Citations du moment :
L'ennemi est bête : il croit que c'est nous l'ennemi alors que c'est lui !
[ Pierre Desproges ]
Imagine

Adrian : Chapitre 3

Le baiser, timide tout d’abord, était devenu plus passionné, plus sensuel. Adrian avait pris la jeune femme dans ses bras et la serrait contre son corps. Quand ils se détachèrent l’un de l’autre, Adrian essuya du bout des doigts les larmes sur les joues de la jeune femme et sourit.
-          Merci de me laisser une chance, Samantha…
Sam lui sourit en retour, tentant d’ignorer son envie de hurler et de s’effondrer sur le sol en pleurant. Adrian la conduisit vers le canapé où ils s’assirent. Il attira la jeune femme contre lui, et elle posa doucement la tête sur son épaule. Adrian regardait le visage de la jeune femme, passant la main dans ses cheveux blonds avec une infinie douceur.
-          Je ne sais qui il est, Samantha. Mais je le hais. Je le hais de vous rendre malheureuse, je le hais de faire couler ces larmes sur votre visage. Je vais tout faire pour vous le faire oublier, pour vous rendre heureuse, pour vous voir sourire. Votre sourire est si exquis, Samantha. Il vous illumine. Je crois savoir comment amener une scientifique telle que vous à ne penser qu’à moi : en vous proposant de vous allier à un projet pour le moins…révolutionnaire. Et en balayant toutes vos connaissances sur la physique.
Sam fronça les sourcils. Adrian la regardait toujours, un petit sourire amusé sur les lèvres.
-          Comment cela ? Que voulez-vous dire ?
-          Ah ah ! Je pique votre curiosité ! J’ai… un petit secret que je voudrais partager avec vous. Un laboratoire assez spécial. Accepteriez-vous que je vous le fasse visiter, disons demain ?
-          Bien sûr, avec plaisir… mais n’oubliez pas que je ne puis rester bien longtemps à Paris…
-          Vous resterez. Je sais qu’après avoir vu… l’étendue de mes recherches, vous resterez.
-          Je vous trouve bien sûr de vous… répondit Sam avec un sourire.
Adrian sourit plus largement, se pencha vers la jeune femme et l’embrassa à nouveau. Elle sentit son cœur s’emballer et ferma les yeux.


Et elle le vit. Ses traits réguliers, sa ride au milieu du front, ses cheveux grisonnants, son port de tête altier. Ses yeux bruns, qui pouvaient être si froids, si sévères, et qui, un instant plus tard, se mettaient à pétiller malicieusement. Et ses lèvres. Ses lèvres si fines, à peine relevées à la commissure gauche dans une petite moue ironique et si sensuelle…
Adrian sentit le corps de la jeune femme se détendre contre lui. Elle répondait maintenant à son baiser avec passion, paupières closes. Doucement il déplaça sa main depuis la joue de la jeune femme, caressant sa nuque, son épaule nue, glissant avec sensualité vers le fin tissu qui couvrait la naissance de sa poitrine. Sam cessa de respirer et ouvrit les yeux, rencontrant le regard vert d’Adrian. Ce dernier lut instantanément la peur dans les yeux de la jeune femme et retira sa main, la posant doucement sur la taille de Sam. Il lui sourit, embrassa doucement sa nuque fine et se leva doucement.
-          Je vais vous raccompagner à votre hôtel Samantha.
-          Adrian… je…
-          Ne dites rien. Je comprends parfaitement. Je passe vous chercher demain en fin de matinée ?
-          Très bien. Merci Adrian. D’être comme vous êtes… merci.
Elle lui sourit largement, sourire qu’il lui rendit. Elle reprit son étole et ils redescendirent au garage. Quand ils arrivèrent devant la porte de l’hôtel de Sam, il déposa un simple baiser sur les lèvres de la jeune femme et la regarda entrer dans le bâtiment avant de repartir.

-          Bien. Carter est rentrée. Je pars faire un tour. Daniel, allez voir si elle a besoin de quelque chose.
-          Jack, vous ne voulez pas…
Mais O’Neill était déjà sorti de la voiture et s’éloignait à grandes enjambées. La voix du jaffa s’éleva :
-          Je pense qu’ils ne vont pas bien du tout. Cette mission est dangereuse.
-          Je suis d’accord, mais je ne vois pas ce qu’on peut faire. Je vais essayer de parler à Sam, mais nous n’arriverons jamais à tirer quoi que ce soit de Jack.
-          Oui. O’Neill a toujours refusé d’aborder le sujet.
Daniel acquiesça en soupirant et ils montèrent dans leurs chambres.
L’archéologue rejoignit rapidement celle de Sam. Elle lui ouvrit la porte et le laissa entrer sans un mot. Ils se regardèrent un instant en silence puis Daniel murmura :
-          Sam…
Elle fondit en larmes et se précipita dans ses bras. Elle sanglotait pendant qu’il la serrait contre lui, la berçant doucement.
-          Je n’avais pas le choix… Je… Si… nous n’aurions pas su…
-          Chut… je sais que vous n’aviez pas le choix, vous avez été très courageuse, nous le savons parfaitement…
Elle leva ses yeux pleins de larmes vers Daniel et murmura :
-          Et… ?
-          Et Jack ?
Elle acquiesça doucement et Daniel la reprit contre lui.
-          Il est parti faire un tour. Il n’a rien dit. Il n’a fait aucun commentaire, bien sûr. Il sait que vous n’aviez pas le choix. Il sait que c’est pour la mission. Il le sait.
Daniel sentit son amie se calmer doucement et elle se détacha finalement de lui avec un sourire triste.
-          Ca va aller Sam ?
-          Oui, oui. Merci Daniel. Je.. je vais tâcher de dormir un peu, j’en ai besoin.
Il laissa donc la jeune femme, doutant qu’elle arrive à trouver le sommeil. En effet, deux heures plus tard, au milieu de la nuit, elle était toujours assise en robe de soirée sur son lit quand on frappa à nouveau à sa porte.

