- je n’en ai aucune idée. Suivez-moi.
Ils repartirent dans les couloirs silencieux, faisant craquer le parquet sous leurs pas, et gagnèrent le département des antiquités grecques, dans l’aile Denon. Daniel se dirigea immédiatement vers les vitrines consacrées aux civilisations crétoises et mycéniennes. Il semblait très étonné. Teal’C lui demanda :
- Qu’y a-t-il, Docteur Jarod ?
- Je ne comprends pas. Les objets empruntés n’ont… aucun rapport entre eux. Il y a des cratères, des fibules, de simples outils en bronze minuscules, et des fragments de stèles…
Teal’C haussa un sourcil. Daniel sourit et expliqua :
- des cratères sont des sortes de vases. Des fibules sont… des broches, si vous voulez. Tous ces objets sont totalement anodins, je ne comprends absolument pas pourquoi ils intéressent Massertie. Et ils sont d’époque et de provenance différentes…
- Ah bon, répondit simplement le jaffa.
Jack s’était éloigné vers la galerie suivante. Sam le suivit et le trouva un peu plus loin, dans le département des sculptures italiennes, observant la célèbre représentation de « Psyché ranimée par le baiser de l'Amour ». Le cœur de la jeune femme se serra, et elle s’approcha de Jack, qui murmura en l’entendant arriver :
- C’est une œuvre d’Antonio Canova.
- Vous connaissez ce sculpteur ?
Jack se retourna vers elle avec un petit sourire :
- Non. Mais c’est marqué sur la plaque !
Sam sourit à son tour puis ils redevinrent silencieux, observant la sculpture. Sam expliqua :
- C’est une représentation d’une scène mythologique. Psyché, ayant désobéi, a libéré un filtre magique et est endormie à jamais. Eros, qui a lui aussi désobéi à sa mère Aphrodite, aime Psyché en secret et vient l’éveiller par un baiser.
- Bref, tout le monde a désobéi dans votre histoire !
Jack sembla soudain réaliser ce qu’il venait de dire et se passa nerveusement la main dans les cheveux. Sam rougit et continua sans le regarder.
- Oui. Mais regardez-les, cela n’en valait-il pas la peine ?
La jeune femme de marbre, encore étendue, semblait s’élancer vers les lèvres de son amant qui se tenait au-dessus d’elle et l’enlaçait tendrement. Ils étaient à quelques centimètres l’un de l’autre, dans un élan d’amour enfin concrétisé. Le désir et le bonheur semblaient irradier, animer le marbre blanc.
Jack, après un silence, murmura sans regarder Sam :
- Et que s’est-il passé, ensuite ?
- Eros demande à Zeus le droit d’aimer Psyché au grand jour, lui disant qu’il ne peut vivre sans elle et elle sans lui. Zeus ne peut rien lui refuser, il a trop besoin de lui, et Eros et Psyché ont déjà subi beaucoup d’épreuves. Donc il accepte, et ils vivent heureux.
Un long silence suivit, pendant lequel ils continuèrent de regarder la sculpture. Sam sentit le regard de Jack sur elle et leva les yeux, rencontrant ceux de son supérieur. Les yeux bruns de Jack étaient rivés à ceux de Sam, pleins d’amertume et… et de désir. La jeune femme frissonna et sa respiration s’accéléra. Ils n’étaient qu’à quelques centimètres l’un de l’autre, seuls dans l’immense galerie. Sam eut un instant l’impression que Jack allait faire un geste… mais il murmura d’une voix rauque :
- Vous lisez trop de contes de fées, Carter. Cela ne se finit jamais comme ça.
A cet instant, la voix de Daniel retentit à l’extérieur de la pièce.
- Sam, Jack ? J’ai fini, on peut y aller.
Jack détacha son regard de celui de Sam et se dirigea rapidement vers la sortie de la salle. Sam se mordit la lèvre de dépit et le suivit lentement. Quand ils sortirent du musée, il était près d’une heure du matin.
