Quand Sam se réveilla le lendemain matin, les dernières lueurs de l’aube jetaient une lumière douce dans la chambre. Elle sourit, s’étira doucement et posa la main à côté d’elle. Personne. Elle cligna des yeux et découvrit Jack debout, torse nu, en jeans, bras croisés, en train de regarder par la fenêtre le jour se lever sur la capitale parisienne.
Il tourna lentement la tête vers elle.
Elle cessa immédiatement de sourire.
Elle sut instinctivement que cela n’allait pas. Du tout. Elle le lisait sur les traits tendus de son visage. Sur les lèvres fines et serrées. Sur la ride au milieu du front.
Ce n’était plus Jack. C’était le colonel O’Neill.
- Cela n’aurait jamais du se produire, Carter. Je suis désolé.
- Jack…
Il leva la main, lui intimant – lui ordonnant de se taire.
- Vous feriez mieux de quitter cette chambre Major.
« Vous », « Major ». Elle ferma les yeux un instant. Puis elle se leva, cachant comme elle pouvait sa nudité, enfilant sa chemise de nuit, se sentant tout à coup sale, honteuse. Elle n’osait plus croiser son regard. Il était toujours parfaitement immobile près de la fenêtre, tourné à nouveau vers l’extérieur. Quand il entendit la porte se refermer doucement, il appuya son front contre la vitre.
Sam se retrouva dans le couloir de l’hôtel… face à Teal’C et Daniel qui s’arrêtèrent net, stupéfaits. Elle rougit, et bafouilla :
- Je suis venue… lui demander… mes ordres pour aujourd’hui… je… je ne pourrai pas aller au rendez-vous habituel… je vous laisse, bon courage pour ce soir.
Elle disparut au bout du couloir. Daniel et Teal’C échangèrent un regard et frappèrent à la porte de Jack. Ils le trouvèrent en train d’enfiler un T-shirt noir. Il leva les yeux vers ses deux amis, maintenant debout dans la chambre. Daniel dit doucement :
- On vient de croiser Sam.
- Ah.
O’Neill se passa nerveusement la main dans les cheveux et tenta de se justifier :
- Elle était venue… pour…
- … pour demander ses ordres pour aujourd’hui. C’est ce qu’elle a dit.
- Oui. Oui, voilà, c’est ça.
- Vous avez mal dormi Jack ? Sommeil agité ?
La voix de Daniel était amère. Jack suivit le regard de ses deux amis : sa chemise était encore sur le sol. Le lit était sans dessus dessous, les deux oreillers portaient encore la marque de leur présence.
Teal’C et Daniel regardaient Jack en silence. O’Neill entreprit de lacer ses chaussures. Il pouvait sentir sur lui le regard froid du jaffa, leva les yeux vers lui et demanda, agacé et mal à l’aise :
- Quoi ?
- Rien O’Neill.
La voix de Daniel s’éleva, glaciale à présent :
- je suppose que vous n’avez pas d’ordres pour nous Jack ?
- Non.
- Sam semblait… assez perturbée par vos ordres.
- Les ordres sont les ordres, Daniel.
L’archéologue semblait bouillir intérieurement. Teal’C avait lui aussi les yeux toujours braqués sur O’Neill, pleins d’une muette désapprobation. L’attitude de Jack, la détresse de Sam…
- Bien. Alors nous vous retrouvons en bas ?
- Oui. J’arrive d’ici cinq minutes.
Teal’C et Daniel tournèrent les talons. Au moment où il s’apprêtait à sortir, Daniel se retourna, toisa Jack et dit d’un ton plein d’amertume et de colère :
- Vous… Vous faites exactement ce qu’il faut… exactement quand il ne faut pas !
Il claqua la porte.
Sam passa la journée dans une sorte de brouillard. Elle prétexta auprès d’Adrian un méchant début de rhume, sensé expliquer ses yeux gonflés et son malaise général.
