailleurs c’est à vous qu’elle s’est adressée. Je me demande comment... enfin, qu’est-ce qui a pu la mettre sur la voix ?
- (Teal’c, déposant les papiers sur le bureau) N’étiez-vous pas avec elle hier soir ?
- (Daniel, faisant de même) Ne le dites pas à Jack mais en fait elle m’avait demandé de la laisser alors je l’ai fait. Je l’ai déposé et je suis retourné la chercher plus tard.
- (Teal’c) Vous avez bien fait. Je pense que c’est là qu’elle a trouvé quelque chose.
- (Daniel) C’est possible... Alors que fait-on maintenant ?
- (Teal’c) Je vous propose mon aide pour vos traductions des frises de P7Y433.
- (Daniel) Parfait. On y va ?
Infirmerie, 14h28
Sam commençait à se réveiller doucement. Elle remua légèrement puis ouvrit les yeux. Une vive lumière l’agressa et elle les referma aussitôt. Elle attendit quelques instants pour retenter l’expérience. Comme à chaque fois qu’elle se réveillait depuis 3 jours, elle paniqua un moment. Pendant deux ou trois secondes elle ne su pas où elle était. Son rythme cardiaque s’accéléra, entraînant avec les bips des machines médicales en arrière fond. Leur cadence diminua alors qu’elle se remémorait les derniers évènements. Ça n’enlevait rien à la panique mais elle savait au moins à quoi s’en tenir. S’habituant à la luminosité ambiante, elle regarda autour d’elle.
Ses yeux se posèrent sur le général assit non loin de son lit. Des images s’imposèrent à elle. Un autre réveil. Plus douloureux. Un autre jour. Plus lointain. Elle plongea dans un souvenir qui ne lui appartenait pas. Se sentant basculer irrémédiablement dans un autre temps. Elle assista impuissante à cette scène à laquelle elle participait bien malgré elle. “Jack?”. “Excuse me?”. “Sorry sir.”. “Yes, well, a massive concussion will tend to disorient one”. Quoi ? Parce qu’en plus il fallait qu’elle s’excuse quand elle l’appelait par son prénom ? Et après on s’étonnait qu’elle tombe en dépression ?
Le retour à la réalité fut brusque. Elle eut l’impression d’être projeté en dehors d’un film et d’atterrir brusquement dans ce lit qu’elle n’avait pas quitté. Son regard se posa de nouveau sur le général mais cette fois elle portait sur lui un œil neuf. Plein de ressentiment. Débordant de ressentiment. Comme son cœur. Il l’avait aimé. Mais quand bien même il ne l’aimait plus ce n’était pas la peine de la traiter de cette manière ! Enfin… non. Elle se calma. Il avait raison. Il était son supérieur. Pas de familiarité entre eux. Elle rencontra le regard toujours aussi attentif et quelque peu inquiet de Jack. Non. Elle ne le haïssait pas. Elle se contentait de souffrir.
- (Jack, se levant et s’approchant) Hey Dorothé ! Ça va mieux ?
- (Sam, fronçant les sourcils) Dorothé ?
- (Jack, malicieux) Le magicien d’Oz, vous connaissez ?
Elle sourit. Elle ne put pas s’en empêcher. Elle se comprenait. Même si elle souffrait auprès de lui, comment pourrait-elle se passer de sa présence ?
- (Sam, se redressant) Que c’est-il passé ?
- (Jack, s’asseyant sur le lit) On dirait que vous avez présumé de vos forces. Vous avez fait un malaise…
- (Sam) … quand j’étais avec Teal’c. Oui. Je me rappelle.
- (Jack) Et vous avez dormi pendant plus de 5 heures et demi.
- (Sam, relevant vivement la tête) Quoi ? (voulant se lever) Mais ce n’est pas possible j’avais plein de chose à faire et…
- (Jack, l’obligé à rester assise, amusé) On se calme jeune fille. Aujourd’hui vous n’allez rien faire du tout. Je vous autorise seulement à vous reposer et à regarder des dessins animés.
Elle leva les yeux au ciel en soupirant bruyamment, faisant s’élargir le sourire du général.
- (Jack, faussement menaçant) Et ce n’est pas négociable. D’ailleurs Teal’c et Daniel y veilleront. Je vous les assigne pour l’après-midi.
- (Sam, incrédule) Des baby-sitter ?
- (Jack) On peut dire ça comme ça… (lui faisant un clin d’œil) Justement, quand on parle des loups.
Elle se tourna vers la porte. En effet Daniel et Teal’c entraient dans la pièce, le sourire au lèvres et les bras chargés de divers sacs. Il s’approchèrent du lit, tirèrent une table et déposèrent tout leur chargement dessus. Sam ouvrit de grands yeux et les voyant déballer – dans le plus grand silence – des choses aussi diverses que des barres chocolatées, des cartes, des canettes de soda, un jeu d’échec, bon nombre de DVD, de CD, de livres… Le jaffa re-disparut une seconde pour revenir dans la pièce avec un énorme bouquet de tulipes. Sam ne put contenir son rire plus longtemps.
- (Teal’c, s’approchant et lui tendant les fleurs) J’espère que vous aimez toujours ça… (se reprenant) que vous aimez déjà ça.
- (Sam, les prenant avec plaisir) Bien sûr. Elles sont magnifiques !
- (Teal’c) Je suis heureux qu’elles vous plaisent.
- (Sam, levant les yeux vers lui) Je les adore, merci.
- (Jack) Bon, je vais vous laisser. (aux deux hommes, souriant) Je compte sur vous pour qu’elle ne fasse rien.
Ils acquiescèrent et le général quitta la pièce non sans un dernier sourire et un dernier geste de la main à l’attention de la jeune fille. Après son départ les trois amis discutèrent un moment. De diverses choses. Sans jamais aborder le thème dont il avait été question avec Teal’c le matin même. Ils y pensaient tous les trois bien sûr. Mais elle ne désirait pas en parler et ils l’avaient bien compris. Ils passèrent une après-midi des plus agréables. Jouant, riant, plaisantant, se gavant de sucreries. Sam était aux anges. Des flashs lui revenaient de plus en plus souvent. Des flashs de sa vie, cette vie au SGC. Ils avaient toujours un rapport avec un élément de la réalité.
Les échecs lui rappelaient d’autres parties avec Cassandra. Les cartes lui rappelaient les soirées poker avec ses coéquipiers. Ainsi de suite… Elle afficha une mine radieuse durant ces quelques heures mais son esprit était ailleurs. Outre les flashs, elle ne cessait de repenser à ce qu’elle avait appris. Elle était reconnaissante envers ses amis mais en réalité elle aurait préféré être seule. Pour réfléchir. Pour réfléchir à tout ça. Calmement. Posément. Elle n’en avait pas eu le temps entre son malaise, le général, Daniel, Teal’c… Ils lui tinrent compagnie jusqu’au moment du dîner. A 19h30 ils se rendirent tous les trois au mess où le Jack les rejoignit.
Ensuite les trois hommes s’isolèrent dans le bureau du général, sans doute pour parler d’elle songea t’elle non sans une pointe de cynisme. Quoiqu’il en soit cela lui permis de prendre une longue douche brûlante comme elles les aimaient. Elle alla finalement s’enfermer dans son laboratoire, à la seule lumière des ordinateurs. Machinalement elle enfila les écouteurs de son baladeur MP3 – il lui avait fallu quelques minutes avant d’en comprendre le fonctionnement – dans ses oreilles et le mit en marche. Immédiatement une voix féminine se fit entendre. Grease. Hopelessly devoted to you. Ça au moins elle connaissait.
La première chose à laquelle elle pensa fut : « Elle a de l’à propos cette fille… ». Elle ne prêta guère d’attention aux chansons suivantes. Elle nota juste que dans l’ensemble elles étaient plutôt tristes. Son esprit était déjà ailleurs. Très loin. Elle essayait d’amener de nouveaux flashs, de nouveaux souvenirs. Elle commença à en avoir vraiment marre. Comment pourrait t’elle prendre la moindre décision si elle ne connaissait pas la moitié – et encore elle était gentille – des faits. Quant à les comprendre… Elle n’espérait même pas y arriver. Elle n’y tenait peut-être pas tant que ça en fait.
La seule chose dont elle était sûre c’est qu’elle adorait son boulot – oui sauf les tortures évidemment – ses amis aussi. Pour le reste… Elle s’écroula sur son bureau et soupira. Si ça continuait comme ça elle était condamnée à rester ainsi. Bon, ce ne serait pas si dramatique pour elle. A part qu’elle perdait toute sa famille. Tous ses amis. Ouais, pas la joie quand même. Le vrai problème c’est qu’ils avaient besoin d’elle ici. Enfin, ils avaient besoin du colonel Carter et du docteur Carter. Elle l’avait bien compris. Depuis 2 jours ils avaient déjà eu pas mal de problèmes avec la porte st sans elle ils avaient pas mal peiné. Sans compter qu’elle était la spécialiste en technologies aliennes.
Sa vie privée en revanche aurait fait de l’ombre au Titanic. Catastrophique. Si au moins elle avait tenu un journal intime… Ok, ce n’était pas du tout son genre mais quand même ça l’aurait pas mal aidée. Forcément elle n’avait pas pu prévoir que ce genre qu’elle serait confrontée à ce genre de situation. C’était pas si courant. En y réfléchissant bien, se battre contre des extra-terrestres avec des yeux qui brillent et des serpents dans le ventre n’était pas très courant non plus. Cette histoire allait la rendre complètement folle. Elle avait 18 ans, ***** ! Elle n’était pas psy ! Elle… Rien n’aurait pu la préparer ça. Rien.
Et franchement elle aurait bien voulu s’en passer. Elle aurait même tout donné pour ça. Elle aurait souhaité n’avoir rien découvert. C’était trop dur. Bien trop dur. En fait ça en devenait quasiment insupportable parce si elle ressentait sa douleur, elle ne pouvait l’expliquer. Elle ne pouvait la comprendre. Elle pouvait juste… la ressentir. Et il fallait pourtant que se soit elle qui prenne une décision. C’était injuste. Ce sentiment d’injustice était peut-être bien la seule constante de sa vie. Elle analysait encore et encore les explications de Teal’c : le test, la perte de mémoire, la boucle et tout les reste. Et puis ces paroles : « Non […] Nous sommes justes des amis ».
Pourtant elle, elle savait. C’était pour lui qu’elle faisait ce qu’elle faisait. Peut-être pas consciemment. Peut-être pas volontairement. Mais c’était ainsi. Elle aimait cet homme par-dessus tout. Elle le détestait par-dessus tout. Par contre lui… Teal’c lui avait dit aussi qu’il avait quelqu’un. Et que c’est elle qui l’avait découvert. Ça n’avait pas du être facile mais quoi, elle était fiancée. Elle ne savait pas pourquoi elle le détestait, pas pour ça en tous cas. Ni pourquoi elle l’aimait autant. Pourtant c’était bien d’elle qu’il s’agissait. Un coup d’œil à sa montre. 23h12. Elle était à bout de nerf. Epuisée. Et pas plus avancée. Elle décida d’aller se coucher.
En passant devant la porte des vestiaires, dans le couloir désert, elle s’arrêta. Comme une somnambule, elle entra. Elle n’avait plus conscience de grand-chose. Une bride de passé refit surface. Le général. Des cris. La colère. La haine. L’humiliation. Encore des cris. D’autres voix. Le silence. La solitude. Des verres brisés. Quand elle reprit possession de son corps, elle était à genoux au milieu de la pièce. La main en sang. Des morceaux de glace tout autour d’elle. Des larmes sur ses joues. Et puis une main. Etrangère. Ou peut-être pas. Une voix douce. Daniel. Elle se sentit soulever de terre. Et se retrouva assise sur ses genoux, blottie dans ses bras.
- (Sam, au bout d’un moment, doucement) C’est déjà arrivé n’est-ce pas ?
- (Daniel, sur le même ton) Oui.
- (Sam) Pourquoi est-ce qu’il fait ça ?
- (Daniel) Je ne sais pas…
- (Sam, reniflant) Tu ne le diras pas ?
- (Daniel, lui souriant gentiment) Je ne l’ai pas dit la dernière fois, je ne vois pas pourquoi je le ferais aujourd’hui.
Il se forçait à sourire mais au fond il était vraiment inquiet pour elle. Et terriblement triste aussi. Elle n’avait plus rien de la femme qu’il connaissait en cet instant. C’était seulement une gamine. Une gamine totalement déboussolée. Submergée par des émotions qui n’étaient pas les siennes. Il aurait tellement voulu pouvoir l’aider. Pouvoir la soulager. La consoler… Et foutre une bonne raclée à Jack ! Quel abruti celui-là !
- (Daniel, enjoué) Hey, ça te dirait qu’on aille faire les boutiques demain ?
Elle sourit en balayant ses larmes de sa manche. Elle aurait pu être mal à l’aise mais non. C’était Daniel. Elle ne songea même pas à descendre de ses genoux. Elle y était trop bien. Les boutiques ? Cela lui sembla une bonne idée. Au moins ça la changerait. Et puis quelle jeune fille de 18 ans normalement constituée pouvait refuser une invitation à dévaliser les magasins ?
- (Sam) Ce serait super ! (plaisantant) Ma garde robe à bien besoin d’un coup de jeune ! (fronçant les sourcils) Mais est-ce que le général sera d’accord ?
- (Daniel, posant son front contre le sien, souriant) Il n’aura pas le choix.
Elle lui adressa un magnifique sourire en retour et se jeta à son cou, l’entourant de ses bras graciles. Peu importe ce qu’il devrait faire pour convaincre Jack. Elle venait de le rembourser au centuple. Au bout d’un moment ils se séparèrent et Daniel raccompagna la jeune femme à ses quartiers. Finalement il n’eut pas grand-chose à faire pour convaincre le général. Il fut d’accord avec lui sur le fond et sur la forme. La faire sortir de la base pour lui changer les idées lui paraissait une bonne idée justement. Teal’c resta à la base tandis que l’archéologue et la jeune femme partirent pour la ville dès 8 heures du matin.
Ils passèrent les quatre heures suivantes dans les boutiques de vêtements et d’accessoires. Daniel ne regardait pas les prix. Seule la bonne humeur de la jeune femme comptait. Il la conseillait souvent. Ils s’amusèrent énormément en essayant diverses tenues excentriques. Entre deux boutiques ils s’offrirent – enfin Daniel leur offrit – des glaces. A leur retour à la base la voiture était bourrée de sacs et paquets. Ils avaient acheté des choses pour eux mais aussi pour Sam, celle de 36 ans. La jeune fille ne portait d’ailleurs plus le treillis réglementaire mais un jean foncé, moulant, un petit haut rouge, un sac et des sandales assorties.
Elle avait oublié toutes ses préoccupations pendant ces quelques heures. Et elle était énormément reconnaissante envers Daniel pour ça. Elle avait bien conscience que c’était également ce genre d’amitié qui liait l’archéologue à la jeune femme qu’elle serait. C’était différent de ce qu’il y avait entre Teal’c et elle. Très différent. Mais tout aussi fort. Peut-être même plus. Avec Daniel elle avait l’impression d’être avec son grand frère. Le grand frère que le sien n’avait jamais été, ou plus depuis longtemps en tous cas. Ou même un copain. Ils s’étaient vraiment amusés.
D’ailleurs un moment Sam s’était même laissée aller à penser que se serait bien plus facile – voir même merveilleux – si elle était amoureuse de Daniel au lieu de l’autre. Après tout ils avaient le même âge. Les mêmes goûts. Les mêmes idées. Les mêmes valeurs. Les mêmes points de vue. Et en toute honnêteté il était vraiment mais alors vraiment très craquant. Mignon, sexy, musclé, des yeux doux, un adorable sourire. Il était intelligent, gentil, attentionné, vif, courageux, drôle. Elle lui avait fait part de ses conclusions. Ils avaient ri. Puis ils avaient réfléchi. C’est vrai. Ils s’entendaient à merveille. Ils se correspondaient parfaitement.
Et physiquement, en toute objectivité, ils étaient – l’un comme l’autre – plutôt… attirants. Daniel lui avait dit d’ailleurs que lorsqu’il était revenu de son ascension il l’avait cru un instant. Ils s’interrogèrent très sérieusement. Pourquoi ? Eh bien l’amour ne se commandait pas. C’était peut-être un peu cliché mais c’était la seule explication. En réalité ils s’aimaient. Mais pas de cette manière. Dans un sens leur lien était plus fort. Ils conclurent qu’ils étaient faits l’un pour l’autre et que si dans un an jour pour jour ils étaient toujours célibataires, ils se marieraient. Ils scellèrent ce pacte d’un chaste baiser.
Salle de Briefing, 12h30
Teal’c, Jack et… Jack – en plus jeune – étaient assis autour de la table. Ils attendaient – plus ou moins patiemment – l’arrivée de deux autres. Le « jeune Jack » était arrivé vers 11h30, d’humeur un peu maussade. Le général lui avait seulement qu’ils avaient besoin et qu’il était arrivé quelque chose au colonel Carter. Rien de plus. Il avait hésité un moment. Depuis 2 ans il faisait tout pour oublier ça vie d’avant – et ça marchait plutôt bien – mais il s’agissait de Sam cette fois. Et puis même si il n’avait quasiment plus rien du colonel – maintenant général – O’Neill, revoir ce qui avait été sa vie, son univers… Il ne pouvait nier que tout ça lui avait manqué.
Quoiqu’il en soit, les trois présents attendaient depuis bientôt une demi-heure que les retardataires arrivent. Teal’c était toujours aussi stoïque. Jack commençait à s’impatienter, comme pouvait en témoigner le pli caractéristique qui barrait son front et le tapotement nerveux de ses doigts sur la table. Quand à Jack2 – le clone donc – il était littéralement affalé sur la table. C’est ainsi que Daniel et Sam les trouvèrent en arrivant. Leurs rires les précédaient dans la pièce. L’archéologue ouvrit la porte avec un grand sourire et s’effaça pour laisser passer la jeune fille, une sucette à la bouche.
- (Daniel, plaisantant) Après vous madame Jackson.
- (Sam, idem) Merci monsieur Jackson.
Ils retrouvèrent un semblant de calme en constatant le silence et la tension régnant dans la pièce. Tous les regardaient avec de grands yeux. En particulier ce jeune garçon dont Sam ignorait l’identité. Elle s’en désintéressa rapidement et reporta son regard sur le général.
- (Sam, sa sucette à la main) Il y a un problème ?
- (Jack) Vous savez l’heure qu’il est ?
- (Sam, levant les yeux au ciel en s’asseyant) Oh, pitié… une demi-heure de retard ! Vous allez vous en remettre.
Le général fut d’autant plus surpris par le ton employé. Elle ne lui avait jamais parlé de cette façon. Son regard était dur. Insolent. Sa voix glaciale. Elle respirait l’animosité. Alors que 5 secondes auparavant elle respirait la joie de vivre. Il en fut mortifié. Elle lui en voulait. Il ne savait pas pourquoi. Mais il en était sûr. Le jeune Jack lui, après un instant de totale incompréhension, commençait à y voir plus clair.
- (Jack2) Quelqu’un pourrait-il m’expliquer ce qu’il se passe ?
- (Daniel) Heu Jack, voici Sam. Sam, c’est Jack.- (Sam) Jack ?!? Comme…
- (Jack) … moi.