Les trois hommes étaient assis à la terrasse d’un café, dans le jardin des Tuileries. Au grand désespoir de Jack, Daniel avait à nouveau entraîné ses deux coéquipiers au Louvre, pour « vérifier certaines choses ». Ils étaient maintenant attablés depuis plus d’une heure, Daniel toujours plongé dans les catalogues du musée. Jack soupira en reposant sa bière :
- Bon, c’est pas tout ça mais je commence à m’ennuyer ferme, moi. Voilà une semaine que nous sommes ici et on n’a pas avancé d’un pouce ! D’accord, Paris c’est sympa, mais à la longue, cela manque d’action quand même !
Daniel leva la tête de ses notes, sourcils froncés, et s’apprêtait à répondre quand O’Neill leva la main pour anticiper sa remarque :
- … Oui ! Oui, je sais Daniel ! Vous travaillez à découvrir pourquoi il a emprunté tous ces objets, et Carter s’amuse comme une petite folle à ses conférences ! Mais là, moi, j’en ai marre ! Heureusement que le colloque se termine ce soir…
- Jack, Sam a aussi beaucoup avancé…
- … dans ses « relations » avec Massertie. Je sais.
La réplique de Jack était sèche. Teal’C leva un sourcil, Daniel secoua la tête et soupira.
- Jack… C’est nécessaire… Si elle peut en savoir plus sur lui et l’amener à se découvrir, ce serait l’idéal, car plus ça va plus je doute de pouvoir trouver quoi que ce soit à partir des objets empruntés au musée.
- Mais je sais très bien, Daniel, que c’est… « nécessaire ». Seulement elle n’avance pas plus que vous, et nous perdons notre temps. Nous ne sommes pas là pour faire du tourisme, je vous rappelle.
- Vous souhaiteriez que le Docteur Carter avance davantage dans ses relations, O’Neill ?
Le ton du jaffa était parfaitement neutre. Jack écarquilla les yeux et Daniel sourit. Le colonel se passa la main dans les cheveux nerveusement :
- Mais non ! Mais si ! Mais je ne sais pas, moi ! Tout ce que je veux c’est qu’on en finisse avec cette mission stupide et inutile !
Il se leva, jeta rageusement un billet sur la table et ses coéquipiers n’eurent d’autre choix que de le suivre.
La conférence était maintenant terminée. Sam avait passé beaucoup de temps avec Massertie, déjeunant avec lui quasiment tous les jours. Il avait emmené la jeune femme dans les meilleurs restaurants de la capitale. Sam était parfaitement à l’aise en sa compagnie, mais regrettait de n’avoir pu obtenir aucune information intéressante. Leurs discussions scientifiques étaient passionnantes, mais n’avaient jamais permis à la militaire de tirer la moindre conclusion sur un lien possible entre Adrian et les disparitions des dossiers et des agents du FBI. Massertie semblait ignorer – comme l’immense majorité des humains – l’existence de la Porte des Etoiles. Pourtant il avait paru très intéressé lorsque la jeune femme avait commencé à discuter avec lui des hypothèses scientifiques sur les vortex multidimensionnels et la déstructuration moléculaire. Mais quoi de surprenant à cela ? Adrian était curieux et féru de sciences…
Quand il la déposa ce soir-là devant son hôtel, après le dîner de clôture de la conférence, il saisit la main de la jeune femme au moment où elle allait s’éloigner. Sam frissonna.
- Samantha… Je ne peux me résigner à vous quitter ainsi.
- Pourtant il le faut bien Adrian. La conférence est finie…
- Je me moque bien de la conférence. J’aimerais… beaucoup vous revoir. Vous m’avez dit que vous pouviez rester encore un peu à Paris… Accepteriez-vous d’être mon invitée demain soir ?
Sam rougit et balbutia :
- c’est que… enfin… je…
Adrian la trouvait encore plus magnifique quand elle rougissait ainsi. Il sourit :
- J’organise une petite soirée. Je serais le plus heureux des hommes si vous acceptiez de venir.
Rassurée à la perspective qu’ils ne seraient pas seuls, elle sourit à son tour :
- S’il n’y a que cela pour faire de vous un homme heureux, alors j’accepte avec plaisir.
Le sourire de Massertie s’élargit.
- J’enverrai mon chauffeur vous chercher vers 20 heures. Cela vous convient-il ?