Elle n’avança pas dans ses observations. A tout instant, elle revivait la nuit précédente. A tout instant elle voyait son sourire, elle sentait sa peau contre la sienne. Mais à chaque fois elle se souvenait aussi de son regard à son réveil. De sa voix tranchante. De la honte, la honte qu’elle ressentait encore, la honte et la colère, le désespoir…
Mais elle était militaire, elle l’avait voulu, elle le voulait encore. Et elle avait une mission, qu’elle devait mener à bien. Alors elle s’appliqua à cacher sa douleur. Et quand Adrian lui proposa de dîner chez lui une fois de plus, elle accepta en souriant. Alors qu’ils avaient discuté au salon avant le repas, Massertie s’excusa et repassa un instant dans sa chambre éteindre son portable. Un email clignotait. Il venait de Frank, qu’Adrian avait vu à peine une heure auparavant. Intrigué, il pianota sur le clavier et le message apparut : « Je n’ai pas voulu vous en parler avant d’être sûr, et j’ai mis longtemps à accéder au dossier. Les photos ont été prises ces cinq derniers jours, tôt le matin. Je suis désolé. » Adrian fronça les sourcils et afficha les pièces jointes.
Des photos. Des photos de Sam, à différents endroits de Paris. Toujours avec un homme à ses côtés. Toujours le même, grand, athlétique, la quarantaine avancée, les traits sévères. La dernière pièce jointe était une fiche signalétique, avec la photo de ce même homme, en uniforme de l’armée américaine cette fois. Adrian serra les mâchoires et parcourut rapidement les informations : « Colonel Jonathan O’Neill, USAF…. Forces spéciales… Résidence : USA, Colorado… affectation classée top secret… fait équipe avec Teal’C X, le Docteur Daniel Jackson et le major Samantha Carter… »
Le MAJOR Samantha Carter.
Adrian resta quelques instants parfaitement immobile. Puis il pianota à nouveau et un email partit pour son secrétaire : « merci Franck. »
Massertie éteignit l’ordinateur et passa un rapide coup de fil. Il respira profondément, se composa un sourire et sortit de la chambre. Sam, toujours assise dans le canapé se tourna ver lui et lui sourit à son tour. Il la regarda longuement et elle fronça les sourcils :
- Adrian ? Tout va bien ?
- Très bien Samantha. Tout va toujours si bien quand vous êtes près de moi. On passe à table ?
Teal’C, Jack et Daniel avaient revêtu leurs tenues noires de commando. Sam les avait renseignés depuis une semaine sur les plans et les systèmes de sécurité du laboratoire de Massertie. Ils avaient donc décidé de passer par les égouts, et Teal’C creusait maintenant depuis un bon quart d’heure au marteau piqueur dans la roche qui les séparait d’un des entrepôts du laboratoire. Daniel seul avait gardé un récepteur glissé dans l’oreille, et il écoutait distraitement la conversation de Sam et Adrian. Son attention restait fixée sur Jack. O’Neill n’avait pour ainsi dire pas décroché un mot de la journée. Daniel et Teal’C avaient renoncé à lui parler, et étaient de toutes façons passablement en colère, se doutant plus ou moins de ce qui avait pu se passer et de la réaction qu’il avait pu avoir. Mais c’est pour Sam qu’ils s’inquiétaient, Sam qui devait être dans un état pitoyable et qui avait tout de même passé sa journée, et maintenant sa soirée avec Massertie. Peut-être sa nuit.
Jack ignorait royalement les regards noirs de l’archéologue. Pendant toute la journée il s’était répété inlassablement qu’il avait bien fait, qu’il allait ruiner la carrière de la jeune femme, sa vie, si ce n’était déjà fait. Il avait tâché de chasser de son esprit le corps de Sam, le visage de Sam, les larmes de Sam. Comme s’il avait jamais réussi à la chasser de son esprit avant ! Comme s’il allait y arriver davantage maintenant que, croyant éteindre le feu dévorant, ils avaient au contraire allumé une passion bien plus brûlante encore.