- (Jack2) Carter ?!?
- (Sam) C’est de famille ?
- (Jack) De quoi ?
- (Sam, l’imitant) « Carter » ?!? Surtout venant d’un gamin je trouve ça un peu déplacé.
- (Jack2) Un gamin ?!? Hey j’ai 19 ans !
- (Sam, pince sans rire) Toutes mes félicitations… Vous voulez une médaille ?
- (Daniel, ne pouvant s’empêcher de sourire) Sam… Tu te rappelles quand je t’ai parlé de la fois ou Jack avait été cloné ? Et bien voilà, (désignant Jack2) c’est lui.
- (Sam, ironique) Super !
- (Jack2, la désignant du doigt en regardant Daniel) Et elle serait…
- (Daniel) Samantha Carter à 18 ans. Oui.
Il resta un instant bouche bée mais se reprit.
- (Jack2) Et vous m’avez fait venir pour…
- (Daniel) En fait, nous… (devant le regard de Jack) j’avais pensé que ce serait une bonne idée que vous vous rencontriez puisque vos expériences présentes quelques similitudes. Vous avez le même âge et…
- (Jack2) Et c’est tout !
Sa colère était plutôt feinte. Si il pouvait aider Sam – et le fait qu’elle était une superbe jeune fille n’y était pour rien… – il le ferait. Mais ce qu’il ne supportait pas c’était cette manière qu’elle avait de l’ignorer superbement. Sans se vanter il avait plutôt l’habitude de plaire aux filles et elle ne lui avait pas accordé un seul regard depuis qu’elle s’était assise. Pas même lorsqu’elle s’adressait à lui. Les adultes commençaient à se dire que ce n’était vraiment pas une bonne idée. Jack lança un regard lourd de sens à Daniel. Ce dernier entreprit donc de calmer le jeu. Il n’était pas surpris. Passées la retenue militaire ils formaient – Sam et Jack – un cocktail explosif.
- (Daniel) Ecoute, elle a perdu la mémoire et peut-être que si vous passiez un peu de temps ensemble, ne serait-ce que pour partager vos impressions…
- (Jack2) Il est hors de question que je joue les baby-sitters !
- (Sam, avec un léger sourire moqueur) Oh, génial ! Et en plus il est caractériel. (se tournant vers Daniel) Daniel, je t’en pris…
- (Jack2, du tac au tac) Je préfère être caractériel que blonde.
Encore un imbécile pensa t’elle. Un de ses machos imbus d’eux-mêmes. Sûrement capitaine de l’équipe de foot. Et avec un peu de chance il sortait sûrement avec la chef des pom-pom girls. Bon, elle était de mauvaise fois. Elle avait été chef des pom-pom girls. Mais quand même. Ça devait être un crétin genre tout dans les muscles, rien dans la tête. Comment pourrait t’il l’aider en quoi que se soit ?
- (Sam, cynique) De mieux en mieux. Il est charmant. Et que fait monsieur le petit génie en dehors des sarcasmes ?
- (Jack2, avec un sourire hypocrite) Je vais à l’université.
- (Sam, idem) A l’université, tiens donc… Pour apprendre à faire des châteaux de sable ?
- (Jack2, d’un ton un peu sec) Je fais des études pour devenir chercheur en biologie marine.
Elle redressa la tête, soudain intéressée puis la pencha légèrement sur le côté. Oui, il avait éveillé son intérêt. Peut-être pas si crétin que ça en fin de compte. Un sourire se dessina sur les lèvres de la jeune fille. Pas moqueur, ni méprisant. Plutôt un sourire surpris, agréablement surpris. Peut-être n’était-il pas si insipide que ça finalement… Pour la première fois depuis qu’il était entré dans la pièce elle le détailla attentivement. Elle l’avait d’abord jugé banal mais en y faisant bien attention il était assez agréable à regarder finalement. Des traits fins et réguliers. Un menton volontaire. Un nez bien dessiné. Des pommettes… humm… viriles, c’était bien le mot.
Quoiqu’elle se demandait si on pouvait véritablement qualifier des pommettes de « viriles ». Elle décida que oui. Des cheveux châtains savamment agencés façon « saut du lit » ou peut-être vraiment « saut du lit ». Des yeux chocolats rieurs, profonds, certainement très expressifs lorsqu’il le décidait. Une adorable fossette au menton. Des lèvres fines aussi, sensuelles, étirées d’un léger sourire qui pouvait être autant moqueur que charmeur.
- (Jack2, légèrement ironique) Ça va ? J’ai passé l’inspection ?
Malgré tout il était flatté qu’elle pose un tel regard sur lui parce que quoi qu’il puisse en dire il la trouvait belle. Vraiment belle. Bien sûr, à l’université il connaissait quelques filles « pas mal ». Certaines même jolies. Mais elle, elle était belle. Superbe. Ça ne l’étonnait pas en vérité. Après tout c’était Carter et vu l’effet qu’elle lui faisait lorsqu’ils étaient « adultes » tous les deux, c’était normale qu’elle lui en face aussi maintenant qu’ils étaient tous les deux « adolescents ». Ce charme si spécial qu’elle dégageait alors était déjà présent aujourd’hui. Et il agissait toujours songea t’il en réprimant un frisson sous son regard perçant.
- (Sam, sur le même ton) Debout !
Elle accompagna son « ordre » d’un sourire malicieux. Elle ne pensait pas réellement qu’il le ferait. Après tout elle s’était montrée assez dure envers lui. Aussi ce n’est pas sans surprise qu’elle le vit se lever de bonne grâce et se laisser examiner avec complaisance. Grand. Il était indéniablement grand. Elle aimait ça. Bien proportionné. Bien bâti. Musclé. Il était définitivement musclé. Son torse moulé dans un tee-shirt noir ne laissait aucun doute. Il fit lentement un tour sur lui-même. Le regard de la jeune femme dévia un peu plus bas et elle se mordit la lèvre inférieure. Il avait de très « jolies » fesses, délicieusement dessinées par son jean serré.
Et Dieu sait pourtant qu’elle n’avait jamais eu de préférence marquée pour ce genre de détails. Il y avait quelque chose. « Il » avait quelque chose. Elle n’arrivait pas vraiment à déterminer quoi mais c’était quelque chose de familier, d’attirant. Plus elle le regardait, plus elle le trouvait… troublant. Troublant, c’était le mot. Et cela la déconcertait. Habituellement c’était plutôt elle qui troublait les hommes. Mais d’un autre côté d’habitude elle ne faisait pas de bon de 18 ans dans le futur. Forcément. Puis elle comprit. Ce n’était pas sans raison. Après tout ne serait-elle pas folle de lui dans 18 ans ?
- (Jack2, lui faisant de nouveau face) Alors ?
- (Sam, espiègle) Passable…
Il haussa les sourcils, l’air peu convaincu. Daniel dissimulait le fou rire qui le gagnait, Teal’c semblait amusé également et Jack était interdit devant ce spectacle. Pour lui c’était toujours Carter et la voir agir de la sorte avec « lui » le laissait passablement déconcerté et fortement décontenancé. Les réactions de son double aussi le perturbaient. La promptitude avec laquelle il avait, en quelque sorte, obéi quand elle lui avait demandé de se lever, sur un ton pourtant des plus cavaliers, lui faisait réaliser sa propre « soumission » envers la jeune femme. Il n’y avait bien que le fait qu’elle respectait la hiérarchie de leur rapport qui le préservait d’une telle docilité.
- (Sam, concédant) Pas mal.
Il sembla davantage satisfait et se rassit sans la quitter des yeux.
- (Jack2) Je te retourne le compliment.
- (Sam, malicieuse) Non, moi je suis bien mieux que « pas mal ».
Le jeune homme sourit davantage et posa un regard chaud sur elle. Elle le soutint un moment et Jack2 s’inclina finalement. Il lui était tellement agréable de se ranger à son avis et puis dire le contraire aurait été mentir. Il la détailla à son tour. Des traits fins et réguliers. Un menton décidé. Un petit nez mutin. Des pommettes saillantes juste ce qu’il fallait. Des cheveux blonds ondulés aux reflets dorés, parsemés de quelques mèches d’un blond plus cendré, lui tombant gracieusement sur les épaules. Des yeux d’un bleu lagon envoûtant et d’une intensité presque irréelle. Deux fossettes qui se creusaient admirablement quand elle souriait.
Des lèvres rouges « appétissantes » si on lui passait l’expression. Et un sourire… à tomber par terre. Sans surprise, quoi. C’était Carter. Enfin Sam. Pas la peine de voir le reste, il n’avait qu’à fermer les yeux pour se rappeler de chaque courbe de son corps. Il n’était plus le colonel – maintenant général – O’Neill. Il ne raisonnait plus du tout comme un adulte. Ses souvenirs s’estompaient. Ses impressions s’envolaient aux quatre vents. Mais pas « elle ». « Elle » faisait sans doute parti des raisons pour lesquelles il avait préféré couper le contact. La voir et n’avoir plus aucune chance de pouvoir vivre un jour quelque chose avec elle.
Voir son regard changer lorsqu’il se posait sur lui. Il ne voulait pas qu’elle le considère comme un enfant ni même un adolescent. Ça lui était passé bien sûr. Il s’intéressait maintenant aux filles de son âge. Pourtant c’étaient les moments passés avec elle qui mettaient le plus de temps à s’effacer et il n’avait pas à chercher bien loin pour faire ressortir les images d’elle qu’il avait emmagasinées en 7 ans. Il ne savait pas vraiment ce qui s’était passé durant les deux ans qui s’étaient écoulés mais il était certain que ses, enfin les rapports entre le général et le colonel Carter n’avaient pas évolué. Et il trouvait ça ridicule. Un beau gâchis…
Quoiqu’il en soit, telle qu’elle était, là, devant lui, elle ne lui avait jamais parût plus belle et attirante.
- (Jack2) C’est vrai.
Elle eut un sourire lumineux qui éclaira tout son visage, faisant bondir le cœur du jeune homme dans sa poitrine. Il déglutit difficilement en lui rendant tant bien que mal son sourire. Finalement, le baby-sitting, ça n’avait rien de très désagréable.
- (Daniel, souriant) Donc c’est bon ? Vous n’allez pas vous entretuer ?
- (Sam, espiègle) Peut-être pas, non.
- (Daniel) Parfait. Vous nous laissez ? Vous n’avez qu’à aller à la surface. On vous rejoint…
Les deux jeunes se levèrent sans protester. La perspective de pouvoir faire plus ample connaissance – sans aucun sous entendu bien évidement – ne leur paraissait finalement pas particulièrement désagréable. Jack2 ouvrit la porte et laissa galamment passer Sam devant lui avec un « Après vous mademoiselle. » qui la fit sourire largement. Elle sortit en secouant la tête, visiblement très amusée. Le jeune homme la suivit sans cesser de parler.
- (Jack) Vous croyez qu’on a bien fait ?
- (Daniel, avec un petit sourire ironique) Ils ont l’air de s’entendre en tous cas. Ça ne peut lui faire que du bien. Leur faire que du bien.
- (Jack, pas très convaincu) Mouais…
- (Daniel) Ça ne vous plaît pas, hein ?
- (Jack) C’est ridicule Daniel, pourquoi est-ce que ça ne ma plairait pas ?
- (Daniel) Vous avez peut-être peur que cette situation révèle certaines choses. (levant la main pour ne pas être interrompu) Peur qu’il réussisse à posséder quelque chose que vous n’avez jamais pu obtenir.
- (Jack, le foudroyant du regard) Daniel !
- (Daniel, sans tenir compte de cette intervention) Ou même peur qu’elle ne veuille plus quitter l’adolescence.
- (Jack, se levant, furieux) Daniel, ça suffit maintenant !
- (Daniel, continuant) Peur qu’elle ne vous revienne pas. (se levant à son tour) Et vous avez même peur de l’admettre !
Pâle de colère, le général jeta un dernier regard noir à l’archéologue puis sortit en claquant la porte. Teal’c observait Daniel, un sourcil relevé. Non pas qu’il n’était pas d’accord avec son ami mais il était étonné par ce coup d’éclat qui lui ressemblait si peu. Le docteur Jackson sorti à son tour et se rendit directement dans son bureau où il s’enferma. Il savait qu’il n’aurait pas du s’emporter ainsi. Cette tactique ne marchait pas avec Jack. Ça ne faisait que le braquer davantage. Seulement, là, il n’avait suivi aucune tactique justement. Il avait juste agi selon ses sentiments.
Le fait est qu’habituellement il ne se mêlait pas de ce genre de chose. Il savait qu’il n’avait pas à le faire. Il n’avait pas toutes les cartes en main. Il ne pouvait pas juger. Surtout il ne le voulait pas. Il s’agissait de ses deux meilleurs amis. Il ne voulait pas choisir ni jouer les arbitres. Pourtant, là, il n’avait pas pu se retenir. Ça avait été plus fort que lui. Sam était comme une petite sœur pour lui. Meilleur ami ou pas, il ne laisserait personne lui faire du mal. Ce n’était même pas contre Jack. Il voulait juste lui ouvrir les yeux. Leur ouvrir les yeux. Mais il ne pouvait pas grand-chose pour Sam pour le moment. Il n’en avait pas le droit.
Jack aussi c’était réfugié dans son bureau. Sous le choc. Ce n’était pas tant les paroles de Daniel qui l’avaient mais son comportement. En fait ses paroles aussi. Il était furieux. Furieux contre Daniel. Et encore plus furieux contre lui-même. Parce qu’en fait il avait vu juste. Sur toute la ligne. Il était terrifié. Et jaloux. Terrifié à l’idée de la perdre. Jaloux de lui-même. Si ce n’était pas pitoyable ! Totalement indigne d’un général de l’air force bardé de médailles. Mais quand il avait vu sa façon de le regarder. Que donnerait-il pas pour que « sa Sam » pose un tel regard sur lui. Pour pouvoir en faire autant. Pour pouvoir en faire même beaucoup plus…
Pourtant c’était vrai qu’il ne la méritait pas. Même si elle avait semblé croire le contraire un moment. Il aurait pu étrangler Kerry de ses propres mains à cet instant. Même s’il savait pertinemment qu’il ne pouvait s’en prendre qu’à lui. Il était le seul responsable. Le seul coupable. Sam n’avait pas finit sa phrase mais ce qu’il avait lu dans ses yeux… C’est pour ça qu’il s’était permis ce « Always ». Il était sincère. Il sera toujours là pour elle. Même si ça ne voulait pas dire avec elle. Son regard encore. Il était sûr qu’elle avait lu en lui. Il était sûr que l’amour qu’il éprouvait pour elle s’étalait dans ses yeux. Et elle ne s’était pas défilée. Pourquoi n’avoir rien fait dans ce cas ?
Comme d’habitude. Trop peur. Peur de souffrir. De la faire souffrir. D’être heureux. De connaître le bonheur suprême auprès d’elle et de ne pas pouvoir la garder. De ne pas en être digne. Des conneries, quoi. Des conneries qui le retenaient depuis plusieurs années déjà. Il ne voulait que son bonheur pourtant. Et il ne réussissait qu’à la faire souffrir. Pourquoi cela changerait-il ? Il rumina ses idées noires pendant un bon moment avant de se décider à rejoindre la surface pour les retrouver. Il devait discuter avec Daniel de toutes façons. Peut-être même s’excuser. A sa manière.
A la surface, 14h10
Un sergent lui ayant indiqué la direction du terrain de basket – avec un petit sourire qui lui avait semblé suspect – il se dirigeait donc vers celui. En fait de terrain, il s’agissait d’un morceau du parking qui avait été agrémenté d’un unique panier. Mais c’était toujours ça. En continuant d’avancer il entendit des cris et des rires lui parvenir de derrière une rangée de sapin. Il fit encore quelques mètres, dépassa la barrière d’arbres et se figea. Daniel et Teal’c se tenaient sur le bord du terrain, discutant tout en gardant un œil – on ne peut plus amusé – sur les deux jeunes gens au milieu du terrain.
Sam et Jack, le jeune toujours, disputaient donc un match de basket très serré. Pas sur le score. Serré au sens propre. En fait c’est eux qui étaient serrés. Quasiment collé l’un à l’autre. Bon, c’était le sport qui voulait ça… mais jusqu’à un certain point. Ils semblaient prendre un plaisir certain à rester collés l’un contre l’autre. La mine malicieuse. Un sourire aux lèvres. Prenant comme excuse le jeu. La jeune fille avait le ballon et il essayait de le lui prendre ou en tous cas de l’empêcher de marquer. Il en résultait qu’elle était presque dans ses bras, le dos contre son torse, à moitié morte de rire.
Finalement elle réussit – sans trop de mal – à se dégager et elle marqua un panier. Panier qui n’était vraisemblablement pas le premier étant donné sa petite dance de victoire, la grimace du jeune homme et l’euphorie des deux spectateurs. Le général s’avança davantage alors que Sam – s’étant manifestement un peu trop vantée – poursuivie par son ex-adversaire, se réfugiait derrière le jaffa avec un « Teaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaal’c !!!! » retentissant. Elle se rapprocha ensuite du mauvais perdant, qui affichait un immense sourire.
- (Sam, espiègle) Alors ? Qui a dit qu’il pourrait me battre au basket ?
- (Jack2, idem) Je t’ai laissé gagner…
- (Sam, riant) Tu as perdu.
- (Jack2, faisant un pas vers elle) Non, j’ai été galant.
- (Sam, idem) Non, tu as été laminé.
- (Jack2) Je l’ai fait exprès.
- (Sam, levant les yeux au ciel) Oh les mecs… Tous les mêmes ! (à Teal’c) Vous, vous avez vu que j’ai gagné (appuyant le dernier mot) honnêtement.
- (Teal’c, hochant la tête) En effet.
Elle adressa un sourire radieux au jaffa avant de se retourner vers le jeune Jack et de lui tirer effrontément la langue. Les représailles ne tardèrent pas à arriver. D’un geste vif il l’attrapa par la taille et les infligea une bonne séance de chatouilles. Jack regardait tout cela avec de grands yeux. Sans pouvoir dire un mot. Jusqu’à ce qu’une pression sur son bras lui fasse détourner la tête. C’était Daniel qui l’avait vu arriver et voulait lui parler après leur « petite altercation ».
- (Jack/Daniel) Daniel/Jack…
Le général lui fit signe de commencer.
- (Daniel) Je regrette pour tout à l’heure. Je n’aurais pas du dire ça. Je n’ai pas à vous juger de cette façon.
- (Jack, regardant les deux ado) Mais vous aviez raison. Dans l’ensemble en tous cas.
Daniel hocha la tête sans rien ajouter. La crise était passée. Ils s’étaient pardonnés. Mais rien n’était arrangé.
- (Jack, faussement détaché) Ils ont l’air de bien s’entendre.
- (Daniel, avec un sourire en coin) Ça vous étonne ?
- (Jack, d’un ton plein de sous-entendu) Ce que je veux dire c’est qu’ils ont l’air de vraiment très bien s’entendre.
- (Daniel, malicieux) Jaloux ?
- (Jack) Non ! C’est juste que… enfin, ce n’était pas du tout mon genre de fille à l’université.
- (Daniel) Oh… à l’université ? Mais maintenant, si ?