- Parfait. Bonsoir Adrian.
- Bonsoir Samantha. Il me tarde déjà d’être à demain soir.
Il serra la main de la jeune femme et la porta à ses lèvres. Sam sentit son cœur bondir dans sa poitrine. Adrian était déjà remonté en voiture, et Sam regarda l’énorme automobile s’éloigner dans la nuit. Elle réalisa soudain qu’elle était toujours debout devant le perron de l’hôtel à sourire largement. Adrian… Elle secoua la tête pour en chasser l’image du milliardaire et regagna rapidement sa chambre.
Le lendemain soir, à 19h30, elle entra dans la chambre de Jack, où les trois hommes l’attendaient. A son arrivée, ils se levèrent d’un seul élan et la regardèrent dans un silence religieux.
Elle avait passé une robe longue noire, à fines bretelles, légèrement fendue sur la jambe droite. Le tissu fluide tombait parfaitement, laissant deviner les formes minces et athlétiques de la jeune femme. Elle portait une étole écrue sur les épaules et des escarpins noirs. Ses cheveux flottaient autour de son visage. Ses yeux, légèrement maquillés, semblaient resplendir encore davantage et son sourire souligné par le rouge à lèvres illuminait ses traits.
Teal’C et Daniel sourirent, et Jack avala difficilement sa salive. L’archéologue prit la main de la jeune femme comme pour la présenter à ses deux amis. Elle sourit encore davantage, rougit et murmura, à la fois heureuse et gênée :
- Daniel…
- Sam, vous êtes éblouissante !
- Daniel Jackson a raison, vous êtes superbe.
- Merci Teal’C. J’ai passé toute l’après-midi à choisir cette robe… Je ne sais pas du tout ce que va être cette soirée… Qui il y aura…
- Elle est parfaite. Vous êtes parfaite.
La voix de Jack était calme, douce, d’une gravité et d’une sincérité rares. Sam, Teal’C et Daniel se retournèrent vers lui, également surpris par sa remarque. Celui-ci se tenait toujours à côté de la fenêtre, les yeux fixés sur sa coéquipière. Comme honteux, il se détourna et ajouta :
- Massertie sera ravi.
- Merci.
La voix de Sam était soudain triste. Daniel soupira, et se tourna à nouveau vers la jeune femme en souriant.
- Cela va aller, Sam ?
- Oui, bien sûr Daniel.
- C’est de toutes façons notre dernière chance, après on abandonne et on rentre, cela fait huit jours qu’on piétine, impossible de mettre la main sur le moindre indice.
- Je sais Daniel. Je crains en plus qu’une soirée ne soit pas l’endroit le plus adéquat pour apprendre quoi que ce soit.
Teal’C tendit une boite à la jeune femme, qui l’ouvrit et passa les boucles d’oreilles en perles qu’elle contenait.
- Ces émetteurs sont indétectables, technologie Tok’ra !
- Je sais Daniel, c’est moi qui les ai mis au point… répondit Sam en souriant.
- Ce n’est pas une bonne idée. Malgré les micros nous ne pourrons pas intervenir rapidement. Nous ne savons même pas où vous allez.
La voix de Jack était grave, inquiète, sèche. Il se tenait debout, bras croisés, le regard sombre, observant la jeune femme. Sam ne répondit rien. Ce fut Teal’C qui reprit :
- On va suivre le Major Carter en voiture, O’Neill. De toutes façons, il s’agit d’une soirée, il devrait y avoir du monde, le Major ne sera pas seule.
Jack fixait toujours Sam. Ses traits étaient tendus et ses yeux bruns semblaient sonder ceux de la jeune femme. Elle murmura :
- Ca va aller mon colonel. C’est notre dernière chance, après on rentre.
Jack détacha son regard du sien et haussa les épaules, mécontent.
- Bien Carter, faites comme vous voulez. Vous êtes en âge d’accepter un rendez-vous sans que nous n’ayons rien à y redire après tout !
Il était amer. Daniel ferma les yeux un instant et soupira. Sam se mordit la lèvre et murmura :
- Bon, je rejoins ma chambre, la voiture ne devrait pas tarder.