Daniel, qui avait fermé les yeux, les rouvrit et fronça les sourcils en entendant la voix de Sam, plaintive.
- Adrian…
Mais le milliardaire captura à nouveau les lèvres de la jeune femme, puis violemment cette fois, la renversant à demi sur le canapé. Le cœur de la jeune femme battait à tout rompre, elle ne savait plus comment réagir, elle sentait le désir d’Adrian dans ses baisers, dans ses mains qui glissaient le long de son dos, qui s’immisçaient sous sa veste légère.
Daniel se mordit la lèvre, se redressa, se tourna vers O’Neill et, d’un geste rageur, jeta l’oreillette au colonel qui l’attrapa au vol.
- Je refuse de faire cela Jack ! Faites votre sale boulot vous-même ! Après tout c’est pour vous qu’elle est là-bas !
- Mais qu’est-ce qui vous prend, pour l’amour du ciel ??
Jack foudroya Daniel du regard et, n’ayant plus le choix, ajusta l’appareil dans son oreille. Il pâlit instantanément. Daniel le fixait toujours, plein de rancœur et de mépris. Teal’C s’était arrêté et regardait tour à tour ses deux coéquipiers sans comprendre et demanda :
- Que se passe-t-il Daniel Jackson ?
- Rien d’important. Je veux juste que Jack s’assure lui-même que le MAJOR Carter fait bien son devoir pour son pays !
Le visage de Teal’C se rembrunit immédiatement. Jack ne répondit pas. Il respira profondément, ferma les yeux, et ses mains se crispèrent sur la crosse de son arme.
- Venez, n’ayez pas peur, Samantha… Ayez confiance en moi, comme j’ai eu confiance en vous, comme j’ai eu confiance en vous depuis l’instant où je vous ai vue sur cette scène immense…
Adrian s’était levé et, tenant la main de la jeune femme, l’entraînait maintenant vers sa chambre. Elle le suivait, s’empêchant de trembler, essayant de discipliner ses pensées, essayant de sourire. Elle y était maintenant. Elle devait le rejeter maintenant, où faire l’amour avec cet homme qu’elle connaissait à peine, cet homme qui était un ennemi, alors que Teal’C, Daniel et Jack entendaient toute la scène, quelque part en bas.
Alors que Jack écoutait toute la scène. Et dire que la veille…
Elle se mordit la lèvre alors qu’Adrian la basculait maintenant doucement sur le lit. Massertie avait un petit sourire sûr de lui, satisfait à l’avance de ce qui allait se passer. Un sourire satisfait et presque méchant. Il n’était plus aussi doux qu’avant… plus aussi patient… il ne lui laissait plus le choix. Penché sur elle, il l’embrassait avidement, laissant ses mains parcourir le corps de la jeune femme sans sembler se soucier de son manque de réaction… semblant l’apprécier même…. Il lui ôta sa veste, elle était maintenant en jupe et débardeur devant lui, couchée sur le lit, tremblante. Il la regarda un instant :
- Vous êtes belle Samantha…. Vous êtes tellement belle…. Tellement intelligente aussi. Oh oui, tellement intelligente… Vous pourriez avoir n’importe qui. Vous m’avez eu, moi… vous m’avez bien eu…
Il remonta doucement la main sous le tissu de la jupe, contre la jambe fine. Elle gémit d’appréhension.
Jack avait rouvert les yeux. Elle gémissait. Elle gémissait dans les bras d’un autre, comme la veille dans les siens. Parce qu’il lui avait dit de le faire. Parce qu’il lui avait dit de partir. Parce qu’il l’avait rejetée.
Teal’C s’était arrêté de creuser, l’ouverture leur permettant maintenant de pénétrer à l’intérieur du laboratoire. O’Neill s’aperçut que ses deux coéquipiers le regardaient, attendant son ordre. Il leur fit signe de le suivre et se glissa lui-même dans la pièce.