- (Jack) Ce n’est pas ce que j’ai dit.
- (Daniel) Celui qui ne nie pas consent.
- (Jack, plus amusée qu’agacée) Daniel…
L’archéologue haussa les épaules avec un sourire innocent.
Quelques heures plus tard, à l’intérieur de la base 17H
Jack et Daniel discutaient en arpentant les couloirs. Ils parlaient d’un sujet crucial – à savoir ce qu’ils avaient eu au déjeuner - lorsque des bruits étouffés et des rires leur parvinrent depuis la salle de sport. Salle devant laquelle ils venaient de passer. Ils s’arrêtèrent, un instant déconcertés. Ils échangèrent un regard. Un froncement de sourcil. Puis ils rebroussèrent chemin pour s’arrêter devant la porte. Un « Arrête ! » peu motivé et un nouveau fou rire les décidèrent à entrer. Jack ouvrit la porte. Il laissa passer Daniel. Mais quand il voulut passer le seuil à sa suite il se heurta au dos de l’archéologue. Surpris, il releva les yeux. Il ouvrit la bouche et allait parler quand les mots moururent sur ses lèvres. Le « Daniel ? » qu’il compter prononcer avorta dans sa bouche. Le spectacle qui se déroulait sous ses yeux lui coupait le souffle.
En effet, devant eux se tenaient les deux adolescents. Allongés sur les tapis – habituellement réservés aux combats – les deux jeunes gens riaient aux éclats. Jusque là rien de bien choquant. Mais le fait est qu’en réalité Sam était allongée sur les tapis et Jack – le jeune – était assis à califourchon sur elle. Ils avaient leurs vêtements. Point positif pour Jack qui avait frôlé la crise cardiaque. Ils ne s’embrassaient même pas à dire vrai. Le jeune homme tenait un pot de nutella dans une main et de l’autre tentait de maintenir sa « victime » à terre. Elle se débattait – quoiqu’avec peu de force – mais n’arrivait pas à se dégager de l’emprise de son « bourreau ».
Un peu plus loin reposait un ordinateur portable, une pile de DVD, deux autres pots de nutella – bien entamés – ainsi qu’une cuillère. C’est ce que découvrirent les adultes en faisant un état des lieux avant de reporter leur attention sur le « couple » qui ne semblait pas encore les avoir remarqués. Jack – le jeune toujours – menaçait manifestement Sam avec le pot en question. Il avait l’air de vouloir utiliser la mixture chocolatée pour réajuster à sa manière le maquillage de la jeune fille. Et elle ne semblait pas partager son enthousiasme à cette idée.
- (Sam, souriant, à bout de souffle) Si tu fais ça, je te mords !
- (Jack2, malicieux) Oh… J’ai peur !
- (Sam, idem) Tu devrais.
- (Jack2, approchant son visage du sien) Essaye un peu pour voir !
Le général se racla discrètement la gorge, affreusement gêné par la situation. Daniel, lui, était plutôt amusé.
- (Daniel) Heu… vous le dites si on dérange, hein ?
Les deux jeunes tournèrent simultanément leurs têtes vers les nouveaux arrivants. Ils n’avaient pas l’air gênés le moins du monde. Tout juste un peu surpris. Sam cessa de se débattre et Jack2 posa le pot de nutella par terre. Il se leva ensuite puis aida la jeune fille à en faire de même. Une fois qu’ils furent debout, il ne lâcha pas sa main. Et elle ne la lui retira pas. Ce que ne manquèrent pas de remarquer les deux adultes. Le regard malicieux de Daniel glissa vers le général qui prenait manifestement sur lui pour ne pas exploser.
- (Sam, souriant) Daniel, général. Vous allez bien ?
- (Jack, ironique) Pas aussi bien que vous on dirait.
- (Jack2, désignant le nutella) Bah, on avait un peu faim, alors…
- (Jack, croisant ses bras sur son torse) Ben voyons. Je croyais que vous deviez parler. Pas faire des batailles de pâtes à tartiner.
Sam se mordit la lèvre inférieure et baissa les yeux. Jack – le jeune – pas démonté pour un sou arborait un sourire espiègle. La vérité c’est qu’ils avaient parlé. Longuement. Très sérieusement. De leurs expériences réciproques. Ils ne s’étaient certes pas aventurés très loin du côté de leurs sentiments. Ils n’étaient pas encore assez en confiance. Pourtant ils se sentaient déjà étrangement proches. Pas vraiment étrangement en fait. Ils savaient très bien pourquoi. Ce qui était étrange c’était que ça leur était venu tout naturellement. Sans aucune gêne. Ils étaient parfaitement bien ensemble. Comme s’ils s’étaient toujours connus. Ce qui n’étaient pas foncièrement faux.
Donc ils avaient discuté. De leur enfance. De Daniel. De Teal’c. De la base. De leur travail. Pas de leur relation. Mais quand même. Ça leur avait fait du bien. A tous les deux. Ça leur avait permis de faire connaissance. Après ils devaient avouer qu’ils avaient un peu dérapé. Ils mangeaient leur nutella en plaisantant puis ils s’étaient un peu cherchés. Gentiment. Ils avaient commencé à chahuter. Et puis… voilà. Ils en étaient arrivés là quand les deux hommes avaient fait irruption dans la salle de sport. Salle qu’ils avaient choisie pour être un peu tranquille mais avoir de la place quand même.
- (Sam, malicieuse) Mais on a parlé général. Seulement… on a eu une petite divergence d’opinion. Vous savez ce que c’est…
Le général en question haussa un sourcil sceptique avant de se tourner vers un Daniel plus qu’amusé par la scène qui se déroulait sous ses yeux. Jack, lui n’était pas amusé du tout. Et ça, ça l’agaçait encore plus que la situation elle-même. Il s’efforçait de ne pas poser les yeux sur leurs mains liées. Jaloux. Comment pouvait-il être jaloux d’un adolescent ? En plus vis-à-vis d’une autre adolescente. C’était pathétique. Il était pathétique.
- (Jack) Mouais. Eh bien on va vous laisser (faisant les guillemets avec ses doigts) « parler ». (se dirigeant vers la porte) Nous on a du travail.
Daniel leva discrètement les yeux au ciel, faisant sourire les jeunes. Il leur adressa ensuite un clin d’œil complice puis sortit à la suite du général, les laissant seuls.
- (Jack2, se tournant vers Sam, souriant) Ça doit lui faire bizarre…
- (Sam) A qui ?
- (Jack2) A Jack. De nous voir tous les deux. Comme ça.
- (Sam) Pourquoi ?
- (Jack2, un peu mal à l’aise) Eh bien, tu sais… (baissant les yeux) entre nous il y a toujours eu…
Elle l’obligea à relever la tête en plaçant deux doigts sous son menton et planta ses yeux dans les siens.
- (Sam) Non, je ne sais pas justement. Et j’ai besoin de le savoir.
- (Jack2) Sam… ce n’est pas une bonne idée.
- (Sam, doucement) Tu ne comprends pas. J’en ai besoin.
- (Jack2) Sam…
Il avança une de ses mains pour la poser sur la joue de la jeune fille mais elle se détourna.
- (Sam, haussant le ton) Je dois savoir, bon sang ! Il faut que je sache !
Il perçut la détresse dans sa voix et dans son regard. Elle n’en pouvait plus. Elle était si touchante ainsi. Il se devait de lui dire. Il lui devait bien ça. Ce serait la dernière chose qu’il ferait en tant que colonel Jack O’Neill. Comme un dernier aveux. Il savait qu’il en avait besoin aussi. Il ne pourrait pas tirer un trait définitif sur ce qu’il avait été si il ne mettait pas ses sentiments à plat une bonne fois pour toutes.
- (Jack2, la fixant sérieusement) Tu es sûre ?
Elle acquiesça en se calmant. Il jeta un coup d’œil autour d’eux, s’attardant sur les caméras de sécurité.
- (Jack2) Pas ici.
Elle lui prit la main. L’expression de son regard était si déterminée que ça le fit sourire.
- (Sam) Suis-moi.
Quartiers du colonel Carter, 5 minutes plus tard
Jack – le jeune toujours – était assis à même le sol, adossé au pied du lit. Sam referma la porte à clef puis vint s’asseoir à ses côtés. Silencieusement. Levant un bras et le passant autour d’elle, il l’invita à se blottir contre son épaule, ce qu’elle fit volontiers. Et puis il commença. Depuis le début. Depuis la première fois qu’ils s’étaient vus. Il ne lui cacha rien. Il lui dit tout. Absolument. Il se mit à nu devant elle. Il lui confia ses sentiments, ses impressions, ses peurs… tout. Il lui expliqua l’évolution progressive de ce qu’il éprouvait envers elle. Bien au-delà de l’attirance physique.
Il lui dit le respect, la confiance, l’admiration, l’amitié. Comment cette amitié s’était transformée en quelque chose de plus tendre, de plus fort, de plus intense. Comment il avait tenté d’ignorer ce nouveau sentiment, de le nier ensuite. Enfin il avait été forcé de l’admettre. De se l’avouer à lui-même. Ensuite il y avait eu la souffrance du à son sens du devoir, à la peur de la perdre. Et le bonheur quand il avait compris que ses sentiments étaient partagés. L’espoir. La douleur. Le doute. Le désespoir. Et cet amour qui ne cessait de croître. Le renoncement qui n’était que feint. Il lui raconta tout, sans rien omettre.
Se débarrassant de cette carcasse militaire dont il ne se séparait jamais. Au fur et à mesure de son récit il se sentait gagné par le soulagement. Cet aveux lui faisait un bien fou. Et puis mettre des mots sur ses émotions, les partager… pour la première fois… Il n’était plus lâche. Il ne put retenir quelques larmes. Sam, elle, était secouée de sanglots silencieux. Elle ne savait pas vraiment à quoi elle s’attendait mais certainement pas à ça. Pas à autant de douleur, d’amour. Elle n’avait jamais imaginé qu’on puisse aimer de cette façon. Totale et inconditionnelle. Son cœur débordait de reconnaissance.
Alors il l’aimait. Elle était bouleversée. Il l’aimait au moins autant qu’elle l’aimait. D’un côté elle se sentait mieux. D’un autre côté ça n’en était que plus dur. Plus triste. Par contre il lui avait menti, l’autre Jack, en niant. Mais elle pouvait le comprendre. Même si elle lui en voulait. Enfin, elle sentait que son autre elle-même en avait également éprouvé un grand soulagement. Après ça elle ne put que balbutier un « Merci » venant du plus profond de son âme. Il la serra davantage contre lui, sans un mot. Ils n’en avaient pas besoin. Ils venaient d’échanger quelque chose de tellement intense. Ils avaient besoin d’assimiler tout ça en silence.
Jack avait lui aussi appris pas mal de chose en réalité. Sur lui-même. Des choses dont il n’avait même pas idée. Mais il était soulagé. Vraiment soulagé. Et puis il se sentait bien, là, avec elle dans ses bras. Combien de fois n’avait-il pas rêvé d’un tel moment ? Il avait du arrêter de compter… Ils savourèrent ensemble le calme qui s’était instauré. Elle ne reprit la parole qu’après une dizaine de minutes.
- (Sam, restant contre lui) Elle aussi elle l’aimait.
- (Jack, l’embrassant dans les cheveux) Je sais.
- (Sam) Je ne sais pas quoi faire. […] Elle a écrit sa lettre de démission.
- (Jack, se redressant) Quoi ?!?
- (Sam, se détachant de lui) Elle devait faire un choix. Je dois faire un choix. Et je pense que tu m’y as aidé. Je vais rester. Ce ne sera pas facile mais maintenant que je sais…
- (Jack) Il faudra que vous en parliez tous les deux. Ce n’est plus possible. Ça dure depuis bien trop longtemps. J’aurais du…
Elle le fit taire en posant un doigt sur sa bouche.
- (Sam) Ils auraient du, oui. Mais peut-être que c’est mieux ainsi. On ne peut pas toujours faire ce dont on a envie. Peut-être qu’on n’était pas fait pour être ensemble.
- (Jack) Mais…
- (Sam, le coupant) Il y a quand même quelque chose que tu pourrais faire pour moi.
- (Jack) Quoi ?
Elle se positionna en face de lui sans le quitter des yeux et prit son visage dans ses mains. Jack se laissa faire, comme hypnotisé, ne pouvant détacher son regard des lèvres tentatrices qui se rapprochait des siennes. Les battements désordonnés de son cœur faisaient échos aux siens. Quand leurs souffles saccadés se mêlèrent ils fermèrent simultanément les yeux pour mieux goûter ce moment. Leurs bouches entrèrent en contact pour la première fois, les secouant d’un violent frisson. Le baiser, d’abord léger et hésitant se fit plus doux et tendre quand il entoura son corps fin de ses bras.
Il devint fougueux et passionné lorsque qu’il accentua la pression de sa bouche sur la sienne. Une de ses mains remonta jusqu’à la nuque de Sam tandis que les siennes s’enterraient dans les cheveux courts du jeune homme. Leurs lèvres s’entrouvrirent et ils eurent l’impression de sombrer, emportés par une vague de plaisir. Leur langues se mêlèrent sensuellement puis avidement, déclanchant de nouvelles et délicieuses vagues de frissons. Emportés par leur élan, ils se laissèrent aller à des caresses plus franches, plus poussées. Les doigts de Jack glissèrent sur les hanches de la jeune fille qui commençait à s’attaquer aux boutons de sa chemise.
Elle ne put retenir un gémissement de plaisir quand une main baladeuse se faufila sous son haut et pencha sa tête en arrière alors que des lèvres douces déposaient d’ardents baisers dans son cou. C’est à cet instant qu’un éclair de lucidité s’empara du jeune homme. Il analysa rapidement la situation. Situation qui lui échappait totalement d’ailleurs. Sam et lui. Dans ses quartiers. Sur le point de faire l’amour. Ok, dit comme ça, ça avait l’air plutôt tentant. Il en avait souvent rêvé. Et oui, de ça aussi. Seulement voilà. Il avait maintenant 19 ans. Elle en avait 18 et aucun souvenir de ce qu’ils avaient pu vivre ensemble.
C’était définitivement malsain. Merveilleux certes, au combien agréable, mais malsain. Il ne pouvait pas la laisser faire ça. Elle le regretterait. Il ne pouvait pas « abuser » d’elle de cette façon. Même si objectivement c’était… humm… plutôt elle qui abusait de lui songea t’il en sentant une main experte venir redessiner de la paume le galbe de ses fesses. Comment pouvait-il résister à ça ? Pourtant, il se le devait. Il lui devait d’être raisonnable, pour tous les deux.
- (Jack, la repoussant doucement) Sam, je ne peux pas…
- (Sam, taquine) Tu ne PEUX pas ?
- (Jack, amusé) Enfin si, techniquement je peux mais je ne pense pas que se serait une bonne idée.
- (Sam, mordillant tendrement son oreille) Vraiment ?
Jack se mordit la langue et serra les poings pour ne pas répondre à ses caresses et céder.
- (Jack) Sam, je t’en pris… tu vas le regretter. On ne se connaît que depuis quelques heures.
Elle s’écarta légèrement de lui, tout en restant sur ses genoux, et l’étudia sérieusement, un sourire attendri sur les lèvres.
- (Sam) Ecoute-moi. Je sais ce que je fais. Ce n’est pas un coup de tête ou ce que tu veux… C’est un peu mon cadeau, pour toi. Pour te remercier de m’avoir dit tout ça. Tu m’as beaucoup aidé, tu sais ?
- (Jack, haussant un sourcil) Alors tu m’offres « toi » ?
- (Sam, amusée) On peut voir ça comme ça mais… le fait est que se sera certainement la seule chance que je n’aurais jamais d’être avec Jack O’Neill. Je sais que ça peut paraître un peu cynique voire malsain mais il faut que tu saches que je t’aime. Je le sens. Je le sais. Et tu m’aimes. Nous le savons tous les deux. Puisqu’on en a la possibilité, pourquoi ne pas… réaliser nos fantasmes ? Il n’y aura pas d’autre occasion. J’en ai envie, tu en as envie. Pourquoi se priver ?
- (Jack, caressant sa joue) Tu n’as pas peur que je pense à elle alors que je serais avec toi ?
- (Sam) Elle est moi. (avec un sourire coquin) Et moi je ne penserais pas à lui, tu peux me croire…
Il lui sourit à son tour, rassuré. Elle avait raison. Il en avait certainement besoin pour passer définitivement à autre chose. Et elle aussi. Ce n’était pas forcément très juste envers Jack, l’autre. Mais après tout, ils n’étaient que des enfants. Ok, c’était une piètre excuse. Mais ça n’en restait pas moins une excuse. Donc bonne à prendre. Donc… Il ne tergiversa pas plus longtemps. Oh oui, il avait envie d’elle. Il s’empara voluptueusement et fiévreusement de la bouche de Sam en se levant, l’entraînant avec lui. Il la prit ensuite dans ses bras, lui arrachant un petit rire, pour la déposer délicatement sur le lit.
Il l’allongea doucement sous lui alors qu’elle s’attaquait à sa ceinture. Ses lèvres glissèrent à nouveau dans son cou, sur sa gorge. Il remonta doucement son haut et vint jouer avec le petit diamant qui ornait son nombril. Le souffle court, il savourait la caresse de ses mains sur son torse et dans son dos, son désir exacerbé par la pression de ses cuisses fermes autour de sa taille. Ils se débarrassèrent mutuellement de leurs vêtements et se découvrirent lentement, tendrement avec délectation. Ils savourèrent chaque instant et sombrèrent dans un univers de plaisir, ensemble. Fusionnant encore et encore sans se lasser du contact de l’autre durant de longues heures.
C’est donc le souffle saccadé, perlés de sueur, nageant en pleine béatitude qu’ils s’effondrèrent l’un à côté de l’autre, un immense sourire aux lèvres. Jack l’attira à lui, son dos contre son torse et passa une main sur sa taille avant de déposer un tendre baiser sur son épaule et d’enfouir son nez dans ses cheveux. Ils poussèrent un soupir de bien être au même moment, ce qui les fit sourire. Sam ferma les yeux, se concentrant sur le mouvement hypnotisant du pouce de Jack sur son ventre. Elle avait l’impression de revivre. Magique. Voilà ce qu’avait été ce corps à corps. Magique. Libérateur.
C’était l’homme de sa vie. Il n’y avait aucun doute là-dessus. Pourtant ce qu’ils venaient de vivre ressemblait terriblement à un adieu. Parce que s’en était un en réalité. Le plus beau des adieux. Le plus parfait des adieux. Mais cela restait un adieu avec ce que cela impliquait de mélancolique. Leur première et dernière fois. Et il avait fallu qu’elle ait lieu dans ces circonstances. Ils s’aimaient depuis des années et il avait fallu qu’ils perdent respectivement 30 et 18 ans pour connaître un tel moment. Dans le genre pas banal ça se posait là… Pourtant ça n’aurait pas pu être plus parfait.
- (Jack, contre son oreille) Je veux que tu me promettes de ne pas renoncer à nous.
- (Sam, se retournant vers lui) Tu ne peux pas me demander ça alors qu’il y a renoncé depuis longtemps.
- (Jack, redessinant les traits de son visage du bout des doigts) Ne dis pas ça. Il n’a pas renoncé.
- (Sam) Ça fait 2 ans que tu n’es plus « lui ». Tu n’en sais rien.