O’Neill se tenait dans l’encadrement, en jean, chemise et veste de cuir. Son visage était totalement fermé, la ride qui lui creusait le front plus profonde que jamais. Ils restèrent quelques instants immobiles, les yeux dans les yeux.  Puis Sam balbutia en s’effaçant pour le laisser entrer :
-          Je… entrez…
-          Je suis juste passé voir si vous alliez bien Carter. Je ne veux pas vous déranger.
-          Non, non… vous ne me dérangez pas… Vous voyez, je ne suis même pas couchée…
Jack se passa la main dans les cheveux, hésita un instant, puis entra dans la chambre. Sam referma la porte de la chambre et ils se trouvèrent debout, face à face au milieu de la pièce. Elle avait pleuré, c’était manifeste, un peu de son maquillage avait coulé autour de ses yeux bleus. Jack ne savait pas ce qu’il faisait là. Daniel était sûrement passé la voir, elle n’avait pas besoin d’être à nouveau dérangée. Et pourtant il était là. Pourtant il était venu directement là après avoir marché deux heures dans la nuit, sans parvenir à se sortir de la tête l’image de Massertie serrant contre lui le corps de Sam.
-          Je… je suis désolée mon colonel, je ne savais pas quoi faire…
-          Je sais Carter. Vous avez…
Jack avala difficilement sa salive et ajouta d’un ton sec :
-          … vous avez bien fait.
Les larmes embuèrent à nouveau les yeux bleus de Sam, mais elle les retint. Jack ne pouvait détacher son regard d’elle. Elle se tenait debout face à lui, dans sa magnifique robe. Elle tremblait légèrement. Il suivit des yeux la nuque pâle de la jeune femme, ses épaules, le galbe de sa poitrine, le creux de sa taille, la courbe de ses hanches… Elle frissonna sous son regard, à la fois si rapide et si sensuel. Il leva à nouveau les yeux vers elle.
-          Vous… vous pensez vraiment que j’ai bien fait, mon colonel ? demanda-t-elle dans un souffle.
Jack ne répondit pas. Ses traits étaient parfaitement figés, mais il menait un combat intérieur désespéré. Combat contre lui-même, contre cette part de lui-même qui voulait tant la serrer contre lui, l’embrasser, lui dire enfin tout ce qu’elle représentait pour lui. Quoi qu’il fût parfaitement conscient qu’il aurait été incapable d’exprimer tout ce qu’elle représentait pour lui. Lui-même ne savait pas où s’arrêtaient ses sentiments pour elle, lui-même ne savait plus s’il y avait une limite à la place que cette jeune femme tenait dans sa vie. Si. Il y avait une limite : le règlement de l’armée.
Il la regardait toujours, figé. Elle n’arrivait pas à déchiffrer ce qu’elle voyait dans ses yeux bruns : de la colère, de l’amertume… de… de la peur ? Elle avança d’un pas et murmura :
-          Donnez-moi une raison d’arrêter Jack… je vous en supplie, donnez-moi une raison d’arrêter…
La voix de la jeune femme était brisée par les larmes qu’elle tentait de contenir. Elle se tenait maintenant à deux pas d’O’Neill, ses grands yeux bleus levés vers lui, implorants, suppliants, désespérés.
-          Sam…
C’était un murmure, presque un râle. Il entrouvrit les lèvres, sembla hésiter, puis ferma les yeux. Quand il les rouvrit, une fraction de seconde plus tard, ils étaient redevenus froids et sévères. Il articula lentement :
-          Je n’ai pas de raison à vous donner. C’est du bon travail major. Faites attention à vous, c’est tout.
Incapable de supporter la détresse dans les yeux de Sam, il tourna les talons et quitta la chambre. Il garda la main sur la poignée après avoir refermé la porte, et entendit un cri étouffé à l’intérieur et des sanglots. Il se mordit la lèvre jusqu’au sang, serra les poings et regagna sa chambre.
Sam s’était jetée sur son lit en pleurant. C’est là qu’elle s’endormit, vaincue par la fatigue et le désespoir.

Elle se réveilla vers 10 heures, avec un goût amer dans la bouche. Elle ne savait pas s’il était dû aux baisers d’Adrian ou à l’attitude de Jack. Elle resta un long moment immobile sur son lit, toujours dans sa robe de soirée froissée, fixant le plafond. Cette mission était une catastrophe. Ils n’auraient jamais pensé que cela puisse se passer ainsi. Tout leur échappait. Elle était à la merci de Massertie, elle ne pouvait plus reculer. Et elle était dorénavant seule, tout dépendait d’elle… et de ce qu’elle était capable de faire. D’endurer. Elle sourit amèrement : après tout, cela faisait sept ans qu’elle endurait bien pire que cela, non ? Mais là c’était différent. Les règles étaient différentes. Tout était différent. Cette mission les mettait à nu, Jack et elle. Cette situation exacerbait leurs sentiments, les détruisait à petit feu. Ils ne sortiraient pas indemne de cette mission, d’une façon ou d’une autre. Elle en était persuadée.
Elle se leva, dégrafa sa robe qui tomba à terre et passa dans la salle de bain prendre une douche. Elle enfila un pantalon de lin beige et un haut noir. Elle remit les discrètes boucles d’oreille et appela la chambre de Daniel. Elle ne parla pas de la visite de Jack et se contenta de lui assurer que tout allait bien. Puis elle attendit l’arrivée d’Adrian.