Sam essayait d’oublier. D’oublier cet homme penché sur elle, d’oublier ses mains qui parcouraient son corps, d’oublier qu’il avait arraché sa propre chemise, d’oublier qu’elle reposait elle-même en sous-vêtements sur le lit d’un inconnu.
Elle essayait de se souvenir. De se souvenir de Jack. De se souvenir de ses mains à lui, de sa chaleur, des muscles de son dos, de l’odeur de sa peau, de sa douceur, du rythme de leurs deux corps… Les images de la veille, qu’elle avait voulu chasser toute la journée, lui revenaient maintenant, se bousculaient dans sa tête…
Les trois hommes progressaient lentement dans les couloirs obscurs du laboratoire. Teal’C, Daniel et Jack avaient bientôt gagné l’endroit où Adrian entreposait les armes mais furent surpris de ne pas en trouver tant que cela. Ils les détruisirent cependant. Ils cherchaient maintenant le laboratoire de Deimos, où devait se trouver le sarcophage, la nouvelle arme, et qui sait, peut-être le Goa’uld…
Teal’C trouvait tout cela facile. Très facile. Trop facile. Aucun garde, un système de sécurité déconnecté en quelques minutes, des armes quasi inexistantes… Il le dit à O’Neill, mais celui-ci n’écouta pour ainsi dire pas.
Jack agissait comme un automate, sans réfléchir, la machine de guerre qu’il était prenant le relais alors que son esprit était totalement ailleurs, à quelques étages au-dessus. Les paroles d’Adrian s’insinuaient en lui comme le pire des poisons. Adrian qui disait à Sam combien sa peau était douce, combien il avait envie d’elle, combien son corps était superbe…
Le visage de Jack trahissait une rage froide, une colère muette et totale. Il avait envie de hurler, de se ruer sur Massertie, de le frapper jusqu’à le tuer, de l’arracher à ce corps qui ne devait être qu’à lui, qu’à lui à jamais. Daniel et Teal’C le suivaient sans un mot, obéissant à ses consignes, eux aussi pâles de colère. Colère contre Jack, contre cette mission, contre eux-mêmes qui devaient rester là alors que Sam… Sam…
Elle l’avait oublié. Elle était avec Jack. Elle était avec l’homme qu’elle avait toujours aimé et qu’elle aimerait pour l’éternité. C’était ses mains à lui qu’elle sentait, c’était son corps qui s’appesantissait sur elle, ses mains encore sur ses poignets délicats… Elle gémit :
- Jack…
Adrian s’arrêta instantanément et le désir fit place à la colère sur son visage.
Plus bas dans le bâtiment, Jack s’arrêta lui aussi. La joie qu’il venait un court instant de ressentir se mua immédiatement en effroi. Elle avait commis une erreur. Une si délicieuse et grave erreur.
Sam avait immédiatement rouvert les yeux qu’elle tenait jusqu’alors obstinément fermés. Adrian, penché au-dessus d’elle, la regardait, pâle de rage, les mains crispées sur les poignets de la jeune femme. Il répéta lentement :
- Jack ?
- Adrian… je … je suis désolée…. Je ne sais pas ce qui m’a pris….
D’un geste sec auquel elle ne s’attendait pas, il réunit les poignets de Sam et les saisit d’une seule main. Il murmura entre ses dents :
- Donc c’est Jack qu’il s’appelle ? Celui à côté duquel je ne suis rien ? Est-ce que avec lui aussi tu fais aussi bien ton devoir ?
- Adrian, je ne comprends pas, vous me faites mal, arrêtez…
Jack était figé. Daniel et Teal’C le regardaient, sourcils froncés, se demandant ce qu’il pouvait bien se passer pour que O’Neill ait l’air soudain encore plus tendu. L’archéologue murmura :
- Jack, que se…
O’Neill lui intima d’un geste de se taire et continua d’écouter.