- (Jack) Jamais je n’aurais renoncé.
- (Sam) Même après que je me sois fiancée ?
- (Jack) Ok, je suis un imbécile. Il n’est qu’un imbécile. Il n’aurait pas du laisser faire ça. Mais crois-moi il t’aime et il t’aimera toujours.
- (Sam, avec un petit sourire) Dis-moi, tu ne serais pas un peu romantique par hasard ?
- (Jack, idem) Borné, têtu, idiot, totalement stupide… non, romantique, je ne vois pas.
- (Sam) Dommage. Ça t’aurait fait au moins une qualité. (avec un regard plein de malice) Je veux dire autre que physique…
- (Jack, passant un bras autour de sa taille pour la rapprocher de lui) Hummm… comme ça on apprécie mes capacités physiques ?
Elle ne répondit rien, se contentant de sourire et de se laisser aller, les yeux fermés, au contact de sa peau nue contre la sienne.
- (Jack, frôlant son nez du sien) Moi j’ai apprécié les tiennes.
Elle sourit de plus belle, les yeux toujours clos, savourant la douceur de ses lèvres contre les siennes, l’intensité de ses caresses. Ils fondirent à nouveau l’un en l’autre avant de s’endormir, heureux, dans les bras l’un de l’autre. Des coups à la porte les sortirent de leur torpeur. Ils ne réalisèrent d’abord pas, restant un moment à se sourire en se regardant dans le blanc des yeux. Mais une voix les fit sursauter.
- (Teal’c, derrière la porte) Samantha ? Vous êtes là ?
La jeune fille se redressa brutalement en plaquant le drap sur sa poitrine, une expression affolée sur le visage. Jack, plus calme, la regarda faire non sans un certain amusement avant de s’asseoir à son tour. Il commença à déposer de légers baisers sur les épaules dénudées de Sam. Elle sourit tout d’abord puis chercha à le repousser. Non pas qu’elle n’appréciait pas mais le fou rire qui la gagnait allait sembler suspect au jaffa dont la voix inquiète se fit entendre de nouveau.
- (Teal’c, toujours depuis le couloir) Samantha ?
Elle grimaça en tentant d’éloigner Jack qui se faisait un jeu de poursuivre sa « torture ».
- (Sam) Oui ?
- (Teal’c) Vous allez bien ?
Jack était passé derrière elle et s’appliquait maintenant à embrasser chaque parcelle de sa nuque. Fait qui ne la laissait pas de marbre. Bien au contraire.
- (Sam) Oui, je m’étais juste… endormie. Il y a un problème ?
- (Teal’c) Aucun mais il est déjà 20 heures. Nous nous proposions d’aller chez O’Malley, voulez-vous venir ?
Elle consulta Jack du regard. Il se contenta d’hausser les épaules en souriant.
- (Sam) Oui. Bien sûr. Je me prépare et je vous rejoins sur le parking d’ici 15… non, disons 30 minutes.
- (Teal’c) Bien. Savez-vous où se trouve le jeune Jack O’Neill ?
Il leur sembla percevoir quelque ironie dans sa voix et ils se demandèrent un instant si il n’avait pas tout deviné. Quoiqu’il en soit, ils savaient qu’il ne dirait rien.
- (Sam) Non, mais je le trouverais.
Le bruit des pas imposants du jaffa se firent entendre puis s’estompèrent alors qu’il s’éloignait dans le couloir.
- (Sam, se retournant vers Jack, l’air faussement fâchée) Bravo pour la discrétion !
- (Jack, innocemment) Quoi ? Je n’ai rien fait !
Elle secoua la tête en souriant et il en profita pour l’attirer à lui et la renverser sur le lit.
- (Jack) Tu sais que je t’adore, toi ?
- (Sam, malicieuse) Je crois oui… (déposant un chaste baiser au coin de ses lèvres) mais il faut se préparer maintenant.
Il eut une moue boudeuse mais elle ne se laissa pas attendrir et renversa la situation avant de se lever pour se préparer. Tout en s’habillant elle sentait sur elle son regard admiratif et tendre. Et ça lui plaisait. Ce qu’elle venait de vivre dépassait tout ce qu’elle aurait pu imaginer. Evidemment elle n’avait pas énormément d’éléments de comparaison. C’était son troisième amant. Mais les deux autres ne tenaient pas la comparaison une seule seconde. Il y avait eu quelque chose de plus. Tout avait revêtu une dimension tellement… Elle ne croyait pas en la perfection. Pas humaine en tous cas. Pourtant tout avait été parfait. Elle ne regrettait rien. Absolument rien.
Lui non plus apparemment. Elle aimait voire cette étincelle d’amour et d’admiration dans ses yeux. Ce sourire serein. Elle s’était servie de lui. Il s’était servi d’elle. Ils en avaient conscience. Ils avaient tourné cette page ensemble. Mais était-ce réellement la fin de leur histoire ? Les deux enfants s’étaient expliqués et trouvés. Qu’en était-il des deux adultes ? Pouvaient-ils vraiment graver le mot « Fin » sur la dernière page d’un livre qu’ils n’avaient même pas commencé à écrire ? N’était-ce pas se condamner ? N’était-ce pas injuste ? Injuste par rapport à qui ? Ses interrogations furent reléguées dans un coin de son esprit quand il prit sa main pour mêler ses doigts aux siens.
Ils échangèrent un regard. Ce n’étaient plus entre eux maintenant. Ils ne pouvaient rien faire de plus. En se laissant guider dans les couloirs elle repensait à tout ce qui s’était déjà passé. A tout ce qu’elle avait découvert. A tout ce qu’ « il » avait nié. Pourquoi ? Pourquoi nier l’évidence ? Evidemment elle l’avait fait aussi. Nier. Reculer. Fuir. Mais elle ne voulait plus jouer manifestement. Elle le laissait gagner en démissionnant. Ou plutôt non, ils perdaient tous les deux. Et elle en porterait la responsabilité. Elle ne pouvait pas faire ça. Ni se faire ça. Ni leur faire ça. Par « leur » elle ne pensait pas à eux deux mais à tous les autres. Tous ceux qui comptaient sur elle.
Chez O’Malley, 20h50
Ils étaient tous les cinq assis à une table, dans un coin de la salle. Les trois hommes devant une bière. Les deux jeunes devant un soda. Ils parlaient depuis un moment de tout et de rien. Sam les écoutait d’une oreille distraite, observant avec attention tout se qui se passait autour d’eux. Elle reconnaissait beaucoup de militaires de la base. Ils en avaient salué un grand nombre en entrant. L’endroit lui semblait familier. En tous cas il était agréable. Un décor plutôt sobre mais chaleureux. Le bar. Les lumières tamisées Les tables en bois. Une vague musique de fond. Un coin billard.
- (Sam, se retournant vers les autres) Vous croyez qu’on peut danser ?
Etant donné les regards stupéfaits qu’elle eut en retour, sa question devait arriver comme un cheveu sur la soupe.
- (Daniel, souriant) Danser ?
- (Sam, légèrement ironique) Oui, « danser ». Tu vois de quoi je parle ?
- (Daniel) Oui mais pour répondre à ta question je ne sais pas… Nous n’avons jamais… Mais je pense que c’est possible.
- (Jack2) Tu veux danser ?
- (Sam, se levant) Bien sûr ! (se dirigeant vers le bar, malicieuse) Pourquoi pas ?
Elle lui adressa un dernier clin d’œil et partit. Il la suivit du regard, observant avec complaisance sa démarche souple et gracieuse. Arrivée au bar elle se hissa sur un des sièges et entama une conversation avec le barman. Il pouvait avoir entre 25 et 30 ans. Grand. Un visage avenant. De longues minutes passèrent. Ils continuaient à discuter, séparés par le comptoir. Ils riaient même parfois. Sam lui adressait ses fameux sourires qui les faisaient tous fondre. Elle replaçait sensuellement une mèche derrière son oreille, humidifiait ses lèvres, lançait des regards en biais.
Elle ne le faisait même pas volontairement. C’était naturel. Le barman était sous le charme. Jack par contre – les deux Jack en fait – voyait cela d’un mauvais œil. D’ailleurs n’y tenant plus, l’adolescent se leva pour rejoindre la jeune fille. Quand il fut à sa hauteur il passa un bras autour de ses épaules dans un geste possessif et lança un regard noir à son « rival » qui ravala son sourire. Quelque part le général en fut soulagé.
- (Daniel, malicieux) Dites, vous n’étiez pas du genre partageur quand vous étiez jeune…
Il ne prit pas la peine de répondre. Que répondre à ça ? Les faits parlaient d’eux-mêmes. D’autant plus maintenant que son « clone » prenait la main de Sam et l’entraînait sur la piste de danse. Piste qui se réduisait en réalité à quelques mètres carrés de parquet. Jack – junior – enlaça la jeune fille et l’attira à lui. Elle se laissa faire en souriant. Il passa une main autour de sa taille et commença à la bercer lentement au rythme de la musique d’Hoobastank : « The reason ». Elle se laissa aller contre son torse, la tête au creux de son épaule.
I'm not a perfect person |
There are many things I wish I didn't do |
But I continue learning |
I never meant to do those things to you |
And so I have to say before I go |
That I just want you to know |
- (Jack2, à son oreille) Tu sais que tu es belle ?
Elle fut touchée par cette déclaration. Une déclaration à la O’Neill en fait. Indirecte. Mais tellement sincère. Il prononçait « tu es belle » mais il pensait « je t’aime ». Et elle le savait. Elle le connaissait à présent.
- (Sam, espiègle) Evidement.
- (Jack2, après quelques secondes, souriant) J’aime ton odeur. C’est le même parfum…
- (Sam) … qu’avant. Oui.
I've found a reason for me |
To change who I used to be |
A reason to start over new |
And the reason is you |
Elle ferma les yeux un instant, se laissant porter par la magie du moment. Dieu quelle était bien, là, dans ses bras. Elle se surprit à penser que ce ne serrait pas si mal de rester comme ça. Elle revint bien vite sur Terre. Elle ne le pouvait pas. Elle ne pouvait pas se permettre de se montrer égoïste. Et pourtant c’était déjà ce qu’elle faisait.
- (Sam, reprenant à voix basse) Tout sera fini demain.
- (Jack2, sans comprendre) Quoi ?!?
- (Sam) Demain je serais redevenue… moi.
I'm sorry that I hurt you |
It's something I must live with everyday |
And all the pain I put you through |
I wish that I could take it all away |
And be the one who catches all your tears |
That's why I need you to hear |
Il parut choqué. Peiné. Ce n’était pas une surprise en soit. Il savait que ça arriverait. Il espérait juste que ce ne serait pas si rapide. La perdre maintenant… Après tout ce qu’ils venaient de vivre… C’était dur. Vraiment très dur. Malgré tout il savait que c’était une chance que la vie lui avait fournie. Une chance de vivre son rêve. Pour pouvoir tourner la page ensuite. Après tout qu’elles étaient les probabilités pour qu’on lui propose de voyager sur des planètes lointaines ? Pour qu’il rencontre toutes sortes d’extraterrestres ? Pour qu’il sauve le monde à plusieurs reprises ? Pour qu’il tombe amoureux de son second ? Pour qu’il soit assez borné pour ne pas le reconnaître ? Pour qu’il soit cloné ? Pour qu’il rajeunisse de 30 ans ? Pour qu’elle rajeunisse de 18 ans ? Zéro. Zéro sur des milliards. Et pourtant…
I've found a reason for me |
To change who I used to be |
A reason to start over new |
And the reason is you |
- (Jack) Déjà ?
- (Sam, avec un petit sourire triste) Je n’ai pas vraiment le choix. Je ne peux pas… même si j’en ai envie… Je suis désolée.
- (Jack, plaçant son front contre le sien) Hey, ce n’est pas ta faute. On le savait tous les deux que ça ne durerait pas.
- (Sam, retenant ses larmes) Oui, c’est juste que…
- (Jack) … ce n’est pas si facile qu’on le croyait.
I'm not a perfect person |
I never meant to do those things to you |
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That I just want you to know |
Elle acquiesça silencieusement et se blottit à nouveau contre lui. Elle était bien consciente que ce n’est pas elle qui souffrirait le plus. En tous cas pas pour ça. Elle allait changer. Elle n’existait pas vraiment telle qu’elle était là. Mais lui… Oui, elle avait agit égoïstement. Elle l’avait laissé s’attacher à elle alors qu’elle savait pertinemment qu’il n’y aurait pas de suite. Qu’il ne pourrait pas y en avoir. Elle s’était attachée à lui aussi. Mais d’une façon différente et elle, en grandissant, le retrouverait sous une autre forme. Enfin, le retrouver était beaucoup dire…
I've found a reason for me |
To change who I used to be |
A reason to start over new |
And the reason is you |
- (Jack, caressant de son pouce le bas de son dos) Tu n’oublieras pas ce que je t’ai dis ?
- (Sam, levant les yeux vers lui) Non mais…
- (Jack, posant un doigt sur sa bouche) Chut. N’oublie pas, c’est tout ce que je te demande.
- (Sam, dans un murmure) Je ne pourrais pas oublier même si je le voulais.
- (Sam, lui souriant) Merci pour tout.
- (Jack) Non, merci à toi.
I've found a reason to show |
A side of me you didn't know |
A reason for all that I do |
And the reason is you |
Ils se séparèrent à la fin de la chanson, un peu mélancoliques, puis enchaînèrent sur des danses plus rythmées pendant un bon moment. Le général et les autres les regardaient sans un mot. Ils les voyaient tels qu’ils étaient. Deux gamins amoureux que la vie séparait. Daniel aurait bien lancé quelques piques pour détendre l’atmosphère mais il sentait bien que le moment était mal choisi. La situation engendrait trop de souffrance et réveillaient des blessures mal ou pas cicatrisées.
Une rue de Colorado Springs, 23h30
- (Sam, avec une mine suppliante) S’il vous plaît…
Malgré l’air bourru et agacé qu’affichait le général, elle savait qu’il ne résisterait pas. Elle le savait. Et elle avait raison. Ils le savaient tous du reste. Il allait dire oui. Il la trouvait tellement mignonne avec sa petite moue enfantine, son regard brillant d’un bleu profond et profondément… adorable.
- (Jack, cédant) Ok, c’est d’accord vous pourrez accompagner Daniel et Teal’c sur Chulak… (devant son air triomphant) Mais seulement si vous me promettez de suivre à la lettre les directives de Teal’c.
- (Daniel, malicieux) Et si tu n’attrapes pas une pneumonie d’ici là.
- (Sam, se retournant) Pourquoi ?
- (Daniel, souriant) Parce que tu es en train de te tremper complètement…
En effet une légère pluie accompagnait les marcheurs. Et si les hommes tentaient de rester un maximum sous l’abri que formait l’avancée des devantures des boutique bordant la rue, elle un malin plaisir à marcher au milieu de la chaussée. Levant la tête et offrant avec délectation son visage à la caresse de la pluie à tout bout de champs.
- (Sam, secouant la tête, d’un air docte) Daniel... tu es beaucoup trop terre à terre !
Les deux Jack – le « vieux » et le jeune – haussèrent simultanément les sourcils dans un signe de profond étonnement avec un air et une petite moue circonspects. Les mêmes. Exactement. Ça avait un petit côté comique en fait. Daniel en était d’ailleurs très amusé et Teal’c dissimulait – plus ou moins efficacement – un sourire.
- (Sam, les regardant avant de lever les yeux au ciel) C’était de l’autodérision !
Elle se retourna et recommença à avancer lentement en prenant un peu d’avance sur les autres. Elle leva les mains en signe d’abattement avant de soupirer à mi-voix, mais toutefois – volontairement – assez fort pour être entendu des quatre hommes derrière elle.
- (Sam) Oh les mecs…
Daniel et Jack2 échangèrent juste un regard d’une fraction de seconde avant de s’élancer tous les deux vers la jeune fille qui continuait de marcher, à quelques mètres devant eux. Elle fut plus rapide. Le fait est qu’elle avait prévu cette réaction. Depuis le début. Elle commençait à les connaître maintenant. Et plus elle les connaissait, plus elle les adorait… Elle commença donc à courir en même temps que ses deux poursuivants et s’en suivit une longue course. Daniel abandonna le premier. Laissant les deux jeunes s’éloigner dans la nuit. Il resta sur place en attendant que Jack et Teal’c le rejoigne, tentant de reprendre son souffle.
- (Daniel, une fois qu’ils furent arrivés à sa hauteur, souriant) C’est terrible ce que je me sens vieux.
- (Jack) Bienvenu au club. (plaisantant) Vous savez ce que je ressens maintenant…
Le jaffa haussa un sourcil mi-intrigué mi-amusé puis ils rejoignirent les deux autres qui discutaient devant l’immeuble dans lequel habitait Jack junior. C’est là qu’ils se séparèrent du jeune homme. Sam déposa un léger baiser sur ses lèvres. Il lui serra la main dans un geste tendre. La pluie, redoublant d’intensité, ne semblait pas les gêner. Ils échangèrent un regard qui en disait long. Ensuite Daniel, Jack et Teal’c raccompagnèrent la jeune fille jusque chez elle. Il était décidé qu’elle dormirait là ce soir – sur sa demande – et que l’archéologue passerait la chercher le lendemain matin à 8h30.
Maison de Samantha Carter, 23h45
Elle referma la porte sur les trois hommes puis s’adossa contre le mur. Elle se débarrassa du sourire enthousiaste qu’elle s’était composée pour laisser place à un air plus grave et déterminé. C’était maintenant. Il fallait qu’elle le fasse. Elle le sentait. Elle en était sûre. De toutes façons ça ne pouvait plus durer. Elle ne réussirait qu’à se faire plus de mal. Leur faire plus de mal. Ça décision était prise. Elle n’aurait pu jurer que c’était la bonne mais c’était une décision. Et ne devait-elle pas prendre une décision ? Puisque c’était la seule qui lui venait à l’esprit alors se serait celle-là.
Elle enleva rapidement sa veste et se débarrassa de ses chaussures. Elle était trempée. Totalement. Et frigorifiée. Mais ce n’était certainement pas tant du au climat qu’à l’état de fatigue intense qui était le sien. Indifférente aux gouttes qui perlaient à ses cils et aux pointes de ses cheveux, elle s’installa devant l’ordinateur. Elle sourit une nouvelle fois à la vue de son fond d’écran mais se reprit. Elle était là pour une bonne raison. Tout d’abord, dans les dossiers… « Lettre de démission ». Elle cliqua. Deux fois. « Etes-vous sûr de vouloir supprimer Lettre de démission.doc ? ». Evidement, sinon elle ne serait pas là. Nouveau clic. « Dossier supprimé ». Parfait. Elle alla le supprimer définitivement dans la corbeille. Soupir de satisfaction. Une bonne chose de faite.
Maintenant Scott. Deux nouveaux messages dans sa boîte email. Cassy et Paul. Elle n’y prêta aucune attention, toute fixée sur son objectif. Elle tapa le texte de son mail sans aucune hésitation, elle avait déjà longuement méditée sur son contenu. Ouf, envoyé. Deuxième bonne chose de faite. Elle ouvrit un des tiroirs du bureau, glissa sa main dans la cachette maintenant connue et en sortit la photo. Elle ne lui accorda pas un regard et la glissa dans la poche arrière de son jean en se levant. Elle referma le tiroir d’un léger coup de pied avant d’éteindre son PC et de quitter la pièce.
