Jack referma la porte derrière lui et s’aventura dans la neige qui recouvrait la petite terrasse. De petits flocons recommençaient à tomber, mais la température semblait s’être radoucie. Il s’assit doucement sur un petit banc déjà occupée Lizzie, qui avait cessé de pleurer mais dont les yeux étaient encore rouges.
Il resta silencieux quelques minutes. Il réfléchissait. Comment allait-il lui dire ce pour quoi il était venu à elle ? Elle venait de perdre la personne qu’elle aimait sans avoir pu y faire quelque chose, c’était une situation qui ne lui était pas inconnue et il savait combien il était difficile de s’en remettre.
Il attendit une réaction mais la jeune femme resta stoïque.
Il se leva et se posta devant elle. Cela lui faisait mal de continuer ainsi à perdre sa confiance, mais il devait le faire. C’était d’ailleurs Daniel, qui étudiait la relique à l’intérieur, qui lui en avait conseillé ainsi. Lui attrapant brutalement les poignets, il les tira à lui pour la relever jusqu’à ce qu’elle lui fisse face. Elle le regarda sans broncher mais il put dicerner un choc profond dans ses yeux.
Il attendit.
Impassible, la jeune femme continuait à le fixer.
Il attendit encore.
Soudainement, elle ferma les yeux et ses genoux se dérobèrent sous elle.
~*~
S’il y avait une chose qu’elle appréciait lorsqu’il lui arrivait de perdre conscience, c’était qu’à son réveil, il était rare que le visage inquiet de son colonel ne la surplombe pas. Cette fois-ci ne faisait pas exception.
Elle était tout simplement exténuée. Quand il l’avait supplié de lutter, il lui avait semblé que ses forces lui revenaient soudainement. Elle lui avait obéi et elle avait finit par prendre le contrôle de Lizzie, mais cela l’avait épuisé et elle avait perdu conscience.
Elle sourit à l’air concerné de Jack. Elle aimait vraiment qu’il tienne à elle de cette façon. Cette relation qu’ils avaient développés aux fils des ans était tout simplement extraordinaire, et la longue histoire racontée à Lizzie l’avait encore rendue encore plus précieuse à ses yeux.
Pour toute réponse, elle serra sa main qui s’était comme par magie glissée dans la sienne.
Il l’aida à s’asseoir sur le lit, puis à se mettre debout. Elle chancela les premières secondes, comme si son corps avait quelques réticences à retourner sous son contrôle, puis, aidé par son colonel, elle se stabilisa. Il y avait tout dans leurs regards, plus encore que d’habitude. Le remerciement, l’affection, le soulagement, la chaleur humaine.
~*~
Daniel reporta toute son attention sur l’objet et le manipula avec précaution.
Il s’interrompit quand il remarqua que ses amis le regardaient avec insistance.
Daniel se tourna vers la jeune femme.
~*~
Il y avait de nouveau eu cette lumière rouge qui s’était échappée de la relique, mais cette fois, tout était différent. Ils avaient été englobés, puis, plus rien. Du blanc et de l’argenté, un sol sans consistance et un espace sans dessus dessous, où les notions d’intérieur et d’extérieur n’avaient plus aucun sens, ni plus ni moins. Jack attrapa la main de son major… du moins il espérait que ce fut la sienne et non celle de Daniel. Ses sensations étaient toutes chamboulées et son regard fixé sur la tache de couleur droit devant lui sans qu’il ne puisse rien y faire. Une silhouette qu’il reconnu comme étant celle de l’archéologue se dirigeait déjà vers elle. La main qu’il tenait l’y entraîna à son tour.
Lorsqu’ils eurent atteint leur but, tout sembla s’atténuer. L’espace multidimensionnel s’estompa. La gravité finit par prendre le dessus et les couleurs prirent une signification. C’était un arbre. Un gigantesque frêne qui n’en finissait pas d’étendre ses branches vers le ciel, ou quoi que ce fut.
A son pied, se tenaient trois femmes. L’une, agée, était assise sur une racine et jetait occasionnellement quelques graines à deux cygnes qui nageaient dans un petit étang. La seconde était debout, majestueuse, belle comme un soleil. De long cheveux dorés glissaient en d’interminables boucles le long de son dos. Elle souriait, radieuse. La dernière était aussi assise, emmitoufflée dans un manteau vert. Elle restait invariablement tournée vers l’astre levant.
Elle leva soudainement un bras vers le ciel et prononça quelques mots dans un dialecte qui leur était inconnu. Le tronc de l’arbre se fissura derrière elle et un brouillard pourpre en sortit. Aussitôt qu’il eut atteint Daniel, celui-ci s’éclipsa.
La vieille femme prit alors la parole pour la première fois. Étonnamment, sa voix n’était ni enrouée, ni fatiguée. Elle s’apparentait même à celle de sa sœur, Verdande.
Seule la vie est importante, marmona Jack pour lui même. Il avait l’impression de vivre ce film de science-fiction qu’il avait regardé en compagnie de Teal’c avant de partir pour l’Angleterre.
Ce fut au tour de Skuld d’ouvrir la bouche. Elle détourna les yeux du soleil et les tourna vers eux, comme hypnotisée.
Avant qu’ils n’aient pu ajouter quoi que ce soit, le brouillard pourpre sortait de nouveau de l’arbre sur la commande de Verdande.
~*~
Peter Lytton apparut dans le cadre de la porte en faisant tinter son trousseau de clés.
A contrecœur, l’archéologue acquiesça et replaça la relique dans l’amulette. Lytton la déposa délicatement sur son socle et fit jouer une des nombreuses clés dans la serrure.
Le jeune homme fit semblant d’ignorer l’air peu convaincu, presque déstabilisé, de son ami. Il tirerai ça au clair plus tard.
Les trois hommes partirent en tête en discutant de choses et d’autres, mais les deux personnes qui voulaient tant partir quelques minutes auparavant restèrent immobiles à les regarder quitter la pièce. Au bout d’un certain temps, quand il se furent assurés qu’ils étaient seuls, leurs regards se croisèrent enfin.
Sam sourit. Elle repensa brièvement à cette histoire qu’elle avait entendu par l’intermédiaire de Lizzie. C’était une merveilleuse histoire. Plus merveilleuse encore que ces contes que sa mère lui racontait avant qu’elle ne s’endorme. Un mélodrame au refrain agréablement sucré, au goût de reviens-y. Daniel leur hurla de se dépêcher un peu, à moins qu’ils ne veuillent passer la nuit en compagnie d’artefacts. Jack commençait à s’éloigner quand elle le rappela.
Il fut parcourut par une vague de tendresse. Ce genre de bouleversement qui lance une onde de chaleur vers le cœur et qui vous crie que vous êtes incroyablement chanceux. Il revint sur ses pas et planta un chaste baiser sur ses lèvres, avant même que son esprit n’ait pu donner son accord.
~*~
Fin
Sir Andrew Summerlee - Jack
Lady Elizabeth *Lizzie* Hearn - Sam
Docteur William Simpson - Daniel
Docteur Thomas Illingworth - Ami de Simpson, fiancé de Lizzie.
Sir Lawrence Clifford – Coéquipier dans l’expédition
Capitaine Bolton - Capitaine du bateau
Edward Bradbury - Conférencier
Jane Summerlee - Femme d’Andrew Summerlee