- Ah tu ne comprends pas ? Je te croyais pourtant si intelligente… tu t’es montrée pourtant si intelligente… un tel appât… Oh oui, les américains m’ont vraiment envoyé leur meilleure arme cette fois, Major !
Elle écarquilla les yeux. La panique la gagnait, mais elle devait rester calme, rétablir la situation… la gifle qu’elle reçut alors fut d’une extrême violence.
La gifle résonna dans l’oreillette de Jack, qui débita à toute allure :
- Carter est démasquée, on va la chercher.
- Quoi, mais que… ?
- MAINTENANT !!!!
Daniel et Teal’C se ruèrent vers l’ascenseur, tentant de suivre Jack qui était déjà plusieurs mètres devant eux.
Elle essaya immédiatement de dégager ses jambes, mais Adrian appuyait dessus de tout son poids, les bloquant avec les siennes. Elle essaya de dégager ses bras, mais force était de constater qu’il était plus fort qu’elle et lui aussi très entraîné manifestement. Il eut un sourire mauvais :
- Alors, Major Carter, on ne vous apprend pas à mieux se battre que cela dans l’US Air Force ? Parce que je suis votre homme, j’en connais pas mal moi aussi des techniques de combat, et un petit corps à corps avec vous me tente depuis longtemps…
- Adrian, écoutez-moi, vous ne savez pas ce qui est en train de se passer, vous…
- Oh si je sais. Je sais que maintenant mes recherches vont aller beaucoup plus vite.
Il la frappa une nouvelle fois, faisant saigner la lèvre de la jeune femme qui tentait toujours en vain de se libérer. Elle plongea ses yeux dans les siens, tâchant de retrouver son calme et de le ramener à la raison :
- Adrian, Deimos est un Goa’uld, un parasite qui n’est qu’un individu d’une race dangereuse qui veut asservir les humains pour en faire des hôtes, il ne veut pas s’allier avec vous, il vous exploite puis il vous tuera, croyez-moi !
- Vous croire ?? Vous qui m’avez trahi, trompé depuis le début ? Sur tout ? Mais c’est vous qui vous êtes servie de moi Samantha, ou plutôt Major devrais-je dire !
Il la frappa à nouveau, poing serré cette fois. Emporté par son geste, il desserra un instant son étreinte autour des poignets de la jeune femme. Il n’en fallait pas plus à Sam qui, accusant le choc, le frappa au cou du tranchant de la main. Elle s’était déjà relevée et mise en garde quand Massertie sembla s’effondrer sur son lit, la respiration coupée. Avant qu’elle ait compris la feinte, il avait saisi un zat dissimulé sous le matelas et en avait envoyé une décharge sur la jeune femme qui s’effondra à terre. Adrian sourit en regardant le corps inerte de Sam puis, à nouveau submergé par la colère, se remit à la frapper. Encore. Et encore.
Chaque coup de poing d’Adrian résonnait dans le cœur de Jack à lui déchirer les entrailles. Il serrait les dents, courant toujours, Teal’C et Daniel sur ses talons. Ils ne s’étonnèrent même pas de ne rencontrer personne, ils ne pensaient tous trois qu’à elle. Ils se ruèrent dans l’ascenseur, enclenchèrent la carte magnétique que Sam avait dupliquée quelques jours plus tôt à l’insu d’Adrian, et attendirent en silence que la cabine s’élève jusqu’à l’appartement.
Sam reprenait douloureusement conscience sous les coups d’Adrian, pelotonnée à terre, un goût de sang dans la bouche. Il s’était arrêté de la frapper, caressant à nouveau la peau de la jeune femme en souriant, redessinant la courbe de sa poitrine du bout des doigts. Elle ouvrit enfin les yeux doucement, le fixant avec défi malgré la douleur.