Sans hésiter elle monta à l’étage et se dirigea droit vers sa commode. Elle prit la photo glissée entre les dessins d’enfant et la fit rejoindre la précédente. Elle passa dans la salle de bain. L’armoire à pharmacie. Elle s’empara des trois boites d’anti-dépresseurs et les vida l’une après l’autre dans la cuvettes des wc. Elle avait l’impression d’être complètement vidée. Pourtant elle n’avait pas fini. Loin de là. Elle s’assit sur le rebord de la baignoire et eut un léger sourire désabusé. Elle voulait faire le ménage. C’était exactement ça. Faire le ménage dans sa vie avant de céder la place à cette autre femme. Elle.
C’était l’adolescente qui s’occupait de l’adulte. Ça avait un côté très ironique. Mais c’est pour ça qu’elle était là, non ? Alors autant aller jusqu’au bout. Elle sauta sur ses pieds, direction la penderie. Elle se saisit de la chemise qui l’avait interpellée la dernière fois. Pour le coup elle n’était pas sûre de sa provenance mais on n’était jamais trop prudente. Elle redescendit ensuite au salon et déposa le vêtement par terre, devant la cheminée. Elle se mit ensuite à la recherche d’une boîte d’allumettes ou d’un quelconque briquet. Elle dénicha l’un et l’autre très facilement. Le rangement, ça avait du bon parfois.
A genoux devant la cheminée elle entreprit d’allumer un feu. Pas trop compliqué comme manœuvre. Pendant un instant elle se perdit dans la contemplation des flammes naissantes qui rongeaient les feuilles de papier journal. Le feu. Ça l’avait toujours fasciné. Ce côté magique sans doute. Pur. Indomptable. Enfin, relativement parlant. Insaisissable. La couleur aussi. Et puis ce mouvement gracieux… Elle soupira. Ce n’était pas le moment de se perdre dans des réflexions d’ordre mystique. Elle remit quelques bouts de bois et de papier dans l’âtre et se releva. Un pas en arrière. Deux. Ça n’allait pas être si facile. Oh, elle s’en doutait bien sûre mais quand même.
C’était comme si elle renonçait définitivement à « eux ». Non, en fait ce n’était pas « comme ». Elle renonçait à « eux ». C’était la meilleure chose à faire du reste. L’idée de brûler tout ce qui la rattachait à cet amour… elle hésita devant le choix de l’adjectif… « Maudit » ? « Sans issue » ? « Qui la tuait à petit feu » ? Oui, ça c’était mieux. Et en plein dans le vif du sujet car ici il s’agissait bien de feu. Cette idée donc lui était venue du souvenir de la lecture d’un livre.
Encore un de ces romans à l’eau de rose et féministes au possible. Dont la lecture inavouable était quasiment jouissive. Enfin, quoiqu’il en soit, dans ce livre l’héroïne « exorcisait » une ancienne relation en brûlant toutes les photos de son ex. Ne gardant que les plus moches. Ensuite elle se débarrassait de bague de fiançailles, alliance… dans les toilettes. Puis faisait un nœud sur une ficelle pour chaque bon moment passé avec lui avant de brûler la ficelle. Même chose avec les mauvais mais elle la gardait cette fois. Et plein d’autres trucs du même genre. Mais elle, elle ne voulait pas se venger. De quoi en plus ? Non, elle, elle voulait juste tourner la page.
D’abord la chemise. Elle la jeta sans ménagement dans le brasier crépitant. Elle l’aurait bien déchiqueté de rage avant mais elle ne s’en sentait pas la force. En réalité, elle avait plutôt envie de pleurer à l’heure actuelle. Passons. Le tissu allait mettre du temps à se désagréger. Tant mieux. Elle avait besoin de temps. Pour se lamenter sur son sort. Elle se blottit donc dans un coin du canapé, serrant contre elle un des coussins. Les deux photos criminelles étaient étalées devant elle, sur la table basse. Elle aurait pu les déchirer, les griffonner mais… non. Elle ne pouvait pas.
Elles brûleraient. Elles brûleraient mais elle ne les abîmerait pas de ses propres mains. Elle ne s’en sentait pas capable. C’était trop dur. Elle s’attarda plus longuement sur le couple rieur. S’ils avaient su qu’un an plus tard il mourrait, auraient-ils été aussi joyeux ? Peut-être que oui en fait. Un an de bonheur, c’était toujours bon à prendre. Ah non ! Elle ne devait pas repartir là-dessus. Il fallait oublier. Ce n’était pourtant pas compliqué. Ou-bli-er. Oublier, renoncer… tout ce qu’elle voulait mais surtout, surtout ne pas flancher. Ils n’avaient pas d’avenir. Elle devait passer à autre chose. C’est même pour ça qu’elle était là.
Elle ferma les yeux un instant et prit une grande inspiration. Elle s’efforçait de contenir ses larmes. Ouais. Pas très concluant comme méthode. De toutes manières pleurer ne pourrait pas lui faire de mal. C’était naturel. D’autant plus en ces instants fatidiques où elle décidait de son avenir. Ça faisait très grande tragédie grecque. Ne l’avait-elle pas déjà mentionné ? Pathétique. Elle finit par s’assoupir. Durant les quelques minutes de ce semi-sommeil d’autres images lui revinrent. Dans un ordre totalement anarchique. Beaucoup d’images et d’évènement. Beaucoup de peine et de douleur. De frustration aussi. Et de colère.
Ce sont ces deux sentiments qui la dominaient quand elle refit surface. Elle n’aurait pas su dire précisément ce qu’elle avait vu. Elle en retirait surtout des sensations. Ce qu’elle savait par contre c’est que cela avait un rapport avec le général. « Pour changer » souffla t’elle, désabusée. Il ne restait presque rien de la chemise à présent. Elle se redressa, essuya ses joues encore humides, s’empara des photos et s’avança. Elle déposa en premier le portrait. Elle le garda quelques secondes dans sa main alors que les flammes léchaient déjà le papier glacé, le gondolant et noircissant l’image.
Quand le feu s’attaqua au visage du général elle lâcha la photo et la regarda se faire dévorer par des langues rouges et cruelles. Elle ne pensait pas que cela aurait pu la toucher à ce point pourtant elle eut un haut le cœur quand le dernier coin du rectangle brillant tomba en cendres. Elle avait la désagréable impression d’avoir commis un meurtre. Comme si elle avait tué l’homme sur la photo. Elle eut peur. Et si c’était vrai ? Si en l’effaçant dans son cœur elle l’effaçait de la réalité ? Non. Elle se raisonna. C’était ridicule. Pourtant son regard glissa vers le téléphone. Elle pourrait peut-être l’appeler. Juste entendre sa voix pour être sûre qu’il allait bien.
Hé oh ! Elle voulait faire quoi déjà ? Ah, oui… l’oublier. Donc ? Donc pas de coup de téléphone. S’il était mort tant mieux. Ce serait plus facile. Pff… à qui voulait-elle faire croire ça ? S’il était mort, elle était morte. Rrrrrrr ! De la volonté que diable ! Un minimum au moins. Elle prit l’autre photo. Allez, c’était presque fini. Elle avança sa main vers le feu puis hésita. Elle aimait tellement cette image… Elle représentait tellement de choses pour elle. Un peu comme un rêve devenu réalité… Pitié, ça n’avait pas l’air si pathétique que ça quand même ? Si ?
Samantha Carter tu n’es qu’une petite imbécile ! Tu va me faire le plaisir de brûler cette photo et plus vite que ça ! Eh non, ça ne marchait pas non plus… Elle ne pouvait définitivement pas faire ça. Les brûler « eux ». C’était par trop symbolique. Elle sursauta quand elle vit qu’une petite flamme attaquait déjà le bas de l’image. Elle ramena prestement sa main hors de la cheminée et souffla sur le morceau de papier. Elle ne put retenir un soupir de soulagement. Non, elle ne brûlerait pas cette photo. Mais elle ne la laisserait pas non plus dans sa chambre. Le grenier lui sembla une bonne alternative. Pas la cave. Le grenier c’est là qu’on mettait les choses du passé.
C’était parfait. Joignant le geste à la pensée elle se leva. Dénicha une enveloppe dans son bureau, y glissa la photo puis monta au grenier. Elle n’y était jamais venue avant mais elle savait qu’il existait. Elle n’était jamais venue parce qu’elle n’y aurait rien appris. Rien qui soit en relation avec son présent en tous cas. Elle ne s’attarda pas malgré l’intérêt qu’elle aurait trouvé à se replonger dans ses vieux souvenirs. Elle déposa l’enveloppe – et donc la photo coupable – tout au fond d’un coffre qui contenait déjà un certain nombre d’albums. En le refermant elle sentit un poids s’envoler. Elle avait fait ce qu’elle avait à faire. C’était fini.
Des larmes roulèrent à nouveau le long de ses joues. Elle ne sut pas déterminer s’il s’agissait de soulagement ou de tristesse. Finalement elle se fit couler un bain brûlant et empli de mousse. Elle se déshabilla et se glissa dedans avec délectation. Les paroles de « Every breath you take » de Police – encore quelque chose qu’elle connaissait – la berçait doucement. Every breath you take. Elle était prête maintenant. Every move you make. Bon, elle n’avait peut-être pas suivi son plan à la lettre mais c’était presque ça. Every bond you break. Cette photo… c’était trop dur. Every step you take.Oh, elle se rendait bien compte que c’était pitoyable. I’ll be watching you. Que son comportement était pitoyable. Every single day. Ce n’était qu’un bout de papier. Every word you say. Mais voilà, c’était « eux » sur ce bout de papier. Every game you play. Alors, non. Every night you stay. « Les » brûler. I’ll be watching you. « Les » tuer. Oh, can’t you see. C’était au-dessus de ses forces. You belong to me. Elle voulait tourner la page, soit. How my poor heart aches. Pas « les » exterminer. With every step you take. Et puis un tel bonheur irradiait de cette photo. Every move you make. C’est comme ça qu’elle voulait se souvenir d’ « eux ». Every vow you break.
Pas la douleur. Every smile you fake. Pas les larmes. Every claim you stake. Juste le bonheur. I’ll be watching you. Un bonheur auquel elle n’avait jamais pu goûter. Since you’ve gone I’ve been lost without a trace. Auquel elle devait renoncer avant même de l’avoir effleurer. I dream at night I can only see your face. Enfin… « Elle ». I look around but it’s you I can’t replace. C’était une façon de parler. I feel so cold and I long for your embrace. La future « elle ». I keep crying baby, baby please. Allons, demain tout serait fini. Oh, can’t you see. Pas de regrets. You belong to me.
Elle avait vécu sa vie, en fait. How my poor heart aches. Et demain elle s’en rappellerait. With every step you take. Demain tout irait mieux. Every move you make. « Tout » c’était peut-être un grand mot. Every vow you break. Mais ça irait mieux. Every smile you fake. C’était une certitude. Every claim you stake. Une certitude à laquelle elle se raccrochait. I’ll be watching you. C’était un mensonge aussi. Every move you make. Mais elle avait pris sa décision en son âme et conscience. Every step you take. Elle allait retrouver sa place. I’ll be watching you...C’était l’essentiel, non ? Ouais, bof. Peu importe qui elle voulait convaincre, elle s’y prenait vraiment comme un manche. Une décision était une décision de toutes façons. Et même si ce n’était pas la meilleure, ce n’était pas la pire. Elle devait voir Scott. S’éloigner d’ici. Quelques temps au moins. Elle reviendrait bien sûr. Le SGC, Daniel, Teal’c... c’était sa vie. Son oxygène. Elle ne pourrait s’en passer. Elle ne l’envisageait même pas d’ailleurs. Elle avait juste besoin de prendre un peu de recul par rapport à tout ça. Elle cessa de réfléchir pour se laisser aller à la mélodie, à la senteur de rose qui imprégnait la pièce.
Elle ferma les yeux et se replongea dans les souvenirs de l’après-midi. Un sourire naquit sur ses lèvres. Elle revécut ces instants magiques durant lesquels elle s’était sentie transportée. Avec « lui ». Dans « ses » bras. Après « ses » aveux. Ses si délicieux aveux. Ils lui paraissaient pourtant déjà si loin… Si irréels… Restaient son odeur, le goût de ses lèvres, la caresse de ses mains, la douceur de sa peau, l’amour dans ses yeux, la tendresse dans sa voix. Tant de choses. Et si peu en même temps. Quelques heures volées à l’éternité. Un pied de nez au destin.
Après le bain elle se sécha sommairement, enfila une des chemises de Scott puis se coucha. Il devait être près de 3 heures. Elle sombra immédiatement. Cette nuit là elle revit tout. Toutes ces 18 dernières années. En accéléré. Comme sur une cassette vidéo. Il en résulta un sommeil agité. Peu réparateur. Pour ne pas dire « pas réparateur du tout ». Quand elle se réveilla le lendemain tout lui revint. Absolument tout. Elle ouvrit les yeux, un instant égarée, puis se redressa brusquement. Elle était revenue. Elle rejeta sa couette au pied du lit et se précipita dans la salle de bain. Le miroir.
Elle ne fut même pas surprise. Un sourire fugitif éclaira son visage encadré de cheveux courts, en bataille. Oui. Elle était revenue. Quoique « revenue » ne lui sembla pas le terme exact. Elle n’était jamais partie. Elle avait toujours été là, dans un coin de son esprit. Durant tout ce temps elle s’était en quelque sorte en dehors de son corps. C’était une sensation difficile à expliquer. Inexplicable même. Indéfinissable. Pas franchement agréable en tous cas. Elle se souvenait de tout. Mais comme si ces évènements s’étaient déroulés 18 ans auparavant, durant son adolescence. Ça avait un côté lointain.
Elle retourna dans la chambre et se laissa tomber sur son lit. Elle l’avait prise finalement sa décision. Et pour ça il avait fallu qu’elle… Oh mon dieu ! Elle avait… avec Jack. Avec le clone de Jack rectifia t’elle mentalement. Mais quand même ! Heureusement que personne ne le savait. Sauf elle. Et lui. Mais pas « lui ». Quoique leur comportement – à elle et à Jack « junior », s’entend – durant la journée et la soirée avait été peu équivoque. Elle se remémora ces derniers jours. Certaines choses la firent rire. D’autres pleurer. Elle avait pris sa décision. Une décision. Humm. Pas si facile que ça, hein ? […]
Elle se décida à regarder le réveil. 6h48. Pas étonnant qu’elle se sente fatiguée. Elle n’avait dormi que 4 heures. Tant pis, elle se rattraperait dans l’avion. Oui, mais d’abord il fallait qu’elle passe à la base. Qu’elle « lui » parle. Perspective peu réjouissante. Hey quoi ? Elle n’avait plus 18 ans ! C’était bien le cas de le dire. Peut-être qu’elle aurait du rester encore un peu « comme ça ». Ça serait certainement mieux passé. De son point de vue à elle du moins.
Base de Cheyenne Mountain, 8h25, devant le bureau du général O’Neill
Elle s’était préparée et habillée en un temps record puis, non sans avoir bouclé ses valises, un pot de nutella dans le ventre – et accessoirement sur les hanches – elle était arrivée à la base un peu avant 8 heures. Après un passage obligé par le bureau de Daniel – qui se préparait justement à aller la chercher – et par les quartiers de Teal’c, elle avait décidé de se rendre directement chez son supérieur. Seulement sur son chemin elle fut abordée par un nombre impressionnant de militaires et de civils qui lui souhaitèrent un bon retour parmi eux. La plupart affichaient de grands sourires. Visiblement la situation les avait amusés. Elle ne pouvait pas vraiment en dire autant.
Maintenant qu’elle se tenait devant la porte elle hésita. Inconsciemment lui revinrent les images de ce visage à moitié dévoré par les flammes. En plus il n’était pas au courant de son « retour ». Elle se demanda comment est-ce qu’il réagirait. Il ne ferait rien bien sûr. Peut-être un « Bienvenue parmi nous Carter » teinté d’ironie. Elle ne se faisait pas d’illusion. Elle n’aurait rien de plus. Evidemment. Elle avait pleuré dans ses bras, il l’avait consolée. Ils s’étaient confiés l’un à l’autre. Mais ce n’était pas elle. Et puis… Et puis ce Jack là ne l’aimait pas. C’est lui qui l’avait dit. Pourtant… Elle soupira et se décida à frapper à la porte.
- (Jack, depuis l’intérieur) Entrez !
Elle s’exécuta, de plus en plus mal à l’aise et referma la porte derrière elle. Il n’avait pas encore levé la tête. Il ne l’avait pas encore vu. Elle s’avança à l’intérieur de la pièce de quelques pas. Elle s’arrêta à une distance respectable du bureau, les mains derrière le dos.
- (Sam) Mon général.
Waow. Plutôt efficace. Il s’était redressé immédiatement et posait à présent un regard indéchiffrable sur elle. Ses yeux parcoururent son corps avec insistance et elle du détourner les siens, trop gênée. Il finit par remarquer que peut-être sa manière de la regarder était peu digne d’un supérieur et se força à se concentrer sur son visage. Ce n’était pas très compliqué. Il aurait pu passer des heures à contempler ses traits délicats, à se plonger dans l’océan de ses yeux… humm… enfin, bref. Il se leva finalement et vint s’adosser sur le devant de son bureau.
- (Jack, avec un léger sourire) Sa… Carter. Vous êtes… vous.
- (Sam, très professionnelle) En effet général.
- (Jack) Bien. C’est… bien.
- (Sam, après quelques secondes, d’une voix hésitante) Oui, je crois.
- (Jack, penchant la tête) Vous n’avez pas l’air convaincue.
- (Sam) Oh si, bien sûr que si. C’est juste… je voudrais vous parler.
- (Jack) Vraiment ?
Il se mit debout. Elle fuyait son regard. Il faut dire que les « Je voudrais vous parler » c’était pas courant venant d’elle. Il se demandait de quoi elle voulait bien lui parler. En tous cas ça semblait la mettre drôlement mal à l’aise. Ce pourrait-il qu’elle veuille aborder « le » sujet ? Peu probable. Et quand bien même, que pourrait-il lui répondre ? Oh, il voyait bien deux ou trois choses qu’il pourrait dire ou faire mais… non. Il ne le pouvait pas. Qu’est-ce qu’une femme comme elle pourrait-elle faire d’un homme comme lui ? De toutes façons c’était trop tard. Elle l’avait dit la dernière fois. « Si je ne le vous dis pas maintenant je ne le ferais jamais… ». Le destin et son foutu caractère avaient voulu que ce soit le « jamais » qui l’emporta.
- (Jack, voyant qu’elle ne se décidait pas) Allez-y.
- (Sam, les yeux baissés) C'est-à-dire que… c’est assez personnel.
- (Jack) Oh… je vois.
Il baissa les yeux à son tour. Et bien si, on dirait que c’était ça en fin de compte. Elle redressa la tête, consciente que sa phrase était un peu trop ambiguë.
- (Sam) Non. Ce n’est pas… (se lançant) Je souhaiterais obtenir une permission. Des vacances.