-          Alors ? demanda Massertie, l’oreille collée à son téléphone cellulaire.
-          Alors rien Monsieur. Son dossier est irréprochable. Pas une ombre. Un père militaire, mais qu’elle ne voit jamais, un frère à San Diego, des études brillantes dans les meilleures universités du pays, et sept ans à la NASA.
-          Ah ! Que vous avais-je dit, Franck !
-          Oui, son dossier est parfait monsieur. C’est même cela qui m’inquiète. Trop parfait.
-          Arrêtez de voir le mal partout. Je vous dis qu’elle est la personne que je cherchais… à tous points de vue.
-          Je vous le souhaite, Monsieur. A plus tard.
Adrian referma son téléphone et entra dans l’hôtel, se dirigeant vers la réception.
-          Pouvez-vous prévenir Mademoiselle Carter, chambre 125, que Monsieur Massertie est arrivé ?
-          Oui, bien sûr Monsieur !
La jeune femme à la réception n’en revenait pas. Elle appela ensuite le Directeur de l’hôtel, qui se précipita dans le hall à la rencontre de Massertie. Sam les trouva en grande discussion quand elle descendit quelques instants plus tard. Adrian et elle se sourirent,  le milliardaire s’excusa auprès du directeur et ils sortirent. Le directeur bondit vers le personnel de la réception :
-          Vos faites immédiatement porter des fleurs dans la chambre de Mademoiselle Carter ! je veux que tout y soit parfait ! Et pas un mot à la presse ou je fais renvoyer tout le monde ! La petite amie de Massertie… si j’avais su….

La Porsche noire se gara à nouveau dans le petit garage de la Butte Montmartre. Adrian et Sam avaient peu parlé pendant le trajet. La jeune femme était surprise de le sentir encore plus nerveux qu’elle. Quand ils se trouvèrent devant l’ascenseur, il se tourna vers elle et plongea son regard dans le sien, comme s’il voulait sonder son âme. Elle frissonna :
-          Adrian, vous m’inquiétez… Que peut-il y avoir de si terrible chez vous ??
-          Vous jugerez par vous-même Samantha. Je suis… enfin, vous allez êtes la première personne extérieure au projet à le découvrir. Vous ne devez révéler à personne ce que vous allez voir.  A personne. Puis-je avoir votre parole ?
-          Vous l’avez.
Il sourit, se pencha vers elle et l’embrassa doucement. Puis il ouvrit l’ascenseur et ils entrèrent dans la cabine. Il refit passer sa carte et un écran tactile apparut. Adrian y posa sa paume, que l’ordinateur identifia, et l’ascenseur entama sa descente dans le ventre de Paris. Adrian ne quittait pas Sam des yeux, amusé par son trouble.
Quand ils sortirent de l’ascenseur, l’espace qui s’offrait à eux n’avait rien à voir avec la petite entrée de l’appartement d’Adrian. Ils avaient débouché sur une sorte de mezzanine en acier, qui dominait une immense cave voûtée de plusieurs milliers de mètres carrés. La pierre nue des catacombes contrastait avec les installations qui y avaient été aménagées. Des laboratoires ultramodernes s’étendaient dans tout cet espace, et leurs toits transparents laissaient apparaître des dizaines de personnes qui s’affairaient à l’intérieur. Plusieurs zones étaient surmontées de dômes de verre. Sam était bouche bée. Elle se retourna lentement vers Adrian :
-          Adrian… Mais… De quoi s’agit-il ?
-          D’un laboratoire très… discret dirons-nous. Pour mes recherches personnelles. Venez.
Ils descendirent un escalier et entrèrent dans le premier bloc.

Jack, Daniel et Teal’C étaient assis à la terrasse d’un café, non loin de là, et écoutaient en silence. Ils entendaient moins bien depuis que Sam était descendue dans les laboratoires, mais la technologie Tok’ra vint facilement à bout des brouilleurs d’onde installés par Massertie et ils pouvaient suivre la progression de Sam sans trop de difficulté.