Un bruit de porte fit se retourner Massertie et le poing de Jack l’atteignit en plein sur la mâchoire. Le milliardaire s’effondra, lâchant son zat et libérant Sam. Daniel se rua sur elle, la serra contre lui un instant, puis l’aida à se relever et lui tendit sa jupe et son débardeur qu’elle enfila rapidement.
Jack frappait toujours, aveuglement. Massertie, qui n’avait pas eu la moindre chance de riposter, tentait en vain de se protéger le visage. Mais la main de Teal’C se posa sur l’épaule du colonel :
- O’Neill. Arrêtez.
- Pourquoi ? Pourquoi j’arrêterais ???
- Pour ça.
Jack, de même que Sam et Daniel, suivit le regard de Teal’C : dix hommes armés venaient de faire irruption dans la pièce et les tenaient en joue.
Les quatre membres de SG1 s’entre-regardèrent et les trois hommes posèrent leurs armes à terre. Jack jeta un coup d’œil à Sam, dont le visage gardait les traces du poing de Massertie. Il murmura :
- Ca va Carter ?
- Bien mon colonel.
Adrian s’était relevé, son zat à la main, et placé à côté de ses hommes. Il souriait tout en massant son visage blessé :
- Colonel O’Neill je présume ?
Jack se retourna vers lui, lentement. Les deux hommes étaient face à face. Jack regardait le milliardaire avec une haine non dissimulée. Massertie souriait toujours :
- Et vous deux devez être…
- Je suis le Docteur Daniel Jackson et voici Teal’C. Monsieur Massertie, il faut nous écouter, vous ne vous rendez pas compte…
Adrian dirigea son zat vers l’archéologue :
- Taisez-vous. Vous ne m’impressionnez pas. Il est hors de question que j’écoute vos beaux discours, tout ce que veut le gouvernement américain c’est garder la Porte pour lui. Mais c’est fini tout cela. Car vous allez gentiment m’indiquer où elle est.
- Mais bien sûr… grogna Jack.
- Oh oui, colonel. Et très vite. Conduisez-les au sous-sol.
Ils furent séparés le temps de redescendre au laboratoire où on les enferma dans une grande pièce vide après leur avoir solidement lié les mains derrière le dos et leur avoir pris la totalité de leurs armes et leurs gilets pare-balles. Plusieurs gardes étaient postés devant la porte. Sam se laissa glisser le long de la paroi et Daniel vint s’asseoir à côté d’elle. Jack resta debout, faisant les cent pas sous le regard indéchiffrable de Teal’C. Le colonel était furieux.
- Je me suis fait avoir comme un bleu…
- Je vous avais dit, O’Neill, que c’était trop facile.
- Oui, oui, je sais Teal’C ! J’aurais du vous écouter… Pourquoi ne vous ai-je…
- Vous étiez préoccupé par ce qui arrivait au Major. C’est compréhensible, mais maintenant la situation se complique.
Sam avait relevé la tête en entendant la remarque de Teal’C et son regard croisa un instant celui de Jack qui se détourna immédiatement. Daniel passa un bras autour des épaules de la jeune femme.
- Ca va aller Sam ?
- Oui, merci Daniel. On a vu nettement pire que deux ou trois coups de poing.
La porte s’ouvrit alors et Massertie entra, accompagné de Deimos et d’une dizaine de gardes armés. Un éclair passa dans les yeux de Deimos quand il aperçut Teal’C :
- Quoi ! un jaffa ! Au service de quel dieu es-tu ?
Teal’C se releva et fit face au Goa’uld.
- Je ne suis plus au service d’aucun faux dieu. J’ai été le prima d’Aphophis, qui est mort comme bien d’autres dans la lutte que mènent les Tau’ris contre les Goa’ulds. Je mène avec fierté ce combat à leurs côtés.
- Shol’va !
- Tiens, il me semble l’avoir déjà entendue celle-là… murmura O’Neill.
Deimos s’approcha alors de Sam qui redressa la tête fièrement :
- Une traîtresse… je vous avais dit de prendre plus de précautions !