Ah non, ce n’était pas ce qu’il croyait. Il hésitait entre le soulagement et la déception. A quoi bon se mentir ? Il était déçu bien sûr. Parce qu’il sentait bien que si elle lui avait parlé maintenant il ne l’aurait pas repoussée. Au contraire… Il se sentait prêt. Prêt à brûler ses vaisseaux comme on disait. Elle était là, devant lui, et il la trouvait plus belle que jamais. Il se délectait de sa vue après ces 4 jours sans elle. Il ne put que répéter ses derniers mots.
- (Jack) Des vacances ?
- (Sam, acquiesçant) Deux semaines de vacances.
- (Jack) Deux semaines ?
Décidément, il n’était pas très réactif ce matin. Il n’arrivait même pas à aligner plus de deux mots.
- (Sam, penchant la tête) Ça pose un problème monsieur ?
- (Jack, se passant une main dans ses cheveux) Heu… non. C’est juste que c’est assez… inhabituel ce genre de… requête… de votre part.
- (Sam, se redressant) Je sais monsieur. C’est pourquoi je me permets de vous le demander aujourd’hui. Le fait est que j’ai pris conscience de… certaines choses et j’ai besoin de… m’aérer… un peu.
- (Jack, posant ses mains sur le bureau de chaque côté de son corps) Je comprends. 2 semaines, c’est d’accord. Mais…
- (Sam, voyant où il voulait en venir) Vous pourrez me joindre sur mon portable à tout moment. Je serais à Chicago.
Le cœur du général se serra. Chicago. Chicago = Scott. Il n’ignorait pas que le « beau chirurgien » – à prononcer avec une pointe de mépris – vivait à Chicago. Elle allait le rejoindre. Parce qu’il l’avait repoussé. Encore. « Non, […] nous sommes amis. ». Ce n’était pas vraiment un mensonge. Mais pas la vérité non plus. La vérité… il ne pouvait pas mettre de mots sur ce qu’il ressentait pour elle. Ça allait bien au-delà des mots. Un « Je t’aime » lui semblait bien insipide et dénué de sens. Ce qu’il ressentait transcendait l’amour ou le poussait au moins à son paroxysme. Elle était tout pour lui. Elle était sa vie. Il vivait pour elle et par elle.
- (Jack, tentant d’adopter un ton neutre) Vous partez quand ?
- (Sam) Mon avion est dans 4 heures.
- (Jack, croisant ses bras sur son torse, souriant) Donc vous étiez sûr que je dirais oui.
- (Sam) Sauf votre respect, général, je serais partie avec ou sans votre accord.
- (Jack, soupirant) Je sais. C’est pour ça que je vous le donne… pour enterrer la hache de guerre.
- (Sam, fronçant les sourcils) Quelle hache monsieur ?
- (Jack) Celle que vous avez déterrée… (décroisant les bras) mais je vous y ai sûrement aidé.
- (Sam, impassible) Je ne savais pas que nous étions en guerre, monsieur.
- (Jack, doucement) Sam…
- (Sam, le coupant brusquement) Je dois y aller monsieur. (partant) Je vous souhaite une bonne journée.
Il fit un geste vers elle mais elle avait déjà passé la porte et disparaissait dans le couloir. Il se traita mentalement de tous les noms. Un lâche. Voilà ce qu’il était. Un horrible lâche bardé de médaille. Non seulement il était incapable de tenir ses résolutions – à savoir la laisser vivre sa vie – mais en plus il n’était même pas foutu de lui dire la vérité. Et il la laissait partir. Encore. Perdu dans ses pensées, furieux contre lui-même, il n’entendit pas les coups répétés sur la porte. Ce n’est que lorsque que le visage de Daniel passa par l’entrebâillement, en se raclant la gorge pour signaler sa présence, qu’il le remarqua.
- (Daniel, entrant dans la pièce) Sam n’est plus là ?
- (Jack, balayant la salle d’un geste de la main, un brin cynique) Comme vous le voyez…
- (Daniel) Oui, évidemment. Vous savez où elle est ?
- (Jack, retournant s’asseoir derrière son bureau) En route pour l’aéroport je suppose.
- (Daniel, ouvrant de grand yeux) Quoi ?!?
- (Jack, las) Elle est en vacances Daniel. Elle ne part pas définitivement.
Quoique… il n’en était pas vraiment sûr. Son regard… D’ailleurs c’est pour cette raison qu’il avait failli tout lui dire. Il l’avait sentie s’éloigner. Et pas seulement au sans propre. Mais, non. Elle ne ferait jamais ça. Fuir ne lui ressemblait pas. Ouais, sauf à l’instant. Mais pas fuir ses responsabilités en tout cas. Son sens du devoir était bien trop aigu.
- (Daniel) … Jack ? Jack ! Hey oh !
- (Jack, semblant émerger) Daniel ?
- (Daniel, amusé) Vous feriez bien de prendre des vacances vous aussi. Vous n’avez pas l’air dans votre assiette. (changeant de sujet) Pour Sam… C’est bien qu’elle soit redevenue elle-même. Il faudrait prévenir Ophalis… Je me demande quel genre de décision elle a du prendre. Enfin, c’est bizarre… elle ne m’a même pas prévenue qu’elle partait. (sur un ton enjoué) C’est pas grave, je l’appellerais.
- (Jack, amer) Vous risqueriez de la déranger. Elle est partie pour Chicago.
- (Daniel, sans comprendre) Oui, et… ? Je ne voit pas en quoi le fait qu’elle soit à Chicago… (réalisant) Oh, Scott. (malicieux) Je comprends mieux.
- (Jack, suspicieux) Comprendre quoi ?
- (Daniel, souriant) Rien.
- (Jack) Daniel…
- (Daniel, levant les mains) Mais je n’ai rien dit !
- (Jack) Vous n’avez pas rien dit. Vous avez dit « Rien ». Avec ce sourire, là…
- (Daniel) Jack, vous devenez parano. Vous devriez vraiment prendre des vacances. On m’a dit que Chicago était très sympa en cette saison…
Il s’éclipsa rapidement alors que le général cherchait des yeux un objet à lui lancer à la figure. Chicago… N’importe quoi ! […] En même temps… Elle avait dit 4 heures ? C’était faisable. Mais d’abord il devait passer quelques coups de fil. Il allait sans doute faire la plus grosse bêtise de son existence. Mais ne l’avait-il pas déjà faite en tentant de nier ses sentiments et de les contrer durant tout ce temps. Il l’aimait, ça oui. Elle l’aimait. Il en aurait mis sa main à couper. Il pensait aussi qu’il ne la méritait pas mais n’était-ce pas à elle d’en décider ? Tout ce qu’il voulait c’est qu’elle ne souffre pas.
Il se rappelait les paroles de Kerry. “Is the Air Force the only thing keeping you two apart? Rules and regulations? Cos if it is, you're making a very big mistake”. Sur le coup il n’avait rien trouvé à répondre. Parce qu’elle avait raison. Au fond il le savait. Si il n’y avait que les lois et les règlements qui les empêchaient d’être ensemble, c’était une erreur. A lui de s’arranger pour que ça change. Mais il n’y avait pas que ça. Il y avait la peur aussi. Mais que risquait-il ? Au pire il se prenait le plus gros râteau de son existence. Au mieux… Au mieux… Il ne préférait pas se donner de faux espoirs.
Aéroport, 1 heure avant le départ
Sam était assise sur un des nombreux sièges de la salle dans laquelle patientaient les passagers du vol pour Chicago. Les jambes croisées. Des écouteurs vissés sur les oreilles. Le nez plongée dans une revue féminine à la mode. Elle était à des années lumières de là. Elle tournait machinalement et régulièrement les pages de papier glacé sans prêter véritablement attention à leur contenu. Son esprit était bien trop occupé à réfléchir à autre chose. Elle pensait à « lui ». Elle s’était jurée pourtant de ne plus le faire. Au moins lorsqu’il n’était pas juste devant elle. Et encore…
Mais voilà, apparemment c’était une chose qu’elle ne savait pas faire. Qu’elle n’était pas physiquement capable de faire. Pitoyable. Oui, ça elle le savait. Elle était pitoyable et pathétique. Elle repensait sans arrêt aux paroles de Jack, l’autre, le jeune. Pas qu’à ces paroles en fait… Que n’aurait-elle pas donner pour renouveler l’expérience ? Mais avec le général bien entendu. Rien qu’une fois. Même si elle savait que ça la briserait. Une seule fois et ne jamais pouvoir recommencer. Non. Si elle y goûtait elle était sûre de ne pas pouvoir s’en passer ensuite.
De toutes façons la question ne se posait même pas. N’y avait-il pas « rien » entre eux ? N’étaient-ils pas « juste amis » ? Elle, elle n’avait pas pu les tuer. Même en photo. Il s’en était chargé. Un long travail de sape. Mais il y était arrivé. Il l’avait poussée à bout et elle avait renoncé. Vraiment. Chose qu’elle n’avait jamais fait avant. Quoiqu’elle ait pu dire ou faire elle n’avait jamais renoncé. Elle avait toujours gardé un espoir, même infime. Plus maintenant. Le problème c’est que l’amour ne marchait pas comme les mathématiques. Ce n’était pas une fonction décroissante de la douleur.
Ça aurait été tellement facile. Plus elle souffrait, moins elle l’aimait. Elle le détesterait depuis un bon bout de temps déjà… Mais ça ne marchait pas comme ça. La vie était mal faite quand même. Avec tous les hommes qu’elle aurait pu mettre à ses pieds d’un simple claquement de doigt – en toute modestie – ou en tout cas avec tous les hommes susceptibles de lui convenir autour d’elle, il avait fallu qu’elle tombe amoureuse – et follement en plus – de celui-là. Désespérant. Enfin, elle n’était pas là pour se lamenter. Elle devait ou-bli-er. Elle l’avait déjà bien assez pleuré.
Elle allait s’amuser pendant ces deux semaines loin de lui. Loin de la base. Avec Scott. Elle comptait bien en profiter. Son ami/amant – elle ne pouvait se décider – avait été plus qu’enthousiaste à l’annonce de son arrivée. Il avait répondu immédiatement à son mail avec une chaleur attendrissante. Elle sourit à ce souvenir. Pourquoi ne pouvait-elle pas tomber amoureuse d’un homme comme lui ? Enfin, ça pouvait encore venir. Elle avait juste besoin d’un peu de temps. A un moment elle redressa la tête, il lui avait semblé reconnaître un parfum. Une odeur familière…
Elle jeta un coup d’œil autour d’elle. Rien. Elle avait du rêver. Elle se replongea dans son magazine. Son pied battait la mesure de « Let’s get Loud » de Jenifer Lopez. Tiens, Tom s’était remis avec Pénélope. Jenifer et Brad allaient rompre. Le nouveau film de Britney était un bide total. Machin venait de divorcer de son troisième mari. Truc trompait son actrice de femme avec une obscure chanteuse… Comme si ça intéressait quelqu’un ! Les gens n’avaient-ils pas assez de problèmes personnels pour vouloir encore se tenir informé de ceux des autres ? Ou alors peut-être que ça les aidait à oublier les leurs ? A méditer.
Un mouvement à sa droite. Elle ne releva pas la tête. Une ombre apparut devant elle. Elle maudit intérieurement tous ces gens qui tourbillonnaient autour d’elle. Quelle idée de prendre l’avion en plein milieu de semaine et à cette heure-ci ? Ils ne pouvaient pas la laisser un peu tranquille, non ? Pff… Elle continua sa lecture pendant quelques instants. Une canette de soda – light – fit soudain son apparition dans son champ de vision. Elle retint un hoquet de surprise et recula légèrement. Avant même de lever les yeux, elle sut. Elle ne comprit pas, mais elle sut. Elle retira d’abord ses écouteurs, posa son magazine puis se décida à « le » regarder.
Il était bien là. Devant elle. Il arborait cet éternel petit sourire en coin mais son regard était porteur d’une certaine inquiétude inhabituelle. De l’inquiétude, oui mais autre chose aussi. Une chose qu’il n’avait pas l’habitude de montrer. Une chose qui la troublait. Une intensité presque douloureuse. Ils restèrent comme ça, à se fixer, longtemps… Ils faisaient passer dans leurs yeux bien plus qu’ils ne l’avaient jamais fait. Détournant finalement son regard, elle se saisit machinalement la canette qu’il lui tendait. Machinalement. Comme souvent depuis un certain temps. Elle agissait machinalement.
Elle fronça les sourcils quand elle remarqua le sac à ses pieds. Elle avait d’abord pensé qu’il était venu la chercher parce qu’il y avait un problème à la base. D’ailleurs elle n’avait pensé à rien d’autre. Elle ne voyait absolument pas quelle autre raison aurait bien pu le pousser à venir jusqu’ici. Mais manifestement ce n’était pas le cas. Alors quoi ? Si il avait voulu lui parler il n’aurait eu qu’à l’appeler. La seule autre option qui lui vint en tête… Non, c’était ridicule. Elle la chassa bien vite de son esprit.
- (Sam) Mon général ? Qu’est-ce que vous faites là ?
- (Jack, tout naturellement) Je viens prendre l’avion.
Elle ne put cacher son étonnement. Il venait…
- (Sam) Quoi ?!
- (Jack, s’asseyant à côté d’elle) Eh bien je suis en vacances alors je pars… en avion.
Cette conversation lui semblait totalement surréaliste. Sa présence ici était surréaliste.
- (Sam) Mais, où allez-vous ?
- (Jack, sans la regarder) A Chicago.
- (Sam, manquant de s’étrangler) A Chicago ?!?
- (Jack) Oui, j’ai une amie là-bas.
Une douloureuse sensation lui noua l’estomac. Une amie… Bien sûr, elle aurait du s’en douter. Ah, non ! Il était hors de question qu’elle se montre jalouse ! C’était tout à fait exclu. O’Neill n’était rien pour elle. Elle avait Scott. Mon dieu. Si cela pouvait être vrai ! Il l’avait vu pâlir et reprit un peu d’assurance. Parce que pour l’instant, même si il ne le montrait pas, il était mort de peur. Littéralement. Il ne savait même pas comment il faisait pour ne pas trembler. Mais maintenant qu’il était là, il irait jusqu’au bout. D’abord il fallait qu’il prenne sur lui et surtout qu’il calme le rythme endiablé de son cœur.
- (Sam, reprenant son magazine) Bien, j’espère que vous y ferez un bon séjour.
- (Jack) Je l’espère aussi.
Le silence s’installa un moment. Pesant.
- (Jack) Et sinon, vous connaissez un peu Chicago ?
Ridicule. Il était totalement ridicule. Ah quoi jouait-il ? Il n’en avait rien à faire qu’elle connaisse Chicago ou non. Pourquoi ses lèvres n’arrivaient-elles pas à former les véritables phrases qu’il voulait prononcer ? Elle ne voyait absolument pas où il voulait en venir. Elle pensa même un instant être en train de rêver. Ça ne rimait à rien. Strictement à rien… Elle détestait tellement ne pas comprendre ! Elle jugea tout de même préférable de répondre. Même monosyllabiquement.
- (Sam) Non.
Ok, c’était pas gagné. Autant pour lui. Il pouvait bien ramer un peu après tout ce qu’il lui avait fait endurer. Il décida d’entrer dans le vif du sujet. Tourner autour du pot n’avait jamais été sa tasse de thé. Et il savait par expérience que ça ne servait pas à grand-chose. Ce qu’il allait faire… ne lui ressemblait pas. Il le savait. Mais c’était sa dernière chance. Si elle prenait cet avion, il la perdrait. Définitivement cette fois. Et cette pensée lui était insupportable. Il avait cru pouvoir se contenter de la côtoyer tous les jours, comme avant. De la regarder de loin. Mais c’était trop dur. Il en avait enfin pris conscience. Et il devait agir. Maintenant.
- (Jack, regardant droit devant lui) Est-ce que vous aimez Scott ?
Elle manqua de s’étouffer – à nouveau – et resta muette d’étonnement quelques instants. Oups… peut-être un peu trop direct. Elle se demandait si il venait bien de dire ce qu’elle l’avait entendu dire. Et si ses paroles avaient bien la signification qu’elle leur donnait. Avec Jack O’Neill on n’était jamais trop prudente. Pourtant là, la formulation laissait peu de place au doute. Réalisant soudain que oui, il lui avait bien demandé si elle en aimait un autre et que oui, il n’était manifestement venu ici – et avait donc du prendre un billet d’avion – dans le seul but de lui poser cette question, la lumière se fit dans son esprit.
Si il s’agissait bien de ce à quoi elle pensait… Mais non… Il ne pouvait pas… C’était bien sa veine ça. Juste quand elle prenait la décision de l’oublier, voilà qu’il se décidait à… enfin… Bon, d’abord retrouver un rythme respiratoire normal. Bon, disons plus normal que ça. Ensuite vérifier qu’elle ne méprend pas sur ses intentions. Et puis le faire un peu tourner en bourrique. Elle jeta un coup d’œil sur sa gauche. Ses traits – délicieusement virils – étaient contractés. Plus aucune trace d’un quelconque sourire. Ses yeux, se posant doucement sur elle étaient pleins d’une appréhension qu’elle n’y avait jamais vue.
- (Sam, avec un léger sourire en coin) Oui…
Son cœur manqua un battement. Une lame acérée s’y enfonça. Elle l’aimait. Alors c’était vraiment fini. C’était ça sa décision. Elle observa, non sans une certaine délectation, son visage se décomposer et ses épaules s’affaisser avant de finir sa phrase. Elle aurait pu s’arrêter là bien sûr mais malgré son désir de lui rendre la monnaie de sa pièce, de rester indifférente, elle ne pouvait s’empêcher de se demander s’il ne s’agissait pas là de leur dernière chance. Leur dernière chance de vivre quelque chose. Ok, elle voulait l’oublier mais en même temps elle ne pouvait laisser passer une occasion d’avoir tout ce qu’elle avait toujours désiré. Elle le devait au moins à son père.
- (Sam, poursuivant) … mais certainement pas dans le sens où vous l’entendez, vous.
Le voir reprendre des couleurs si brutalement. Voir ses yeux s’illuminer d’un espoir tout neuf. Voir un sourire hésitant étirer ses lèvres. C’était un spectacle peu courant. Lui qui ne laissait jamais transparaître une seule émotion sur son visage. Elle pouvait à présent y lire tout ce qui se passait dans son esprit. Elle ne put s’empêcher de sourire davantage et de secouer doucement la tête. Il avait l’impression de revivre et décida donc d’aller plus avant.
- (Jack) Donc vous ne l’aimez pas vraiment ?
- (Sam, restant volontairement vague) Tout dépend quel sens vous donnez à ce verbe. Il y plusieurs façons d’aimer, non ?
- (Jack) Oui, mais je voulais dire…
- (Sam, le coupant, d’un ton tranchant) Je sais exactement ce que vous vouliez dire, monsieur. Mon problème actuellement est de savoir en quoi le fait de savoir ça puisse vous avancer et où voulez-vous en venir.
Il se gratta nerveusement la nuque. Evidemment. Il aurait du s’y attendre. Il continuait à tourner autour du pot et elle n’était pas dupe de son manège. N’était-ce pas Carter après tout ? Enfin… Sam. Sam lui plaisait davantage. Il sourit. « Sam ». Tiens… elle le regardait bizarrement. Il n’avait pas parlé tout haut quand même ? Elle semblait amusée. Bien, peut-être que si.