- Vous voyez Jack, pas de quoi vous inquiétez ! La soirée a lieu chez Massertie, et a priori il y a beaucoup de monde !
- Mouai…
Les trois hommes avaient garé discrètement leur voiture à une distance relative de l’hôtel particulier de Massertie, où le chauffeur du milliardaire avait déposé la jeune femme. Les limousines et les voitures de sport se succédaient devant l’entrée.
Quand Sam arriva à la porte des salons, elle s’arrêta un instant, le souffle court. La pièce était gigantesque, très haute de plafond, s’ouvrant sur la Seine par plusieurs portes-fenêtres. Les murs crème mettaient en valeur un splendide parquet en marqueterie et deux immenses cheminées anciennes à chaque bout de la pièce. Des portes s’ouvraient vers ce qui semblait être une multitude petits salons, tous décorés avec un goût irréprochable. Des dizaines de personnes évoluaient dans la pièce, allant d’un buffet à l’autre, discutant bruyamment. Sam crut reconnaître plusieurs hommes politiques, des acteurs, des chanteurs.
Elle sortit de sa torpeur en entendant son prénom.
- Samantha ! Enfin vous voilà !
Massertie se dirigeait vers elle, fendant la foule. Il lui prit la main et la porta à nouveau à ses lèvres.
- Merci. Merci d’être venue.
- Je vous en prie Adrian, balbutia Sam, consciente des dizaines de regards qui étaient maintenant braqués sur elle.
Son cœur battait à toute allure, mais la main d’Adrian dans la sienne la rassurait un peu. Elle se sentait mesurée, dévisagée, jaugée par tous ces gens d’une façon fort désagréable. Elle s’efforça de se concentrer sur Massertie. Il avait passé un costume noir avec une chemise rouge sombre dont les reflets chatoyants contrastaient parfaitement avec ses yeux verts. Il souriait à la jeune femme, qui lui rendit finalement son sourire. Sans lâcher la main de Sam, il l’entraîna vers un buffet pour lui faire servir une coupe de champagne. Elle avala quelques gorgées du précieux liquide et se détendit un peu. Adrian murmura :
- Vous êtes magnifique, Samantha.
- Vous plaisantez ?? La pièce est remplie de mannequins de vingt ans ! ELLES sont magnifiques, Adrian !
- Elles ne sont rien à côté de vous, Samantha. Croyez-moi.
- Vous vous y connaissez ? demanda la jeune scientifique en souriant.
Adrian sourit largement et fit une petite moue gênée :
- La richesse a… des avantages indéniables…
Il resta auprès d’elle un bon moment, mais dut manifestement à contrecœur la laisser pour aller discuter avec ses invités. Il la regardait régulièrement en souriant. Sam tâchait de faire bonne figure, mais était totalement paniquée. Ce n’était pas son univers. Ce n’était aucun des très nombreux univers qu’elle connaissait ! Ces jeunes femmes qui la dévisageaient sans vergogne, en riant aux éclats, ces chanteurs suffisants parlant de leur dernier album… Tout cela était totalement étranger à la jeune scientifique américaine. Elle connaissait certains visages, mais sans pouvoir mettre de noms dessus. Si seulement elle était comme toutes les autres femmes de son âge, à se plonger dans la lecture des magazines mondains, elle aurait su qui étaient tous ces gens ! Mais les seuls illustrés qu’elle dévorait étaient les revues scientifiques les plus spécialisées. Elle soupira et s’éloigna discrètement vers la terrasse.
Les salons se trouvant au troisième étage de l’hôtel particulier, la vue sur la Seine était splendide. La cathédrale Notre Dame brillait dans la nuit et se reflétait dans l’eau calme. L’air frais fit du bien à Sam, qui se sentait se calmer un peu. Elle jeta un coup d’œil autour d’elle, vérifiant qu’elle était parfaitement seule, sourit pour elle-même et se mit à parler très doucement.
Adrian ouvrit la porte-fenêtre en souriant et la laissa passer. En gagnant l’entrée Massertie jeta un coup d’œil à son secrétaire qui accourut :
- Franck, le Docteur Carter et moi partons. Je prends ma voiture et je vais… chez moi.