Soudain le Goa’uld se figea à quelques centimètres de la jeune femme et balbutia :
- Mais… Mais… comment… pourquoi ne l’ai-je pas senti avant ?
- Parce que j’ai pris grand soin à me tenir éloignée de vous ! répondit la jeune femme sans le quitter des yeux, avec un petit sourire.
Adrian fronça les sourcils :
- Quoi ? Que se passe-t-il Deimos ?
- Elle a été possédée par un Goa’uld… Je peux percevoir le naquadah en elle…
Massertie murmura, éberlué :
- Le naquadah en elle… Mais… Qu’est-ce que….
- Oui Adrian. J’ai effectivement été un hôte mais certainement pas d’un Goa’uld ! D’un Tok’ra !
Le milliardaire serra le poing en fixant la jeune femme qui le regardait, debout, fière et déterminée. Deimos quitta la pièce sans un mot de plus. Adrian fit un pas vers Sam.
- Samantha… Nous aurions pu faire tellement de choses… Nous aurions pu former une telle équipe…
- J’ai déjà une équipe. La meilleure. Je n’en veux pas d’autre.
Le regard d’Adrian passa sur les quatre membres de SG1. Il enchaîna, tentant de garder son calme à présent :
- Donc vous devez savoir où se trouve la Porte des Etoiles…
- Non seulement je le sais Massertie, mais je l’emprunte depuis des années. Mais là où elle se trouve vous ne l’atteindrez jamais.
- C’est ce qu’on verra.
- Vous allez mourir Adrian. Il va vous tuer dès qu’il aura atteint son but.
Massertie se rapprocha d’elle doucement, souriant à présent.
- Oh non Samantha… Car nous sommes en train de constituer une armée… une armée qui ne le sait même pas encore…. Deimos a besoin de moi, mes recherches lui ont apporté de quoi fabriquer une nouvelle arme… arme qui est maintenant enfin opérationnelle…
Une lueur s’alluma dans ses yeux verts. Une lueur machiavélique qui effaça le sourire de Sam.
- … une arme que vous allez tester, Samantha…
Deimos venait de revenir et tenait maintenant une arme de poing, d’un modèle légèrement différent du modèle habituel que Sam avait repéré au laboratoire. Jack sourit :
- Ah celle-là on la connaît, c’est un peu du réchauffé…
- Oh non colonel ! C’est une… variante à laquelle nous avons apporté des modifications… grâce à mes travaux sur les ondes radios Samantha… Vous vous souvenez de mes travaux…
La jeune femme fronça les sourcils, ses trois équipiers se tournèrent vers elle :
- Vos travaux… sur la dissociation par les ondes radios des différentes parties du cortex cérébral… la séparation entre volonté et action… Mais que…
Deimos, manifestement agacé, l’interrompit :
- Massertie, cela suffit, le temps presse, vous êtes démasqué, il faut agir maintenant !
- Juste un instant…. Vous allez comprendre Samantha. Deimos, voulez-vous bien faire une petite démonstration je vous prie ?
Le Goa’uld brandit l’arme et la douleur trop connue vrilla instantanément le crâne de la jeune femme qui tomba à genoux, tentant de résister. Ses trois coéquipiers, qui s’étaient immédiatement précipités, avaient été arrêtés par les armes que tous les gardes brandissaient maintenant vers eux. Mais Deimos interrompit le rayon.
- C’est bon.
Massertie se pencha vers elle et murmura avec délectation :
- Vous n’obéissez qu’à moi maintenant Samantha. Levez-vous.
Elle se releva en effet. Dans ses yeux bleus ses amis pouvaient lire l’incompréhension, la panique même. Adrian prit le revolver d ‘un des gardes et le donna à la jeune femme dont il avait défait les liens. Elle restait là, sans bouger. Jack hurla :
- Mais tirez Carter, tirez donc !!!!