- (Jack, se levant) On ne pourrait pas aller ailleurs ?
Déjà que pour les grandes déclarations il n’était pas très doué… alors en public…
- (Sam, faisant de même par habitude) Je vous signale que j’ai un avion à prendre dans moins d’une demi-heure.
- (Jack) Vous êtes sûre ?
- (Sam, ironique, désignant le panneau d’affichage) Oui, c’est marqué là.
Il suivit des yeux la direction qu’elle lui indiquait puis reporta son regard sur elle. Les bras croisés sur sa poitrine, l’esquisse d’un sourire ironique aux lèvres, elle ne semblait pas décidée à l’aider. C’était de bonne guerre.
- (Jack, rapidement) Je n’ai pas envie que vous preniez cet avion.
- (Sam, cynique) Tiens donc ! Et alors quoi ? Je dois vous obéir ?
- (Jack, encore plus rapidement) J’aimerais que vous veniez avec moi.
Il n’en revenait pas d’avoir dit ça. Enfin, il le pensait évidemment. Mais de là à le dire… Bon, il aurait bien fallu y venir à un moment ou à un autre mais il n’en revenait pas de l’avoir sorti comme ça. Elle dissimula tant bien que mal sa surprise. Cette conversation était définitivement surréaliste. En réalité, elle imaginait assez bien où il voulait en venir mais ne pouvait y croire. Etait-ce vraiment le grand Jack O’Neill devant-elle ? Si peu sûr de lui ? On aurait dit un autre homme. Non pas que cela lui déplaisait particulièrement mais ça lui semblait… bizarre.
- (Sam, se reprenant) Où ça ?
- (Jack, la fixant intensément) Où vous voudrez.
- (Sam, penchant la tête, plus doucement) Pourquoi ?
Ah… on y était. La question piège à un million de dollar. Comment lui dire… Comment lui faire comprendre tout ce qu’elle représentait pour lui ? Les mots… ça n’avait jamais été son truc. Il leva une main tremblante vers le visage de la jeune femme qui se figea. Davantage par anticipation que par surprise. Elle retint sa respiration, sentant la chaleur de sa paume avant même que leurs peaux n’entrent en contact. Les yeux rivés dans les siens il tentait d’y mettre tout ce qu’il pouvait ressentir. Un frisson les secoua alors que sa main glissait enfin sur la joue chaude de Sam. Se faisant il s’approcha d’elle jusqu’à ce que leurs corps se frôlent.
Il se pencha tout doucement vers elle, lui laissant le temps de se désister si elle le souhaitait. Il effleura ses lèvres, laissant leurs souffles se mêler avec délice, puis captura délicatement sa bouche dans un tendre baiser. Sam ferma les yeux et s’abandonna au flot de sensations qui l’envahissait. Ses jambes flanchèrent mais Jack la maintenait fermement contre lui, un bras passé autour de sa taille fine. Finalement ils se séparèrent, le souffle saccadé, le sourire aux lèvres, le regard sombre, front contre front. Aucun d’eux n’était réellement surpris par la tournure des évènements. Sans les attendre ils les avaient souvent espérés.
- (Jack, tout contre sa bouche, tout bas) Pour ça.
Elle ne put réprimer un petit rire qui se transforma en sanglot. Si elle avait suivi son plan elle se serait défiler ou elle l’aurait giflé. Peut-être même insulté… Heureusement qu’elle n’en avait rien fait. Elle débordait littéralement de bonheur. Elle qui, la veille, pleurait devant une vieille photo brûlée. Elle était dans « ses » bras. « Il » venait de lui faire la plus belle des déclarations. En plein aéroport. Le parfait cliché. Mais en même temps, eux qui ne faisaient jamais rien comme tout le monde, n’avaient-ils pas droit de profiter de ce cliché ? Si. Définitivement. Une larme roula sur sa joue, rapidement effacée par une douce caresse du pouce de Jack.
- (Jack, lui replaçant une mèche derrière l’oreille) Hey…
- (Sam, souriant et posant son front sur son épaule) C’est une bonne raison.
- (Jack, idem) Tu trouves ?
Pour toute réponse Sam se jeta littéralement sur ses lèvres. Glissant une main sur sa nuque, l’autre dans ses cheveux, elle entrouvrit sa bouche pour laisser passer la langue insistante qui forçait le barrage de ses dents. Elle étouffa un gémissement sous l’ardeur du baiser et Jack raffermit leur étreinte. Le ballet incessant de leurs langues, l’odeur de son after-shave, la fermeté de son torse contre sa poitrine, la caresse de ses mains sur son corps… elle avait l’impression de rêver. De flotter plutôt. Toujours est-il que c’était terriblement agréable. Non, c’était bien mieux qu’agréable. Et manifestement elle n’était pas la seule à le penser…
Jack en était arrivé aux mêmes conclusions. Son anatomie régissait à la sensation de cette femme qu’il adorait, de ce corps si désirable contre lui, sans tenir compte du fait qu’ils en étaient en plein milieu d’une salle d’attente. Si ça continuait comme ça il ne répondait plus de rien. Il était bouleversé par la manière dont elle s’abandonnait à leur baiser, dont elle s’abandonnait à lui. Ça le transportait. Rien à voir avec leurs trois derniers baisers. Rien avoir avec tous ses précédents baisers. Il avait toujours su qu’avec elle se serait « spécial ». Mais là c’était… waow ! Il ressentait un besoin incontrôlable de la posséder au sens noble comme au figuré.
Les deux militaires restèrent là, à s’embrasser comme si leur vie en dépendait alors que les gens commençaient à rejoindre les portes menant à la salle d’embarquement et à l’avion. Ils n’entendirent même pas les derniers appels pour leur vol. Ils étaient dans leur monde, embrasant mutuellement leur sens. Il avait à présent les mains sur ses hanches alors qu’elle avait passé ses bras derrière sa nuque. La passion de leur baiser retomba progressivement et ils finirent par s’écarter légèrement l’un de l’autre.
- (Jack, avec un petite grimace espiègle) Je crois que tu as raté ton avion…
- (Sam, taquine) C’est pas grave, je prendrais le prochain.
Il fronça les sourcils et elle éclata de rire.
- (Sam, faisant mine de réfléchir) Ou sinon…
- (Jack) Sinon ?
- (Sam, malicieuse) Je ne sais pas si vous… (se reprenant devant son regard) si tu as quelque chose de mieux à me proposer…
- (Jack, idem) Faut voir… (la lâchant complètement) Attends-moi là.
Il partit au pas de course sous l’œil amusé de la jeune femme. Elle eut à peine le temps de se retourner qu’il revenait déjà. Il prit son visage entre ses mains et l’embrassa de nouveau avec fougue.
- (Jack) Je t’aime.
Et il repartit aussi vite qu’il était revenu, laissant une Sam, un grand sourire indélébile sur les lèvres, au milieu de la salle maintenant vide. Elle secoua la tête. C’était un vrai gamin. Tellement surprenant. Tellement adorable. Et dire qu’elle avait voulu se passer de ça. Qu’elle avait cru pouvoir y arriver… « Je t’aime ». Quelques hommes le lui avaient dit. Dans des circonstances assez diverses. En général plus romantiques que dans le cas présent. Mais jamais, au grand jamais ces trois petits mots ne l’avaient autant saisie. Et puis cette façon qu’il avait de l’embrasser. S’ils n’avaient pas été dans un lieu public… Un délicieux frisson lui parcourut le corps.
Elle profita de cette absence momentanée pour appeler Daniel. Elle n’était même pas passée le voir en partant. Sans doute trop pressée de s’éloigner de cet homme dont elle ne voulait plus jamais être séparée. Elle ne dit rien à son ami des derniers évènements. Pour lui elle allait à Chicago. Voir Scott. Scott. Elle l’appela lui aussi, pour le prévenir. Pour rompre dans un certain sens. Même s’ils ne formaient pas un couple au sens conventionnel. Il fut déçu et peiné bien sûr mais tenta de ne pas le laisser paraître. A lui, elle dit tout. Elle lui devait bien ça. Il se montra heureux pour elle. Fidèle à lui-même.
Elle se sentit un peu coupable. Ils s’étaient servis l’un de l’autre mais elle s’était plus servie de lui que lui d’elle. Et maintenant, après lui avoir dit qu’elle venait le rejoindre elle rompait. Au téléphone en plus. Le pauvre. Il faudrait qu’ils en reparlent. Mais plus tard. Pas maintenant. Maintenant elle était bien trop heureuse et elle sentait que ce bonheur, même si il lui faisait plaisir n’était pas pour consoler totalement Scott. Elle était encore au téléphone avec lui quand Jack revint. Elle raccrocha juste quand le général arriva à sa hauteur. Il avait l’air très content de lui.
- (Jack, les mains dans les poches) C’est bon.
- (Sam, souriant) Oh… et où va-t-on ?
- (Jack) C’est une surprise.
- (Sam) Bien.
Elle lui faisait confiance de toute façons. Et puis du moment que c’était avec lui elle aurait pu aller n’importe où. Elle remarqua un petit pli soucieux qui lui barrait le front. Une sourde angoisse lui noua le ventre. Avait-il des doutes ? Regrettait-il ? Etait-ce bien sage de partir ensemble alors qu’ils venaient tout juste de… de quoi au juste ? De se mettre ensemble ? Ça sonnait bizarrement. On ne devenait pas un couple en deux minutes. Qu’étaient-ils exactement ? A part des hors la loi. Peut-être était-ce à cela qu’il pensait ? Ils n’avaient pas le droit… L’inquiétude la gagna à son tour et acheva de perturber son interlocuteur.
- (Jack) Tu es sûre ?
Elle fronça les sourcils et il lui tendit la main pour toute réponse.
- (Jack) Tu es sûre de le vouloir ?
Elle soupira de soulagement en fermant les yeux. C’était donc ça son problème… Elle sourit.
- (Sam, mettant sa main dans la sienne) J’en suis sûre.
- (Jack, un peu incrédule) Vraiment ?
- (Sam, souriant de plus belle) Vraiment.
Devant son air déterminé et rayonnant il se détendit. Comment avait-il fait pour être aimé d’une femme pareille ? C’était une véritable aberration. Mais il en ressentait, en plus de son bonheur actuel, une immense fierté. Il ne put cependant s’empêcher de l’interroger à nouveau, avec plus d’humour cette fois.
- (Jack) Non, parce qu’une fois dans l’avion…
- (Sam, faussement désespérée) Mon général…
- (Jack, haussant les sourcils) Carter ?
- (Sam, riant) Jack… si tu continues je vais changer d’avis.
- (Jack, souriant à son tour, l’entraînant à sa suite) Alors suis moi.
Mais elle ne bougea pas. Restant obstinément sur place. L’obligeant à s’arrêter et à se retourner. Il l’interrogea du regard. Elle semblait de nouveau perturbée par quelque chose. Quelque chose d’important. Ses doigts, qu’il avait enlacés aux siens, s’étaient raidis. Son regard s’était voilé. Elle avait pâli, comme si elle avait réalisé, soudain, une chose capitale. Capitale et effrayante.
- (Sam, la lèvre tremblante) Général…
- (Jack, rectifiant) Jack.
- (Sam) Il y a… C’est… On ne peut pas… Enfin… Je veux dire…
Alors il comprit. Il comprit à quoi elle faisait allusion. Il sourit. En réalité il s’étonnait un peu qu’elle n’ait pas fait allusion au caractère illégal de leur relation plus tôt.
- (Jack) J’ai démissionné.
Elle resta muette un instant. Assimilant difficilement cette nouvelle information. Il avait… quoi ? Mais il ne pouvait pas ! Il ne pouvait pas faire ça. Lui faire ça à elle. Elle avait besoin de lui à ses côtés à la base. Elle le voulait en tant qu’amant aussi, oui. Bien sûr. Mais ne plus travailler à ses côtés… C’était inconcevable. Et puis lui. Elle savait combien ce projet comptait pour lui. Combien il aimait son travail.
- (Sam) Non…
Ce n’était qu’un chuchotement. Elle avait esquissé le mot plus qu’elle ne l’avait prononcé. Mais toute sa douleur y transparaissait. Dans un sens cela lui fit plaisir. Elle tenait à lui. Mais d’un autre côté il ne supportait pas de la voir triste comme un cet instant.
- (Sam, plus fermement) Vous ne pouvez pas faire ça.
- (Jack) Bien sûr que je le peux.
- (Sam) Pas pour moi…
C’était presque une supplication. Il caressa doucement sa main de son pouce, un léger sourire aux lèvres.
- (Jack) Non. Pour nous. C’est pour nous que je l’ai fait. (sur un ton plus léger, malicieux) De toutes façons, ne crois pas que tu seras débarrassée de moi pour autant. Je quitte l’armée pas le SGC. Le président a donné son accord.
Cette fois se fut la surprise qui se lut sur ses traits. L’incompréhension. Et puis, petit à petit elle sembla comprendre et son visage s’illumina. Un sourire radieux naquit sur ses lèvres.
- (Sam, hésitante) Vous… tu…
- (Jack, acquiesçant) Je suis passé dans le civil.
- (Sam, malicieuse) Donc…
- (Jack, l’attirant à lui en passant une main autour de sa taille) Donc… On a le droit.
- (Sam, plaisantant) Dommage. (à son oreille) Le côté interdit c’est…
Le reste de sa phrase se perdit dans un souffle. Jack lâcha un grognement de frustration avant de s’emparer de ses lèvres avec fièvre. Quand il la relâcha enfin – bien trop tôt d’après elle – il reprit sa main dans la sienne.
- (Jack, souriant) Suis-moi.
Dans un avion, quelques heures plus tard
Jack était assis près du hublot. Son regard n’était pas dirigé sur le paysage extérieur mais couvait la jeune femme blottie contre lui. L’accoudoir entre leurs deux sièges avait été relevé et elle s’était donc rapprochée, le dos contre son torse alors qu’il avait ses deux bras autour d’elle. Le menton posé sur sa tête, il avait les yeux clos, une expression de bien être intense gravée sur le visage. C’est la voix mélodieuse de la jeune femme qui lui fit ouvrir les paupières. Depuis qu’ils avaient pris l’avion – en direction de Rome comme elle l’avait bien vite découvert – elle ne cessait de repenser, non sans un certain amusement, au rituel auquel elle s’était livrée la veille.
Elle se sentait tellement bien maintenant, tout contre lui, enveloppé dans cette couverture invisible et pourtant si présente de tendresse… Elle eut envie de tout lui dire maintenant. Peut-être pour se sentir moins coupable. Moins idiote. Parce que c’est surtout comme ça qu’elle se voyait. Une idiote. Une idiote particulièrement chanceuse. Mais tout de même. Quoiqu’en fait c’était peut-être cette « idiotie » qui avait permis de débloquer les choses. Si elle n’avait pas fait ce qu’elle avait fait, elle n’aurait pas pris de vacances, elle ne serait pas venue ici et il ne l’aurait pas rejointe et…
- (Sam) Tu sais, je m’en veux.
- (Jack, intrigué) Pourquoi ?
- (Sam, se mordant la lèvre) Je t’ai brûlé.
- (Jack) Quoi ?!
- (Sam) Hier j’ai brûler votre… ta photo… dans la cheminée.
- (Jack, grimaçant) Tu devais beaucoup m’en vouloir alors ?
- (Sam) Pas tant que ça. (mi-sérieuse, mi-plaisantant) Tu l’aurais mérité pourtant.
- (Jack, l’embrassant tendrement sur la tempe) Je sais. Je suis désolé. Moi je m’en voulais beaucoup mais… toi tu es tellement… et moi si… Je ne pouvais pas penser que tu éprouvais quelque chose pour…
- (Sam) Menteur.
Pas de reproches. Pas de cynisme. C’était une affirmation.
- (Jack) Tu as raison. La vérité c’est que je ne… je ne te mérites pas. Et puis… j’avais peur aussi.
Elle accentua la pression de ses mains sur les siennes, lui signifiant son soutien et sa reconnaissance. Reconnaissance pour cet aveux qui avait du lui coûter beaucoup.
- (Jack) Tu crois que… ?
- (Sam) J’en suis sûre.
- (Jack) Mais…
- (Sam, sûre d’elle) Tout ira bien.
Il n’en fallut pas plus pour le rassurer. Si elle allait bien, il allait bien. Et si elle disait que tout irait bien, il la croyait. Il n’y avait pas de raison… En tous cas pour le moment il se sentait incroyablement bien. Elle était sincère. Elle était réellement sûre que tout irait bien. Parce qu’elle venait de prendre une décision. La bonne cette fois. Elle avait décidé d’être heureuse. Et pour ça elle avait besoin de lui. Elle n’avait besoin que de lui. De lui à ces côtés. Tout le temps.
- (Sam, reprenant, malicieuse) J’espère quand même que tu réalises que ma valise va arriver à Chicago.
- (Jack, sur le même ton, commençant à la chatouiller) Serait-ce une manière détournée de m’obliger faire les boutiques italiennes ?
- (Sam, riant) Peut-être… de toutes façons c’est de ta faute si je n’ai pas pris cet avion.
- (Jack, légèrement inquiet) Des regrets ?
- (Sam, se retournant vers lui) Aucun. (espiègle) Enfin, pour l’instant.
- (Jack, de la même façon) Voyez-vous ça, colonel… Pour l’instant, hein ? Tu vas voir !
Il fondit sur ses lèvres, laissant glisser ses mains sur le corps de la jeune femme qui se retrouva bientôt à califourchon sur ses genoux. Elle gémit de plaisir en sentant sa langue s’insinuer en elle et fouiller sa bouche avec avidité et tendresse. Passion et délicatesse. Y transparaissait tout son amour et son désir. Leurs deux cœurs à l’unisson étaient au bord de l’implosion. Ce fut Sam qui mit un terme au baiser en le repoussant gentiment. Dieu savait pourtant qu’elle n’en avait pas envie. Il lui semblait qu’elle aurait pu passer tout le reste de sa vie à l’embrasser, à sentir ses mains sur son corps sans jamais se lasser.
- (Sam, le souffle) On devrait arrêter avant de…
Elle ne put terminer sa phrase, riant au contact de ses lèvres chaudes sur son cou.
- (Sam, le repoussant à nouveau) Jack !
- (Jack, consentant finalement à arrêter ses tortures) Hummm ?
- (Sam, souriant) On est dans un avion.
Comme si il ne le savait pas… Il n’eut pas l’air de s’en émouvoir et lui renvoya un regard interrogatif.
- (Sam, amusée) On n’est pas tout seuls dans cet avion.
- (Jack, souriant) Et… ?
Elle leva les yeux au ciel. Dieu qu’elle l’aimait ! Comment avait-elle pu ne serait-ce qu’un instant penser qu’elle pourrait se passer de lui ? Elle se blottit dans ses bras en fermant les yeux, le nez dans son cou. Plus ému qu’il aurait voulu le laisser croire il l’entoura de ses bras et déposa un baiser dans ses cheveux.
- (Sam, sans bouger) Pourquoi l’Italie ?
- (Jack) Parce que l’avion partait maintenant, parce que c’est beau, parce que tu aimes ce pays, parce que tu parles italien… et parce que j’en ai souvent rêvé.
- (Sam) Rêvé d’aller en Italie ?
- (Jack) Rêvé d’aller en Italie avec toi.