Adrian ne donnait pour l’instant aucune explication à Sam, il la laissait découvrir les lieux. Les pièces s’enchaînaient, remplies d’un appareillage scientifique de pointe. Les personnes qui travaillaient levèrent à peine les yeux vers eux, totalement absorbées par leurs recherches. Sam reconnut beaucoup des appareils dont ils disposaient : les mêmes se trouvaient dans son laboratoire du SGC. Pour l’instant la jeune femme suivait en silence Adrian dans le complexe. Elle essayait de rester calme, de retenir la typographie des lieux, le visage des personnes qui s’y trouvaient. Adrian la fit entrer dans un très vaste bureau et elle prit place face à lui dans un fauteuil confortable. Il la regardait, un sourire aux lèvres.
-          Adrian… Qu’est-ce qui se passe ici ? Qu’est-ce que vous faites ?
-          Je cherche à découvrir un passage vers d’autres mondes Samantha.
Sam sentit son sang se glacer dans ses veines mais seul l’étonnement se lut sur son visage.
-          Pardon ? Comment cela ?
-          Un passage, passage entre notre monde et d’autres, situés bien au-delà des étoiles que nous pouvons observer chaque soir à l’œil nu. Passage que nous pourrions franchir grâce à la déstructuration moléculaire qui nous enverrait, vous et moi, à l’autre bout de l’univers en quelques secondes. Vous savez parfaitement qu’une fois transformée en énergie pure la matière n’est plus soumise aux lois si contraignantes de la relativité.
Teal’C, Jack et Daniel se regardèrent. Ils ne prononcèrent pas un mot.
Une pensée stupide, totalement inattendue, traversa l’esprit de Sam : « Ma petite, si tu veux gagner un Oscar, c’est maintenant ou jamais ». Elle sourit, respira profondément et regarda Adrian dans les yeux.
-          C’est impossible. Vous le savez parfaitement. Nous en avons assez parlé cette semaine. C’est un très beau rêve, mais totalement hors de notre portée. Définitivement hors de la portée de n’importe qui.
Adrian sourit plus largement. Il se leva, fit le tour de son bureau, se pencha vers Sam et murmura avec délectation :
-          Vous m’avez mal compris Samantha. Je n’ai pas dit que je cherchais à créer ce passage. Je dis qu’il existe, sur Terre, et que je veux juste le trouver.
Sam sentit un filet de sueur froide glisser le long de son dos. Il était au courant. Il était au courant pour la Porte des Etoiles. Elle ne répondit pas et se contenta de fixer les yeux verts d’Adrian.
Les trois coéquipiers de la jeune femme étaient tétanisés.
-          Et votre cher gouvernement américain le sait, Samantha. J’en ai la preuve.
-          Pardon ?
-          Ils ont trouvé la porte – oui, on appelle cela la Porte des Etoiles – sur le plateau de Gizeh en Egypte dans les années 20. Puis, pfft, plus rien, envolé, soit disant l’objet et le projet ont été abandonnés. Mais je pense que non. Et de toutes façons je veux le trouver.
-          Pourquoi ?
Adrian écarquilla les yeux et rit doucement, toujours à quelques centimètres de Sam.
-          Pourquoi ?? Vous êtes décidemment délicieuse Samantha.  Pourquoi chercher une porte qui nous ouvrirait l’Univers ? Pourquoi chercher à contacter les autres races qui peuplent l’Univers ?
-          Les autres races… ?
A ce moment la porte du bureau s’ouvrit et Sam tressaillit. Un homme d’une trentaine d’années, de haute stature, vêtu d’une blouse blanche sur un pantalon et un T-shirt noir, venait d’entrer. Ses cheveux mi-longs étaient retenus par un bandeau doré. Il était d’une grande beauté, mais ses traits durs et ses yeux noirs auraient rendu mal à l’aise n’importe qui.
Pas Sam. Sam était seulement pétrifiée.
C’était un Goa’uld. Chaque particule de Jolinar qui dormait en elle lui criait l’atroce vérité.
Adrian se tourna vers l’homme, manifestement énervé d’avoir été dérangé :
-          Je vous ai déjà dit de ne pas entrer dans mon bureau comme cela.
-          Je n’ai aucun ordre à recevoir de vous, répondit le Goa’uld d’une voix sèche mais humaine.
Il posa les yeux sur la jeune femme, la toisant avec mépris.
-          C’est elle ?
-          Oui. C’est le Docteur Carter. Je vous ai parlé de ses travaux, je sais qu’elle peut nous aider. Et elle est américaine.
Adrian se tourna vers Sam et tenta de lui sourire :
-          Samantha, voici… le professeur Deimos. Il est grec. C’est lui qui dirige les travaux.

Daniel fronça les sourcils :
-          Deimos…
-          Cela vous dit quelque chose, Daniel ? demanda Jack.
-          C’est le nom d’un dieu de la mythologie grecque. Le Dieu de la Terreur, le fidèle compagnon d’Arès, le dieu de la guerre.
-          C’est aussi le nom d’un ancien Goa’uld. Il était un allié de Apouat qu’a vaincu et tué Râ il y a des milliers d’années.
-          Apouat… répéta l’archéologue. C’est logique ! Apouat est le dieu égyptien de la guerre, l’équivalent d’Arès chez les grecs. Deimos serait donc l’ancien bras droit de Apouat. Que lui est-il arrivé, Teal’C ?
-          Je ne sais pas. Vous pensez qu’il s’agit du même Deimos ?
Jack grogna :
-          Bien sûr c’est peut-être seulement un nom grec quelconque… mais vous y croyez, vous ?
-          Sam nous dira cela quand elle reviendra, répondit Daniel.
-          Si elle peut revenir, murmura doucement Teal’C.
Jack le foudroya du regard et ils reprirent leur écoute.

 