- Je… je ne peux pas mon colonel…
Adrian s’amusait manifestement beaucoup de la situation et de la peur qu’il lisait dans les yeux de la jeune femme.
- Expliquez leur Samantha…
- Je… Mon corps ne m’obéit plus. Je ne peux plus bouger. Les ondes ont… séparé ma volonté de mes actions…
- Oh si vous pouvez bouger ! Il suffit que Deimos ou moi vous l’ordonnions. Démonstration ! Regardez vos amis Samantha.
Elle se retourna vers eux, le revolver toujours le long du corps. Les trois hommes étaient face à elle, et la peur qu’ils lisaient dans ses yeux bleus était loin de les rassurer. Adrian murmura lentement :
- Quand je vous le dirai, vous allez blesser le Docteur Jackson. Juste le blesser pour le moment.
La jeune femme leva son arme lentement et la pointa sur Daniel qui recula d’un pas :
- Sam… Sam… non….
- Non… Adrian… je vous en prie Adrian… non…
Elle le suppliait. Adrian lisait la terreur dans ses yeux, l’incompréhension dans ceux des trois hommes, l’incrédulité. Elle n’allait pas faire cela, elle ne ferait jamais cela, jamais Sam ne tirerait sur Daniel…
- Maintenant.
Le coup partit. Daniel s’effondra au sol, un filet de sang s’écoulant maintenant de son épaule. L’archéologue grimaçait de douleur. Jack et Teal’C regardèrent Sam avec horreur puis se précipitèrent vers Daniel.
La jeune femme était pétrifiée, des larmes coulaient abondamment sur son visage. Mais elle ne tremblait pas, son corps restait parfaitement immobile, son arme toujours dirigée vers Daniel, attendant les ordres.
Le sourire d’Adrian s’élargit :
- Impressionnant, non ?
- Je comprends pourquoi vous vous alliez avec ces serpents, vous ne valez pas mieux qu’eux !
Jack avait hurlé cela. Des gardes l’avaient empêché de rester près de Daniel, qui serrait les dents sous la douleur. Teal’C aussi avait été éloigné. Massertie reprit :
- Alors, que vais-je vous demander maintenant… D’achever celui-ci ou…
- NON ! C’est moi le chef de cette équipe, si vous devez vous en prendre à quelqu’un allez-y, mais laissez mes hommes et Carter !
Jack se tenait face à Adrian, les yeux pleins de rage. Daniel cria :
- Non Jack ! Arrêtez !
Mais Adrian avait soudain pâlit et dévisageait O’Neill avec stupeur. Il répéta doucement :
- Jack…
Sam ferma les yeux sous une douleur sans nom. Massertie fit un pas vers O’Neill. Son visage était blême de colère :
- Jack ? Vous vous appelez Jack ?
Puis, se retournant vers Sam, il hurla :
- Jack ?? C’est lui Jack ???
Elle ne répondit pas. Ses trois coéquipiers étaient pétrifiés. Daniel et Teal’C ne comprenaient absolument pas la rage soudaine de Massertie. Jack regarda alors le milliardaire et sourit :
- Et oui Massertie. Moi, c’est Jack pour les intimes. Jonathan Jack O’Neill.
Adrian recula d’un pas devant l’assurance du colonel et se tourna vers la jeune femme :
- C’est lui… C’est lui dont tu murmurais le nom dans mes bras, c’est lui… Bien sûr que c’est lui…
Elle se mordit la lèvre jusqu’au sang, les paupières closes, les larmes coulant sur son visage. L’arme toujours levée vers Daniel.
La rage de Massertie se mua alors en une joie sauvage, un sourire terrible éclairant soudain son visage. Les trois coéquipiers de Sam regardaient Massertie avec inquiétude, Daniel grimaçant de douleur.
Adrian s’approcha de Sam et, caressant doucement sa joue humide de larmes, murmura à l’oreille de la jeune femme :
- Changement de programme : quand je te l’ordonnerai, tu tueras ce cher Jack. D’une seule balle.