Il la sentit sourire et en fit de même.
- (Sam, reprenant) Mais ce n’est pas un peu… loin ? S’il y a un problème au SGC…
- (Jack, d’un ton léger) Thor nous télétransportera.
Nouveaux sourires.
- (Sam) Tu ne crois pas qu’il a autre chose à faire ?
- (Jack, plaisantant) Pourquoi ?
Elle secoua la tête et se lova davantage contre lui. Que pouvait-elle répondre à ça ? De toutes façons il aurait trouvé quelque chose à répliquer.
- (Jack, caressant lentement son dos) Tu sais pourquoi je suis venu aujourd’hui ?
- (Sam, espiègle) A part le fait que tu sois follement amoureux de moi ?
- (Jack, souriant) Cela va sans dire… Mais je parle de ce qui m’a décidé cette fois.
- (Sam) Daniel ?
- (Jack) Daniel… peut-être… d’une certaine manière. Mais non. C’est vous.
- (Sam) Nous, qui ?
- (Jack) Les deux enfants que j’ai vu hier en train de danser. Ils savaient qu’ils ne se reverraient pas mais ils étaient heureux. Ensemble. Et je les enviais. (après quelques secondes) Et puis j’ai compris quelque chose… je ne voulais pas te perdre… ma vie…
Elle le fit taire en déposant un doigt sur ses lèvres. Elle savait que c’était dur pour lui. Et elle savait tout ça. Elle pouvait le lire dans ces yeux. Depuis longtemps. Mais elle n’avait pas voulu le voir avant. Il s’empara de sa main et y déposa un baiser. Il fallait qu’il continue. Qu’il s’en débarrasse une bonne fois pour toutes.
- (Jack) C’est Kerry qui m’a dit que je… que nous faisions une bêtise en nous cachant derrière les règlements. J’ai voulu… mais ton père venait de… tu m’as semblé trop fragile…
- (Sam) Il m’a dit la même chose.
- (Jack) Jacob ?
Elle acquiesça silencieusement.
- (Jack) Tu te rends compte qu’il a fallu qu’on nous ouvre les yeux, qu’on nous parle comme à des enfants pour qu’on… enfin pour que je… je suis désolé pour la dernière fois quand tu es venue et que…
- (Sam) Ça va. D’un certain côté j’ai été soulagé d’être interrompu même si j’aurais préféré que ce soit par… autre chose. Faire le premier pas ça n’a jamais vraiment été mon truc. Sans compter qu’heureusement qu’elle n’est pas arrivée deux minutes plus tard parce que j’aurais eu le temps de m’humilier complètement et…
- (Jack, la coupant) Tu ne te serais pas humilier. J’aurais été heureux mais…
- (Sam) Mais qu’est-ce que tu aurais fait ?
- (Jack) Effectivement. Disons qu’on s’est beaucoup fait souffrir pour rien et que ça a duré bien trop longtemps pour que l’on s’appesantisse là-dessus.
- (Sam, malicieuse) Comme pour le fait que je ne sois jamais venue à ton chalet avant ?
- (Jack) Par exemple.
- (Sam, faisant courir ses doigts sur son bras) Je croyais que tu allais m’emmener là-bas.
- (Jack) Tu aurais préféré ?
- (Sam) Non, pas spécialement. Ça ne m’aurait pas dérangé non plus.
- (Jack) Nous irons. Une autre fois. Mais je voulais quelque chose de spécial… (malicieux à son tour) Et puis tu auras plus de mal à t’enfuir de Rome.
- (Sam, souriant) Tu crois ?
- (Jack, idem) Je l’espère en tout cas.
- …
- (Sam, au bout d’un moment) C’est étrange.
- (Jack) Quoi ?
- (Sam) Nous deux.
Sachant qu’elle ne manquerait pas d’expliquer ses pensées il lui laissa le temps de continuer, se contentant de la serrer davantage dans ses bras. L’avoir « elle » dans ses bras, c’était… Il adorait. Ce n’était pas vraiment un scoop mais l’effet était vraiment… comme pour une drogue il avait l’impression de devenir dépendant. Il ne pourrait plus s’en passer. Rien qu’à l’idée qu’il faudrait bien qu’elle se redresse un jour – ne serait-ce que pour l’atterrissage –, son cœur se serrait.
- (Sam) Ce que je veux dire c’est que je ne pensais pas que se serait si simple, si… évident.
Il comprit parfaitement ce qu’elle sous-entendait. Il n’en pensait pas moins. Il ne savait pas exactement à quoi il s’était attendu en quittant la base pour rejoindre l’aéroport mais pas à ça. Pas à ce que se soit si facile. Enfin, quand il disait « facile » c’était une façon de parler. Si facile de lui parler, de l’embrasser, de la prendre dans ses bras, de la tutoyer, de se confier à elle… de partir avec elle à l’autre bout du monde. En fait il s’était attendu à plus de gêne, plus malaise. Mais il ne s’en plaignait pas. C’était parfait. Il ne réalisait pas encore mais il savourait chaque nouvelle seconde.
Sam finit par s’endormir, après le déjeuner, toujours contre lui. Il se contenta pour sa part de somnoler. Il ne s’ennuyait pas. Il contemplait avec un plaisir inlassable la femme de sa vie – parce que c’était elle – dans ses bras. Ses traits sereins et angéliques, ses mains fines, ses courbes harmonieuses… Pendant longtemps. Il n’aurait pas su dire combien de temps exactement. C’est une hôtesse qui le sortit de sa torpeur en lui demandant si lui ou sa « femme » désirait quelque chose. Il sourit. Sa femme. Il remercia l’hôtesse et replongea dans sa contemplation jusqu’à l’annonce de l’atterrissage.
Rome, hôtel « The Westin Excelsior », 11 heures du matin heure locale (soit 01H am US)
Après 10 heures de vol et une heure de taxi, ils étaient arrivés dans Rome. Le trajet s’était passé dans la bonne humeur, entre tendresse et humour. Les deux amants l’avaient passé le nez à la fenêtre de la voiture, l’un contre l’autre, admirant le paysage romain. Ils entraient à présent dans le hall d’un somptueux hôtel dont le général avait donné le nom à leur chauffeur de taxi. Somptueux était même un euphémisme. Tout n’était que dorure, fresques, marbre, peinture, fleurs et meubles précieux. Sans être surchargé. De bon goût mais respirant le luxe. Ils se dirigeaient à présent vers l’accueil.
- (Sam, regardant tout autour d’elle) Jack… tu ne crois pas que c’est un peu trop… enfin c’est un hôtel 5 étoiles, on a pas besoin de ça, en tous cas pas moi. (malicieuse) A moins que tu ne tentes de m’acheter ?
- (Jack, passant une main auteur de sa taille, sur le même ton) Non, ça c’est pour t’impressionner. Je t’achèterais avec les vêtements.
- (Sam, le bousculant légèrement) Idiot !
Une fois au comptoir Sam prit la parole, en italien, mais il s’avéra que le réceptionniste parlait anglais et Jack continua donc.
- (Jack) O’Neill, avec deux « l ». Nous voudrions une suite.
Sam le regarda, narquoise, en haussant les sourcils. Il rougit légèrement, baissa les yeux et commença à bafouiller.
- (Jack) Enfin… je ne sais pas… je veux dire… c’est comme tu veux…on peut prendre deux suites… je ne…
Elle le laissa s’enfoncer encore un peu puis échangea un regard amusé avec le réceptionniste, Ricardo.
- (Sam) Une suite, ça sera très bien.
- (Ricardo, avec un grand sourire) Parfait. Une junior suite. Vous resterez combien de temps ?
- (Jack) Une semaine. (à Sam, avec une grimace d’excuse) Je n’ai que 8 jours. (au réceptionniste) Nous resterons 6 nuits donc.
- (Ricardo) Très bien. Vous prendrez les petits déjeuners ?
- (Sam, après avoir échangé un regard avec Jack) On verra.
- (Ricardo) Comme vous voudrez. (leur tendant une clef) Voici la clef de votre suite, la 410, au quatrième étage. Nous nous occuperons de vos bagages.
- (Jack) En fait nous n’avons pas beaucoup de valise, (désignant le sol, à ses pieds) juste mon sac. (lançant un clin d’œil à Sam) On va devoir faire du shopping !
- (Ricardo, amusé) Bien monsieur. Le petit déjeuner est servi de 7 heures à 10 heures 30. Notre restaurant ouvre de 11 heures 30 à 15 heures et de 19 heures à minuit. Notre bar est accessible toute la journée. Il y a aussi le room service si vous désirez quoi que ce soit durant la journée. Je vous souhaite un bon séjour parmi nous monsieur et madame O’Neill.
- (Jack, entraînant Sam par la taille) Merci.
Le général refusa l’offre d’un groom qui voulait porter son sac et ils prirent l’un des trois ascenseurs qui menaient aux étages.
Dans la suite 410, 11h20
Après avoir ouvert la porte Jack s’effaça et laissa la jeune femme pénétrer dans la pièce. Elle ne put retenir une exclamation d’admiration. La pièce était immense et superbe. Le plafond était un dôme peint. Le salon et la chambre étaient richement décorés et meublés dans un style renaissance. O’Neill referma la porte derrière lui, posa son sac sur un des fauteuils puis vint enlacer Sam en l’attirant de dos contre son torse.
- (Sam) Jack… C’est magnifique.
- (Jack, la regardant avec malice) Je suis bien d’accord.
Elle se retourna pour lui faire face, toujours dans ses bras, et passa ses bras autour de sa nuque.
- (Sam, souriant) Tu ne crois pas que c’est un peu au-dessus de nos moyens ?
- (Jack) Tu sais, vu nos salaires, plus les primes de risque de ces dernières années et le fait qu’on n’a pas trop le temps de dépenser quoi que se soit, on peut bien se permettre ça. Et puis je voudrais que tout soit parfait, pour toi.
Elle l’embrassa tendrement et il ne se fit pas prier pour répondre au baiser. Il l’aimait tellement. Il avait tellement besoin d’elle. Envie d’elle. De se fondre en elle, de sentir sa peau nue contre la sienne, de goûter enfin à ce bonheur qui s’était si longtemps refusé à lui. Il en était de même pour elle. Le sentir en elle, sentir ses mains sur elle, c’était tout ce qu’elle désirait en cet instant. Après toutes ces années de frustrations…
- (Sam, entre deux baisers) Qu’est-ce qu’on fait aujourd’hui ?
- (Jack, idem) Hm mm… J’sais pas.
Pourtant il avait l’air plutôt bien parti… songea Sam en réprimant un frisson de plaisir alors qu’une de ses grandes mains se glissait sous son haut et que l’autre se baladait le long de sa cuisse. Les siennes s’égarèrent sur le torse de Jack en passant sous sa chemise. Elle le fit reculer jusqu’à un mur alors que leurs langues se mêlaient avidement dans un ballet sensuel et envoûtant. Les lèvres du général désertèrent finalement sa bouche pour descendre dans son cou. Elle renversa lascivement sa tête en arrière pour mieux goûter la sensation. Il remonta ensuite pour déposer une multitude de baisers sur son visage.
- (Sam, au creux de son oreille) Peut-être qu’on pourrait simplement ne rien faire.
- (Jack, la plaquant à son tour contre le mur, souriant contre ses lèvres) Très bon programme…
Il remonta la main sur sa cuisse, entraînant sa jambe avec elle, ajustant les reins de la jeune femme contre les siens en la soulevant légèrement, lui révélant toute la force de son désir. Leur gémissement fut étouffé par leur baiser qui se faisait de plus en plus profond. Finalement ils reculèrent vers le lit à baldaquins – abandonnant sur leur route une chemise, un pull, des chaussures… – et finirent par basculer sur les draps immaculés.
Même endroit, quelques heures plus tard
L’état du lit témoignait des ébats agités qui avaient animés la chambre durant les deux heures précédentes. Jack était allongé sur le dos couvant d’un regard tendre la jeune femme endormie sur son torse. Il avait une main autour de sa taille, l’autre caressant son épaule nue. Il releva un peu le drap pour mieux couvrir Sam qui gémit légèrement en se coulant davantage contre lui. Il déposa un baiser sur son front et en profita pour caresser doucement sa joue chaude. Ce geste lui fit esquisser un sourire dans son sommeil. Il sourit à son tour et ferma les yeux en re-songeant à ces moments magiques qu’ils venaient de vivre.
Ils s’étaient aimés comme jamais. Avec une intensité qui l’avait saisie. Elle avait été merveilleuse. Etonnante. Tendre, câline, entreprenante, sensuelle, sauvage… Parfaite. Comme toujours. De son point de vue en tous cas. Il était tellement heureux en cet instant. Tellement apaisé, comblé. Dire qu’il aurait pu ne jamais connaître un tel moment. A cause de son orgueil, de sa bêtise et de l’armée. Ça valait bien ces 8 ans de doutes, d’angoisse, de tortures. Oh oui, largement… Il n’avait plus aucun doute. Il avait fait le bon choix. Tout irait bien. Il la sentit bouger légèrement contre lui et rouvrit les yeux pour tomber dans son regard lagon.
Elle se sentait merveilleusement bien. Légèrement et délicieusement courbaturée par leurs dernières activités. Elle profitait de la chaleur de Jack, tranchant délicieusement avec le froid du drap. Le mouvement régulier du torse de son amant la berçait tandis qu’elle émergeait doucement. Leur première fois. C’était leur première fois. Enfin… pour elle ce n’était pas réellement la première fois. Mais est-ce que l’aventure qu’elle avait eue avec son clone, à 18 ans, pouvait vraiment compter ? Oui, ça comptait décida t’elle finalement mais pas de la même façon. C’était donc leur première fois. Et ça avait été… intense, passionné, tendre. Parfait.
- (Jack, souriant) Salut toi.
- (Sam, idem) Salut.
- (Jack) Ça va ?
- (Sam, s’étirant langoureusement) Hummm… oui. (se hissant sur lui, avec un regard coquin) Je vais même très bien.
- (Jack, l’embrassant avec volupté) Tant mieux.
Il passa sur elle et commença à la chatouiller tout en l’embrassant un peu partout, la faisant rire aux éclats. Ils s’amusèrent ainsi quelques minutes, roulant sur le grand lit, chahutant gentiment, jusqu’à ce que Sam réussisse à le bloquer sous elle, retenant ses poignets au-dessus de sa tête, triomphante.
- (Sam, relâchant ses poignets) J’ai faim.
- (Jack, glissant ses mains sur ses hanches, amusé) Ah, belle et matérialiste… On a qu’à commander un truc à manger.
Elle tendit la main pour attraper la carte posée sur la table de chevet. Elle la consulta un instant.
- (Sam, proposant) Lasagnes ?
- (Jack, l’obligeant à s’allonger sur lui pour pouvoir l’embrasser) Parfait.
Elle sourit et se laissa faire volontiers. Ils commandèrent finalement deux assiettes de lasagne, une bouteille de vin rouge et deux parts de gâteau au chocolat. Ils mangèrent sur la table du salon, se faisant mutuellement goûter leurs plats – bien qu’identiques – et se livrant à diverses activités illicites sous la table, leurs pieds se livrant un duel sensuel et sans merci. Sam s’était contentée d’enfiler la chemise de Jack qui avait remis son jean. Après le repas ils s’allongèrent sur le lit, l’un contre l’autre et discutèrent de tout et de rien. Principalement de leur relation, de leur avenir, de leurs craintes, de leurs espoirs…
Ils se parlaient sans aucune retenue des sujets les plus variés. Restaient silencieux parfois. Appréciant le silence, ensemble. De fil en aiguille ils se débarrassèrent du peu de vêtements qu’ils portaient et profitèrent à nouveau l’un de l’autre, faisant plus ample connaissance au sens biblique du terme. Longuement. Passionnément. Ils finirent dans l’immense baignoire-jacuzzi de la salle de bain. Ils barbotaient dans la mousse, l’un en face de l’autre en souriant.
- (Jack) Alors, pas trop déçue ?
- (Sam, fronçant les sourcils) Déçue par quoi ?
- (Jack) Eh bien… par moi.
Elle fronça les sourcils et vint se positionner juste devant lui. Elle l’obligea à la regarder et sourit. Elle le connaissait par cœur. Il avait essayé de se cacher derrière de l’ironie mais elle le sentait vraiment inquiet.
- (Sam) J’ai l’air déçue ?
- (Jack) Je ne sais pas…
- (Sam) Bien sûr que non ! Jamais tu ne me décevras, d’accord ? Quoique tu fasses. (espiègle) Maintenant si tu fait allusion à un domaine précis…
Elle se coula tout contre lui, le faisant frissonner lorsque sa poitrine nue entra en contact avec son torse et que ses hanches se collèrent contre les siennes.
- (Sam, à son oreille) Je peux te jurer que tu ne m’as pas déçue. Tu as été parfait.
Et elle le lui prouva de suite en entamant de nouveaux ébats qui débouchèrent sur une bataille d’eau ponctuée de grands éclats de rire. La salle de bain était inondée mais c’était bien le dernier de leurs soucis. Il était 17 heures 30 quand ils se décidèrent à sortir de la chambre pour aller renouveler la garde robe de la jeune femme. Non seulement la garde robe mais aussi le maquillage, les accessoires… Ils passèrent environ deux heures dans les boutiques, s’amusant comme des enfants. Jack commentait chacune des tenues qu’essayait Sam.
Force lui était de reconnaître que, lui qui n’était pas fan de ce genre d’activité, voir la femme qu’il aimait dans différentes tenues – toutes plus féminines et plus sexy les unes que les autres – ne présentait pas que des inconvénients. Bien au contraire. Elle le laissa même choisir certaines pièces de lingerie. Le plus délicat fut le choix des chaussures car moins intéressant pour le général qui commençait à saturer. Ils regagnèrent finalement l’hôtel des paquets plein les bras en plaisantant. Après un bref passage dans leur chambre, le temps de se changer, ils redescendirent pour aller dîner au restaurant. Ricardo les salua alors qu’il passait une nouvelle fois devant la réception.
Il sourit en voyant leurs mains liées et leurs regards soudés. Sam portait une robe noire assez simple, lui arrivant aux genoux et mettant en valeur ses formes. Jack la couvait d’un regard amoureux et admiratif. Il lui semblait avoir perdu 10 ans avec elle. Il agissait comme un adolescent. Ils agissaient comme des adolescents. Et il adorait ça. Les regards en coin, les mains baladeuses, les sourires coquins… et puis cette soif de l’autre qui semblait insatiable. Oh, oui, il adorait ça. C’était bien mieux que ce qu’il aurait pu imaginer. Il avait d’être sur un nuage depuis qu’elle avait répondu à son baiser dans cet aéroport.
Elle, elle savourait pleinement le contact de leurs mains. Se laissant guider par cet homme qu’elle adorait. Repensant aux heures qu’ils venaient de vivre. Elle n’aurait jamais cru qu’il puisse être si… adorable. Il s’était révélé le plus parfait des amants. Le plus patient des hommes. Et comme elle l’avait toujours su, il lui semblait rire en permanence. Elle nageait en plain rêve. Eux, ensemble, à Rome, dans le plus luxueux des hôtels. Un rêve merveilleux. C’était presque trop. Son bonheur était total. Sans compter qu’elle venait de refaire sa garde robe chez un grand couturier italien…