Les deux hommes avaient quitté le bureau pour discuter, laissant Sam seule. Heureusement, Deimos ne s’était pas approché d’elle, et ne semblait donc pas avoir senti les traces de Jolinar en Sam. La jeune femme essayait d’organiser les pensées qui se bousculaient dans sa tête. Adrian travaillait à trouver la porte des Etoiles. Il était allié à un Goa’uld. D’où venait-il ? Comment était-il arrivé sur terre ? Etait-il seul ? A quoi servait ce laboratoire immense s’ils ne voulaient que trouver la Porte ??
Elle se sentait seule. Elle ne savait pas si ses amis pouvaient l’entendre. Elle ne savait pas ce qu’elle faisait ici, ce que Adrian attendait d’elle.
Elle leva à nouveau les yeux vers Adrian quand il entra dans la pièce. Il lui sourit.
-          Adrian, qu’est-ce que c’est que cette histoire de races extra-terrestres ? Avez-vous perdu la raison ?
-          Non.
Devant l’air sérieux d’Adrian, Sam se composa un visage inquiet et résigné.
-          C’est vrai ? demanda-t-elle simplement.
-          Oui. Venez. J’ai des choses à vous montrer.
Elle le suivit dans les laboratoires. Elle écouta Adrian lui raconter comment, un an avant, une équipe d’archéologues qui travaillait avec lui avait fait une fabuleuse découverte : un tombeau, ou plutôt une sorte de caisson d’hibernation, appelé sarcophage. Comment ils y avaient découvert le corps d’un homme venu d’un autre monde, parfaitement intact et en vie. Comment il avait réussi à s’allier avec lui…
-          S’allier avec un Goa’uld ??? Ce type est complètement fou !
-          Taisez-vous Jack, et écoutez, coupa Daniel.
… et à lui promettre de l’aider à retrouver les siens en cherchant le passage qui ouvrait sur son monde, la Porte des Etoiles. Comment depuis ce moment Adrian travaillait à rechercher la Porte, qui avait manifestement été déplacée, sûrement par les américains, mais sans qu’il arrive à trouver où. Comment de son côté le Goa’uld – c’est comme cela qu’il s’appelait – lui offrait des technologies avancées.
-          Certainement les armes que Massertie a mises en vente.
-          Vous avez sûrement raison, O’Neill.
Sam ne parlait pas. Elle se contentait de suivre Adrian dans les laboratoires et d’écouter ses explications. Elle n’avait pas à feindre à la surprise, elle était éberluée. Elle avait reconnu les objets qui avaient été empruntés au Louvre, et avait demandé à Adrian ce qu’ils faisaient là. Il lui avait répondu qu’ils contenaient, dissimulés depuis des milliers d’années, des échantillons d’une substance nécessaire à ses recherches.
Du naquadah.
Daniel avait failli s’en décrocher la mâchoire.
Il lui avait montré les objets retrouvés avec le Goa’uld, tous rassemblés dans une pièce. Il y avait là un sarcophage et une arme de poing Goa’uld, posée dans une vitrine. Adrian n’avait toujours pas dit à Sam que celui qu’il avait présenté comme un professeur grec était l‘extra-terrestre en question. Elle demanda donc innocemment où était ce fameux alien. Le milliardaire sourit, et murmura :
-          Chaque chose en son temps, Samantha… mais vous serez surprise.
-          Ce n’est pas vous, tout de même ?
Elle avait feint l’inquiétude en posant la question. Adrian étouffa un rire et, passant sa main derrière la nuque de la jeune femme, l’embrassa avec passion avant qu’elle ait pu réagir. Quand il se détacha d’elle il murmura :
-          Non Samantha. Je suis bien humain, fait de chair et tout à votre merci, comme vous pouvez le voir.
Elle sourit et ils continuèrent à discuter de longues heures dans le laboratoire. La jeune scientifique faisait très attention à ce qu’elle demandait, elle tâchait d’être crédible dans ses questions, tout en essayant d’en apprendre le plus possible. Adrian souhaitait qu’elle l’aide entre autres dans ses recherches sur le naquadah et son exploitation. Elle apprécia le fait qu’il ne lui proposait absolument pas de trahir son pays, les Etats-Unis, en l’aidant à trouver la porte. Mais Sam restait parfaitement sur ses gardes, maintenant qu’elle savait qu’un Goa’uld travaillait avec Massertie. Elle dîna avec Adrian dans son appartement et il la raccompagna à son hôtel assez tard dans la soirée.