- Mais, Monsieur, le premier ministre est là…
- Dites-lui que je l’appellerai demain. J’ai un rendez-vous beaucoup plus important, ajouta-t-il en souriant à Sam qui rougit.
- Bien, répondit l’homme en fronçant les sourcils.
Sam suivit Adrian dans un dédale de couloirs et d’escaliers, et ils débouchèrent enfin dans un grand parking où étaient alignées un grand nombre de voitures superbes. Massertie se dirigea vers une Porsche noire, décapotable, et ouvrit la porte à la jeune femme qui s’installa. La porte du garage s’ouvrit lentement et la voiture s’élança dans Paris. Adrian semblait tendu, mais conduisait tout en souplesse. Sam demanda :
- Où allons-nous ?
- Chez moi.
- Mais… nous n’étions pas chez vous, là ?
- Si, aussi, répondit-il en souriant. J’ai beaucoup de « chez moi », mais là nous allons dans le vrai, celui que personne ou presque ne connaît. Celui où j’aime être seul. Enfin, où j’aimais être seul, avant de vous connaître Samantha.
La jeune femme ne répondit pas. Son estomac était noué, les battements de son cœur rapides.
Ils avaient remonté le boulevard Sébastopol et tourné dans les rues sinueuses qui menaient à la butte Montmartre. Après s’être dirigé vers le Sacré Cœur, Adrian engagea la voiture sous un porche discret et ils pénétrèrent dans un petit garage. Il ouvrit la portière de Sam et elle le suivit vers un ascenseur privé. Après avoir passé une carte magnétique, il appuya sur le bouton du cinquième étage. La jeune femme remarqua qu’il y avait deux niveaux en sous-sol. Quand la porte de l’ascenseur s’ouvrit, ils se retrouvèrent dans une petite entrée, seulement meublée d’un fauteuil, d’un portemanteau et d’un grand miroir mural. Adrian précéda Sam dans le salon et se retourna vers elle.
- Voilà. Là, on est chez moi.
Le salon était une pièce claire, aux dimensions raisonnables, avec quelques meubles anciens mais confortables. Un canapé rouge sombre, deux fauteuils et une table basse occupaient le centre de la pièce, tournés vers une petite cheminée simple. Une cuisine américaine agrandissait la pièce. Deux portes se trouvaient à l’autre extrémité de la pièce, ouvrant très certainement vers les chambres. Sam se sentit tout de suite plus à son aise dans cet intérieur à la fois superbe et d’une grande sobriété. Elle sourit à Adrian et se dirigea vers la fenêtre. Paris s’étalait à leurs pieds, brillant de mille feux. Tous les monuments resplendissaient dans la nuit.
- La vue est la première chose que je regarde dans un appartement. Pourquoi habiter Paris si ce n’est pour en profiter à chaque instant ?
- C’est magnifique, Adrian.
- L’endroit vous plaît-il davantage ?
- Oh oui, votre hôtel particulier est superbe, mais je… enfin… je…
- Vous êtes plus à l’aise ici. Je sais, moi aussi. On dîne ?
Elle le regarda, étonnée, et acquiesça. Il lança sa veste sur un fauteuil, remonta les manches de sa chemise, en déboutonna le col et se dirigea vers la cuisine. Il refusa l’aide qu’elle lui offrit et Sam s’assit dans un fauteuil. Elle le regarda en souriant préparer un simple plat de pâtes au saumon. Ils discutèrent pendant qu’Adrian s’affairait, il lui expliquait qui étaient les personnes présentes à sa soirée. Il rajoutait là un détail, là une anecdote qui faisaient rire la jeune femme aux éclats.
Dans la voiture, quelques rues plus loin, Jack fixait un point invisible sur le tableau de bord. Ses mâchoires étaient crispées, ses poings fermés. Daniel, à ses côtés à l’avant du véhicule, jeta un coup d’œil derrière lui, vers Teal’C. L’archéologue et le jaffa se regardèrent, inquiets de ce qu’ils entendaient dans leurs écouteurs et de la possible réaction de Jack.
- Les pâtes étaient délicieuses.