Sam fut surprise de ne pas recevoir de coup de fil de ses coéquipiers, mais attendit patiemment. Elle entendit un froissement alors qu’elle se déshabillait, et vit qu’un bout de papier avait été glissé sous la porte. Elle l’ouvrit et lut : « Nous avons tout entendu. Vous êtes à priori surveillée, on se rencontre demain à 8 heures au jardin du Luxembourg, à l’entrée rue de Fleurus. Bon travail. » Elle reconnut l’écriture de Jack, rapide et décidée. Elle se rendit dans sa salle de bain, mouilla la feuille de papier jusqu’à ce que l’encre disparaisse et la jeta dans la corbeille après l’avoir déchiquetée. Puis elle alla se coucher. Elle aurait aimé pouvoir les voir, les entendre au téléphone au moins. Mais elle se rendait parfaitement compte que maintenant qu’Adrian lui avait fait part de ses travaux, elle devait agir encore plus prudemment.
Sam se leva tôt, enfila un jean et quitta rapidement l’hôtel. Elle prit le métro, changeant plusieurs fois de ligne, feignant de se tromper de direction. Quand elle sortit du métro rue de Rennes, elle espéra avoir semé ses éventuels poursuivant, même si elle n’avait remarqué personne. Il était 8 heures moins 3 quand elle entra dans le jardin du Luxembourg. Elle avait rendez-vous à 9 heures chez Adrian. Elle regarda autour d’elle, et repéra immédiatement la haute stature de Jack, assis sur un banc un peu plus loin. Il portait une casquette et ses lunettes de soleil. Il ne fit pas un geste quand elle s’assit sur le banc à son tour et ouvrit un livre.
-          Ca va Carter ?
-          Bien. Je ne pense pas avoir été suivie.
-          Parfait. Il va falloir devenir très méfiants. Au moins maintenant, on sait à qui on a affaire. Ce Deimos est bien… ?
-          Oui. C’en est un. Adrian le sait mais ne me l’a pas dit, je suis sensée l’ignorer.
-          Daniel a dit que c’était le dieu grec de la terreur, ou quelque chose comme ça. A priori il a été banni par Râ il y a quelques milliers d’années et on n’en a pas entendu parler depuis.
-          Il a été retrouvé dans son sarcophage en Grèce, près de Mycènes. Adrian cherche la porte pour lui.
-          Il faut se méfier de lui, ils se sont alliés, et les disparitions des agents sont peut-être de sa faute.
-          Je ne crois pas qu’il soit forcément au courant, il faut rester sur nos gardes mais Adrian ne semble pas se rendre compte…
Jack leva un sourcil et demanda sèchement :
-          Vous le défendez, Carter ?
Sam rougit et bafouilla :
-          Non, bien sûr que non, c’est juste qu’on ne sait pas si…
-          Ce type est allié à un de ces serpents et est mêlé à la disparition d’agents, j’en sais assez pour m’en méfier comme de la peste. Vous feriez bien de faire pareil.
Elle ne répondit pas. Jack enchaîna plus doucement :
-          Bien. Je voulais juste savoir si tout allait bien. Vous allez chez lui ce matin ?
-          Oui. Je commence les recherches dès aujourd’hui. Je crois qu’il est très impatient de me voir à l’œuvre.
-          Ben voyons… Remarquez, le naquadah, cela ne va pas beaucoup vous changer.
-          C’est assez étrange. J’en sais beaucoup plus sur le sujet que tous ceux qui travaillent avec lui, et il va falloir que je fasse mine de tout découvrir.
-          Vous vous en sortez très bien. Je n’aurais jamais imaginé que vous puissiez feindre aussi bien l’ignorance. Mais bon, c’est vrai qu’on a tendance à oublier que vous êtes avant tout une blonde, Carter !
Elle se tourna vers lui, rouge de colère, prête à répliquer, et découvrit un grand sourire satisfait sur le visage de Jack. Elle secoua la tête et sourit à son tour. Il se leva.
-          Bien, je n’ai rien à ajouter. On continue comme cela. Transmettez nous toutes les informations possibles : plan des installations, dispositifs de sécurité… De mon côté je vais contacter Hammond pour savoir ce que nous devons faire. Si vous avez un message, glissez un bout de papier sous la porte d’un de nous trois. Daniel vous embrasse. Teal’C… euh… vous salue bien bas je suppose. Bon courage Carter.
-          Merci.
Elle le regarda s’éloigner et disparaître à l’entrée du parc.
Quand elle arriva chez Adrian, celui-ci l’attendait à son appartement. Elle sourit quand il ouvrit la porte et ce fut elle qui l’embrassa cette fois, à la grande joie du milliardaire qui la serra dans ses bras. Ils reprirent l’ascenseur et descendirent au laboratoire. L’attitude d’Adrian n’avait absolument pas changé, ce qui rassura Sam, certaine à présent de n’avoir pas été suivie. La journée se passa sans encombres. Elle avait revêtu la blouse réglementaire et avait passé la matinée à éplucher les dossiers qui lui avaient été remis sur le naquadah. Ils avaient avancé, mais fort peu comparé à tout ce qu’elle-même connaissait du minerai. Elle se lança dans ses premières expérimentations l’après-midi même, avançant juste assez vite pour inspirer le respect aux autres chercheurs. Adrian était ravi.

Jack demanda une cabine téléphonique au serveur et, laissant Daniel et Teal’C à leur table, partit appeler Hammond. Il s’installa dans le petit réduit à l’arrière du restaurant. La voix de son supérieur se fit bientôt entendre :
-          Alors, colonel O’neill, comment ça se passe ?
-          Carter a été embauchée par Massertie et travaille depuis ce matin au laboratoire dont je vous avais parlé hier.
-          Bien. Elle fait vraiment du bon travail.
-          Oui.
Hammond décela immédiatement la froideur dans la voix de son subordonné.
-          Un problème Jack ?
-          Non. Enfin… c’est juste que Massertie est, disons, très attaché à Carter et que cette mission la place dans une position…. désagréable.
-          Désagréable pour qui ? demanda Hammond avec une légère ironie dans la voix.
Jack ne répondit rien. Le général soupira.
-          Bien, je vois… Ecoutez, nous n’avons pas le droit d’influencer cette partie de sa… mission. Mais cependant, protégez la, et prenez garde à ce qu’elle ne se sacrifie en aucune façon de peur de  déplaire à… ses supérieurs. Vous m’avez compris colonel ?
-          Oui mon général.
-          J’en doute. Quoiqu’il en soit, pour l’instant vous ne bougez pas. Nous lançons la procédure auprès des autorités françaises pour pouvoir agir sur leur territoire, cela peut prendre un certain temps vous vous en doutez. Continuez de me tenir eu courant, et saluez la Tour Eiffel pour moi.
-          Je n’y manquerai pas !
-          Et Jack… prenez soin de Carter tous les trois.
-          Comme d’habitude mon général. Comme d’habitude.
-          C’est bien ce qui m’inquiète. Au revoir colonel.

Sam travaillait maintenant depuis une semaine au laboratoire. Elle progressait suffisamment pour se rendre indispensable aux recherches de Massertie, mais sans rien dévoiler de crucial. Les autres chercheurs lui étaient inconnus, mais elle avait pu se rendre compte qu’Adrian s’était entouré d’une équipe brillante. Ils étaient peu en contact les uns avec les autres. Deimos restait seul dans le laboratoire où avait été installé le sarcophage. Sam essayait d’en apprendre le plus possible sur les projets du Goa’uld et d’Adrian, mais devait se méfier de ce qu’elle demandait pour ne pas éveiller les soupçons. Adrian était persuadé que la Porte des Etoiles était maintenant aux Etats-Unis, et qu’elle était utilisée, mais il semblait ignorer où elle se trouvait précisément. Elle gardait avec elle ses boucles d’oreilles, qui n’avaient en effet nullement été repérées par les systèmes de sécurité de Massertie. Ce dernier travaillait manifestement à reproduire les armes Goa’uld que lui décrivait Deimos. Le laboratoire contenait déjà de nombreux prototypes de zat, mais ils manquaient de naquadah. Deimos en avait bien sûr promis à Adrian si celui-ci arrivait à retrouver la porte. Sam avait envie de crier à Adrian que c’était faux, que jamais Deimos ne l’aiderait à fabriquer des armes à grande échelle, que tout ce qu’il souhaitait c’était aller chercher du renfort et revenir anéantir les Tau’ris. Mais elle ne dit rien, bien sûr.
Par contre elle avait entendu parler d’une autre arme. D’une nouvelle arme. Mise au point à partir de l’arme de poing, à priori. Mais c’était là le projet personnel de Deimos, et elle n’avait pu en savoir plus. Jack avait donné l’information à Hammond, qui avait décidé d’attendre dans savoir plus pour lancer une offensive. Il semblait de toutes façons que les négociations sur une intervention musclée avaient peu de chance d’aboutir, Massertie étant beaucoup trop influent au sein de l’intelligentsia française. SG1 risquait de devoir agir seule pour neutraliser le Goa’uld et les armes. Les autorités militaires françaises acceptaient juste de se charger du milliardaire, une fois seulement que sa culpabilité serait prouvée. Jack avait grincé des dents en apprenant cela : tout reposait décidemment sur les épaules de Carter.
Adrian et Sam passaient tout leur temps libre ensemble. Elle déjeunait et dînait avec lui quasiment tous les jours, puis il la raccompagnait à son hôtel, en parfait gentleman. Il était adorable et prévenant. Il ne se montrait pas pressant, se contentant de la compagnie de Sam et des baisers qu’ils échangeaient fréquemment. Mais elle se doutait qu’il attendait davantage d’elle, il souhaitait qu’elle s’implique davantage dans leur relation… à tous points de vue. Elle sentait son regard posé sur elle, ses mains qui tremblaient de devoir rester sur la taille de la jeune femme. Sam se refusait à y penser.
Elle retrouvait Jack tous les matins à divers endroits dans Paris. Ils ne se regardaient pas, ne se frôlaient pas, ils échangeaient à peine quelques mots, elle lui transmettait les renseignements nécessaires et il s’éloignait en lui souhaitant bonne chance. Jamais il ne l’avait interrogée sur sa relation avec Massertie. Ce qu’il entendait de leurs conversations grâce aux transmetteurs Tok’ra le rassurait jusqu’à présent.
Car il était jaloux. Jack O’Neill avait du se l’avouer, il était jaloux. Inquiet, bien sûr, de savoir Sam toute la journée enfermée avec Massertie, mais jaloux aussi. Jaloux du temps qu’il passait avec elle, jaloux de leurs discussions au restaurant, jaloux de leurs rires, de tout ce jeu de séduction qui lui était interdit, à lui. Daniel et Teal’C évitaient soigneusement d’en parler, Jack se fermant dès que le sujet de la relation entre Sam et Massertie arrivait sur le tapis. Daniel s’était senti obligé de rappeler à Jack que Sam savait parfaitement à qui elle avait affaire, ce qui avait valu à l’archéologue de se faire jeter par un O’Neill furieux.

Adrian venait une fois de plus de garer la voiture devant l’hôtel de Sam. Il l’embrassa et, alors qu’elle avait déjà la main sur la poignée de la portière, il murmura en la regardant dans les yeux :
-          Samantha…. J’aimerais… j’aimerais tellement ne plus avoir à me séparer de vous chaque soir.
La jeune femme écarquilla les yeux et son cœur se mit à battre très vite. Adrian continua :
-          Je voudrais… passer encore plus de temps à vos côtés. Votre présence me manque dès que vous êtes loin de moi. Bref, y penserez-vous ?
Elle le regarda longuement, puis répondit dans un souffle :
-          Oui Adrian. J’y penserai. Je vous le promets.
Le séduisant visage du milliardaire s’éclaira et il déposa un baiser sur le front de Sam.
-          Merci. Rien que cela me comble de bonheur Samantha. A demain.
-          A demain Adrian.
Elle s’éloigna rapidement de la voiture et regagna sa chambre. Elle se laissa tomber sur son lit et fixa le plafond un long moment. Elle murmura pour Jack autant que pour elle :
-          Que dois-je faire ?

Jack avait jeté l’écouteur à terre et regardait maintenant par la fenêtre de la chambre, immobile, sombre. Daniel et Teal’C se regardèrent, puis l’archéologue demanda doucement :
-          je pense que c’est à vous que la question de Sam s’adressait, Jack.
-          A moi ? Je suis son officier supérieur, mais c’est sur elle que repose la mission. C’est à elle de prendre… ce genre de décision.
-          Jack….
O’Neill se retourna et foudroya Daniel du regard.
-          Inutile d’ajouter quoi que ce soit. De toutes façon la question ne se pose pas, j’ai eu le feu vert d’Hammond, on va demain soir dans le labo de Massertie récupérer les armes.
-          Avec Sam ?
-          Non. Bien sûr que non vu qu’elle sera avec Massertie ! Vous la préviendrez, Daniel.
-          Ah, elle a donc la noble tâche de « détourner l’attention » de Massertie, Jack ? Et vous disiez qu’elle n’avait pas de décision à prendre ?
La voix de Daniel était pleine d’ironie et de colère. Celle de Teal’C s’éleva :
-          Je pense comme le Docteur Jackson que c’est de vous que le Major attend une réponse, O’Neill. Elle fera ce que vous lui demanderez. Tout ce que vous lui demanderez. Vous le savez. Mais vous n’avez pas le droit de la laisser seule face à ce choix.
O’Neill ne les regarda pas, attrapa sa veste et sortit de la chambre en claquant la porte.