- Vous vous attendiez certainement à mieux en quittant votre hôtel ce soir…
- Non. Je n’aurais pas pu rêver mieux que cette fin de soirée, Adrian.
Il lui sourit et rangea rapidement leurs assiettes. Pendant ce temps, Sam s’était à nouveau avancée vers la fenêtre. De quoi parlait Adrian tout à l’heure ? Où menait l’ascenseur ? Teal’C, Daniel et Jack l’avaient-ils suivie ? Sûrement. Que devait-elle faire ? Son cœur se remit à battre plus rapidement quand elle entendit Adrian s’approcher derrière elle. Elle pouvait sentir son souffle sur son cou. Elle frissonna. La voix d’Adrian s’éleva, douce, chaude, sensuelle.
- J’ai passé une merveilleuse soirée avec vous Samantha. Tous les moments que je passe avec vous depuis une semaine sont merveilleux. Vous êtes tellement… différente. Tellement belle, tellement brillante, tellement douce, fragile et forte en même temps. Je n’ai jamais rencontré quelqu’un tel que vous avant. J’avais cherché, cru trouver parfois… mais je sais maintenant que vous êtes… bien plus extraordinaire que tout ce que j’avais pu espérer.
Dans la voiture, Jack ferma les yeux et serra un peu plus le poing. Ses articulations blanchirent.
- Adrian…
La voix de la jeune femme mourut quand il la prit doucement par le bras pour la retourner vers lui. Elle leva les yeux vers son visage et lut dans le regard Adrian… ce qu’elle aurait tellement voulu voir dans ceux d’un autre. Elle ferma les yeux un instant et ses lèvres tremblèrent. Adrian fronça les sourcils et caressa la joue de la jeune femme :
- Samantha… Qu’y a-t-il… je croyais… je croyais qu’il se passait quelque chose.
Elle releva les yeux vers lui. Ils étaient brillants de larmes. Adrian la regardait toujours, à quelques centimètres de la jeune femme, semblant chercher dans les yeux bleus de Sam la réponse à ses questions. Soudain il murmura, comme pour lui-même :
- Il y a… il y a quelqu’un d’autre…
- Non. Non… il n’y a personne d’autre…
- Si Samantha. Je le vois dans vos yeux. Je les vois briller d’un éclat qui n’est pas pour moi.
- Adrian, je vous assure, il n’y a personne dans ma vie, je vous l’ai dit…
- Il vous rejette Samantha ?
Elle se mordit la lèvre. Adrian écarquilla les yeux.
- C’est donc ça… Il y a un autre homme… et il vous rejette… Comment… Comment est-ce possible ? Comment peut-il y avoir quelqu’un d’assez stupide pour repousser une femme telle que vous, Samantha ?
Adrian secoua doucement la tête de dépit et se recula légèrement, se détachant d’elle. Sam paniquait. Elle ne savait plus quoi faire. Cette situation… Adrian…. La mission… et Jack, Jack qui entendait tout… Elle ferma à nouveau les yeux pour s’empêcher de pleurer. C’était leur seule chance. Leur seule chance de découvrir quelque chose. Et ils allaient la perdre, par sa faute… elle ouvrit à nouveau les yeux et plongea dans ceux d’Adrian qui l’observait toujours. Elle fit un pas vers lui alors que ses premières larmes coulaient sur ses joues.
- Je veux l’oublier Adrian. Je veux pouvoir enfin l’oublier. Et je veux l’oublier avec vous.
Elle passa sa main autour du cou de Massertie, le regarda, puis ferma les yeux et posa doucement ses lèvres sur les siennes.
Le silence. Le silence tellement éloquent dans leurs écouteurs. Jack eut l’impression qu’une lame acérée venait de s’enfoncer dans sa poitrine. Il rouvrit les yeux et resta parfaitement immobile. Daniel murmura :
- Jack, écoutez, je…
Très calmement, très froidement, Jack articula :
- Pour l’amour du Ciel, taisez-vous Daniel. Taisez-vous.
L’archéologue n’insista pas et soupira profondément. Il échangea un regard plein d’inquiétude avec le jaffa. La situation leur échappait. La situation leur échappait complètement.