Quand il revint, quelques heures et quelques verres de bière plus tard, il s’allongea sur son lit, pieds nus mais encore habillé. L’image de Sam lui vint tout naturellement à l’esprit. Sam. Sam en robe de soirée, Sam en treillis, Sam qui rit, Sam qui pleure, Sam qui réfléchit, Sam qui sauve le monde. Sam. SA Sam. Ses cheveux blonds, les courbes de son corps, son nez fin, son sourire, ses yeux bleus. Sam son second dans l’Armée de l’Air des Etats-Unis d’Amérique. Peut-être après tout n’était-elle qu’un fantasme, comme pour la grande majorité des hommes du SGC ? Peut-être après tout était-ce l’attrait de l’interdit ?
Non. Si seulement ce n’était que cela ! Mais elle hantait toute sa vie, pas seulement ses nuits. Par sa seule présence elle l’avait rendu meilleur. Par sa seule existence elle avait bouleversé la sienne.
On frappa à la porte. Jack regarda son réveil : il était plus de minuit. Il se leva et se dirigea vers l’entrée de sa chambre, prêt à incendier Daniel.
Mais ce n’était pas Daniel.
C’était elle, en chemise de nuit blanche, serrant un petit gilet contre elle.
Sans un mot il s’effaça pour la laisser entrer, ce qu’elle fit timidement. Il lui indiqua un siège et s’assit lui-même face à elle sur son lit.
-          Je… je suis désolée de vous déranger mon colonel.
-          Ne vous excusez pas. Comme vous le voyez je n’étais même pas couché. Pourquoi êtes-vous ici ?
Son ton était plus dur qu’il ne l’aurait voulu. Elle tressaillit, baissant les yeux et se mordant la lèvre.
-          j’aurais voulu vous parler de ma mission… de ma mission avec Massertie.
-          Ah.
C’était bien ce qu’il craignait. Qu’elle veuille en parler. Avec lui. Merveilleux. Manifestement, il n’avait pas assez bu pour se préparer à cela. Il soupira et elle enchaîna, toujours sans le regarder :
-          Comme vous l’avez peut-être entendu…
-          J’ai entendu.
-          Je ne sais pas quoi faire. En plus… demain soir… pendant que vous…. Enfin…
Elle releva lentement les yeux vers lui. Ses magnifiques yeux bleus. Il se passa nerveusement la main dans les cheveux et se leva, incapable de rester assis plus longtemps face à elle.
-          je ne sais pas quoi vous conseiller Carter. Cela dépasse… Cela dépasse mes ordres. Cela dépasse votre mission. Vous êtes seule face à cette décision.
-          Mais si… si je ne fais rien… je mets en péril la mission… votre incursion au labo...
-          Je sais. Je ne vous en tiendrais jamais rigueur, vous le savez.
-          Mais je perdrais votre respect.
-          Non. J’ai fait moi aussi certaines choses par le passé dans l’armée…
-          Je ne parlais pas de l’armée. Je ne parlais pas du respect de mon supérieur. Je parlais... de vous.
Jack sentit son cœur se serrer. Il se sentit perdre pied. Elle semblait à cet instant si frêle, si fragile dans sa chemise de nuit fine, son gilet gris serré contre elle maladroitement, pieds nus. Mais ses yeux bleus étaient décidés, à la fois apeurés et déterminés. Elle murmura :
-          Ce n’est pas à mon supérieur que je suis venue demander conseil. C’est à vous, Jack.
Elle rougit et baissa la tête, comme surprise elle-même de ce qu’elle venait de dire, tremblante à présent. Jack se tenait debout, parfaitement immobile, le souffle court, ses yeux bruns fixés sur elle. Quand il parla, sa voix était rauque, basse.
-          Je n’ai pas de conseil à vous donner. Je n’ai aucun droit de vous donner un conseil, un avis.
Elle ne répondit pas. Un sourire amer, tremblant, passa seulement sur son visage triste. Un sourire qui déchira le cœur du colonel O’Neill. Il acheva dans un murmure :
-          Faites ce que vous voulez. Vous avez toujours pris les bonnes décisions. Faites exactement ce que vous voulez vraiment.
Pendant un instant elle ne bougea pas. Elle le regardait toujours. Puis, très doucement, elle se leva et fit un pas vers lui. Jack sentit un frisson le parcourir, son cœur se serrer. Il voulut avaler sa salive mais sa gorge était sèche. Il murmura son prénom, comme une plainte :
-          Sam…
Elle fit un deuxième pas et murmura très doucement :
-          Je fais ce que vous m’avez ordonné Jack. Je fais ce que je veux vraiment. Dites-moi que vous voulez que je m’arrête. Dites-moi que vous voulez que je sorte. Dites-moi que cela ne vous tue pas à petit feu, dites-moi que cela n’est pas insupportable, dites-moi que ce n’est pas une torture de tous les instants… Dites le moi.
Elle avait continué d’avancer, très doucement, jusqu’à être devant lui, à quelques centimètres, ses yeux bleus levés vers lui, à la fois décidés et implorants.
Tellement belle.
Il ouvrit les lèvres pour parler. Pour lui dire de partir, de se taire, d’arrêter cette souffrance sans nom. Mais à cet instant quelque chose se déchira en lui qui fit voler en éclat l’homme qu’il était.
Dans un mouvement à la fois doux et violent, il saisit la nuque de la jeune femme, l’attira contre lui et posa ses lèvres sur les siennes dans un baiser désespéré.
 
 
Conçu par Océan spécialement pour Imagine.
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